Tageblatt, 18/2/2007:
Des incidents à répétition
dans les centrales nucléaires suédoises ont conduit
l'industrie à faire appel à l'Agence internationale
de l'énergie atomique (AIEA) dans le but de rassurer l'opinion
publique.
Vendredi, les responsables des trois centrales du pays scandinave
se sont réunis et ont fait part de leur souhait de voir
l'agence onusienne inspecter les centrales suédoises.
Ils ont sollicité le gouvernement suédois qui, formellement,
est le seul à pouvoir convier une telle mission d'inspection
de l'AIEA.
»Je pense que c'est une question de crédibilité.
(Avec l'AIEA), nous aurons une inspection totalement indépendante
(...) de plus, les conclusions de l'inspection sont publiques,
donc le résultat sera accessible à tous»,
a déclaré Jan Edberg, nouveau PDG de la centrale
de Forsmark dont le prédécesseur a démissionné
il y a une semaine. [Il
ne faut pas oublier à chaque fois que l'AIEA intervient
dans les questions nucléaires, que c'est à un promoteur du
nucléaire qu'on a affaire !]
Forsmark, située au nord de Stockholm, a été
très critiquée ces derniers mois pour avoir accumulé
les entorses aux normes de sécurité, tandis que
des incidents dans les autres centrales du pays ont contribué
à entacher la réputation de l'industrie nucléaire
suédoise.
Le 25 juillet dernier, une coupure d'électricité
avait conduit à la fermeture temporaire de l'un des trois
réacteurs de Forsmark, car deux des quatre générateurs
de secours ne s'étaient pas activés, illustrant
d'autres défaillances dans le système électrique.
Selon des experts, un accident catastrophique avait été
évité de justesse mais dans leur rapport officiel
en septembre dernier, les autorités suédoises avaient
catalogué l'incident au niveau 2 sur une échelle
de 0 à 7.
A l'heure actuelle, deux des trois réacteurs de Forsmark
sont à l'arrêt, suite à la récente
découverte d'un défaut technique et ce vendredi,
l'un des quatre réacteurs de la centrale de Ringhals (côte
sud-ouest) a également dû être arrêté
en raison d'une "petite fuite" dans le système
de refroidissement primaire.
Cela signifie que trois des dix réacteurs que compte la
Suède sont actuellement hors service.
Toutefois la Suède ne connaît aucun problème
d'approvisionnement en électricité après
l'arrêt de ces réacteurs.
Ce vendredi également, la troisième centrale suédoise,
Oskarshamn (côte sud-est) a indiqué que des doses
anormales de radioactivité ont été décelées
dans de l'eau, un incident qui n'a cependant pas nécessité
l'arrêt de la production.
Lors d'une visite début février en Suède,
le commissaire européen chargé de l'énergie,
Andris Piebalgs, a exprimé son inquiétude face aux
récents problèmes.
Commentant la situation générale, le PDG d'Oskarshamn,
Patric Ramberg, a estimé que "c'est quelque chose
qui a eu un impact sur l'ensemble du secteur et la confiance des
Suédois en a pris un coup".
A l'heure actuelle, l'industrie nucléaire suédoise
fait déjà l'objet d'une enquête de l'Autorité
de l'énergie nucléaire suédoise (SKI), un
organisme indépendant, ainsi que de l'Association mondiale
des opérateurs nucléaires (WANO), selon l'agence
de presse suédoise TT.
Une mission d'inspection de l'AIEA, si elle a lieu, n'interviendrait
pas avant un an environ.
L'énergie nucléaire représente près
de la moitié de la production d'électricité
de la Suède qui a prévu de fermer son parc nucléaire
d'ici à une trentaine d'années.
Enerpresse, 18/9/2006:
L'autorité de sûreté suédoise
(la SKI) a infirmé, en fin de semaine, vouloir autoriser
le redémarrage des tranches 1 et 2 de la centrale de Forsmark,
arrêtés depuis l'incident survenu le 25 juillet dernier.
La SKI entend que l'exploitant réalise auparavant les travaux
d'amélioration de la sûreté demandés,
et notamment une sécurisation de l'alimentation électrique
autonome et du contrôle-commande de la centrale.
Libération, 31 août 2006:
Un mois après l'incident survenu à
la centrale de Forsmark à 150 km de Stockholm, le 25 juillet,
la moitié du parc nucléaire suédois est toujours
immobilisée. Par mesure de sécurité, quatre
des dix réacteurs du pays ont été arrêtés.
Et aucun ne sera remis en activité avant le feu vert de
l'organisme suédois de l'inspection de la sûreté
nucléaire (SKI), qui juge l'incident «très
sérieux», mais «sans conséquence
sur la santé publique ou l'environnement», résume
le porte-parole de l'organisation, Anders Bredfell.
Tests. Classé de niveau 2 sur l'échelle
[médiatique] Ines (International
Nuclear Event Scale) graduée jusqu'à 7, l'incident
a été provoqué par un court-circuit dans
le réseau électrique en bordure de la centrale,
qui a entraîné une panne du système d'alimentation
électrique du réacteur 1. Le système de sécurité
s'est déclenché normalement, et le réacteur
a été arrêté. Mais, si quatre générateurs
de secours devaient se mettre en marche pour alimenter les pompes
de refroidissement, seulement deux se sont allumés automatiquement.
Les deux autres ont dû être activés manuellement.
Dans un premier rapport, la direction de la centrale de Forsmark,
exploitée par la compagnie électrique Vattenfall,
expliquait la défaillance par un défaut de fabrication
des batteries utilisées pour démarrer les générateurs.
Depuis, la société allemande AEG, filiale du groupe
suédois Electrolux, qui a fourni l'une des pièces
du système de secours, a mené une série de
tests, en collaboration avec des techniciens suédois. En
début de semaine dernière, la direction de Forsmark
a remis son rapport définitif à la SKI.
Experts. «Nous savons désormais ce qui
s'est passé, affirme Claes-Inge Andersson, chargé
des relations publiques de la centrale. Le court-circuit a été
provoqué par une brusque surtension de courant. Le système
de secours n'était pas adapté pour y faire face.
Les équipements étaient conformes aux exigences,
mais nous n'avions pas anticipé une telle surcharge.» L'incident
est jugé d'autant plus sérieux que, précise-t-il,
«nous n'avions pas prévu qu'une défaillance
en marge de la centrale puisse avoir de telles conséquences
et affecter le système de sécurité».
Reste à déterminer pourquoi deux des générateurs
ont fonctionné et pas les deux autres. Plusieurs experts
suédois et étrangers travaillant pour le compte
de la SKI continuent d'analyser la défaillance. Aucun des
réacteurs ne sera remis en activité, «tant
que nous ne sommes pas complètement certains que ce genre
d'incidents ne se reproduira pas», explique Anders
Bredfell. La catastrophe nucléaire a-t-elle été
évitée de justesse ? Anders Bredfell dément
: «Jamais il n'y a eu de risque que le réacteur se
mette à fondre.»
A trois semaines des élections législatives, la
campagne électorale bat son plein. Mais aucun des candidats
ne semble prêt à évoquer l'avenir du parc
nucléaire, qui fournit près de la moitié
de l'électricité produite en Suède. Seule
inquiétude [pour
Libération ?]: le coût de
l'immobilisation des réacteurs, qui s'élève
déjà à 700 millions de couronnes (75 millions
d'euros).
Anne-Françoise Hivert
La Vie, 17/8/2006:
L'incident" était à deux doigts de provoquer un second Tchernobyl. Il a eu lieu le 26 juillet dernier à la centrale de Forsmark, en Suède, mais ce n'est que quinze jours après, à travers des informations diffusées par la presse suédoise et le réseau Sortir du nucléaire, que l'on commence à savoir la vérité.
Ce jour-là, le réacteur n°1 tombe en panne soudainement. Les quatre générateurs de secours, censés alimenter en électricité ses pompes de refroidissement, ne se mettent pas en route. Le coeur s'échauffe, la pression dégringole. Vingt-trois longues minutes s'écoulent avant qu'une équipe ne parvienne à démarrer manuellement deux générateurs . Un peu plus, et un dégagement colossal de radioactivité se serait disséminé dans toute l'Europe. "C'est un pur hasard si la fusion du coeur n'a pas eu lieu", confie Lars-Olov Höglund, ancien responsable et constructeur du réacteur n°1, au journal suédois Svenska Dagbladet.
A l'origine de cette panne de niveau 2 sur l'échelle [médiatique] internationale d'évènements nucléaires (INES), sans doute un défaut générique. Le ministre allemand de l'Environnement a annoncé la vérification complète de son parc nucléaire, même s'il ne fonctionne pas avec la même technologie que celui de la Suède. La Finlande suit la même voie, tandis qu'en France, où l'on compte 58 réacteurs nucléaires, EDF n'a annoncé aucune mesure spéciale.
Isabelle Piot
La Tribune de Genève, 11 août 2006:
Un incident atomique en Suède a entraîné l'arrêt de quatre centrales.
L'été est la saison de révision des centrales nucléaires. Le bilan de celle de Leibstadt (AG) devrait être connu ces jours. Mais c'est du nord qu'est venue la dernière alerte énergétique: le 25 juillet, l'installation de Forsmark, à 150 kilomètres de Stockholm, a connu ce qu'on qualifie officiellement d'incident. Les circonstances de cet événement sont encore floues. Mais il pourrait avoir des répercussions jusqu'en Suisse.
Après le 25 juillet, Greenpeace a demandé que des tests soient effectués dans les installations du monde entier. A Berlin, le ministre de l'Environnement, de la Protection de la nature et de la Sécurité nucléaire, le social-démocrate Sigmar Gabriel, a lui aussi jugé nécessaire d'effectuer des contrôles en Allemagne.
Mais en Suisse, la Division principale de la Sécurité des Installations Nucléaires (DSN) adopte un autre ton: «Nous n'utilisons pas le même système de générateurs d'électricité de secours que la Suède. Du coup, nous n'avons pas exigé de mesures immédiates», souligne le porte-parole Anton Treier, en précisant que Berne attend le rapport suédois sur les événements de Forsmark pour décider des suites à lui donner. Comment expliquer cette différence de ton ? Anton Treier répond par une interrogation prudente: «Peut-être y a-t-il dans la décision allemande une dimension politique ?»
Du pain bénit pour les antinucléaires
En Suisse, l'émotion suscitée par cette panne n'a que partiellement traversé la Sarine. Mais l'événement trouve logiquement des relais parmi les antinucléaires. «Qui aurait parié qu'un incident puisse se produire en Suède, s'interroge ainsi la présidente d'écologie libérale, Isabelle Chevalley. C'est un pays sûr, comme la Suisse!» Et le secrétaire général des Verts, Hubert Zurkinden, d'ajouter: «Personnellement, quand je vois ce qui se passe dans un endroit où la technologie est bonne et lorsque j'entends que nous voulons prolonger la durée de vie de nos centrales, cela me fait peur.»
Dans le creux de l'été, l'incident
suédois semble avoir pris de cours les écolos. Entre
les vacances des uns et des autres, les membres du parti n'ont
pas encore discuté officiellement de cette affaire. En
coulisses, toutefois, le dossier est pris au sérieux, comme
le confirme Hubert Zurkinden. Prudente, la formation attend aussi
de savoir plus précisément ce qui est arrivé,
le 25 juillet à Forsmark.
Ce printemps, le Parti socialiste a présenté un
projet pour se passer de l'atome dès 2020. Les derniers
événements apportent évidemment de l'eau
à son moulin.
Le conseiller national Roger Nordmann (VD), socialiste et membre de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie, n'entre toutefois pas dans la polémique du danger qui a été couru en Suède. Il préfère rappeler que Stockholm a dû fermer quatre centrales d'un coup (lire ci-dessous).
L'incident de Forsmark aura-t-il des suites au Parlement ? Roger Nordmann ne l'exclut pas. Mais le parlementaire est, lui aussi, dans l'expectative: «Nous allons attendre le rapport suédois et nous verrons avec nos spécialistes quelles suites lui donner.»
Caroline Zuercher
La Tribune de Genève, 11 août 2006:
Le «Tages-Anzeiger» a fourni mercredi plus de détails sur l'incident de Forsmark. Ce dernier a été causé par une panne d'électricité, provoquée elle-même par un court-circuit en dehors de la centrale. Cet événement a enclenché, comme prévu, le système de sécurité, et les réacteurs ont été mis à l'arrêt. Mais alors que quatre générateurs de secours ont été sollicités pour alimenter le système de refroidissement, seuls deux ont fonctionné et les autres ont été activés manuellement après 23 minutes. Bref, le filet de sécurité n'a pas totalement fonctionné. Après cet événement, quatre des dix réacteurs suédois ont été mis à l'arrêt afin de faire le point.
Ces deux dernières semaines, les commentaires sont allés bon train, le réseau «Sortir du nucléaire» allant jusqu'à écrire que «l'Europe était passée à deux doigts de la catastrophe». L'événement, toutefois, a été classé de niveau 2 sur l'échelle [médiatique] Ines (International Nuclear Event Scale), qui en compte sept. Selon Bruno Pellaud, président du Forum nucléaire suisse, cela signifie «qu'il ne s'agit pas d'une bagatelle, mais que les conséquences de cet incident ne sont pas graves».
Interviewé par le Tages-Anzeiger, le professeur ETH Horst-Michael Prasser précise qu'à sa connaissance, le réacteur de Forsmark n'a jamais risqué de fondre. Avant d'ajouter que «davantage de sécurités ont failli que ce que nous voudrions». L'autorité de l'énergie nucléaire suédoise a ouvert une enquête.
Caroline Zuercher
Deutsche Welle, 9/8/2006:
Le ministre allemand de l'Environnement, Sigmar Gabriel, a exigé de procéder à un examen complet des centrales nucléaires allemandes, après l'incident dans la centrale nucléaire suédoise de Forsmark. Un incident qui selon le ministre n'aurait pas pu se produire en Allemagne, où les centrales ne fonctionnent pas avec la même technologie qu'en Suède, mais qui montre tout de même qu'il y a des risques inhérents au système. Sigmar Gabriel :
« Avec un système aussi complexe que celui d'une centrale nucléaire, il est difficile de prévoir toutes les défaillances possibles et de développer les contre-mesures appropriées. De plus, les erreurs humaines restent toujours possibles. C'est pourquoi je pense que cela vaut la peine de réfléchir à des alternatives et de poursuivre l'abandon de l'énergie nucléaire. »
L'Allemagne compte 17 centrales nucléaires,
qui produisent près de 30% de son électricité.
L'accord sur l'abandon du nucléaire civil, conclu sous
l'ancien gouvernement rouge-vert de Gerhard Schröder, prévoit
une fermeture progressive de tous les sites d'ici 2024. Un projet
critiqué par une partie de l'industrie et des conservateurs.
Le Figaro, 9 août 2006:
L'incident survenu le 26 juillet dernier
dans la centrale suédoise de Forsmark provoque des remous
en Europe.
L'Europe vient-elle de passer tout près d'un nouvel
accident nucléaire de type Tchernobyl ? Vingt ans après
la tragédie ukrainienne, un incident survenu le 26 juillet
dernier dans une centrale suédoise relance la polémique
sur les dangers de l'énergie atomique. En Allemagne, les
antinucléaires se sont saisis de cette affaire pour demander
la sortie du nucléaire normalement prévue en 2020.
Les pays d'Europe occidentale craignaient surtout jusqu'alors
la vétusté des réacteurs d'Europe de l'Est.
Depuis la chute du rideau de fer, les centrales de l'ancien bloc
de l'Est ont été modernisées et portées
au niveau des normes de sécurité européennes,
avec la maîtrise d'oeuvre d'entreprises occidentales. Dans
les années 1990, l'Américain Westinghouse avait
ainsi été chargé de rénover les réacteurs
VVER 1000 à eau pressurisée de Temelin, d'origine
soviétique, en leur adjoignant notamment une nouvelle enceinte
de confinement.
Cela n'a pas empêché que le 2 août dernier,
la centrale nucléaire tchèque de Temelin, en Bohême du Sud, a connu une
«sérieuse défaillance». Alors
que les techniciens du site procédaient à une vérification
d'usage, une vanne mal refermée manuellement a provoqué
l'écoulement de «plusieurs milliers de litres
d'eau légèrement radioactive», hors du
circuit principal de refroidissement, d'après les autorités
tchèques. Cette fuite, cantonnée à deux compartiments
étanches, n'aurait cependant pas débordé
de l'enceinte de confinement du réacteur n° 2 incriminé.
Deux jours plus tard, celui-ci fonctionnait à nouveau à
91% de sa puissance, comme si de rien n'était.
Mais le 26 juillet, c'est en Suède que s'est produit un
dysfonctionnement majeur. Dans la centrale nucléaire de
Forsmark de conception occidentale, située à 72
km au nord de Stockholm, un court-circuit a entraîné
une panne d'électricité générale et
l'arrêt automatique de la tranche n° 1, un réacteur
à eau bouillante dit BWR. Une anomalie dans le système
d'alimentation a empêché le démarrage de deux
des quatre groupes électrogènes, qui auraient normalement
dû prendre le relais en pareille situation. Les deux diesels
défaillants n'ont pu être redémarrés
manuellement que 23 minutes plus tard.
«Passés près
de la catastrophe»
Tandis que les représentants de la centrale s'efforçaient,
comme leurs homologues tchèques une semaine plus tard,
de dédramatiser l'événement, des voix discordantes
commencent à se faire entendre. «On est passés
près de la catastrophe», confesse Lars-Olov Höglund,
un responsable de l'entreprise Wattenfall, qui assure la maintenance
de Forsmark. «Seul le hasard a évité la
fusion du coeur» du réacteur, qui se serait produite
sept minutes plus tard si les groupes électrogènes
n'avaient pu être réactivés, poursuit un expert
suédois, s'exprimant sous couvert d'anonymat.
Suite à cette panne de niveau 2 sur l'échelle [médiatique] internationale d'événements
nucléaires (Ines), qui en compte 7 (le maximum, atteint
lors de l'accident nucléaire de Tchernobyl en 1986), la Suède a arrêté
par précaution trois de ses dix réacteurs, le temps
que l'enquête soit achevée. La Finlande et l'Allemagne,
qui possèdent plusieurs réacteurs de type BWR, ont
annoncé de leur côté qu'elles allaient vérifier
tout leur parc nucléaire pour s'assurer que l'incident
suédois ne risquait pas de se reproduire chez elles.
L'Autriche particulièrement inquiète
Après cette série noire, le débat sur la
sûreté du nucléaire est relancé en
Europe, et tout particulièrement en Autriche. Dans ce pays
farouchement antinucléaire, depuis qu'un référendum
populaire a classé cette forme d'énergie anticonstitutionnelle
en 1978, la proximité des ex-centrales soviétiques
ne cesse d'alimenter la controverse. Temelin se trouve à
65 km de la frontière autrichienne, où les manifestations
contre la centrale tchèque ne faiblissent pas depuis six
ans. Dans le décor enchanteur et champêtre de Haute-Autriche,
les rues fleuries des villages frontaliers sont pavoisées
d'affiches jaunes fluorescentes criardes, sur lesquelles on peut
lire «Stopp Temelin !».
Temelin aurait connu 92 incidents depuis sa réouverture
officielle en novembre 2000. La fuite du 2 août avait elle-même
été précédée de deux autres
incidents deux jours auparavant. Le 31 juillet, une fuite d'huile
avait entraîné l'arrêt de la turbine principale,
avant que celle-ci ne soit à nouveau stoppée automatiquement
vingt minutes plus tard, une surchauffe de 2° C s'étant
produite.
«Ces derniers jours nous ont très clairement montré
que l'énergie nucléaire ne pourrait jamais être
rendue sûre et qu'elle représentait une source de
danger permanent pour l'ensemble de la population européenne»,
dénonce à Vienne Jan Krainer, le porte-parole
du parti social-démocrate (SPÖ), joignant sa voix
à l'ensemble de la classe politique autrichienne, confortée
dans son rejet de l'atome.
Maurin Picard
Le Monde, 7/8/06:
Vingt ans après l'accident de la centrale de Tchernobyl (Ukraine), l'Allemagne, reste sensible à tout ce qui touche à l'énergie nucléaire. L'incident survenu le 25 juillet dans un réacteur suédois a ainsi fait autant de bruit en Allemagne que dans le royaume scandinave.
Les antinucléaires ont aussitôt réclamé le démantèlement des centrales dans les délais prévus par l'accord conclu en 2000, entre le gouvernement et les industriels du nucléaire. Ces derniers, soutenus par la droite, voudraient prolonger leur durée de vie.
Pour une raison encore mal expliquée, deux diesels électriques de secours de la centrale civile de Forsmark, au nord de Stockholm, n'ont pas fonctionné comme prévu pour suppléer la panne des générateurs normaux provoquée par un court-circuit. Les employés ont pu faire démarrer deux autres diesels. L'Inspection suédoise de contrôle de l'énergie nucléaire (SKI) a classé l'incident au niveau 2 sur l'échelle internationale des événements nucléaires (INES), qui en compte sept.
DIX-SEPT CENTRALES
Avec quelques jours de décalage, les médias allemands ont couvert l'incident avec moult détails. Les propos alarmistes d'un expert suédois, selon lesquels c'était l'événement le plus grave depuis l'accident de Tchernobyl, ont été largement repris outre-Rhin, tandis que la SKI les estimait "très exagérés" .
Les opposants allemands au nucléaire ont bondi sur l'occasion pour insister sur la nécessité de fermer dès que possible les dix-sept centrales encore en fonction en Allemagne et investir davantage dans les énergies renouvelables.
D'après un porte-parole pour les questions environnementales du Parti social-démocrate (SPD), Marco Bülow, l'incident de Forsmark, survenu dans un pays dont les centrales sont pourtant réputées sûres, démontre que la technologie du nucléaire n'est pas "maîtrisable" .
Une défaillance semblable n'est pas à exclure en Allemagne, puisque le composant incriminé, fabriqué par la firme allemande AEG, équipe certaines centrales du pays, ont estimé les Verts. Le ministère fédéral de l'environnement a fait procéder à une vérification en ce sens.
L'Union chrétienne-démocrate (CDU) de la chancelière Angela Merkel a souhaité qu'on ne tire pas de conclusions hâtives. Et pour cause, ce parti prône une relance du programme nucléaire, qui fournit au pays près de 30 % de son électricité.
Certes, le contrat de coalition, conclu avec le SPD après les élections législatives de septembre 2005, ne remet pas en question la sortie de l'atome en 2020, décidée par le précédent gouvernement SPD-Verts.
Mais la droite espère bien revenir dessus, en cas de victoire aux législatives de 2009. Selon elle, le pays ne pourra se passer du nucléaire avant longtemps, les énergies renouvelables tardant à s'imposer.
Antoine Jacob
La Voix du Nord, 6 août 2006:
Des incidents sur deux sites nucléaires,
en Suède et en République tchèque, ont ravivé
le spectre d'un accident majeur, vingt ans après Tchernobyl.
Les Autrichiens, déjà antinucléaires, sont
très inquiets des problèmes qui ont affecté
la centrale de Temelin, située à côté
de la frontière tchèque. En trois jours, cette semaine,
la production a dû être stoppée trois fois.
Lundi, une fuite d'huile dans la deuxième tranche avait
entraîné l'arrêt de la turbine principale.
Vingt minutes après la remise en route, celle-ci se coupait
en raison d'une surchauffe. Mercredi, enfin, une vanne mal fermée
avait provoqué le rejet de milliers de litres d'eau «
légèrement » radioactive. Plus grave, en Suède,
les centrales tournent au ralenti et la moitié des réacteurs
est à l'arrêt depuis un incident consécutif
à une coupure d'électricité : deux des quatre
générateurs de secours ne s'étaient pas déclenchés
et le système électrique était défaillant.
Par précaution, l'Allemagne va vérifier tout son
parc de centrales.
Libération, 5 août 2006:
L'organisme suédois de l'inspection
de la sûreté nucléaire (SKI) qualifie l'incident
de «sérieux» . Mardi 25 juillet,
un court-circuit dans le réseau électrique en bordure
de la centrale de Forsmark, située à 150 km au nord
de Stockholm, a révélé des défaillances
du système d'arrêt d'urgence. Une enquête a
été ouverte. Deux des trois réacteurs n'ont
toujours pas été remis en activité. Et, par
crainte d'un incident comparable, l'opérateur de la centrale
d'Oskarshamn, au sud-est du pays, a décidé à
son tour mercredi d'arrêter deux de ses réacteurs.
Classé de niveau 2 sur l'échelle d'Ines (International
Nuclear Event Scale), l'incident de Forsmark a été
causé par une panne d'électricité, provoquée
par un court-circuit hors de la centrale. «Le système
de sécurité s'est déclenché comme
prévu, c'est-à-dire que les réacteurs ont
été mis à l'arrêt. Mais le problème
est survenu au niveau du système de refroidissement, habituellement
alimenté en électricité par le réseau
électrique de la centrale. Quatre générateurs
de secours ont été sollicités pour alimenter
le système. Or deux seulement se sont déclenchés», explique
Anders Bredfell, porte-parole de la SKI. Il a fallu attendre 21
minutes et 41 secondes pour que les deux autres soient activés
manuellement.
Défaut de fabrication des batteries. «Grâce
au démarrage automatique de deux des générateurs,
le refroidissement des réacteurs n'a posé aucun
problème», précise la direction
de la centrale de Forsmark. Anders Bredfell ajoute : «A
aucun moment, l'environnement ou la santé des gens vivant
dans les alentours n'a été en jeu.» Dans
un rapport remis à la SKI, la direction de Forsmark pointe
du doigt un défaut de fabrication des batteries utilisées
pour démarrer les générateurs d'électricité.
Depuis, la SKI a demandé aux trois centrales de faire le
point sur leur système de sécurité. La compagnie
OKG, qui intervient à Oskarshamn, a décidé
d'arrêter deux de ses trois réacteurs. Car, si la
direction d'OKG pouvait assurer, mercredi, qu' «un des
trois réacteurs est construit et équipé pour
faire face à ce type d'incident», elle confessait
avoir besoin d' «analyses supplémentaires» avant
de se prononcer sur les deux autres.
Depuis mercredi soir, cinq des dix réacteurs nucléaires
suédois sont donc à l'arrêt. L'un en raison
de travaux de maintenance. Quatre, parce que leur système
de sécurité a montré des défaillances.
Sur le marché nordique de l'électricité Nord
Pool, les conséquences de l'incident n'ont pas tardé
à se faire sentir puisque, dès jeudi matin, le prix
de l'électricité était à la hausse.
Mais les autorités rassurent : aucun risque de pénurie
n'est à craindre.
Reste qu'à un mois des législatives en Suède,
les événements de ces derniers jours ont réveillé
les passions. Certains sont même allés jusqu'à
déclarer qu'il s'agissait de «l'incident le plus
grave depuis Tchernobyl». Des «propos idiots», selon
Anders Bredfell. Mais le leader des Verts, Peter Eriksson, prend
ces déclarations très au sérieux. Il a réclamé
que le parc nucléaire suédois fasse l'objet d'une
enquête approfondie : «Nous devons de nouveau nous
poser des questions fondamentales concernant les risques d'un
accident, les faiblesses et les carences de sécurité
qui sous-tendent l'utilisation du nucléaire.»
Revirement dans les sondages. Lors d'un référendum
en 1980, 58 % des Suédois s'étaient exprimés
en faveur du démantèlement progressif de leur parc
nucléaire. Mais, depuis, le ton du débat a changé.
Si deux réacteurs ont été fermés en
1999 et 2005, le gouvernement social-démocrate a décidé
de renoncer à l'ultimatum, fixé à 2010, pour
l'abandon définitif du nucléaire civil en Suède.
Aujourd'hui, les trois centrales et leurs dix réacteurs
fournissent 40 % de l'électricité consommée
par le royaume. Or, selon un sondage réalisé en
juin par l'institut Temo, 85 % des Suédois seraient désormais
favorables à la poursuite de l'utilisation du nucléaire
civil.
Vérifications tous azimuts en Europe
Pour les antinucléaires européens, les incidents
suédois apparaissent comme un «Tchernobyl raté» :
«La défaillance des systèmes d'alimentation
électrique d'urgence peut causer la fusion du combustible
nucléaire, après la perte d'alimentation principale
ou lors d'un black-out.» Peut-être s'emballent-ils
un peu vite... L'incident a été jugé sérieux,
mais pas catastrophique. En revanche, la décision de stopper
la moitié du parc suédois inquiète. En Allemagne,
le ministère de l'Environnement s'est empressé de
vérifier si les centrales du pays étaient équipées
de la pièce défectueuse qui a conduit à l'incident
de Forsmark. En France, EDF assure qu'un tel incident ne peut
se produire, les réacteurs étant de conception différente.
Pour les antinucléaires, ces différences ne mettent
pas EDF à l'abri d'un «accident générique», une
panne ou une défaillance affectant plusieurs réacteurs,
voire tous ceux du parc français. «Le problème
est bien plus large que les réacteurs suédois, des
incidents similaires ont été constatés dans
différents pays. Une enquête sur les 443 réacteurs
nucléaires mondiaux est indispensable et urgente», estime
Jan Van de Putte, chargé de campagne nucléaire pour
Greenpeace International.
Le Monde, 5/8/06:
In incident, qualifié de "sérieux" par l'autorité suédoise de contrôle de l'énergie nucléaire, est survenu dans un des dix réacteurs civils en fonction dans le royaume, relançant timidement le débat sur le futur de l'énergie atomique dans ce pays à un peu plus d'un mois d'élections législatives. Provoqué par un court-circuit électrique, l'incident, qui s'est produit le 25 juillet, a mis au jour des dysfonctionnements à plusieurs niveaux, en particulier dans le système de secours du réacteur n°1 de la centrale de Forsmark, située à une centaine de kilomètres au nord de la capitale, Stockholm. Cette défaillance a conduit la Suède à arrêter par précaution trois autres réacteurs du même type - dit à eau bouillante (BWR) -, un à Forsmark et deux à Oskarshamn.
Selon les explications fournies à l'Autorité publique d'inspection nucléaire (SKI) par Forsmarks Kraftgrupp AB, l'exploitant de la centrale, deux diesels électriques, censés démarrer en cas de panne de courant, n'ont pas pu se mettre automatiquement en route comme prévu, et ce pour une raison encore peu claire. Deux autres générateurs du même type ont pu les suppléer, évitant de mettre le réacteur dans une situation telle que cela aurait pu conduire à une montée anormale de température de l'installation. ["une montée anormale de température"... comme à Tchernobyl ???]
"C'est toujours sérieux lorsque quelque chose ne fonctionne pas dans le système de secours" , a commenté Maria Svensson, chef adjointe du service d'information de la SKI, contactée à Stockholm. Selon une enquête préliminaire effectuée par cette autorité deux jours après la panne, l'équipe de la centrale a suivi les instructions prévues pour un tel scénario. Mais, à en croire des témoignages d'employés recueillis par les médias, l'ambiance était tendue dans la salle de contrôle. En raison du court-circuit, écrans d'ordinateurs et haut-parleurs étaient hors service, note la SKI dans son rapport.
EN PLEINE CAMPAGNE ÉLECTORALE
D'un commun accord, l'exploitant privé de la centrale et la SKI ont classé l'incident au niveau 2 de l'échelle [médiatique] internationale des événements nucléaires (INES) reconnue par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Un tel niveau correspond à un "incident" , le niveau 1 désignant une "anomalie" et le niveau 7 étant réservé à un "accident majeur" , comme celui qui a conduit en 1986 à l'explosion de Tchernobyl. Selon Mme Svensson, les commentaires d'un expert suédois affirmant que l'incident de Forsmark était le plus grave survenu depuis Tchernobyl et qu'on était passé tout près d'un accident majeur sont "grandement exagérés" .
La SKI a toutefois préconisé, au-delà des mesures ponctuelles pour s'assurer de la sécurité de Forsmark 1, que les autres réacteurs suédois construits sur le même modèle soient vérifiés de près. La deuxième unité de Forsmark, ainsi que deux réacteurs de la centrale d'Oskarshamn (sud), ont donc été fermés entre-temps, par mesure de précaution. En fonction depuis le début des années 1980, la centrale de Forsmark, qui comprend trois réacteurs mis en service entre juin 1980 et mars 1985, est l'une des plus récentes du pays. En temps normal, les dix réacteurs du pays fournissent près de la moitié de l'électricité produite sur place.
Alors que Greenpeace a réclamé que soient contrôlés après cette défaillance les 443 réacteurs en service dans le monde, l'incident de Forsmark a provoqué des remous dans la campagne électorale suédoise. Le 17 septembre, un nouveau Parlement sera élu. Allié traditionnel du gouvernement social-démocrate sortant, le Parti de gauche (ex-communiste) a réclamé une accélération de la sortie de l'atome - décidée après un référendum en ce sens organisé en 1980 - et la fermeture, d'ici à 2010, d'un des dix réacteurs aujourd'hui en service. Jusqu'à présent, seuls les deux réacteurs de la centrale de Barsebäck ont fait l'objet d'une telle mesure. La droite, qui pourrait revenir au pouvoir, a paru embarrassée par l'incident de Forsmark, alors qu'elle est favorable au maintien du nucléaire.
Antoine Jacob
4 août 2006 - En Suède, depuis la nuit du 2 au 3 août, cinq des dix réacteurs nucléaires suédois sont à l'arrêt suite à un grave incident intervenu sur le réacteur de la centrale nucléaire de Forsmkark. La Suède se voit donc privée de 25 % de sa production électrique. En effet, Greenpeace a annoncé que la Suède était privée de la moitié de sa production nucléaire suite à un incident. Greenpeace demande une investigation immédiate sur tout le parc nucléaire mondial.
Cinq des dix réacteurs nucléaires suédois sont à l'arrêt depuis la nuit du 2 au 3 août, suite à un grave incident intervenu sur le réacteur 1 de la centrale de Forsmkark. Après investigation de la compagnie électrique et de l'autorité de sûreté suédoise, il a été décidé de fermer les autres réacteurs exposés au même problème, soit 2 réacteurs. 2 réacteurs étant actuellement arrêtés pour maintenance, la Suède se retrouve privée d'environ 25% de sa production électrique jusqu'à nouvel ordre.
L'incident intervenu la semaine dernière a mis en évidence de graves problèmes dans les systèmes d'alimentation électrique de secours. Suite à une perte de l'alimentation électrique principale de la centrale due à un problème sur le réseau, les systèmes de secours ont été incapables de prendre le relais, laissant le réacteur sans alimentation électrique pendant 20 minutes. La défaillance des systèmes d'alimentation électrique d'urgence peut causer la fusion du combustible nucléaire après la perte d'alimentation principale ou lors d'un black-out. L'opérateur perd en effet les instruments de contrôle de la centrale. Il est alors dans l'incapacité de refroidir le coeur du réacteur qui surchauffe et entre en fusion.
« Le problème est bien plus large que les 4 réacteurs suédois, car des incidents similaires ont été constatés dans différents pays. Une enquête globale sur les 443 réacteurs nucléaires mondiaux est indispensable et urgente » a estimé Jan Vande Putte, chargé de campagne Nucléaire pour Greenpeace International. « Dans ce genre de configuration, un black-out tel que survenu aux Etats-Unis et au Canada en 2003, obligeant 20 réacteurs à s'arrêter, pourrait rapidement conduire à la fusion du coeur du réacteur, scénario parmi les plus catastrophiques sur une centrale nucléaire. C'est une menace sérieuse ».
Dans un rapport publié l'année
dernière, Greenpeace avait mis en lumière les risques
associés aux défaillances des systèmes d'alimentation
électrique de secours, et la fréquence et l'étendue
de ces problèmes rencontrés notamment aux Etats-Unis
et en Allemagne (1). Depuis d'autres problèmes de ce type
ont été découverts en Belgique sur la centrale
de Tihange (2) ou en Finlande qui possède 2 réacteurs
identiques à ceux arrêtés en Suède.
Un rapport de l'autorité
de sûreté nucléaire américaine (NRC),
révèle que 50% des scénarios de fusion du
coeur proviennent d'un black-out de la centrale.
« Après la canicule, l'épisode suédois
révèle à nouveau la réalité
du risque nucléaire mais nous éclaire surtout sur
sa fragilité. Imaginons que la France découvre que
ce problème concerne la plupart de ses réacteurs,
les autorités et EDF auront-ils le courage de fermer une
grande partie du parc nucléaire privant notre pays d'électricité
? » s'interroge Frédéric Marillier, chargé
de campagne Nucléaire à Greenpeace France. «
Le nucléaire, colosse aux pieds d'argile, nous place dans
une situation ingérable, il est plus que tant de sortir
de cette impasse et de s'ouvrir aux alternatives : les énergies
renouvelables et l'efficacité énergétique,
seules à même de garantir la sécurité
énergétique. Ceci passe bien évidemment par
l'abandon du projet EPR
».
Pierre Melquiot
TAZ du 03 août 2006:
(Traduction par Cécile L.)
Il y a une semaine, on est
passé très près de la catastrophe nucléaire
dans le réacteur de la centrale de Forsmark I en Suède.
Suite à un court-circuit plusieurs systèmes de sécurité
ont été défaillants. Un expert dans la construction
de ce type de réacteur affirme que le hasard a évité
la fusion du coeur.
L'Europe est vraisemblablement passée à deux doigts
d'un nouveau Tchernobyl. Le réacteur numéro 1 de
la centrale suédoise de Forsmark, située au nord
de Stockholm, est devenu pratiquement incontrôlable à
la suite d'un court-circuit suivi d'une perte de réseau
électrique. Dans le même temps, plusieurs systèmes
de sécurité n'ont pas fonctionné comme prévu.
« Le hasard a évité qu'une fusion du coeur
ne se produise ». C'est ce qu'affirme à présent
un homme qui doit savoir de quoi il parle. Lars-Olov Höglund
a été responsable du département de construction
dans l'entreprise Suédoise Wattenfall, il était
responsable de la centrale nucléaire de Forsmark et connaît
le réacteur par coeur. « C'est l'évènement
le plus dangereux depuis Harrisbourg
et Tchernobyl
» a-t-il dit mercredi au quotidien suédois Svenska
Dagbladet.
Cette quasi-catastrophe s'est produite le 25 juillet peu avant
14h lors de travaux de maintenance qui ont causé un court-circuit
qui a coupé la centrale nucléaire du réseau
électrique tout d'un coup. Le réacteur 1 s'est arrêté
automatiquement. Dans une telle situation, il y a normalement
4 générateurs qui prennent le relais pour entre
autre alimenter les pompes de refroidissement en électricité.
Mais dans les faits, le court-circuit s'est propagé à
l'ensemble du circuit d'alimentation si bien que les batteries
des générateurs de secours ont elle aussi été
victimes d'un court-circuit.
Et ce n'est qu'au bout
de 23 minutes que l'on a pu reprendre le contrôle du réacteur, lorsque enfin deux des quatre générateurs
de même type de fabrication se sont mis à fonctionner
et faire fonctionner le système de refroidissement d'urgence.
Sept minutes plus tard,
la destruction du réacteur n'aurait pu être empêchée,
sit Höglund. Et la fusion du coeur qui s'en suit se serait
produite une heure et demi plus tard.
Problème supplémentaire à Forsmark : la coupure
de courrant à entraîné l'arrêt des ordinateurs,
si bien que l'équipe du centre de commandes a du agir en
partie « à l'aveugle » : beaucoup d'appareils
de mesure n'ont pas fonctionné si bien que l'équipe
n'avait pas d'informations fiables sur l'état du réacteur
et les effets de ses agissements.
L'autorité suédoise du nucléaire "Statens
Kärnkraftinspektion" (SKI) prend la défaillance
des systèmes de sécurité au sérieux,
elle a demandé une enquête complète. Ingvar Berglund, le chef de la sécurité
de Forsmark, ne trouve « pas acceptable » qu'il puisse
y avoir des erreurs de conception des composants pouvant mener
à des courts-circuits en chaîne, sans pouvoir les
contrôler : « j'en avais entendu parler une fois dans
le passé, mais c'était à propos d'un réacteur
russe ».
Selon Berglund, on a appris après l'incident que la firme
AEG qui a construit et livré ces générateurs
défectueux au début des années 90 avait connaissances
de ces faiblesses. AEG n'avait pas estimé nécessaire
de transmettre ces informations. Au contraire, Upsala Nya Tidming
a affirmé à notre journal que AEG avait informé
la centrale nucléaire de Forsmark suite un incident dans
une centrale nucléaire allemande.
Plusieurs réacteurs
suédois et finlandais sont équipés de ces
mêmes générateurs. Berlund n'exclut pas qu'il
s'agisse d'un problème « mondial ». L'agence internationale de l'énergie atomique
AIEA a été informée.
Les exploitants de la centrales, tout comme l'autorité
étatique SKI estiment que l'appréciation de l'expert
en construction de réacteurs est exagérée.
La SKI a classé l'incident provoqué par la perte
de courrant comme « incident sérieux », étape
2 de l'échelle [médiatique] Ines qui en
compte 7. Aucune radioactivité n'a été libérée.
Ole Reistad, directeur de l'institut norvégien de protection
contre les rayonnements ionisants dans le pays voisin, prend cependant
l'incident plus au sérieux que ses collègues suédois.
A Forsmark on est « passé près de la catastrophe
» et près de la défaillance de la dernière
barrière de sécurité, a-t-il déclaré
au TAZ. « une telle chose n'aurait jamais dû se produire.
»