www.amnistia.net, 12 septembre 2006:
Exclusif
En novembre 2005, nous avions rencontré
un officier de la US-Navy qui était en poste à la
base nucléaire américaine de La Maddalena en Sardaigne
(voir notre édition du 15.11.2005).
Au cours de notre long entretien, le militaire nous avait annoncé,
bien avant que cela devienne officiel, le retrait des sous-marins
d'attaque de l'Oncle Sam de l'archipel sarde. Un retrait que devrait
être effectif courant 2007 (voir nos éditions du
25.11.2005 et du 29.05.2006).
L'officier de la Navy nous avait aussi confié une information
bien alarmante. Il nous avait en effet affirmé que les
militaires US effectuaient la vidange de l'eau radioactive
contenue dans les réacteurs des sous-marins. Cette opération
très dangereuse, soumise à des protocoles très
stricts, s'accomplissait avec une nonchalance surréaliste,
par la US-Navy au beau milieu du Parc international des Bouches
de Bonifacio. A la suite de la publication de nos informations,
le député italien (aujourd'hui sénateur)
Mauro Bulgarelli interrogeait publiquement le ministre de la Défense
italien: "Quelles dispositions sont prises pendant cette
opération très délicate?"
L'officier de la US-Navy, qui avait accepté
de nous parler sous couvert de l'anonymat, nous avait également
affirmé que l'eau radioactive était stockée
sur le bateau d'appui, le Emory Land,
en attendant que des bâtiments militaires US, équipés
pour ce type de transport, se chargent ensuite de ramener l'eau
irradiée aux Etats-Unis.
Aujourd'hui, un sous-officier de la Marine militaire italienne,
qui a été en poste pendant deux ans sur l'archipel
sarde dément catégoriquement ces propos.
"C'est de la foutaise", nous dit-il, "les Américains n'ont jamais ramené l'eau radioactive de leurs réacteurs chez eux. Ils l'ont toujours déversée directement en mer: au milieu du Parc marin international!"
"J'ai servi à La Maddalena pendant
deux ans" - nous raconte le militaire italien, qui tout comme
son collègue US, a accepté de nous parler sous couvert
de l'anonymat - "J'ai été en poste sur la base
italienne de Santo Stefano, qui est dans le périmètre
immédiat du quai où se trouvent les sous-marins
US et le navire d'appui logistique
Emory Land. Certains matins, très tôt, le Emory Land,
en compagnie d'un sous-marin nucléaire, quittait l'île.
Ils ne se déplaçaient pas très loin. Le soir,
ils étaient de retour. Tout le monde était au courant.
Les Américains allaient vidanger l'eau du réacteur...
mais, contrairement à ce que vous a affirmé l'officier
de la Navy, l'eau radioactive n'était ni stockée
quelque part, ni ramenée aux Etats-Unis. En deux ans de
service dans l'archipel, je n'ai d'ailleurs jamais ni vu, ni entendu
parler d'un navire qui serait arrivé expressément,
avec pour mission de rapatrier l'eau radioactive des réacteurs
aux Etats-Unis. La vérité est beaucoup plus simple:
l'eau radioactive était tout bonnement déversée
en mer".
Pendant notre entretien, le sous-officier italien était
en compagnie d'un collègue. Un sous-officier, comme
lui, qui acquiesçait silencieux, à chaque affirmation.
"En tant que militaire, je devrais me taire. Mais mon uniforme ne peut pas m'empêcher de faire abstraction du fait que je suis aussi un citoyen. Et, le citoyen vous dit que c'est dégueulasse de balancer de l'eau radioactive en pleine Méditerranée. Et de plus, dans les eaux territoriales d'un pays ami, alors que la US-Navy était notre hôte. C'est une honte. C'est d'autant plus honteux que tout le monde à l'intérieur de la Marine italienne était au courant de telles pratiques. Le déversement de l'eau radioactive des sous-marins US dans le Parc marin international était un secret de Polichinelle! Et pourtant, tout le monde s'est toujours tu. C'est honteux".
En décembre 2003, le député italien Mauro Bulgarelli nous affirmait, sans détours:
"Savez-vous ce que nous a répondu, le commandement du corps militaire italien, quand on s'est inquiété de la façon dont sont stockées les armes atomiques de la US-Navy à La Maddalena? Et quand on s'est inquiété des procédures relatives à l'écoulement des déchets radioactifs? Ils nous ont rétorqué: 'No comment'. C'est une insulte à notre souveraineté nationale!"
En janvier 2004, le laboratoire indépendant français de la CRIIRAD, avait décelé un taux anormalement élevé de thorium 234 dans des algues prélevées à proximité de la base US de la Maddalena (voir notre édition du 14.01.2004). D'où provenait donc ce dérivé de l'uranium 238? A ce jour, la question demeure sans réponse.
Enrico Porsia
Tout le dossier: "Les mystères de La Maddalena: Une base US contre l'Europe"
9 août 2006 - Les
États-Unis auront fermé d'ici au premier semestre
2008 leur base militaire de la Maddalena en Sardaigne (Italie),
port d'attache en Méditerranée pour leurs sous-marins
nucléaires, a annoncé mercredi un porte-parole de
l'exécutif régional de l'île.
«Le ministère italien de la Défense nous a
annoncé aujourd'hui (mercredi) que les États-Unis
quitteraient la base de Maddalena d'ici au 1er semestre 2008»,
a annoncé un porte-parole de la Présidence de la
région, Umberto Cocco.
«Le Département d'État américain a
fait cette annonce il y a quelques jours au ministère»,
a-t-il ajouté.
En novembre 2005, le ministre de la Défense de l'ancien
gouvernement de Silvio Berlusconi, Antonio Martino, avait annoncé
le départ prochain des forces américaines, sans
donner de date précise.
Le ministère de la Défense avait précisé
que les États-Unis avaient pris leur décision «en
fonction de nouvelles exigences géostratégiques
concernant la sécurité en Méditerranée,
différentes d'il y a trente ans».
La flotte américaine utilisait depuis 33 ans l'archipel
de la Maddalena, comme port d'attache en Méditerranée
pour ses sous-marins nucléaires.
La base avait été construite en 1972, en pleine
guerre froide, à la suite d'un accord secret italo-américain.
Quelque 3000 militaires et leurs familles y sont aujourd'hui basés.
La présence américaine sur l'archipel de la Maddalena,
un des plus beaux sites naturels d'Italie à quelques encablures
de la Corse (France), près du détroit de Bonifacio,
suscitait une controverse de plus en plus poussée.
Plusieurs études
ont mis en évidence une pollution de l'eau à l'uranium
et au plutonium aux abords de Santo Stefano, l'îlot où
font escale les sous-marins nucléaires américains.
Le 25 octobre 2003, un sous-marin à propulsion nucléaire
avait heurté un récif dans le détroit de
Bonifacio. L'accident n'avait officiellement pas eu de conséquences
sérieuses sur l'environnement, mais il avait renforcé
l'opposition à la présence de la base, en Corse
comme en Sardaigne.
La région Sardaigne avait organisé sans succès
un référendum pour en demander la fermeture en 1988.
23 novembre 2005 -
L'US Navy va fermer sa base sous-marine située sur une
île au large de la Sardaigne, l'un des deux seuls endroits
au monde, en dehors des Etats-Unis, où pouvaient être
entretenus les sous-marins nucléaires, a annoncé
le ministère italien de la défense.
Un communiqué du ministère italien de la défense
publié le 22 novembre a indiqué que le calendrier
de fermeture serait négocié ultérieurement.
La décision fait partie d'un plan de redéploiement
plus large des forces américaines en Europe, a-t-il ajouté.
La base américaine de soutien de La Maddalena a été
ouverte le 1er janvier 1973, mais les autorités locales
demandaient depuis des années sa fermeture en raison d'inquiétudes
environnementales.
Le groupe écologiste Legambiente avait annoncé l'an
dernier qu'il avait effectué des tests qui révélaient
des niveaux croissants de radiations dans les eaux, dont l'origine
pouvait être remontée jusqu'aux sous-marins. Les
dirigeants locaux ont salué la décision américaine.
"C'est la meilleur nouvelle que nous ayons eu depuis longtemps,"
a déclaré le président de la région
Sardaigne, Renato Soru.
Quelques 1.800 américains travaillent à la base
de La Maddalena, construite sur une petite île au large
de la côte nord-est de la Sardaigne. Les sous-marins utilisent
les installations pour des réparations et aucun n'est basé
là.
Le seul accident connu s'est produit en 2003, lorsque le sous-marin
nucléaire Hartford s'est échoué près
de la base provoquant des dégâts substanciels au
navire. Le commandant et un autre officier supérieur avaient
été relevés de leurs fonctions.
La Sardaigne est célèbre pour ses plages de sable
et son climat ensoleillé, mais les autorités locales
se plaignent que la présence de la base américaine
nuit au développement du tourisme sur l'île.
29/10/2005 - Quelque
400 militants anti-nucléaire et écologistes sardes
et corses ont manifesté samedi à proximité
de la base militaire américaine de l'île de Santo
Stefano, à l'extrême nord de la Sardaigne, pour demander
son démantèlement.
Les manifestants, principalement des militants écologistes,
anti-nucléaire et issus du mouvement pour l'indépendance
de la Sardaigne (IRS), ont rejoint à l'aide de nombreux
zodiacs la petite île de Santo Stefano, dans l'archipel
de la Maddalena, où se trouve la base militaire US, pour
y tenir un rassemblement pacifique.
Ils ont exigé l'abandon d'un projet d'extension de la base
et demandé son démantèlement.
"Nous ne pouvons plus laisser la situation se dégrader,
il y a un risque pour la santé et la sécurité
des populations sardes et corses", a déclaré
à l'agence italienne Ansa, Roland Tafani, représentant
d'une association de défense de l'environnement des Bouches
de Bonifacio (Corse).
En octobre 2003, un sous-marin nucléaire américain
avait "heurté" les fonds marins entre les îles
sardes de la Maddalena, de Caprera et San Stefano.
Selon les militants écologistes, des analyses effectuées
en janvier 2004 par la Commission de recherche et d'information
indépendante sur la radioactivité (CRIIRAD) sur
des algues du secteur de la zone, auraient révélé
des taux cent fois supérieurs en thorium 234, un produit
radioactif.
Lire: A propos de sous-marins nucléaires
Communiqué CRIIRAD 15 janvier 2004: Accident hartford
Les autorités italiennes et/ou américaines doivent publier les résultats du point zéro environnemental et des suivis radio-écologiques.
L'accident survenu le 25 octobre 2003 au sous-marin nucléaire américain le Hartford est, aujourd'hui encore, marqué par l'opacité. Afin d'apporter un premier niveau d'information, l'association corse ABCDE, le WWF Sardaigne et la CRIIRAD ont uni leurs efforts afin de procéder à une première série de contrôles indépendants.
L'accident a été rendu public 18 jours après sa survenue et les prélèvements n'ont pu être effectués dans l'archipel de la Maddalena que les 17 et 18 novembre, soit 23 jours plus tard (et le 9 décembre pour le sud de la Corse : golfes de Sant'Amanza et de Ventilegne). S'agissant d'une étude préliminaire aux moyens limités, les investigations ont été ciblées sur les algues marines. Ces végétaux ont en effet la particularité de concentrer certains radionucléides et permettent de rendre compte d'une contamination sur plusieurs semaines voire plusieurs mois.
* Aucun radionucléide artificiel émetteur gamma n'a été identifié. Un résultat plutôt rassurant même si le nombre d'échantillons analysés ne permet pas de rendre compte de l'état global de l'environnement.
* Par contre, les niveaux de contamination de certains éléments de la chaîne de l'uranium 238 apparaissent anormalement élevés : sur 2 des 6 échantillons d'algues, l'activité en thorium 234, descendant immédiat de l'uranium 238, atteint ainsi 3 900 et 4 700 Bq/kg sec (becquerels par kilo de poids sec) pour des valeurs attendues de l'ordre de quelques dizaines de Bq/kg sec.
Les radionucléides détectés sont d'origine naturelle mais, en l'état du dossier, il est impossible d'affirmer qu'il s'agit d'un phénomène entièrement naturel (concentration sélective de certains radionucléides présents dans le milieu marin) et d'exclure une pollution d'origine anthropique. Pour aller plus loin des investigations complémentaires sont nécessaires, en particulier la réalisation d'analyses par spectrométrie alpha. Elles seront réalisées dès qu'un financement sera trouvé.
Quoiqu'il en soit, afin de lever ces premières interrogations et de répondre aux nombreuses questions qui se posent quant à l'impact de la base de San Stefano, il est indispensable que les autorités italiennes communiquent les résultats de l'étude de point zéro (état des lieux de l'environnement avant son démarrage) et des suivis radiologiques qui permettent de rendre compte de l'impact de son fonctionnement et de la circulation des sous-marins nucléaires.
Tout refus de communication conduirait à penser que ces études indispensables n'ont pas été effectuées ou qu'elles l'ont été, mais qu'elles mettent en évidence une pollution que les autorités militaires américaines et/ou italiennes préfèrent dissimuler. Les impératifs du secret défense ne peuvent, en effet être invoqués, dès lors qu'il s'agit simplement de connaître le niveau de contamination de l'environnement et , en particulier, des éléments de la chaîne alimentaire. En complément des études officielles, et après analyse critique de leur contenu, il sera nécessaire d'effectuer une contre-expertise indépendante permettant de vérifier l'exactitude des résultats officiels et de combler les lacunes qui auraient été identifiées.
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Les prélèvements ont été effectués bénévolement par le WWF Gallura (secteur de la Maddalena), et l'association corse ABCDE (secteur de Bonifacio). Les analyses ont été cofinancées par ABCDE et la CRIIRAD pour montant total de près de 2 000 euros.
* WWF (World Wildlife Fondation Gallura - Sardaigne) : Mme Paola BUIONI au 00 39 07 89 75 57 88 ;
* ABCDE (Association Bonifacienne Comprendre et Défendre l'Environnement) : Mme Vincente CUCCHI au 04 95 73 10 80.
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Rapport d'étude, carte de localisation des stations de prélèvement, tableau de résultats et photos des échantillons à partir de demain 14 h sur le site de la CRIIRAD
CRIIRAD 471, av. Victor Hugo 26 000 Valence
www.CRIIRAD.org
contact@criirad.com 04.75.41.82.50
/ fax 04.75.81.26.48
Voir les questions et demandes
de la
CRIIRAD:
Demande de renseignement à Monsieur Howard LEACH
- Ambassade des Etats-Unis (format word ou format pdf)
Demande de précisions à Mme Roselyne BACHELOT-NARQUIN
AMNISTIA.NET 26/11/03
Lundi 24 novembre, trois députés
italiens se sont rendus à la base de sous-marins atomiques
de l'US Navy de La Maddalena , en Sardaigne. Cette visite des
parlementaires Paolo Cento et Mauro Bulgarelli (Verts) et Elettra
Deiana (Rifondazione Comunista) fait suite à l'accident
survenu au sous-marin nucléaire, le USS Hartford, à
la fin du mois d'octobre. Un accident qui inquiète les
habitants de Sardaigne et de Corse (voir notre édition
du 19/11/2003) .
"Nous demandons l'ouverture d'une commission d'enquête
parlementaire sur les bases américaines en Italie",
nous déclare Elettra Deiana, "il est inadmissible
que notre pays soit obligé d'être lié aux
Etats-Unis à travers des traités secrets qui datent
de la guerre froide et dont le parlement ignore les contenus".
- "Cela est-il légal?" lui demandons-nous - "Le
Gouvernement fait valoir que les traités qui régissent
les bases américaines sur la Péninsule sont des
traités bilatéraux prévus entre de pays membres
de l'OTAN".
"Il ne s'agit pas d'une alliance paritaire, mais d'une condition
où l'Italie se trouve dans la position d'un vassal. Les
populations qui vivent à côté des bases américaines
disposant d'armes nucléaires sont contraintes de subir
un risque pour leur santé. C'est insultant pour un pays
comme l'Italie qui a dit non au nucléaire", affirme
de son côté Mauro Bulgarelli lors de la conférence
de presse donnée par les trois députés à
la suite de leur visite à la base de La Maddalena.
En Sardaigne, comme en Corse, les populations attendent avec impatience
les résultats des analyses effectuées après
l'accident du sous-marin Hartford.
Deux organismes ont reçu les échantillons afin des
procéder aux examens.
L'Institut de radioscopie et de sûreté nucléaire,
qui intervient a la demande de l'Office de l'environnement de
Corse et la CRIIRAD , la Commission de recherche et d'information
indépendante sur la radioactivité, alertée,
elle, par l'Association de défense de l'environnement de
Bonifacio, ABCDE.
Il est intéressant de remarquer que la CRIIRAD , organisme
reconnu et réputé, ignorait jusqu'à ces dernières
semaines, la présence d'une base nucléaire militaire
américaine à l'extremité nord-est de la Sardaigne.
La CRIIRAD vient d'écrire à l'ambassadeur américain
à Paris afin d'obtenir des renseignements exacts. Les résultats
des analyses devraient être connus dans quelques jours.
"Quand nous nous sommes rendus à la base américaine",
nous raconte Elettra Deiana, "nous avons posé des
questions précises: Quand est-ce qu'a eu lieu exactement
l'accident du sous-marin? Réponse: le 25 octobre. Les autorités
militaires américaines nous ont aussi affirmé qu'elles
ont immédiatement alerté l'état-major italien.
Et que c'est à ce dernier de décider si alerter,
ou pas, les autorités civiles. Nous avons aussi posé
la question sur les dégâts exacts subis par le Hartford.
- Une simple égratignure et un problème de gouvernail.
Rien d'alarmant - nous indique-t-on. - Mais alors, pour quelle
raison avez-vous mis fin aux fonctions du commandant de la base?
- nous avons encore demandé", souligne la députée
communiste. "Et là... nous n'avons pas eu de réponse.
Tout comme nous avons eu des réponses ridicules concernant
le projet d'agrandissement de la base".
"Corse Matin, dans son édition de mardi 25 novembre,
reporte le fait que les habitants de La Maddalena ont entendu
deux nouvelles explosions en provenance de la base US. Ces faits
se seraient produits mercredi 19 novembre à 20 heures 15.
Selon le quotidien corse ces explosions auraient été
suivies d'une extension des feux sur le navire Emory Land, le
bâteau d'appui aux sous-marins. Quand vous vous êtes
rendue sur place, avez-vous remarqué quelque chose qui
pourrait confirmer ces informations?"
- "J'ai entendu parler de ces nouvelles explosions",
nous répond Elettra Deiana, "mais lors de la visite
à la base je n'ai rien vu qui puisse laisser penser à
la trace d'un accident... Il faut aussi bien préciser que
nous avons visité seulement une partie des lieux. On a
vu ce qu'ils ont bien voulu nous montrer".
- "Avez-vous pu voir le navire logistique Emory Land?"
- "Nous nous sommes même rendus à son bord.
Apparemment il n'y a aucune trace d'incendie, mais... c'est difficile
d'inspecter un immense bâtiment militaire sur lequel vivent
et travaillent en permanence 1087 personnes.
C'est une base flottante, qui ressemble à un énorme
atelier avec beaucoup d'ingénieurs. Le Emory Land est ancré
dans la baie de Santo Stefano depuis 1972. A quoi sert-il, au
juste? Je ne le sais toujours pas.
Tout comme je n'ai pas encore compris à quoi sert ce dépôt,
caché sous la roche, dans un dédale de tunnels.
Il mesure huit kilomètres de long et, théoriquement,
ne fait pas partie de la base militaire US. Il est dans la zone
militaire italienne. Pourtant, il a été construit
avec des fonds de l'OTAN. Quand nous avons demandé à
le visiter, le commandant des troupes italiennes en poste sur
l'île nous a fait part de son opposition.
Alors, nous lui avons fait présent que, en Italie, un député
a le droit de se rendre sur n'importe quelle base militaire du
pays, et là il nous a sorti une lettre qui lui ordonnait
de nous conduire uniquement dans certaines zones du dépôt
souterrain. Nous nous sommes donc trouvés devant un militaire
italien qui avait reçu un ordre illégal.
En insistant, nous avons pu visiter une petite partie de ce dépôt.
On nous a déclaré qu'il n'abrite qu'une petite réserve
d'armes conventionnelles. Des mines, des torpilles... Mais mois
je m'interroge sur la fonction réelle de ce dépôt.
Il est énorme. Il y a un rapport disproportionné
entre ses dimensions et le peu de matériel qui, selon les
dires des militaires, y serait entreposé.
Pourquoi creuser et aménager 8 kilomètres de tunnels
sous la roche s'ils ne servent à stocker que quelques banales
torpilles? Or, ce dépôt, est contigu à la
base US. Est-il possible que ce dépôt puisse être
utilisé pour stocker les déchets radioactifs des
propulseurs nucléaires des sous-marins? Nous nous posons
la question".
A la fin de cette semaine, une question devrait trouver enfin
une réponse.
Les résultats des premières analyses de l'eau prélevée
dans les Bouches de Bonifacio seront rendus publics.
Enrico Porsia
Le Monde du 26/11/03:
Après un incident dans les bouches de Bonifacio, l'île attend le résultat d'analyses en fin de semaine
La tension, mais non toutes les inquiétudes, est retombée le 18 novembre à la lecture de l'unique communiqué officiel consacré par les autorités françaises à l'"affaire" du sous-marin nucléaire américain. Cet incident, "sans aucune conséquence pour les personnes, l'environnement et le système de propulsion nucléaire", selon Kate Muller, porte-parole de la 6e flotte américaine, citée par le quotidien Corse-Matin, vient de défrayer la chronique pendant deux bonnes semaines.
L'histoire remonte au 25 octobre. Ce jour-là, à 12 h 40, le sous-marin à propulsion nucléaire USS-Hartford quitte la baie de Santo Stefano, au cur de l'archipel de la Maddalena, au nord-est de la Sardaigne. "Pendant une navigation en surface par faibles fonds dans les eaux territoriales italiennes, à trente kilomètres au sud de Bonifacio, indiquera le communiqué français, le sous-marin heurtait brièvement le fond. De retour au port, il était inspecté par les plongeurs qui identifièrent des avaries au gouvernail et des éraflures sur la coque. L'étanchéité du navire et le réacteur n'ont pas été affectés par l'incident. Il n'y a eu aucun déversement en mer de produit polluant."
DES RIVERAINS SENSIBILISÉS
Réparé à Santo Stefano, le sous-marin a immédiatement repris son programme de navigation, tandis que deux officiers supérieurs étaient relevés de leur commandement. Enfin, toujours selon le communiqué, "les autorités italiennes (...) n'ont pas informé les autorités françaises de la nécessité d'investigations complémentaires (...). Les procédures de coopération en matière de lutte contre la pollution maritime (...) n'ont donc pas eu à être activées".
Un incident jugé banal qui aurait été grossi par les médias de Sardaigne et de Corse ? C'est apparemment le sentiment du commandement de la 6e flotte américaine basée à Naples, de la préfecture maritime de Toulon et des autorités des deux îles. Mais les riverains des bouches de Bonifacio, à 17 kilomètres seulement de Santa Teresa di Gallura, sont très sensibles aux risques de pollution. Depuis 1992, les pétroliers battant pavillons français et italien doivent se conformer à l'interdiction de traverser le détroit, il n'en est pas de même pour tous les autres, s'agissant d'eaux internationales, malgré plusieurs démarches de la France et de l'Italie.
Par ailleurs, la base américaine créée en 1972 sur l'îlot de Santo Stefano, qui abriterait 2 500 hommes, n'est pas acceptée par les écologistes sardes et corses. L'incident du sous-marin a ravivé la protestation, et les contestataires ont souligné que cette base n'a plus sa place depuis la création du parc marin international des bouches de Bonifacio en 1998.
Le maire de Bonifacio, Ati Lantieri (UMP), et le maire de Maddalena, Rosana Guidice, ont, en tout état de cause, regretté de n'avoir pas été informés. Et l'Office de l'environnement de la Corse que préside Jérôme Polverini (UMP) a décidé le 17 novembre de confier à "l'Institut français de radioprotection et de sûreté nucléaire une campagne de mesure de la variation de la radioactivité dans le périmètre du parc international". Les résultats des analyses, qui seraient négatifs, devraient être connus à la fin de cette semaine.
Paul Silvani
24/11/03 - L'Institut
de radioprotection et de sûreté nucléaire
(IRSN) rendra public, en fin de semaine, les résultats
d'une étude sur la radioactivité dans les Bouches
de Bonifacio (Corse-du-Sud), un mois après qu'un sous-marin
américain à propulsion nucléaire eut heurté
les fonds marins entre Sardaigne et Corse, a-t-on appris lundi
auprès de cet organisme.
Selon les autorités, le submersible de l'US Navy avait
"brièvement heurté" le fond de la mer,
le 25 octobre, entre les îles sardes de la Maddalena, de
Caprera et de San Stefano, à une trentaine de kilomètres
au sud de Bonifacio, mais l'accident n'avait été
annoncé publiquement que le 12 novembre.
L'office de l'environnement de la Corse a commandé "une
campagne d'analyses de la radioactivité" dans le périmètre
de la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio. Il espère
que les résultats des premières analyses "seront
négatifs et que les populations concernées seront
ainsi rassurées", s'est borné à indiquer
lundi son président, Jérôme Polverini.
Deux officiers supérieurs de l'US-Navy avaient été
relevés de leur commandement après l'accident. Une
porte-parole de la sixième flotte américaine avait
assuré que le gouvernail et la partie inférieure
du submersible avaient subi des dégâts, mais qu'il
n'y a jamais eu "de danger pour personne ou pour l'environnement".
"L'étanchéité du navire et le réacteur
n'ont pas été affectés, il n'y a eu aucun
déversement en mer de produit polluant", avaient précisé
la préfecture maritime de la Méditerranée
et la préfecture de Corse dans un communiqué le
17 novembre.