C'est ce que Jean-Yves Nau (expert sur les
problèmes de la contamination des transfusions françaises
pour le sida) nous explique dans un article du Monde du
24 janvier 2006.
Les résultats expérimentaux obtenus autour de certains
centres nucléaires concernant les leucémies sont
assez curieux tels qu'ils nous sont présentés. Les
travaux épidémiologiques ont été effectués
par l'INSERM (dont la servitude vis-à-vis des autorités
a été évidente dans bien des cas - l'amiante,
le sida).
Voici ce qui paraît bizarre dans cette étude rapportée
par Le Monde. Le journaliste mentionne que sur les 29 sites
examinés seuls 2 montrent des excès de leucémie
(Chinon et Civaux) et que pour les autres il y a un déficit
de cas. Comment expliquer cette curiosité : des sites nucléaires
sont favorables à une diminution des leucémies mais
deux seulement montrent un excès. Comment ramener ces surprises
dans le domaine scientifique ? Les experts de l'INSERM et de l'IRSN
(des vertueux de l'expertise !) ont fait appel à un «
correcteur dit de Bonferroni » qui permet de tout ramener
dans le normal. Ce fameux correcteur de Bonferroni date de 1936
et le journaliste du Monde ne donne aucune explication
le concernant. Référons-nous aux données
de ce scientifique des années 30 (ce que ne semble pas
avoir fait Jean-Yves Nau). Lorsque dans un milieu homogène
on tire des cohortes au hasard et qu'on trouve des résultats
hors des moyennes attendues en plus ou en moins, il s'agit de
voir, suite à des calculs probabilistes, si ces résultats
sont ou ne sont pas significatifs. Mais il s'agit de tirages dans
des domaines homogènes où les probabilités
des événements sont identiques partout. En gros
on est dans les statistiques des probabilités de la théorie
des jeux.
Il est évident qu'en ce qui concerne la fréquence
des leucémies il est absurde de prendre comme postulat
que la totalité de la France est homogène et que
les sites nucléaires pourraient ne pas être conformes
à la moyenne nationale.
Appliquer le « correcteur de Bonferroni » aux études
épidémiologiques permet de remettre dans la normale
ce qui est inférieur à la moyenne nationale (une
curiosité) ou ce qui est supérieur à la moyenne
à cause de la présence d'une industrie rejetant
des radioéléments liquides et gazeux leucémogènes.
Si l'INSERM adopte a priori le « correcteur de Bonferroni
» qui permet de remettre dans la normale toute analyse particulière
on ne voit pas pourquoi il est nécessaire de faire les
études épidémiologiques que cet institut
effectue puisque avec ce fameux « correcteur » quoi
qu'on observe on peut toujours se ramener à être
dans la normale.
Monsieur Jean-Yves Nau du Monde qui s'était fait
remarquer lors des problèmes de sida liés aux transfusions
par sang contaminé, s'est-il renseigné au sujet
de la validation scientifique de ce fameux « correcteur
de Bonferroni » dont on n'avait jamais entendu parler dans
les études épidémiologiques avant son article
?
La science au service de la sécurité mentale des
populations avec la complicité des responsables médiatiques
Le mot « statistique » d'après le Petit
Robert viendrait du mot latin statisticus, « relatif
à l'Etat ». La première signification
donnée dans le dictionnaire est : « Étude
méthodique des faits sociaux par des procédés
numériques (...) destinée à renseigner et
aider les gouvernements (souligné par moi) ».
Aider le gouvernement à gérer les problèmes
sociaux afin d'éviter les turbulences est bien la préoccupation
majeure des statisticiens.
R. B. mai 2006