Der Spiegel, 16/10/89:
Le gouvernement de la RFA veut prolonger le traité nucléaire avec le Brésil : il vient à échéance le 18 novembre, mais doit être automatiquement prolongé de cinq ans s'il n'est expressément résilié. Or, c'est précisément ce qu'ont demandé en septembre le SPD et les Verts. Le gouvernement fédéral veut s'assurer que les Brésiliens utiliseront la technique ainsi transférée qu'à des fins strictement pacifiques, mais il y a de plus en plus d'indices qui montrent que le Brésil ne s'en tiendra sans doute pas à une telle clause.
Le traité de 1975 prévoyait :
- réalisation de huit réacteurs nucléaires
(de 1300 mW)
- prospection, extraction et réalisation commerciale de
l'uranium naturel situé au Brésil
- construction d'une usine pour les "parties lourdes"
d'un réacteur (réservoirs à pression, générateurs
de vapeur)
- la construction d'un établissement d'enrichissement de
l'uranium
- la construction d'un site de retraitement pilote
Ce traité devait fournir à l'industrie
allemande 12 milliards de Deutsch-marks (au cours de 1975). Un
document administratif adressé à Riesenhuber (ministre
de la recherche) et daté du 20 mai 1988 expliquait qu'il
n'était presque rien resté du projet initial.
Parmi les réacteurs prévus, seul Angra a commencé
à être construit (son achèvement attendra
au moins 1994). Angra III n'est encore qu'un projet. Angra I, le seul réacteur fonctionnant
au Brésil, a été construit par l'entreprise
américaine Westinghouse.
Le reste du programme est arrêté. Il n'y a plus de
demande suffisante pour l'uranium enrichi. L'usine de fabrication
des gros composants ne fonctionne qu'à 40 % de ce qui était
prévu. L'usine d'enrichissement a fonctionné, mais
se trouve à l'arrêt par suite du manque de commande.
Le projet d'une usine de retraitement est remis à plus
tard sans plus de précision.
Il ne s'agit pas seulement d'un désastre industriel, mais
de la volonté du Brésil de n'utiliser l'assistance
allemande que pour des projets non militaires. Le Brésil
a refusé de signer le traité de non-prolifération.
S'il a signé un pacte de non-nucléarisation concernant
toute l'Amérique latine, il ne l'a pas encore ratifié.
Le doute existait déjà en 1975. Le ministre de la
marine, Fonseca, a expliqué publiquement en 1987 que le
traité commercial avec l'Allemagne n'avait qu'un but :
acquérir la technique permettant de construire la bombe
atomique ("Le Brésil doit tester une bombe atomique").
En 1987, on avait appris que le Brésil maîtrisait
la technique de centrifugation (une technique clé pour
la production d'armes atomiques). Il existait de fait un programme
nucléaire parallèle au programme civil prévu
avec la collaboration allemande (les autorités brésiliennes
veulent tenir ce programme parallèle à l'abri de
tout contrôle international).
Le 31 août 1988, le Président Sarney a signé
un décret stipulant une nouvelle organisation de l'industrie
atomique brésilienne, l'usine d'enrichissement passant
dans le secteur étatique, et devenant très difficile
à contrôler par les experts internationaux. Les Allemands
ont réussi à retarder cette mesure, mais l'usine
est montée à 99 %, et les essais entamés :
l'usine peut très certainement fonctionner sans eux.