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mercredi 26 mars 2003
par: Collectif national droits de l'homme Romeurope
DECLARATION POUR MONSIEUR RICHARD SENGHOR
Le 12 Mars 2003
Le collectif national Romeurope droits de lhomme avait
souhaité être reçu à Matignon par
les services du Premier Ministre afin d'exposer la situation
des Roms en France, de préciser de quelles personnes on
parle et que l'on commence à construire des projets à
deux niveaux:
- en urgence par l'amélioration des conditions d'accueil,
l'accès aux droits en matière de santé,
de nourriture, de scolarisation
- à moyen terme par le développement de projets
d'intégration sur plusieurs communes en Ile de France
avec l'appui des pouvoirs publics, à partir de conventions
impliquant la délivrance de titres d séjour et
d'un droit au travail.
Partant du constat que ces questions devraient être
traitées au Ministère de l'intérieur et
au Ministère des Affaires sociales en complémentarité,
deux rencontres ont été organisées sans
aucun résultat
Au Ministère de lintérieur : madame
Mignon le 23 septembre 2002. Mme Mignon fait preuve d'une grande
méconnaissance du dossier si ce nest une visite
éclair au bidonville de Choisy le Roi
. Un leitmotiv :
les roumains en Roumanie, sans accepter de considérer
la situation de la minorité rom dans ce pays. Si les Roms
roumains ne sont pas tous actuellement en situation irrégulière,
ils vont le devenir sous peu
.
Au Ministère des Affaires Sociales : monsieur
Normand le 6 novembre 2002 . Des propositions dhébergement
provisoire et précaire sont faites pour les personnes
en situation régulière
en attendant quelles
ne deviennent irrégulières. Accueil possible à
lhôtel de quelques familles en situation irrégulière
en attendant quil soit statué sur leur sort . Monsieur
Normand regrette, et le fait savoir, que les associations naient
pas collaboré au tri des familles en fonction d'une hypothétique
situation régulière alors que la volonté
affichée par le Ministère de l'intérieur
est de renvoyer toutes ces familles en Roumanie
Dans les départements, les contacts avec les services
de l'Etat sont limités. Des contacts avec la Préfecture
et le DDASS de Seine Saint Denis, le Sous Préfet et le
DDASS du Val de Marne
Les contacts et réunions de travail avec les cabinets
(Matignon, Intérieur, Affaires sociales) n'ont rien apporté
si ce n'est un leitmotiv régulier. Ces personnes n'ont
rien à faire en France. Donc pas de titre de séjour
(intérieur) et pas de plan d'intégration (affaires
sociales) favorisant les conditions d'hébergement, la
scolarisation, les soins, les projets de travail et les titres
de séjour car de leur point de vue ces familles seront
bientôt en Roumanie.
Nous tenons à dire notre déception du peu de
résultats de ces réunions de travail. Les dossiers
remis avant les rendez vous n'avaient pas été lus.
Nos interlocuteurs ne les avaient même pas avec eux !
Des engagements avaient été pris lors du premier
entretien avec Monsieur Senghor ( 5 septembre) pour qu'une intervention
soit faite auprès du Ministère de l'éducation
nationale afin qu'il donne des consignes précises aux
inspections académiques pour la scolarisation de tous
les enfants! Des dossiers ont été préparés
dans ce sens ; sans suites.
Des engagements avaient été annoncés
par Monsieur Normand, pour que les DDASS rappellent les circulaires
faisant obligation aux CCAS de faire les domiciliations pour
l'aide médicale d'état. Rien na été
fait.
La liste des événements ( cf en annexe) depuis
notre entretien initial est amère : expulsions répétées
des lieux de vie dans des conditions totalement indignes, harcèlement
policier des personnes sans cesse contrôlées et
menacées, multiplication des renvois en Roumanie, sans
aucune prise en charge à leur retour, de telle sorte que
les réseaux de passage clandestin refonctionnent, les
personnes renvoyées nayant cesse de revenir. Dautant
que leur situation en Roumanie sest aggravée en
raison de la médiatisation qui fait dire là-bas
que les Roms compromettent lentrée de ce pays dans
lUnion Européenne.
Le Collectif Romeurope fait connaître son refus que
la situation des Roms, communauté de plus en plus fragile
et fragilisée, soit soumise à une analyse simpliste
et à un traitement technique.
Aujourd'hui nous tenons à faire connaître notre
colère et notre révolte à propos de ce que
subissent les familles roms depuis plusieurs mois, comme bouc-émissaires
d'une politique sécuritaire et qui s'en prend aux pauvres
sans rien proposer d'autres que des expulsions. Expulsions de
lieux d'habitations et expulsions du territoire français.
La situation pour les familles roms non seulement n'a pas
été réglée mais elle s'est aggravée.
Après des années d'attentisme, les mesures d'expulsion
sont désastreuses. Les expulsions, nous l'avons plusieurs
fois dénoncé, n'apportent rien! Elles sont toujours
une violence et déplacent les situations de précarité
ailleurs. Elles détruisent tout début de projet
!
Les expulsions vers la Roumanie aggravent la situation. Il
n'y a rien de prévu pour les Roms en Roumanie. Les discriminations
n'ont pas cessé. Une ONG roumaine Romani Criss est venue
en France sur invitation du gouvernement français. Le
rapport établi met en avant les impossibilités
pour ces familles d'avoir un avenir en Roumanie et dénonce
les conditions faites aux roms par la France.
Nous dénonçons ce jour le manque total d'écoute
de nos interlocuteurs et le manque de volonté de mieux
comprendre la complexité des familles roms dans une Europe
en construction.
Nous dénonçons le traitement fait à ces
familles par une système répressif et essentiellement
policier. Il s'agit d'un véritable harcèlement
quasi quotidien, violences verbales, menaces et arrestations
régulières. Larrestation dune fillette
de 10 ans à lécole dAchères
est, si lon peut dire un point dorgue
POUR CONCLURE: ni l'attentisme (pourrissement des situations
et maintien de familles sur des bidonvilles sordides ), ni la
répression (expulsions visant à faire "disparaître"
visuellement les problèmes) sont des solutions d'avenir
pour des populations qui ont vocation à vivre en France
et dans la n nouvelle Europe en construction. Il s'agit d'anticiper
sur la suite !
Nos demandes :
- arrêt des harcèlements policiers et des expulsions
de lieux de vie sans solution
- organisation, localement, au niveau départemental
de véritables réunions de travail, avec tous les
acteurs concernés, représentants de lEtat
( Préfectures et DDASS), représentants des municipalités,
représentants des associations et des comités de
soutien, représentants des Roms. Nous demandons que le
cabinet du premier Ministre prenne les mesures nécessaires
pour faire en sorte que ces réunions aient lieu dans des
délais très rapides et aient comme objectif de
trouver des solutions constructives réalistes et humaines
- prendre en considération les familles qui manifestent
concrètement leur désir de rester en France et
leur accorder le droit au séjour et le droit au travail,
Annexe1 !Rappel des faits récents
:
- Accords franco-roumains le 30 août 2002
- Pressions policières insupportables sur les terrains
de Choisy le Roi : départ vers la suisse des personnes
stationnées avenue de Lugo ( via des réseaux ainsi
alimentés
)
- Arrestation symbolique dune mère de famille
devant ses enfants voie des Roses à Choisy le Roi
- Visite de Nicolas SARKOZY début octobre à Choisy
le Roi : visite le terrain vide, ne sarrête
pas voie des Roses où les Roms lattendaient, espérant
au moins un regard, et reçoit dans les locaux de la Mairie
une association de riverains qui sest distinguée
par la distribution de tracts à caractère raciste
- Grande expulsion à Choisy le Roi le 3 décembre :
bidonville de la voie des Roses, petit squat et petit terrain
attenant rue de Sébastopol. Avec un double objectif :
cacher et expulser la pauvreté hors de la vue des habitants
de Choisy le Roi et renvoyer le maximum de personnes en Roumanie.
Ce dans un contexte de propagande sécuritaire. Conditions
indignes. Disproportion des forces de lordre. Mise à
lécart des associations et de la presse. Tri ( avec
erreurs ! ! !) selon la situation supposée
des personnes. Pères ou mères menottés devant
les enfants. Coup de pieds dans les portes et les caravanes immatriculées
" vides ". Bousculades des personnes qui
nont que quelques minutes pour emporter quelques affaires
Erreurs
dans le traitement administratif. Résultat : quatre
personnes renvoyées en Roumanie et quel traumatisme pour
les autres
- Pressions policières répétées
pour annoncer lexpulsion de lIle Saint Denis
- Pressions policières aboutissant au départ
des personnes dun terrain à Saint-Ouen lAumône
pour aller
à Pierrelaye
- Même situation à Saint-Denis : déplacement,
sous pressions, dun groupe de personnes dun quartier
à un autre
- Janvier 2003 : Mission confiée à lONG
roumaine Romani Criss pour proposer un retour volontaire sans
autre garantie que le versement de 153 euros par personne ( à
rapprocher de 7000 euros pour les Maliens selon la presse). Echec
complet. Romani Criss dénonce les discriminations en France
et la méconnaissance de la situation des personnes et
de leurs réelle volonté dintégration
- Arrestation sur le terrain de Lieusaint de Valentin SANDOR
renvoyé en Roumanie malgré une présence
de plus de dix ans en France, les preuves dune période
de travail, une promesse dembauche, une bonne connaissance
de la langue française. Arrestation de Radu à Montreuil,
placé en centre de rétention puis relâché..
- Menaces de multiplier les arrestations..
- Pressions sur les terrains de Vitry pour faire partir les
Roms
- A Lieusaint, arrestations et expulsions de personnes en situation
régulière qui ne peuvent faire la preuve de ressources
suffisantes
- Le 25 février, grande opération de police à
Achères pour contrôle des papiuers et des ressources.
Remise le 27 février de 21 APRF pour insuffisance de ressources
à des personnes possédant un passeport en règle
- Le 6 mars expulsions à Achères et à
l'Ile St Denis dans des conditions effroyables. A Achères,
nouveau déploiement démesuré des forces
de lordre, fracture des portes de caravanes qui seront
broyées devant les personnes qui ne pourront prendre quun
petit sac daffaires. Tri des personnes en fonction de leur
situation administrative. Séparation des familles. Arrestations
sur la péniche église dun prêtre à
Conflans Sainte Honorine de quatre personnes qui y avaient trouvé
refuge. Une enfant de ces familles étant alors à
lécole, la police est venue ly chercher
.Renvoi
en Roumanie de personnes malades qui avaient fait une demande
dautorisation de séjour pour soins. Hébergement
des familles demandeurs dasile dans des centres éparpillés
sur toute la France, dans une grande opacité, sans quil
soit possible de savoir où ils sont
- A Lieusaint, grande opération policière pour
le contrôle des papiers. Arrestations de personnes et renvois
en Roumanie pour insuffisance de ressources. Lexpulsion
du terrain est annoncée
- Autres expulsions annoncées : Montreuil, Saint-Denis
.
Annexe 2 : La situation des familles
est très critique
- sur les terrains restants : augmentation du nombre de
personnes. Exemple à Créteil, les personnes qui
avaient fui la voie des Roses ou lavenue de Lugo sont revenues
et nont plus dautres lieux où sabriter
- terreur : contrôles policiers incessants, menaces
- expulsions annoncées comme imminentes, sans proposition
alternative bien sûr
- précarité des hébergements faits à
Choisy et Vitry et dans toute la France pour Achères
- scolarisation en danger
- aucune avancée de la scolarisation là où
elle navait pas été initiée
- alphabétisation interrompue
Malgré cela, les familles considèrent que les
conditions de vie en France sont incomparablement meilleures
que celles qui les attendraient en Roumanie. Celles qui étaient
parties reviennent en disant que vraiment elles ne peuvent pas
vivre là-bas.
Annexe 3 : L'exemple désastreux
de Choisy le Roi
L'expulsion des familles roms de Choisy le Roi et de Rungis
du 3 Décembre 2002 était à double détente:
expulsion des lieux de vie (terrains, bidonvilles et squats)
et expulsion vers la Roumanie.
A travers l'expulsion de Choisy, on peut comprendre le choix
politique en cours: l'expulsion, même si les autorités
en savent l'impossibilité réelle et peuvent en
mesurer les dégâts. Ce choix politique est le même
pour tous les lieux où se sont installés des familles
roms.
En prenant cette double option, les autorités ne sont
pas posé au préalable les questions des hébergements
décents et la suite des projets de vie des familles.
Tout d'abord, (ou ensuite ?) les conditions de l'expulsion
sont à dénoncer. Conditions très dures
que l'on a pu qualifier de rafle. Le déploiement des forces
était immense et disproportionné. pour le nombre
de familles plutôt peu belliqueuses ! Réveiller
des familles tôt le matin en donnant des coups de pied
dans les portes des caravanes et des appartements. Ne pas permettre
que des associations soient présents pour les assister.
Tenir la presse à l'écart. Mettre des menottes
à des personnes en situation irrégulières.
Sortir les familles entre les CRS. Ne leur donner que quelques
instants pour prendre quelques affaires, organiser un tri en
fonction de situations lié au séjour (avec en plus
des erreurs), tout cela relève de méthodes inacceptables.
La justice a su mettre un point d'arrêt à ces pratiques.
Mais les traumatismes restent forts. Mettre fin au bidonville
pouvait se faire (avec projets d'hébergements) avec la
seule présence de la croix rouge et des associations de
soutiens. Quant à l'immeuble réquisitionné,
il pouvait encore être utilisé (sa démolition
n'est pas imminente) jusqu'à des solutions solides !
Ensuite il y a la non préparation des hébergements
pour les familles qui ne relevaient pas d'une expulsion du territoire
(selon les critères des autorités). C'est dans
la précipitation que des hébergements provisoires
ont été trouvés. Même précipitation
pour les familles remises en liberté par le juge des libertés.
On peut (et l'on doit) protester contre les conditions
de vie dans les bidonvilles et même se battre contre de
telles conditions. Les mesures à prendre doivent être
progressives et amener la poursuite de projets en cours pour
ces groupes.
Mais les expulsions sont toujours néfastes. (voir
dossier déjà remis à Senghor) Il nous faut
ne plus parler d'expulsions sans solutions, mais distinguer une
politique d'expulsions et une politique fondée sur des
projets d'intégration. Cette dernière doit pouvoir
prévoir la fin des bidonvilles avec des hébergements
organisés.
Les conséquences de l'expulsion sont terribles:
Les projets d'intégration sont stoppés nets.
Ces projets étaient plus développés sur
le bâtiment réquisitionné depuis décembre
2000, les conditions de vie étant plus facile. Il a fallu
toute l'énergie des familles et du comité de soutien
pour redonner un peu d'unité et de reconstruction à
ces projets.
- la scolarisation des enfants est en danger. Même là
où les enfants ont pu être re scolarisés
assez vite (car hébergements proches) il faut à
présent que les familles prennent un bus (temps et argent
que les familles ont du mal à réunir). Certains
enfants (jeunes) mettent près de 45 mn pour rejoindre
leur école.
- travail d'insertion par l'alphabétisation et les travaux
économiques (ventes de journaux, fleurs, musique
orchestre)
- contact avec la population locale (commerçants, parents
d'élèves,
)
- image dans les médias.
- Fracture d'une dynamique de solidarité entre familles
La précarité pour l'avenir reste identique.
Même si plusieurs familles sont au chaud pour l'hiver (foyer
et hôtels) la situation reste plus qu'incertaine. Peu de
familles ont le projet (malgré les difficultés)
de rentrer en Roumanie, la vie ne s'y étant pas amélioré
pour eux. Les conditions sont différentes en foyer (possibilité
de faire de la cuisine, soutien de travailleurs sociaux et espace
pour faire un peu d'alphabétisation et d'aides aux devoirs
pour les enfants) de celles en hôtel (pas de possibilité
de faire la cuisine, peu de place
).
Mais ce qui est commun, c'est l'inéluctable fin annoncée
de ces projets d'hébergements. En gros fin Mars.
Les choix qui s'offrent aux familles sont restreints:
- se réinstaller sur de nouveaux terrains, avec tout
à recommencer et de nouvelles expulsions à craindre.
Recommencer l'errance avec tous les droits construits à
refaire (école, soins, domiciliations,
)
- occuper de nouveaux immeubles vides
- être expulsé (et chercher trouver les
moyens de revenir)
Le constat est qu'en ne proposant rien à ces familles
(dont certaines sont en France depuis plusieurs années)
on les replace dans des circuits de précarité et
d'éventuelles exploitations.
L'analyse de l'exemple de Choisy le Roi comme traitement de
la situation pour les familles roms doit inciter les pouvoirs
publics à proposer d'autres moyens visant à ce
que ces familles puissent s'intégrer en France.
En tout cas, ce n'est pas en durcissant les règles des
expulsions (des lieux de vie et de France) que l'on trouvera
la solution, mais bien en organisant enfin des plans d'intégration
sur plusieurs communes.
Collectif national droits de
lhomme Romeurope :
ALPIL (Action pour linsertion
sociale par le logement)
ASAV (Association pour laccueil des voyageurs)
AVER (Association AVER de recherche et daction sur
toutes les formes de racisme)
CIMADE (Comité intermouvements auprès des
évacués)
GISTI ( Groupe dinformation et de soutien avec les
travailleurs immigrés)
LDH (Ligue des droits de lhomme)
MDM (Médecins du Monde)
MRAP (Mouvement contre le racisme et pour lamitié
entre les peuples)
Mouvement catholique des gens du voyage
Romani Baxt (Destin rom)
Ternikano Berno (Cercle de la jeunesse)
URAVIF (Union régionale des associations voyageurs
dIle de France)
Et Les Comités de soutien aux familles roumaines dAchères,
Choisy/Vitry, Fontenay sous Bois, Lieusaint, Montreuil. |
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