Extrait Science & Vie n°1092, septembre 2008.
Réserves mondiales prouvées
d'uranium: 2.643.300
tonnes (Source : Observatoire de
l'énergie d'après AIEA/OCDE 2006)
Rappel: Calculs avec les chiffres donnés
dans le mémento du CEA
- réserves d'uranium dans le monde fin 1996 (ressources
connues + ressources estimées: 4.299.000 t
- consommation mondiale actuelle annuelle: 56.250 t,
- durée de la vie de la production d'énergie nucléaire:
76 ans.
Si on triple la production mondiale de l'électricité
nucléaire actuelle (pour lutter contre l'effet de serre
par exemple...) alors, la durée de la vie des réserves
se réduit à 25 ans. C'est moins de temps que promit
le soi-disant "sortir du nucléaire" allemand...
Sources: (L'énergie en France, édition 2000,
ministre de l'économie des finances et de l'industrie)
et dans "Mémento sur l'énergie",
1999.
Enerpresse, 3/3/2009:
Korea Electric Power Corp., le groupe nucléaire sud-coréen, vient de décider de stopper net deux projets d'exploitation de mines d'uranium, pour cause de plongeon des prix du minerai. Kepco avait deux projets, l'un aux États-Unis et l'autre en Slovaquie, mais le groupe coréen a décidé plutôt d'acheter de l'uranium chez les fournisseurs habituels : Australie, Afrique du Sud et Kazakhstan, rapporte le Korea Herald. Pourtant, en mai dernier Kepco avait signé un accord préliminaire avec Yellowcake Mining, afin d'explorer la mine de Beck, dans le Colorado. Le même mois, Kepco avait signé un MOU avec Tournigan Energy, une compagnie canadienne afin de lancer n projet minier à Kurisokva, en Slovaquie. Deux développements qui devaient assurer le minerai pour les tranches de l'exploitant sud-coréen, pour quatre ans. Mais les prix de l'uranium ayant chuté le mois dernier à 47 dollars par livre, après une pointe enregistrée en 2007, à 135 $/livre, Kepco a décidé de se recentrer sur des mines plus rentables. Il devrait ainsi demeurer présent dans la province canadienne du Saskatchewan, où Kepco dispose d'un accord avec le groupe Fission Energy, signé en janvier dernier. La Corée du Sud est le sixième plus gros consommateur d'uranium au Monde, avec des besoins annuels de 4 000 tonnes d'uranium pour alimenter ses 20 tranches (17 541 MW au total), qui délivrent environ 40% du courant consommé dans le pays.
Sud-Ouest, 4/12/2008:
LE FIEU. La Cogema a acheté, il y a une vingtaine d'années, 1 200 hectares de terrain dans le secteur. Les réserves d'uranium y ont été évaluées à 10 000 tonnes
Peu de gens le savent, mais le secteur du Nord-Libournais
est riche en uranium. Suffisamment, en tout cas, pour que la Cogema,
géant nucléaire français aujourd'hui rebaptisé
Areva NC, achète il y a une vingtaine d'années 1
200 hectares de terrain. Cette superficie, qui s'étale
sur quatre communes girondines (Le Fieu, Les Églisottes,
Chamadelle et Les Peintures) et une commune de Charente-Maritime
(La Barde), n'a jamais été exploitée. Mais
le net regain d'intérêt pour le nucléaire,
constaté ces derniers temps à l'échelle planétaire
(1), a relancé certaines interrogations. Pour être
clair, le gisement girondin, classé par Areva en réserve
stratégique, a-t-il des chances d'être un jour exploité
?
Dirigeant d'Areva NC à Bessines (Haute-Vienne), Guy Lauret
laisse la porte ouverte à tous les scénarios, mais
il y a peu de chances que des mines voient prochainement le jour
dans le secteur. « Ces 1 200 hectares sont effectivement
classés en zone stratégique par Areva, et la France
ne compte plus que 4 500 hectares identifiés comme tels.
Mais si les prospections en uranium ont repris au Canada, en Namibie,
en Mongolie ou au Kazakhstan, ce n'est pas le cas dans notre pays.
Car s'il n'est pas négligeable, le gisement girondin n'est
pas très important. D'après nos estimations, il
représenterait environ 10 000 tonnes. À titre comparatif,
Jouac (en Haute-Vienne), la dernière mine qui a fonctionné
dans l'Hexagone, exploitait un gisement de 30 000 tonnes. »
L'uranium du Libournais revêt pourtant un véritable
intérêt, non démenti par Guy Lauret. «
Dans le Limousin, il fallait creuser 400 mètres pour récupérer
le métal. En Gironde, il ne se trouve qu'à 10 ou
20 mètres sous nos pieds. » Des arguments qui ne
devraient toutefois pas suffire pour se lancer dans l'exploitation.
« Dire que la probabilité de le faire est nulle serait
faux. Mais, à court terme, ce n'est vraiment pas prévu.
»
[Mines d'uranium: le radon y provoque
des cancers du poumon
Le personnel des mines d'uranium
respire un gaz rare, le radon, qui résulte de la désintégration
du radium et s'accumule dans les interstices des roches radifères.
Ce gaz lourd s'amasse au fond des alvéoles pulmonaires
et s'y désintègre en polonium. Radon et polonium
sont des émetteurs Alpha (le radon émet en plus
des Béta et Gama). Ces particules à forte densité
d'ionisation, tuent les cellules des alvéoles pulmonaires
ou induisent des cancers.
Les statistiques effectuées sur les mineurs de Bohême
(du Schneeberg, de 1895 à 1912; de Jachymow, ex-Joaquimsthal,
de 1929 à 1938) montrent que l'incidence des cancers
du poumon était de 30 à 50 fois supérieure
à celle observée dans la population de Vienne; pour
les autres types de cancers, on n'observait aucune différence
significative. Les conditions d'aération, qui permettent
une évacuation plus rapide des émanations de radon,
ont permis de diminuer le taux d'incidence des cancers pulmonaires
chez ces travailleurs, qui demeure toutefois 5 fois supérieure
à la normale dans les mines d'uranium américaines.
(Science & Vie n°693, juin 1975)]
(1) Le carnet de commandes international d'Areva pour la conception de réacteurs nouvelle génération ne cesse de gonfler.
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Réponse de Tchernoblaye (Non publiée par Sud-Ouest)
Areva laisse entendre que des mines d'uranium pourraient un jour
être ouvertes dans le Nord-Libournais. C'est pour nous l'occasion
de rappeler que de telles mines causent de très graves dommages à l'environnement et mettent en danger les travailleurs et les
riverains. C'est d'ailleurs le cas au Niger où Areva
s'attribue l'uranium depuis 45 ans, et ce à un tarif si
bas que l'on peut pratiquement parler de pillage. Des montagnes
de stériles (résidus d'extraction) restent à
ciel ouvert et l'uranium contamine des régions entières.
Qui plus est, les Touaregs sont peu à peu chassés
de leurs territoires. C'est aussi le cas des Aborigènes
et des Indiens, chassés par les mines d'uranium respectivement
en Australie et au Canada. Nul doute que Areva n'hésiterait
pas longtemps pour traiter de la même façon les Nord-Libournais.
Heureusement, le risque est très faible car, contrairement
à ce que prétend l'entreprise nucléaire,
ses ventes de réacteurs sont pratiquement nulles: chacun
a entendu Mme Lauvergeon (Pdg d'Areva) et M Sarkozy annoncer des
dizaines de réacteurs ici où là, mais la
réalité est implacable: à ce jour, un seul
réacteur a été vendu, à la Finlande,
et celle-ci s'en mord les doigts: le chantier compte déjà
deux ans de retard et deux milliards d'euros de pertes... qui
vont être couvertes par les Français !
Tchernoblaye
Le Temps (Suisse), 16/6/2008
Les 450 centrales existantes consomment plus de combustible qu'il n'en est extrait. L'uranium marin est pratiquement inexploitable.
Depuis 2001, le prix de l'uranium a été multiplié par 10, passant de 7 dollars la livre à plus de 75 dollars en 2007. Cette augmentation massive du prix de l'uranium montre bien l'incertitude qui règne autour de sa production. Le pic historique du prix de la livre d'uranium se situait autour de 43 dollars vers la fin des années 70 en raison de la conjonction de la demande militaire et de l'essor du nucléaire civil.
Depuis 1991, on n'extrait plus assez d'uranium pour couvrir les besoins des 450 centrales nucléaires civiles actuelles. La différence est comblée par l'utilisation des stocks militaires. En 2003, la demande en combustible nucléaire a été satisfaite pour moitié par des ressources minières et pour moitié par des ressources militaires (1).
Les gisements que l'on découvre aujourd'hui sont presque tous plus pauvres en uranium que ceux déjà exploités. De plus, un gisement n'est jamais exploité en totalité, par manque de rentabilité, même à un prix élevé de l'uranium, ou du fait d'un risque financier trop élevé (2). Cependant, vu qu'au prix actuel le combustible ne pèse que 5 à 10% des coûts d'une centrale, la principale limitation provient de la nature du gisement et des obstacles techniques à son exploitation, quel qu'en soit le coût. Le manque d'uranium limitera ainsi peu à peu l'utilisation d'une partie des centrales nucléaires entre 2015 et 2025. Puis la production d'uranium diminuera et, avec elle, la production d'électricité nucléaire (3). De quoi se faire du souci pour les nouvelles centrales à amortir en quarante ans au moins...
L'uranium naturel ne contient qu'une petite fraction (0,7%) d'uranium 235, qui seul donne lieu à la fission et constitue ainsi la source d'énergie des centrales nucléaires. La séparation des autres isotopes ne peut être faite facilement, puisque, par définition, ils se comportent de façon identique dans toutes les réactions chimiques auxquelles ils sont soumis. Il faut donc avoir recours à des procédés physiques particuliers, tels que la diffusion gazeuse ou l'ultracentrifugation. C'est l'opération d'enrichissement. Cette opération, qui produit de l'uranium enrichi entre 4 et 5% (4), se fait en France à l'aide d'autres centrales nucléaires ou aux Etats-Unis avec des centrales à charbon. Cet enrichissement demande énormément d'énergie. En France, sur les 58 réacteurs existants, 4 ne sont dévolus qu'à produire de l'énergie pour effectuer cet enrichissement. C'est sans compter la préparation de la poudre d'uranium, appelée uranate ou yellow cake, qui est fabriquée à partir du minerai directement sur place, entre autres en Afrique, avec des centrales à charbon.
Production très concentrée
Même si le parc des réacteurs nucléaires actuels était gelé aujourd'hui, la production d'uranium serait insuffisante pour les approvisionner. L'engouement pour la prospection du métal gris ne permettra pas de satisfaire la demande du jour au lendemain. Une mine est opérationnelle parfois plus de vingt ans après la découverte du gisement et, ces vingt dernières années, aucune découverte majeure n'a été faite.
Les mers contiennent 4 milliards de tonnes d'uranium naturel (dissous par 3 mg/m3) (5), ce qui correspond à près de 60 000 ans de la consommation actuelle. Donc, plus de souci à se faire? Voyons ça de plus près: la centrale nucléaire suisse de Leibstadt utilise chaque année 155 tonnes d'uranium (recalculé en équivalent uranium naturel); le volume d'eau de mer pour trouver cet uranium, en supposant généreusement une extraction complète, correspond à 52 milliards de m3, ou les deux tiers du Léman. Comme un calcul simple montre que le pompage vers une hypothétique usine de ce volume d'eau consommerait la quasi-totalité de l'énergie électrique pouvant être tirée de cet uranium dissous, il faut imaginer autre chose. L'agence nucléaire japonaise, la plus avancée dans ce domaine, a depuis dix ans essayé diverses substances capables d'adsorber spécifiquement l'uranium, montées sur des supports immergés dans des courants marins suffisamment forts. Elle a réussi à en récupérer presque un kilo.
En extrapolant l'essai le plus récent (6), il faudrait, toujours pour la seule demande annuelle de Leibstadt, avoir immergé plus de 600 000 objets ressemblant à des algues flottantes de 100 m ancrées au fond, répartis sur une zone grande comme le canton de Vaud, et tous les deux mois les retirer, les passer dans de l'acide pour récupérer l'uranium, puis les remettre en mer. Le retour sur investissement énergétique [EROI] est très probablement pire que celui de l'extraction des filons terrestres restants dans dix ou vingt ans. Alors, cessons cette utopie de croire que l'uranium marin va résoudre nos problèmes d'approvisionnement en combustible.
Il faut savoir que la production d'uranium est extrêmement concentrée, bien plus que le pétrole. Actuellement, 16 pays exploitent l'uranium et le 80% de la production se concentre dans six de ces pays (Russie, Niger, Namibie, Kazakhstan, Australie et Canada). De ce fait, le chantage à l'uranium est incomparablement plus facile que celui au pétrole, car très peu de pays sont producteurs. Cela rend l'industrie nucléaire très vulnérable. C'est pour cela que la France, très dépendante du nucléaire, attache une très grande importance à s'assurer un approvisionnement sûr, en particulier au Niger.
Dans ce contexte d'approvisionnement tendu en combustible, il est totalement illusoire de vouloir construire de nouvelles centrales nucléaires. Investissons nos moyens dans les énergies renouvelables, comme les banques nous y invitent avec leurs fonds verts. Aujourd'hui, seuls les politiques n'ont pas encore compris qu'il n'y a aucun avenir dans le nucléaire.
Isabelle Chevalley, chimiste, présidente
d'Ecologie libérale.
Pierre Bonnard, physicien.
1. Ressources, production et demande de l'uranium:
bilan de 40 ans, AEN Infos 2006, N° 24.1.
2. Fuel costs and uranium reserves, revised, J.W. Storm van Leeuwen
and P. Smith, 2002.
3. Pénurie et fin progressive de l'uranium, 2007.
4. L'uranium, une ressource d'avenir, Forum nucléaire suisse,
janvier 2008.
5. Nucléaire et environnement, J. Frot, juin 2002.
6. JAEA R & D review, 2006, p. 63, et Separation science and
technology 39, p. 2753 (2004).
Usine nouvelle, 27/3/2008:
Par Daniel Krajka
Malgré les importants programmes de développement du nucléaire, la demande d'uranium restée stable a violemment infléchi la hausse des cours du yellow cake.
Après l'envol qui avait vu le prix de la livre d'oxyde d'uranium (U3O8) grimper de 15 dollars en 2004 à 138 dollars en juin 2007, la correction a été sévère et le métal s'échange aujourd'hui à 74 dollars. Cette envolée des prix spot correspondait à la « renaissance du nucléaire » annoncée alors que l'extraction d'uranium ne couvrait pas plus des deux tiers des besoins des centrales, le reste étant assuré par la reconversion des stocks militaires. L'an dernier, des investisseurs qui prétendaient être des mineurs d'uranium, mais qui en réalité n'étaient que des détenteurs de terrains, peuplaient les conférences spécialisées en Australie, rappelle un expert. Cette année, ils ont disparu et ce type de conférence n'est plus fréquenté que par des juniors ou des spécialistes du secteur.
La volatilité des prix de l'uranium devrait se poursuivre en 2008, mais sans atteindre les écarts extrêmes de 2007, estimait récemment le vice-président d'Ux Consulting, Eric Webb, lors d'une conférence à Toronto. Alors que pendant les deux décennies jusqu'à 2005, les mouvements annuels des prix sur le marché spot ne dépassait pas 2,5 dollars chaque année, en 2007, ces évolutions ont totalisé 146 dollars. Parler de volatilité était devenu un « understatement », souligne l'analyste. La « renaissance du nucléaire » n'est pas à l'ordre du jour, affirme Eric Webb. Les annonces par 86 pays d'un programme de développement nucléaire d'ici à 2050 ne sont que le potentiel de cette renaissance.
Début 2008, indiquait une étude de la World Nuclear Association (WNA), il y avait 439 réacteurs nucléaires dans le monde pour une puissance combinée de 2 658 GW, soit 16% de la production d'électricité. A cette date 38 réacteurs (28 GW) étaient en construction, 93 (101 GW) programmés et 222 (193 GW) à l'étude. Ce qui représenterait, si tout est réalisé, un quasi doublement de la consommation de yellow cake. Le Royaume Uni et les Etats-Unis ont en particulier décidé de relancer leurs programmes nucléaires et en mars, la Chine a annoncé l'accélération de la construction de centrales. De 40 GW prévus initialement d'ici à 2020, sa capacité grimperait à 60 GW et entre 120 et 160 d'ici à 2013. La Chine dispose actuellement de 11 réacteurs (8,6 GW) et aurait l'intention d'en construire 116 nouveaux.
Un marché fragile
La production a éprouvé d'immenses
difficultés pour répondre aux attentes du marché
et à la hausse des prix en raison, bien plus que pour les
autres métaux, de deux décennies de crise et de
sous-investissements et d'un quasi arrêt de l'exploration.
En 2006, la production mondiale avait reculé à 103
millions de livres d'oxyde, contre 108 millions l'année
précédente, avant de remonter à 107 en 2007,
tirée par la production kazakhe.
L'évolution des prix de l'uranium va dépendre de
la vitesse à laquelle les programmes nucléaires
seront mis en route, et de celle des mises en activité
des nouvelles mines, explique Webb. Toutefois, avec les politiques
restrictives d'extraction de l'uranium, à l'exemple de
l'Australie, la montée en puissance de la production minière
prendra du temps. La volatilité des cours est accrue par
l'intervention sur ce marché des fonds d'investissement
depuis 2004. Ceux-ci détiennent environ 20 millions de
livres d'U3O8, estime l'australien Resource Capital Research RCR),
alors que les volumes traités sur les marchés spot
(l'uranium est avant tout commercialisé au moyen de contrats
à long terme) évoluent annuellement entre 18 et
28 millions de livres. De plus, contrairement aux autres métaux,
l'uranium n'a qu'une seule utilisation, la production d'énergie.
Avec la moitié de l'offre mondiale provenant de seulement cinq mines, l'équilibre du marché est fragile, souligne Scott Finlay de Canaccord Adams qui estime que les cours pourraient remonter vers les 95 dollars malgré une demande étale. Pour les analystes de RCR, les cours devraient rapidement remonter vers 80/85 dollars et même vers 105 dollars d'ici à septembre 2008, mais toujours avec une forte volatilité. D'autant que les mineurs opérant en Afrique du Sud ont revu en baisse leurs objectifs de production en raison des pénuries d'électricité.
Enerpresse, 13/2/2008:
La production des trois grandes mines canadiennes
d'uranium a reculé l'an dernier, de 5%. C'est ce que rapporte
WNN, précisant que l'extraction a atteint, en 2007, 11
046 tonnes d'U3O8 (9 367 t d'uranium). Des chiffres que le site
nucléaire spécialisé compare à la
production australienne de 10 145 t U3O8 et du Kazakhstan 7 827
tU3O8. La mine de McArthur River, détenue à 70%
par Cameco, a livré 8 492 tU3O8. En revanche, sur la mine
de Cameco, à Rabbit Lake, les inondations enregistrées
ont freiné l'extraction, en recul de 22%, à 1 821
tU3O8 l'an dernier. Le site d'Areva, à Mc-Clean Lake, a
délivré 734 tU3O8
Boursier.com, 10/8/2007:
Selon 'Le Figaro', il existe un risque pour que la France perde son autonomie en matière d'uranium, à mesure que les réserves s'épuisent et que l'engouement pour le nucléaire se développe. Le journal souligne que plus de 3.000 tonnes avaient été produites dans l'hexagone en 1985, contre 5 seulement en 2006, signe que les mines de l'Hérault sont presque à sec. Areva doit donc trouver d'autres ressources, ce qui explique le rachat récent du canadien UraMin et les efforts accomplis pour trouver d'autres sources. Le groupe vise à multiplier par deux sa production annuelle à l'horizon 2012, à 12.000 tonnes, conclut le quotidien.
Cercle Finance, 10/8/2007:
Areva pourrait être confronté à une pénurie d'uranium souligne Le Figaro ce vendredi. Toutefois le géant du nucléaire aurait mis en oeuvre un important programme de recherche de minerai d'uranium afin d'enrayer ces difficultés. Le quotidien rapporte que plus de 3 000 tonnes d'uranium avaient été produites en France en 1985 contre seulement 5 en 2006. En outre, le journal rappelle que le groupe a rencontré des problèmes la semaine précédente au Niger, pays qui fournit 43% des besoins du groupe en Uranium. Le gouvernement qui souhaite reprendre le contrôle de sa production de minerai a relevé de 40% le prix de la tonne d'uranium. Dexia souligne également que la construction de nouveaux réacteurs déjà sur les rails générerait un accroissement des besoins du groupe en uranium. Le broker indique toutefois qu'Areva a déjà, pour partie, anticipé ces nouveaux besoins en rachetant récemment UraMin pour 2,5 milliards d'euros. Dexia indique également que le géant du nucléaire 'a prévu de tripler ses dépenses en matière d'exploration minière à 90 millions d'euros sur les 5 prochaines années'. L'analyste ajoute 'nous n'excluons pas qu'Areva réalise de nouvelles acquisition dans le domaines des mines d'uranium'. Le titre abandonne près de 3% vers 12 heures.
Libération, 6/8/2007:
Dans le Nord-Ouest, la mine de McArthur River extrait de quoi alimenter 34 réacteurs par an.
Une pépite fabuleuse, à la fois titanesque et minuscule. Le genre de pépite pour laquelle certaines grandes puissances sont désormais prêtes à montrer les crocs. Elle est là, à 550 mètres sous terre, perdue dans l'immensité des forêts de conifères du nord-ouest du Canada, où on accède par avion charter et une heure de pistes en terre. Si on pouvait la voir de la surface, cette anomalie géologique très rare ressemblerait à une tête d'épingle de quelques dizaines de milliers de mètres carrés, profonde d'à peine 500 mètres. Un gisement de taille presque ridicule. «McArthur River est pourtant la plus importante mine d'uranium à haute teneur au monde», explique Kevin Quesnel, le directeur des opérations. L'uranium qui est extrait chaque année de ce gros rocher, une fois enrichi, pourrait suffire à alimenter 34 réacteurs de 1 000 MW, soit 7 % de l'électricité consommée par les Etats-Unis. «Sa pureté est sidérante», s'enthousiasme un géologue du site. Car si la teneur moyenne est de 21 % d'uranium naturel - soit déjà cent fois la teneur moyenne mondiale - certains morceaux de ce bloc dépassent parfois les 60 % de pureté. Cigar Lake, un autre gisement situé non loin de là, renferme 135 000 tonnes d'uranium pur dans un mouchoir de poche de 50 mètres sur 300, sur un demi-kilomètre de profondeur. De quoi alimenter toutes les centrales du monde pendant deux ans. Une inondation survenue en octobre 2006 dans cette mine, située sous un lac, a aussitôt poussé plus encore à la hausse les prix de l'uranium naturel sur le marché mondial. Le coût de l'accident a été estimé à un milliard de dollars ; les réparations, laborieuses, prendront des années avant que la production puisse commencer.
Saignée. Cette région isolée
du Canada, le bassin de l'Athabasca, d'où provient près
d'un tiers de la production mondiale, est le lieu stratégique
du marché de l'uranium. «Un grenier à uranium»,
disent les géologues. On y trouve une succession de gisements
qui se suivent, parfois seulement à quelques dizaines de
kilomètres les uns des autres, le long d'une saignée
de grès qui s'enfonce dans la terre en oblique, partant
de la surface pour atteindre 800 mètres de profondeur.
Les premiers sont exploités dans des mines à ciel
ouvert, le reste dans des galeries souterraines.
Repas gratuits. On ne visite pas une mine d'uranium en touriste.
C'est le géant français du nucléaire, Areva,
qui détient un tiers de la mine en partenariat avec le
canadien Cameco, qui a autorisé Libération à
s'y rendre. Le premier village du voisinage, principalement peuplé
d'Indiens, est à 140 km de la mine de McArthur River. Sur
ce site, Areva et Cameco ont dépensé sans compter,
établissant un camp moderne, en préfabriqué,
où les cuisines offrent des repas gratuits et à
toute heure aux centaines de mineurs qui travaillent là
quarante heures par semaine. Une piste utilisée traditionnellement
par les tribus Déné et Cree, qui font toujours le
commerce des peaux, passe non loin de ce paysage de forêts
presque totalement inhabitées. La moitié des mineurs
sont des locaux, fait fièrement valoir Areva.
[La pollution radioactive est en fait énorme, voir le film:
Un film du cinéaste indépendant
Magnus Isacsson. Prix Golden Sheaf du meilleur documentaire,
Yorkton Short Film and Video Festival (Saskatchewan, 1991).
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Pâte à modeler. Première surprise, les précautions pour descendre au fond sont semblables à celles qu'on prendrait dans une mine de charbon : Un casque de chantier, un bleu, des bottes et une petite bonbonne d'oxygène au cas ou. «Contrairement à ce qu'on croit, l'uranium naturel n'est pas radioactif [faux, archi faux évidemment], trompette Yves Dufour, un ingénieur d'Areva. Il diffuse des particules lourdes alpha qu'une feuille de papier ou la peau arrête.» Le radium, qui est contenu dans le minerai, émet en revanche des particules gamma, mais celles-ci ne sont pas dangereuses lorsqu'on se tient à bonne distance. Le minerai, une fois purifié par procédé chimique (en le trempant dans de l'acide sulfurique) devient de l'uranium à 70 % de teneur. Les résidus sont retraités. L'uranium est mis dans des fûts de 400 kg contenus dans un entrepôt siglé «radiation». «C'est sans danger, car le radium a été précipité», explique néanmoins l'ingénieur en tapotant sur l'un de ces tonneaux peints en noir. Le yellow cake, devenu marron après calcination, «pourrait presque être pris dans sa main, à condition de se laver ensuite, afin que le produit n'entre pas en contact avec les muqueuses». On se demande alors si Areva n'en fait pas un peu trop pour prouver que le yellow cake est aussi inoffensif que la pâte à modeler. D'autant que l'ingénieur se refuse, pour finir, à mettre la main dans un pot à confiture scellé par un ruban adhésif contenant le produit, en expliquant qu'il n'est pas autorisé à l'ouvrir. «Sécurité avant tout !»
Lire:
Le Limousin radioactif
Résultats de l'étude radioécologique (mines d'uranium du Limousin)
Les conséquences de l'exploitation de l'uranium en France (CRIIRAD)
Mines d'uranium au Niger, un scandale nommé COGEMA
Inde, les aborigènes sacrifiés du nucléaire
Si cet Eldorado n'est pas avare en uranium
à haute teneur, le minerai est toutefois peu aisé
à mettre au jour, et encore moins à extraire. A
McArthur River, la production n'a pu commencer qu'en 1999, onze
ans après sa découverte. Car le sous-sol est tellement
gorgé d'eau qu'il a fallu bâtir un frigidaire géant
autour du gisement afin de l'isoler des nappes. Des centaines
de tuyaux dans lesquels circulent de l'ammoniac à - 35
°C coffrent la mine, érigeant mur de glace protecteur.
Des méthodes ont été inventées afin
de protéger le personnel d'un minerai particulièrement
rayonnant. Une galerie profonde a été creusée
sous le gisement qui est foré à l'envers, de bas
en haut ; le minerai est récupéré par un
énorme wagonnet motorisé télécommandé
par un technicien à une centaine de mètres de distance.
«Personne n'est jamais en contact avec le minerai»,
assure un ingénieur, en ajoutant que les normes, strictes,
sont contrôlées par la Commission canadienne de la
sûreté nucléaire.
Carottes. Non loin de là, à Shea Creek, un autre
gisement vient d'être découvert. Un géologue
explorateur, qui vit avec quelques collègues dans des maisons
de bois aménagées dans une clairière, passe
son compteur à impulsions sur les carottes forées
dans les bois alentour. Il se bloque à 40 000 impulsions
avant de marquer «over». «De toute ma vie, sourit-il,
je n'ai jamais vu une telle teneur.»
Le Monde, 5/8/2007 :
Il y avait déjà les "rois du pétrole", il y aura peut-être demain les "rois de l'uranium". Les tensions apparues entre le Niger, cinquième producteur mondial de ce minerai, et le groupe nucléaire français Areva, accusé de soutenir la rébellion touareg dans le Nord, ont une cause à peine avouée : le prix du fameux "yellow cake". Une fois enrichi, il alimente les centrales nucléaires. Jean-Marie Bockel, le secrétaire d'Etat à la coopération, a été dépêché à Niamey, samedi 4 août, pour détendre les relations avec un pays qui "nous tient très à coeur". C'est peu dire : il est le deuxième fournisseur d'uranium de la France et, sans son précieux minerai, EDF devrait fermer une partie de ses 58 réacteurs.
La visite du ministre français n'est évidemment pas désintéressée. Elle a été précédée d'une salve de critiques et de mises en garde des autorités nigériennes. Bien sûr, ont-elles affirmé, il n'est pas question de "chasser" Areva, qui pourra exploiter ses deux anciennes mines, en ouvrir une troisième et explorer le désert. Mais "plus rien ne sera comme avant", et Niamey négociera "ferme" la vente de son uranium pour en tirer le meilleur profit, ont déclaré le président Mamadou Tandja et son premier ministre Seini Oumarou. Ils ont commencé à le faire en obtenant d'Areva un relèvement des prix de l'uranium.
M. Tandja a constaté l'envolée des prix. La livre est passée de 10 dollars, il y a trois ans, à près de 150 dollars sur le marché international (hors contrats à long terme révisables). Et la hausse devrait se poursuivre à mesure qu'augmenteront les besoins et qu'apparaîtront des tensions sur l'approvisionnement. Une aubaine pour le Niger, qui voit affluer Chinois, Canadiens et Australiens. Les réserves sont abondantes dans le monde [pas vraiment, il n'y en a que pour 50 à 70 ans de production environ...], mais l'exploration n'a repris que récemment, après vingt ans de sous-investissement lié à un pétrole attractif jusqu'en 2003 et au rejet du nucléaire, après la catastrophe de Tchernobyl en 1986. La demande des grands groupes d'électricité américains, allemands, français, japonais, chinois ou russes va croître à mesure qu'ils construiront de nouveaux réacteurs. Avec l'épuisement des stocks militaires (notamment russes), recyclés en combustible depuis la fin de la guerre froide pour compenser la sous-production minière, le rationnement menace.
A sa façon, moins brutale que celles
du président vénézuélien, Hugo Chavez,
ou du russe, Vladimir Poutine, saisis par le "nationalisme
pétrolier", le président nigérien agit
à l'image des dirigeants des pays producteurs de pétrole
et de gaz. Il tente de mieux contrôler une richesse de plus
en plus convoitée, avec tous les risques que cela comporte
dans un pays dépourvu de tout. Qui pourrait le reprocher
au chef de l'Etat le plus pauvre de la planète ?
Le Monde, 5/8/2007:
L'avenir d'Areva au Niger, où il exploite deux mines d'uranium, n'est plus aussi radieux. Les accusations du gouvernement nigérien reprochant au groupe nucléaire français de soutenir financièrement la rébellion touareg du Nord et l'expulsion de son directeur, Dominique Pin, le 25 juillet, ont jeté une ombre sur une coopération vieille de quarante ans.
Nicolas Sarkozy et son homologue nigérien, Mamadou Tandja, s'en sont expliqué au téléphone, mardi 31 juillet. Et la visite à Niamey du secrétaire d'Etat à la coopération, Jean-Marie Bockel, samedi 4 août, devrait permettre de régler cette "mini-crise".
Les tensions de ces derniers mois ont un nom : l'uranium. Classé dernier sur l'échelle du développement humain établie par les Nations unies, le Niger n'a que cette ressource, dont il est le cinquième producteur mondial - derrière le Canada, l'Australie, le Kazakhstan et la Russie. Mais il assure un tiers de l'approvisionnement d'Areva, et donc des centrales nucléaires d'EDF. M. Bockel explique ainsi au Monde que le temps d'une "renégociation d'ensemble des relations entre Areva et le Niger" est venu. Il devrait l'évoquer à Niamey, ainsi que la levée de l'arrêté d'expulsion frappant M. Pin, ancien de la "cellule Afrique" de François Mitterrand.
Areva, au centre d'un imbroglio politico-diplomatique, dément formellement tout soutien à la rébellion touareg. L'entreprise a commis une "maladresse involontaire", selon M. Bockel.
Le groupe français s'est adjoint les services de la Force nationale d'intervention et de sécurité (FNIS), mise sur pied il y a douze ans après la fin d'un premier conflit avec les Touaregs. Mais ces soldats, chargés de protéger le site de prospection d'Areva à Imouraren (Nord) des incursions des bandits, des trafiquants et des rebelles touaregs du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ), ont récemment déserté. A commencer par le capitaine commandant cette force à Imouraren, passé avec armes et argent au MNJ, alimentant ainsi les accusations de soutien financier d'Areva.
HAUSSE DES PRIX DE VENTE
Les relations entre Paris et Niamey s'étaient déjà tendues après l'expulsion fin juin du responsable français de la sécurité d'Areva. Colonel à la retraite et ancien attaché militaire français à Niamey, Gilles Denamur était accusé par les autorités et la presse nigériennes de collusion active avec le MNJ.
Areva a été aussi récemment critiqué par plusieurs organisations non gouvernementales (ONG), qui l'accusent de manquements graves aux obligations élémentaires en matière de formation et de prévention des risques liés à l'exploitation des mines d'uranium.
Pour autant, "le Niger n'a nullement l'intention de chasser Areva", a déclaré, mercredi, M. Tandja. Le 1er août, sa ministre des affaires étrangères, Aichatou Mindaoudou, et la présidente d'Areva, Anne Lauvergeon, ont signé, à Paris, la reconduction des accords d'exploitation des mines de Somaïr et de Cominak.
Il prévoit toutefois une hausse du prix de vente de l'uranium qui accroîtra les recettes budgétaires du Niger, actionnaire des deux mines. Niamey pourra aussi vendre directement une partie de l'uranium à des prix mondiaux plus élevés. Enfin, Areva devrait obtenir les cinq permis d'exploration demandés, en plus des quatre qu'il a récemment obtenus.
Mais les temps changent et le monopole d'Areva - seul jusqu'à aujourd'hui à exploiter les mines nigériennes - a vécu. Comme les pays producteurs de pétrole et de gaz, le Niger veut tirer un meilleur parti de ses richesses minières. "En 2008, nous allons négocier ferme. L'uranium est notre produit. Il sera vendu à notre profit", a prévenu M. Tandja. Très critique sur les anciens contrats, son premier ministre, Seini Oumarou, a souligné que l'appétit retrouvé dans le monde pour l'uranium, lié à la relance de l'énergie nucléaire, a fait de son pays "une fille choyée" et courtisée par plusieurs "hommes". En clair, plusieurs pays.
"Plus rien ne sera comme avant", a-t-il souligné après une rencontre de M. Tandja avec des dirigeants d'Areva. Désormais, le Niger va diversifier ses partenaires. Les Chinois, accusés de vendre des armes contre des permis d'exploration, sont de plus en plus présents, à la recherche de "yellow cake" pour alimenter un parc nucléaire en plein développement. Australiens, Canadiens et Indiens prospectent aussi le désert du Niger.
Areva continue de miser sur ce pays, où il est le premier employeur privé avec 1 600 salariés. Il prévoit d'investir 1 milliard d'euros dans le gisement d'Imamouren, qui prendra le relais des deux mines en cours d'exploitation, et diversifie ses sources d'approvisionnement.
"Nous allons développer notre production de minerai d'uranium dans le monde pour la doubler d'ici 2012 en nous appuyant sur des projets internes, en renforçant l'exploration, dont le budget a triplé en trois ans, et en faisant des acquisitions", résume Olivier Mallet, vice-président chargé du secteur mines-chimie-enrichissement.
Le rachat pour 2,5 milliards de dollars (1,8 milliard d'euros) du canadien UraMin et de ses gisements en Namibie, en Afrique du Sud et en Centrafrique (Le Monde du 1er août) s'inscrit dans cette stratégie. Areva entend développer son activité au Canada (40 % de sa production) et au Kazakhstan (25 %), où il produit depuis 2006.
SINGAPOUR (10/4/2007) - Les cours spot de l'uranium sont au plus haut depuis
la fin des années 70 alors que l'énergie nucléaire
connaît un nouvel engouement lié à l'envolée
des prix des hydrocarbures et au fait qu'elle est moins génératrice
de gaz à effet de serre.
Alors que les autorités françaises ont volontiers
souligné que la production d'électricité
d'origine nucléaire avait contribué à limiter
la facture énergétique, les prix du combustible
nucléaire poursuivent leur ascension et ont atteint 113
dollars la livre, selon Ux Consulting, un bureau d'analyse spécialisé
sur le marché de l'uranium.
Les prix spot de l'uranium sont ainsi passés de 9,50 dollars
la livre fin 2002 à 36,25 dollars fin 2005 puis 60 dollars
à la fin de l'année dernière.
Les prix pourraient encore augmenter en raison de la demande croissante
des pays et des faibles disponibilités en combustible.
Des années de sous-investissement dans l'exploitation d'uranium
à cause de prix peu élevés et du lobby antinucléaire
ont entraîné une pénurie de combustible dans
le monde.
"L'environnement est favorable à une renaissance du
nucléaire. Les opérateurs de marché se sont
tellement concentrés du côté de l'offre, qu'ils
ont oublié que c'est aussi une histoire de demande et le
développement de nouveaux programmes d'exploitation n'a
pas encore décollé" a déclaré
Joël Crane, analyste à la Deutsche Bank à Melbourne.
Plusieurs pays d'Europe, les Etats-Unis, la Russie, la Chine et
même certains groupes environnementaux, comme Greenspirit,
sont favorables au nucléaire notamment parce qu'il émet
moins de gaz à effet de serre que les combustibles fossiles.
Les risques d'accidents nucléaires comme Tchernobyl et la crainte que l'uranium enrichi
soit utilisé à des fins militaires ont certes freiné
le développement de l'énergie nucléaire.
Certains observateurs considèrent toutefois que l'uranium
pourrait encore augmenter de 50 dollars par livre.
"Le pic des années 70 s'élevait à 120
dollars par livre en termes réels. Etant donné la
faiblesse du dollar, la forte demande et l'offre limitée,
nous pouvons considérer que le pic pourrait être
de plus de 150 dollars", estime ainsi Paul Carter, directeur
général de la firme de courtage Argonaut Securities
à Perth.
"La demande tire les prix mais la faiblesse du dollar signifie
qu'on est prêt à payer un peu plus que dans d'autres
devises", précise-t-il.
Actuellement 435 réacteurs nucléaires sont en fonctionnement
dans le monde, dont 58 en France répartis sur 19 sites
pour une capacité totale installée de 63.363 mégawatts.
La France est ainsi le deuxième producteur mondial d'électricité
d'origine nucléaire après les Etats-Unis avec une
production de 428,7 terawatts/heure d'électricité
nucléaire l'année dernière, soit 78% de sa
production totale d'électricité.
[La dernière mine d'uranium française a cessé
toute extraction de minerai en 2000. Avec 100% d'uranium importé,
le nucléaire ne peut donc assurer aucune indépendance
énergétique à la France.]
Au niveau mondial, 28 réacteurs sont en construction, 64
planifiés, et quelque 158 projets sont en cours.
L'Inde et la Chine arrivent en tête des nouveaux projets
de construction avec respectivement sept et cinq nouvelles centrales.
En France, les travaux de construction du réacteur de troisième
génération EPR (European Pressurized Reactor) à
Flamanville (Manche) débuteront fin 2007.
Les constructeurs des réacteurs qui entreront en service
d'ici cinq à sept ans cherchent à s'assurer dès
maintenant des prix pour leurs premiers chargements d'uranium.
"Ces premiers chargements devront intervenir alors que d'autres
réacteurs tournent presque à plein régime
- plutôt à près de 90% de leur capacité
qu'à 70% - ce qui signifiera une augmentation de la consommation
de combustible", prévient Paul Carter.
Un nouveau réacteur a besoin d'environ 600 tonnes d'uranium
pour le premier chargement. Il consomme ensuite 200 tonnes par
an.
En 2006, la production d'uranium est estimée à 103
millions de livres (46.720 tonnes) tandis que la consommation
a atteint 177 millions de livres (80 000 tonnes).
"Cette année, la prévision pour la demande
est d'environ 183 millions et celle de la production de 117 millions",
note Alice Wong, vice-Présidente de Cameco Corp.
"Depuis 1985, la consommation d'uranium a dépassé
la production et la première progresse plus rapidement
que la seconde", ajoute-t-elle.
[Calculs avec les chiffres
donnés dans le mémento du CEA:
- réserves d'uranium dans le monde fin 1996 (ressources
connues + ressources estimées: 4.299.000 t
- consommation mondiale actuelle annuelle: 56.250 t,
- durée de la vie de la production d'énergie nucléaire:
76 ans.
Si on triple la production mondiale de l'électricité
nucléaire actuelle - pour lutter contre l'effet de serre
- alors, la durée de la vie des réserves se réduit
à 25 ans. C'est moins de temps que promit le soi-disant
"sortir du nucléaire" allemand...
Sources: (L'énergie en France, édition 2000,
ministre de l'économie des finances et de l'industrie)
et dans "Mémento sur l'énergie",
1999]
La différence entre production et consommation a pu être
comblée par les stocks et par le recyclage des armes nucléaires.
Mais un traité entre la Russie et Etats-Unis pour convertir
l'uranium militaire en uranium faiblement enrichi, expire dans
six ans.
"L'accord entre la Russie et les Etats-Unis se termine en
2013 et on ne sait pas trop ce qui va se passer alors", relève
Steve Kidd, directeur de la World Nuclear Association à
Londres, tout en se montrant assez confiant.
"Le marché sera approvisionné d'une manière
ou d'une autre mais la question reste de savoir à quel
prix", estime-t-il.
Pour Andrew Harrington, de l'Australian and New Zealand Bank,
"la réduction de l'offre secondaire empirera et le
déficit pourra difficilement être comblé par
l'accroissement des capacités".
L'échéance à laquelle le marché retrouvera
l'équilibre dépend beaucoup de l'Australie et de
l'autorisation donnée par Canberra à l'ouverture
de nouvelles mines.
L'Australie détient 40% des réserves mondiales d'uranium
mais les exportations ne sont autorisées que depuis certains
Etats - comme ceux de Western Australia ou du Queensland, particulièrement
riches en minerai - en raison d'une réglementation datant
du mouvement anti-nucléaire des années 70.
Les nouveaux approvisionnements pourraient venir d'Afrique avec
la Namibie ainsi que du Canada, où le projet Cigar Lake
de Cameco devrait être opérationnel en 2012. Le site
devrait fournir à terme 18 millions de livres d'uranium
par an, mais le projet prend actuellement du retard en raison
d'inondations.
"Le délai prévu pour le démarrage de
l'exploitation de Cigar Lake est un peu optimiste", estime
Paul Carter.
Alors que le délai de mise en exploitation d'une mine d'uranium
est d'au moins dix ans, la hausse des cours a encore de beaux
jours devant elle.
Nick Trevethan