La protection des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants ne doit pas passer sous la tutelle, même partielle, du ministère de l'INDUSTRIE.
La protection des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants ne doit pas passer sous la tutelle, même partielle, du ministère de l'INDUSTRIE.
Le gouvernement a présenté hier, au Conseil d'Etat, le projet de création d'une Direction Générale de la Sûreté Nucléaire et de la Radioprotection (DGSNR) et d'un Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN), rassemblant l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire (IPSN) et l'Office de Protection contre les Rayonnements Ionisants (OPRI).
DGSNR : le ministère de l'Industrie s'empare de la radioprotection
La radioprotection, c'est-à-dire la protection contre les dangers des rayonnements ionisants - qu'ils soient générés par l'industrie nucléaire, la radioactivité naturelle ou l'exposition médicale...- était placée, jusqu'à présent, sous la tutelle du ministère de la Santé, pour la protection du public, et du ministère du Travail, pour le contrôle de l'exposition professionnelle.
La DGSNR qui traitera désormais les dossiers de radioprotection fonctionnera sous une triple tutelle : celle de l'Environnement, celle de la Santé mais aussi celle du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie.
Le ministère du Travail est parvenu à conserver, de haute lutte, la protection des travailleurs mais le ministère de la Santé a dû abandonner celle du public. Il n'aura, dans le nouveau dispositif, qu'une tutelle partagée avec l'Environnement et, surtout, avec le très puissant ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Etant donné le poids respectif de ces ministères, il est difficile d'être optimiste sur le devenir de la radioprotection. Une suspicion légitime pèsera sur toutes les décisions que la DGSNR sera amenée à prendre car les conflits d'intérêt entre le développement du nucléaire et la protection du public sont vraiment trop importants. Un élément significatif : le seul domaine laissé à l'entière appréciation du ministère de la Santé est le problème du radon, un gaz radioactif naturel. L'Industrie a, par contre, obtenu un droit d'ingérence sur tous les dossiers de santé impliquant le fonctionnement de l'industrie nucléaire, en situation normale (gestion des déchets, des rejets de polluants dans l'environnement...) comme en situation accidentelle (niveau de contamination « acceptable » des aliments, indemnisation des malades, des producteurs, etc).
Faute de moyens, de volonté politique
et du fait d'un passif jamais apuré, la radioprotection
n'a jamais été en France, pays pourtant fortement
nucléarisé (ou sans doute à cause de cela),
une priorité et a même longtemps fonctionné
en marge des prescriptions réglementaires. La création
d'une structure de radioprotection à la hauteur des enjeux
(et notamment des questions posées par la catastrophe de
Tchernobyl) nécessitait une réforme de grande ampleur,
avec le développement, au sein du ministère de la
Santé, d'un bureau de radioprotection doté de moyens
humains et de capacités d'expertise appropriés.
Cette structure aurait dû fonctionner en liaison avec le
ministère du Travail, pour ce qui concerne les travailleurs,
et le ministère de l'Environnement, pour le contrôle
des pollutions.
IRSN : une vocation industrielle et commerciale pour les experts en santé publique
Le statut choisi pour l'Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, qui doit devenir l'expert attitré de la DGSNR, est un EPIC, c'est-à-dire un Etablissement Public à vocation Industrielle et Commerciale. Travailler dans l'industrie ou le commerce est parfaitement honorable mais est-ce dans cette logique que doivent s'inscrire les missions d'expertise en santé publique ?
La CRIIRAD a pointé du doigt, à de nombreuses reprises, les dysfonctionnements induits par la confusion des genres. L'IPSN intervient ainsi, tantôt comme expert d'Etat sur des dossiers réglementaires et décisions de radioprotection, tantôt comme prestataire de service pour les exploitants du nucléaire. Dans la gestion des dossiers d'autorisation de rejets radioactifs des centrales nucléaires, l'IPSN rédige, financé par EDF, le dossier d'impact radiologique, puis procède à son expertise, dans le cadre d'une procédure réglementaire, sur financement de la DSIN !
Tout aussi inquiétant, le placement de l'IRSN sous la quintuple tutelle des ministère de l'Industrie, de la Recherche, de l'Environnement, de la Santé et de la Défense. Là encore, le ministère de la Santé perd la tutelle qu'il exerçait spécifiquement sur l'OPRI (conjointement avec le ministère du Travail pour l'exposition professionnelle). Comment construire, dans un tel contexte, une véritable culture de santé publique ?
L'effacement programmé du ministère en charge de la santé des populations pose, en outre, avec acuité le problème de la représentation de la France dans les instances internationales où s'élaborent les normes de radioprotection. Ces décisions qui conditionnent notre niveau de protection (ou plutôt le niveau de risque jugé acceptable) sont prises par des experts qui ne paraissent avoir de compte à rendre à personne et certainement pas au ministre de la Santé. La France est ainsi représentée à la Commission Internationale de Protection Radiologique (au comité 4) par un expert de l'IPSN. Cette instance a décidé qu'en cas d'accident, les familles habitant sur des zones contaminées ne seront pas relogées tant que la dose ne dépassera pas 15 à 20 mSv/an alors que le risque maximum tolérable en situation normale est de 1 mSv/an. Si l'on considère, par exemple, les 2 millions de Bélarus vivant en zone contaminée par les retombées de Tchernobyl, ce risque « acceptable » correspond à environ 100 000 morts par cancer radio-induit. Des niveaux de risque que les citoyens trouveraient inacceptables ... si toutefois on les en informait.
Appels à mobilisation
Rien n'est jamais définitif. Si les citoyens sont décidés à se battre pour la prise en compte de leur santé, le rapport de force peut s'inverser. La CRIIRAD lance ce jour :
1. un appel à mobilisation de toutes
les associations qui uvrent en matière de protection de
la santé, de l'environnement ou des droits des consommateurs.
Tous ces secteurs sont concernés car les domaines qui intéressent
la radioprotection sont multiples : quantité de polluants
qu'une installation nucléaire est autorisée à
rejeter dans l'environnement ; niveau de contamination toléré
dans les aliments en cas d'accident ; obligation (ou pas) d'étiqueter
les produits contenant des substances radioactives; niveau de
contamination admissible pour la remise d'un site pollué
dans le domaine public ; fixation des normes et donc du niveau
de risque cancérigène et génétique
que l'on juge « acceptable » , décision de
protéger les enfants moins, de la même façon
ou plus que les adultes, etc. 2. une pétition nationale
demandant le maintien de la protection sanitaire des personnes
sous la seule responsabilité du ministère de la
Santé ainsi que des garanties sur la consultation régulière
des citoyens sur toutes les décisions qui concernent leur
protection contre les rayonnements ionisants, en particulier en
cas d'accident. 3. un texte destiné aux candidats aux élections
présidentielles et législatives, leur demandant
de s'engager à placer la radioprotection hors de toute
emprise du lobby nucléaire et à mettre en place
un système de consultation du public sur toutes les décisions
de radioprotection.
1986 - 2002 : l'inégal combat entre la Santé et l'Industrie.
Grâce aux perquisitions lancées par Madame le Juge Berthella-Geffroy, la CRIIRAD a pu obtenir le compte-rendu manuscrit d'une réunion de crise qui s'est tenue au ministère de l'Intérieur, le 16 mai 1986, en pleine gestion des retombées de l'accident de Tchernobyl. Ce document indique que le ministre de l'Industrie, Monsieur MADELIN, est l'autorité politique qui décide de l'information diffusée aux français et que le ministère de l'Industrie élabore les instructions qui sont ensuite transmises au secrétaire d'Etat à la Santé ! ! ! Chacun a pu constater les conséquences de ces choix : la « qualité » des informations qui ont alors été diffusées et « l'intérêt » porté à la protection de la population, en particulier aux enfants. Le projet de placement de la radioprotection sous tutelle du puissant ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie vient ainsi faire écho, plus de 15 ans après les faits, aux graves dysfonctionnements de 1986. A l'heure où une plainte est déposée en justice, où des malades s'interrogent sur la responsabilité de Tchernobyl dans l'origine de leur pathologie, où l'on reconnaît enfin les véritables niveaux de contamination et l'importance des doses reçues par les groupes critiques, les Français méritent mieux que le projet qui est soumis au Conseil d'Etat.
Alors qu'au niveau international, il semble aujourd'hui possible d'envisager une rupture du traité qui lie, depuis 1959, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à l'Agence Internationale de l'Energie Nucléaire (AIEA), organisme statutairement pro-nucléaire, il est regrettable que la France s'engage dans un processus de subordination de la protection sanitaire des Français aux intérêts de l'industrie nucléaire.
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Date de lancement : 6 février 2002 Délais : au plus tôt ( et avant juin 2002)
PETITION
Je demande que la protection de la population contre les dangers des rayonnements ionisants soit placée sous la responsabilité du seul ministère de la SANTE et que des garanties soient apportées sur son indépendance vis-à-vis du lobby nucléaire.
Je refuse que le ministère de l'INDUSTRIE dispose désormais d'une tutelle, même partielle, sur la radioprotection. Je refuse qu'il puisse intervenir sur des décisions de santé publique dès lors qu'elles risquent d'entraver le développement de l'industrie nucléaire.
Je demande que des engagements soient pris sur la consultation des citoyens français dès lors que les décisions impliquent leur protection contre les dangers des rayonnements ionisants, en situation normale (rejets de polluants, gestion des déchets radioactifs, etc) comme en situation accidentelle (critères d'intervention des pouvoirs publics, niveaux de contamination « tolérés » dans les aliments, dans l'environnement, conditions d'indemnisation des producteurs, prise en charge des victimes, etc).
Nom de la personne Adresse Signature ou de l'association
Pétition à renvoyer à la CRIIRAD et à adresser à Monsieur le Premier ministre soit par télécopie (01-45-44-15-72) soit par courrier (Hôtel de Matignon- 57 rue Varenne-75007 PARIS)
L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
PARIS, 13 fév - L'Institut
de radioprotection et de sûreté nucléaire
(IRSN), créé mercredi par décret adopté
en conseil des ministres, regroupera des compétences jusqu'à
présent réparties dans deux organismes distincts,
l'IPSN et l'OPRI.
L'Office de protection contre les rayonnements ionisants était
plus spécialement chargé des aspects sanitaires
de la radioactivité (surveillance de l'environnement, des
travailleurs, inspections des installations...). Sous tutelle
des ministères de la Santé et du Travail, il emploie
225 personnes.
L'Institut de protection et de sûreté nucléaire était chargé pour sa part de la recherche et de l'expertise sur le risque nucléaire et ses conséquences (sûreté des installations, protection des travailleurs et du public, sécurité des transports...). L'IPSN emploie 1.400 personnes, dont deux tiers de cadres.
Le nouvel organisme, doté d'un statut d'établissement public industriel et commercial, emploira quelque 1.600 personnes, dont plus de 1.000 experts et chercheurs compétents en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.
L'IRSN comptera pas moins de cinq tutelles ministérielles (Industrie, Environnement, Santé, Recherche et Défense). Il bénéficiera d'un budget de 250 millions d'euros, dont plus des quatre cinquièmes en subventions, selon le ministre de l'Environnement Yves Cochet.
Son président devrait être nommé prochainement, "en tout cas avant les élections", a ajouté le ministre.
Le gouvernement réforme les instances de contrôle du nucléaire
PARIS, 13 fév - Le
gouvernement a apporté mercredi une pierre à la
réforme du nucléaire en réformant ses instances
de contrôle, sans convaincre les écologistes qui
attendent toujours une grande loi sur la transparence dans ce
secteur.
Le conseil des ministres a adopté deux décrets,
le premier créant un nouvel organisme chargé de
la radioprotection et de la sûreté nucléaire,
le second réformant les attributions du "gendarme
du nucléaire". "C'est un progrès vers
plus de transparence", a commenté devant la presse
le ministre de l'Environnement Yves Cochet. "Nous avons maintenant
une séparation complète entre l'exploitant, le contrôleur
et l'évaluateur. C'est une nouveauté considérable",
a-t-il ajouté.
Le texte adopté par le gouvernement crée un Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Cet organisme, qui regroupera sous un même toit les activités de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) et de l'Office pour la protection contre les rayonnements ionisants (OPRI), sera chargé d'expertises, de travaux de recherche liés à la sûreté, mais aussi de tous les aspects sanitaires liés aux rayonnements.
Parallèlement, un second décret crée une Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR), qui regroupera elle aussi sûreté et radioprotection. Cette autorité de sûreté aux compétences élargies, généralement considérée comme le "gendarme du nucléaire", sera sous la tutelle des ministères chargés de l'Environnement, de l'Industrie et de la Santé. Le "gendarme du nucléaire" a autorité pour contrôler toutes les installations nucléaires civiles, notamment les centrales électriques dont il peut dédider la fermeture partielle ou totale.
Régression
Les fonctions d'évaluateur (IRSN) et de contrôleur (DGSNR) sont désormais clairement séparées, souligne-t-on au ministère de l'Environnement. "On ne mélange pas les fonctions, il y a découplge entre l'autorité et l'évaluation alors qu'il y avait une certaine confusion", souligne Philippe Hubert, conseiller de M. Cochet pour les affaires nucléaires.
Le statut de l'IPSN, qui fait partie du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), a souvent été critiqué, l'organisme chargé de la promotion du nucléaire abritant en son sein les experts chargés d'en surveiller les risques. La sortie du CEA s'était toutefois faite progressivement et depuis dix ans, l'IPSN avait évolué vers une réelle indépendance, souligne-t-on à l'institut.
La réforme de la sûreté a déjà fait l'objet d'un premier tir de barrage d'associations anti-nucléaires, Greenpeace y voyant "la main mise du lobby (nucléaire) sur la santé".
"Ce projet de réforme n'est ni plus ni moins que l'avènement de l'ingérence du lobby nucléaire sur tout ce qui touche à la santé et la protection de l'environnement", selon l'association écologiste qui dénonce le fait que la radioprotection soit aussi rattachée à l'industrie. "Ceci est en totale contradiction avec le principe de l'indépendance de l'expertise", selon Greenpeace.
"Il s'agit d'une régression considérable", s'insurge de son côté la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (CRII-RAD). L'association rappelle "qu'en 1986, c'était le ministère de l'Industrie qui était en charge de l'information des Français sur les retombées de Tchernobyl".
Le gouvernement réorganise le contrôle et l'expertise dans le nucléaire
PARIS, 12 fév - Le
gouvernement va réorganiser le contrôle et l'expertise
dans le nucléaire, qui seront regroupés dans un
seul organisme, aux termes de deux décrets qui doivent
être adoptés mercredi en Conseil des ministres, a-t-on
appris mardi au ministère de l'Environnement.
Un seul organisme, l'Institut de radioprotection et de sûreté
nucléaire (IRSN), ayant le statut d'établissement
public industriel et commercial, regroupera des compétences
réparties jusqu'à présent dans deux établissements
publics distincts: l'OPRI et l'IPSN.
L'Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) est plus spécialement chargé des aspects sanitaires de la radioactivité (surveillance de l'environnement, des travailleurs, inspections des installations...). Sous tutelle des ministètres de la Santé et du Travail, il emploie 225 personnes.
L'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) est chargé de la recherche et de l'expertise sur le risque nucléaire et ses conséquences (sûreté des installations, protection des travailleurs et du public, sécurité des transports...). L'IPSN emploie 1.400 personnes, dont deux tiers de cadres.
Rattaché administrativement au Commissariat à l'énergie atomique (CEA), il est considéré comme son "bras expert". Cette répartition des rôles, où l'organisme chargé de la promotion du nucléaire abrite en son sein les experts chargés d'en surveiller les risques, a souvent été contestée par les écologistes.
Le nouvel organisme, dont la création avait été prévue par une loi de mai 2001, n'aura pas moins de cinq tutelles ministérielles: Industrie, Défense, Environnement, Recherche et Santé.
L'IRSN emploiera 1.600 personnes, dont 1.000 experts issus de l'IPSN et de l'OPRI, avec un budget pour 2002 de 211 millions d'euros.
Outre la création de cet organisme, le Conseil des ministres doit approuver également la création d'une nouvelle direction ministérielle, la Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR), sous la tutelle des ministères de la Santé, de l'Environnement et de l'Industrie.
Cette réforme du contrôle du nucléaire, qui reste très en retrait par rapport au projet de loi sur la transparence nucléaire promis par le gouvernement au début de la législature, a provoqué d'ores et déjà des réactions négatives chez écologistes.
"Il s'agit d'une régression considérable", s'insurge la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (CRII-RAD). L'association conteste la tutelle du ministère de l'Industrie sur les questions de radioprotection, rappelant "qu'en 1986, c'était le ministère de l'Industrie qui était en charge de l'information des Français sur les retombées de Tchernobyl".