L'affaire Saint-Aubin !
(extrait du
CRI du RAD, n°12-13, automne 90 + articles de presse)

Le jeudi 20 septembre 1990, "Le Parisien" titre, dans son édition nationale : "Décharge radioactive de l'Essonne : les témoignages qui brisent le mur du silence ". L'article fait état de nombreuses anomalies concernant la décharge radioactive de Saint-Aubin, dans l'Essonne.

Le même jour, des journalistes prélèvent un échantillon de sol sur le site de la décharge et l'adressent au laboratoire de la CRIIRAD pour analyse en spectrométrie gamma.



L'analyse est effectuée le lendemain
et les résultats transmis le jour-même à la rédaction du Parisien. L'analyse révèle la présence de six radioéléments artificiels émetteurs béta et d'un radioélément artificiel émetteur alpha, l'américium 241.

Ces résultats attestent la présence de déchets provenant de combustibles nucléaires irradiés.

 

Le 24 septembre 1990, "Le Parisien" publie l'intégralité des analyses de la CRIIRAD et titre Décharge radioactive de l'Essonne: après les soupçons, les preuves ".

Ce même jour, parvient à la CRIIRAD, un document émanant du CEA et présentant le résultat des contrôles effectués sur le site par cet organisme. Curieusement, les mesures sont très récentes (septembre 90), certains tableaux sont même manuscrits (voir ci-contre). Quoi qu'il en soit, malgré ces signes de précipitation, ces résultats confirment la présence, en d'autres points du site, des radioéléments identifiés par notre laboratoire: césium 137, europium 152 et 154, baryum 133, et américium 241. Ce document fait également état d'un niveau de césium 137 de 6 020 Bq/kg, un niveau voisin de celui que nous avions détecté (7 962 Bq/kg).

 

Vous avez dit "TROMPERIES" ?

Le 25 septembre 1990, la CRIIRAD envoie au laboratoire de l'Université de Brême, en Allemagne, un échantillon de la terre prélevée à Saint-Aubin. La présence d'américium 241 laisse supposer une contamination en plutonium et le laboratoire de Brême est spécialisé dans ce genre de mesures.

Le même jour, parvient à la CRIIRAD un document daté du 21 septembre 1990, et signé du Professeur Pellerin, directeur du SCPRI. Concernant le sol de la décharge, le SCPRI affirme que le CEA lui a transmis un "état de la situation en 1972" établissant :
- que la radioactivité maximale du site est inférieure à 3 000 Bq/kg pour le "césium radioactif",
- qu'il n'y a dans le sol du site "ni alpha ni béta".
Notons pour l'anecdote que le césium est un émetteur béta.

Ce bilan, établi par le CEA et cautionné par le SCPRI, est en complète contradiction :
1) avec les analyses de la CRIIRAD.
2) avec les résultats communiqués le même jour par le CEA.

Dernier rebondissement en fin de journée : dans une dépêche AFP, le Professeur Pellerin met en cause les mesures de la CRIIRAD, mesures qu'il qualifie de "tromperies"(voir la copie de la dépèche AFP à la fin du dossier CRIIRAD). Il affirme également que la CRIIRAD n'a pas la capacité de mesurer les radioéléments qu'elle dit avoir identifiés dans l'échantillon de sol que lui a confié "Le Parisien".

Suite à ces déclarations diffamatoires, le 10 octobre 1990, la CRIIRAD dépose plainte contre X avec constitution de partie civile, auprès du Tribunal de Grande Instance de Paris.

 

Le Parisien, 25 septembre 1990:
Décharge radioactive : le CEA avoue

 

Du PLUTONIUM dans le SOL !

Le 18 octobre 1990, le laboratoire de Brême, communique ses résultats : l'échantillon contient 2 153 Bq/Kg sec de plutonium 239+240, et 98 Bq/kg de plutonium 238.

Les résultats sont publiés le mercredi 24 octobre dans le Parisien qui titre
"Du plutonium dans la décharge de Saint-Aubin." L'information est reprise par les différents média.

Sollicité par les journalistes, le CEA invoque une limite autorisée de 100 000 Bq/kg, le SCPRI défend pour sa part un seuil de 370 000 Bq/kg.

Dans l'après midi, en réponse à Monsieur P. Mandon, député de l'Essonne, le ministre de l'Environnement et des Risques Majeurs parle de vérifications, de sanctions éventuelles..., et demande au CEA de fermer ses grillages.

 

Le jeudi 25 octobre, lors de sa conférence de presse, la CRIIRAD dénonce les dissimulations du CEA, l'utilisation erronée de la loi par les services responsables et demande que les graves manquements constatés soient sanctionnés. Cette demande sera réitérée le lendemain dans une lettre ouverte au Premier Ministre.

 

Le Parisien, 25 octobre 1990:
Plutonium : Lalonde exige toute la lumière



Libération, 25 octobre 1990:
Une décharge nucléaire polluée au plutonium

 

Ouest France, 25 octobre 1990:
Du plutonium dans la terre de Saclay

 

La Croix 25 octobre 1990:
Du plutonium dans la décharge de Saint-Aubin

 

Le Monde, 25 octobre 1990:
La polémique sur les déchets nucléaires s'amplifie

 


Le vendredi après-midi, les plus hauts représentants du CEA montent au créneau : M. Philippe Rouvillois, administrateur général du CEA, M. Jean Teillac, Haut Commissaire du CEA et M. Robert Lallement, inspecteur général du CEA, reconnaissent certains "problèmes de transparence dans les procédures" mais réaffirment qu'il n'y a aucun danger. Gage des bonnes dispositions du CEA, M. Rouvillois distribue une note concernant des sites de dépôts de substances radioactives (scoop un peu forcé puisque "Libération" en avait, la veille, révélé la teneur).

Quoiqu'il en soit, le CEA annonce qu'une cartographie de la radioactivité du site est en cours: 20 000 points doivent être évalués.

 

Libération, 26 octobre 1990:
Fuites autour des centres de stockage des déchets nucléaires

"Après la découverte sur deux sites de l'Essonne, de traces de contamination, notamment par le plutonium, un rapport confidentiel, commandé par le ministère de l'Industrie, dresse une liste des points noirs dans le stockage des produits radioactifs."


Coup de théâtre le lendemain matin : le directeur du CEA et le Maire de Saint-Aubin ont convié la population à une visite guidée de la décharge. Les démarches de la CRIIRAD auprès de la Préfecture de l'Essonne et des Verts-Ile de France auprès du Premier Ministre sont demeurées vaines.

 

Le Parisien, 27-28 octobre 1990:
Enfin, le CEA avoue : "On a caché le plutonium"

 

Le Monde, 28-29 octobre 1990:
L'autocritique du patron du CEA

 

Mardi 30 octobre : dans le cadre des auditions sur le stockage en couche géologique des déchets à vie longue, Michèle Rivasi expose à M. Bataille, responsable de ce dossier à l'Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques, les défauts relevés à Saint-Aubin et les questions qu'ils soulèvent au niveau plus général de la gestion des déchets.

 

TOUCHE PAS A MON SITE !

Mardi 6 novembre : le CEA déclare, dans un communiqué officiel, que le quadrillage du terrain entrepris, le 25 novembre 1990, a fait apparaître "une douzaine de points, présentant une radioactivité supérieure au "bruit de fond" du reste du terrain..." ajoutant que "ces points se trouvent répartis à différents endroits du site, plus ou moins éloignés de l'aire où ont été entreposés des fûts de déchets jusqu'aux années 1970. Une campagne de prélèvements est annoncée pour la semaine suivante.



Revirement le mercredi 7 novembre :
alors que le CEA a affirmé que personne ne toucherait au site avant la campagne de prélèvements, des ouvriers sont surpris alors qu'ils viennent de retirer de la terre à l'aide d'une pelleteuse. Des témoins oculaires déclarent : "la décharge n'est plus la même qu'en septembre".



Le Nouvel Obs, 8-14 novembre 1990:
Des becquerels à la pelle

 

Vendredi 9 novembre : la CRIIRAD intervient officiellement auprès de la Préfecture de l'Essonne pour demander un réexamen du statut de la décharge.

 

Le Parisien, 9 novembre 1990:
Les trous dans la décharge ? Pour enterrer une dalle... radioactive !


Le Point, 12 novembre 1990:
Empoisonnants déchets


Mardi 13 novembre : M. Delpeyroux a été démis de ses fonctions de directeur du CEN de Saclay. " Ce remplacement inattendu est la conséquence des négligences du Centre de Saclay dans la gestion du site de Saint-Aubin ". Le Monde du 14/11/90.



Mercredi 14 novembre :
La Préfecture de l'Essonne met en place une Commission qui doit statuer sur les dangers liés à la décharge. La CRIIRAD est expressément invitée.



Jeudi 15 novembre :
prélèvements effectués sous la responsabilité du CEA, orchestrés par le CEA, avec des laboratoires désignés par le CEA, après étude (et nettoyage) préalable du CEA.



Vendredi 16 novembre :
"Le CEA révise ses explications sur l'origine de la pollution radioactive" titre Le Monde. " Personne, à la direction du CEA, ne sait précisément d'où vient cette radioactivité. ", peut-on lire dans le Figaro.

 

Le Parisien, 16 novembre 1990:
Le C.E.A. à la chasse au plutonium sur la décharge radioactive


Le Parisien, 17-18 novembre 1990:
Plutonium: les ingénieurs savaient depuis vingt ans !

 

Libération, 30 novembre 1990:
Saint-Aubin: la radioactivité était signalée dès 1974

 

Le Monde, 1 décembre 1990:
Le CEA réorganise ses services de protection contre les rayonnements

 

Le Parisien, 20 décembre 1990:
Saint-Aubin: On va chercher la vérité à 25 mètres sous terre

 

CEA, 6 mars 1991:
Résultats des analyses sur la "déposante" de Saint-Aubin


Le Parisien, 7 mars 1991:
Le rapport sur Saint-Aubin n'enterre pas la polémique