Le Monde, 13/4/07:

Protestations après le feu vert discret à la construction de l'EPR

"Déni de démocratie" pour Greenpeace, "acte antidémocratique d'un gouvernement en fin de règne" pour Sortir du nucléaire, "mépris pour la démarche de débat public" pour les Verts, "étonnement" du Parti socialiste : les réactions ont été vives après la publication au Journal officiel, mercredi 11 avril, du décret autorisant EDF à construire le réacteur nucléaire de troisième génération (EPR) de Flamanville (Manche).

Greenpeace a annoncé son intention de déposer immédiatement "un recours en annulation devant le Conseil d'Etat". La candidate des Verts Dominique Voynet a précisé qu'elle excluait d'apporter son soutien au deuxième tour à un candidat qui "n'aurait pas pris l'engagement de revenir sur cette décision". Le PS a réaffirmé son engagement "à ouvrir un débat transparent et approfondi sur l'avenir de l'EPR au lendemain de l'élection présidentielle, pour définir les orientations de la politique énergétique du pays".

"EN CATIMINI"

François Bayrou, candidat de l'UDF, juge "antidémocratique" de prendre une décision "en catimini" juste avant l'élection et s'engage à "suspendre la décision" s'il est élu. José Bové, qui a annoncé, jeudi dans le quotidien gratuit 20 Minutes, qu'il proposerait à Nicolas Hulot d'être premier ministre s'il était élu, y voit "une provocation".
Le ministère de l'économie a indiqué pour sa part que "cette autorisation est l'aboutissement d'un processus de consultation du public très complet". La Commission nationale du débat public (CNDP) a organisé un débat public sur l'EPR entre octobre 2005 et février 2006. Une enquête publique locale s'est ensuite déroulée en juin et juillet 2006, "qui s'est conclue par un avis favorable", a rappelé le ministère. Les travaux de terrassement sont déjà largement entamés à Flamanville. La publication du décret, le 11 avril, doit permettre une mise en service du réacteur en 2012.
Le réacteur européen à eau sous pression (European Pressurised Water Reactor ou EPR) est destiné à prendre le relais d'une partie des 58 réacteurs français actuels. En France, l'énergie nucléaire assure 78 % de la production d'électricité, contre 16 % dans le monde et 32 % en Europe. Ses opposants dénoncent le coût élevé de sa construction (3,4 milliards d'euros), sa technologie "obsolète" et son utilité discutable, la France étant "en situation de surcapacité énergétique". Selon eux, le coût de l'EPR va limiter l'investissement dans les énergies renouvelables.

Christophe Jakubyszyn


Libération, 12 avril 2007:
Explosion de colère contre le décret sur l'EPR

 

 

TF1 LCI, 12/4/07:
Le projet de réacteur nucléaire s'invite dans la campagne
"A droite, Nicolas Sarkozy s'est récemment dit en faveur du "maintien et du renouvellement" du "parc nucléaire", tandis que l'UMP estime que la construction d'un tel réacteur est nécessaire pour être prêts lors du renouvellement des centrales plus anciennes."


Greenpeace, 11 avril 2007:
Signature du décret d'autorisation du réacteur EPR:
Greenpeace dénonce une décision anti-démocratique et attaque le décret en justice



11/04/2007, communiqués de presse du Réseau Sortir du nucléaire:

Décret de création du réacteur nucléaire EPR : acte anti-démocratique d'un gouvernement en fin de règne

Mme Royal et M. Bayrou doivent s'engager avant le 1er tour à annuler ce décret au moins le temps qu'un débat démocratique ait enfin lieu

Le Réseau "Sortir du nucléaire" dénonce la publication du décret autorisant la construction du réacteur nucléaire EPR à Flamanville (Manche). Alors que la question de la construction du réacteur EPR est fortement débattue lors de la campagne présidentielle, c'est un gouvernement en fin de règne et décrédibilisé qui tente de court-circuiter le débat en publiant à la sauvette le décret de création de l'EPR.

Considérant qu'il n'y a rien à attendre de M. Sarkozy, qui est clairement aligné sur les exigences de l'industrie nucléaire, le Réseau "Sortir du nucléaire" s'adresse ce jour à Mme Royal et à M. Bayrou : l'une comme l'autre ont reconnu que le débat sur l'EPR et la décision de construction de ce réacteur avaient été imposés de façon non démocratique.

C'est avant le 1er tour de l'élection présidentielle que Mme Royal et M Bayrou doivent prendre l'engagement, en cas de victoire, d'annuler le décret de construction du réacteur nucléaire EPR, et ce au moins le temps que se tienne enfin un débat démocratique sur la question. De même il est nécessaire que Mme Royal et M Bayrou s'engagent à annuler les arrêtés préfectoraux grâce auxquels EDF a commencé les travaux préparatoires sur le site, pour tenter d'imposer le "fait accompli".

Par ailleurs, Mme Royal doit dénoncer les propos de Bernard Cazeneuve, maire PS de Cherbourg, qui a déclaré qu'un tel débat pourrait être expédié sur "1 mois et demi, en plein été". M. Bayrou doit lui aussi dénoncer l'idée d'un débat "expédié" en quelques jours... et débouchant sur la même décision de construire l'EPR.

Un débat véritablement démocratique doit permettre aux opposants de s'exprimer à égalité avec les promoteurs de l'EPR, contrairement à ce qui s'est passé lors du "débat public" qui a mis en scène EDF, les opposants devant se contenter de poser quelques questions.

Enfin, le Réseau "Sortir du nucléaire" rappelle que trois candidats à l'élection présidentielle, Olivier Besancenot, José Bové, et Dominique Voynet, se sont prononcés contre le nucléaire en général et donc contre la construction de l'EPR.

 


Libération, 11 avril 2007:

Le décret sur la construction de l'EPR vivement critiqué

La parution ce mercredi d'un décret autorisant la construction du réacteur nucléaire EPR près de Flamenville provoque de nombreuses réactions politiques qui dénoncent le «l'absence de débat» sur cette décision.

Un décret du ministère de l'Economie et des Finances paru ce mercredi dans le Journal Officiel autorise EDF à construire le réacteur EPR de Flamanville dans la Manche.

Ce décret, signé par le Premier ministre Dominique de Villepin et les ministres de l'Economie, de l'Ecologie et des Finances, «fixe les prescriptions techniques en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et de protection de l'environnement qui devront être respectées dans le cadre de l'exploitation de ce réacteur» selon le ministère de l'Economie

L'EPR doit être construit sur les falaises du Cotentin au sein du site de 120 hectares du centre de Flamanville, qui comprend déjà deux réacteurs de 1.300 MW mis en service il y a 20 ans. Sa construction doit commencer à la fin de l'année, pour une mise en service prévue en 2012.

«EDF se félicite de la publication de ce décret», a déclaré une porte-parole de l'électricien français en faisant valoir que «la construction de ce réacteur de 1.650 MW contribuera de manière décisive au maintien de l'indépendance énergétique de la France et de l'Europe».

Ce décret a provoqué de nombreuses réactions critiques dans la sphère politique. Selon Dominique Voynet, la publication de ce décret au Journal Officiel manifeste du «mépris pour la démarche de débat public».

Le PS «s'étonne» de cette annonce à seulement quelques jours des élections et s'engage à ouvrir un «débat transparent» sur le sujet après les présidentielles.

Même réaction critique pour François Bayrou qui considère comme «totalement anti-démocratique» ce décret et appelle à sa suspension pour avoir «un vrai débat» sur le sujet.

L'organisation écologique Greenpeace a elle déploré cette nouvelle en mettant en avant «un déni de démocratie» et a annoncé dans un communiqué qu'elle «attaquerait en justice» ce texte.
 
Le ministre des Finances Thierry Breton juge de son coté que «le débat démocratique a déjà eu lieu» en affirmant avoir obtenu «les avis favorables de l'autorité de sûreté du nucléaire et du ministère de la Santé».

 

 

Le gouvernement donne son feu vert au projet contesté de l'EPR

PARIS (11 avril 2007) - Feu vert pour l'EPR. A dix jours du premier tour de l'élection présidentielle, le décret autorisant EDF à créer la première centrale nucléaire de type EPR sur le site de Flamanville (Manche) a été publié mercredi au Journal Officiel, déclenchant la colère des opposants au projet qui parlent de "provocation" et de décision "anti-démocratique d'un gouvernement en fin de règne".
Ce réacteur de nouvelle génération, dont la mise en place est prévue en 2012, est très contesté par les militants écologistes, qui ont tenté en vain d'obtenir de la justice qu'elle repousse sa construction, et par trois candidats à la présidentielle (Dominique Voynet, Olivier Besancenot, José Bové). La candidate socialiste Ségolène Royal propose pour sa part de rouvrir le débat sur sa construction et l'UDF François Bayrou souhaite un moratoire.
"Malgré ce qu'affirme le gouvernement, le projet de réacteur nucléaire EPR a été décidé sans débat démocratique. La signature du décret en période de campagne électorale illustre à nouveau les méthodes que l'on croyait révolues: celles d'un gouvernement à la solde du lobby nucléaire", a dénoncé Frédéric Marillier de Greenpeace France. L'association avertit et qu'elle "prépare dès aujourd'hui un recours en annulation devant le Conseil d'Etat".
Le porte-parole national des Verts Yann Wehrling a qualifié de "véritable provocation" la publication de ce décret à l'approche de l'élection présidentielle. Après un "débat public tronqué", il épingle, dans un communiqué, le "coût faramineux" de l'EPR (réacteur à eau pressurisée) pour une "efficacité médiocre" et demande à la gauche, si elle remporte la présidentielle, d'"enterrer définitivement le projet".
Le Parti socialiste, qui se dit "étonné" de cette autorisation, juge qu'elle "est révélatrice d'une conception de la politique qui fait fi du débat transparent et ouvert en matière énergétique et qui illustre le passage en force qui a été la caractéristique de la méthode de la droite sur tous sujets depuis cinq ans". Le PS "s'engage à ouvrir un débat transparent et approfondi sur l'avenir de l'EPR au lendemain de l'élection présidentielle pour définir les orientations de la politique énergétique du pays. Ce débat devra éclairer, notamment, l'intérêt de la construction dès 2007 de ce nouveau réacteur".
Quant à José Bové, il dénonce une "provocation" et "le comportement d'un gouvernement irresponsable, à la botte de Sarkozy". Il "appelle toute la gauche, tous les écologistes, tous ceux qui refusent que leurs enfants soient soumis au diktat des nucléocrates à s'opposer à cette construction inutile et dangereuse". "Tous les candidats doivent s'engager à demander un moratoire sur l'EPR et la construction de nouvelles centrales".
Pour le collectif d'associations Sortir du nucléaire, "c'est un gouvernement en fin de règne et décrédibilisé qui tente de court-circuiter le débat en publiant à la sauvette le décret de création de l'EPR". Le collectif demande à Ségolène Royal et à François Bayrou de "prendre l'engagement, en cas de victoire, d'annuler le décret de construction du réacteur nucléaire EPR".
Ce décret, signé par le Premier ministre Dominique de Villepin et les ministres Thierry Breton (Economie), Nelly Olin (Environnement) et François Loos (Industrie), s'inscrit "dans le cadre de la loi du 13 juillet 2005", indique le ministère de l'Economie dans un communiqué qui assure que cette autorisation "est l'aboutissement d'un processus de consultation public très complet" et que le projet "a reçu le 13 février dernier un avis favorable de l'Autorité indépendante de sûreté nucléaire (ASN) et un avis conforme du ministre de la Santé le 20 mars dernier".
Le premier Réacteur pressurisé européen (EPR) est un réacteur utilisant à la fois uranium et plutonium dont la capacité atteindra les 1.630 mégawatts, pour une consommation de combustible qui devrait être inférieure de 17% à celle des réacteurs actuels. Il s'agit d'un projet franco-allemand développé depuis 1991 par Siemens et Areva, destiné à prendre le relais des réacteurs qui équipent aujourd'hui les 19 centrales nucléaires françaises.