L'Expansion, 11/5/2007:
Le numéro quatre mondial du pétrole a confirmé aujourd'hui devant l'AG de ses actionnaires qu'il menait une "réflexion" dans le nucléaire. Il souhaite aussi sortir à court terme de Sanofi-Aventis dont il détient 13,1%. Une participation qui vaut aujourd'hui quelque 12 milliards d'euros.
Il y a trois mois, Christophe de Margerie, qui n'était encore que directeur de la branche exploration-production de Total, confiait déjà au Financial Times qu'il lui fallait se diversifier pour pallier la raréfaction inéluctable des ressources. Aujourd'hui, durant l'assemblée générale des actionnaires, le successeur de Thierry Desmarest a réaffirmé qu'il menait une « réflexion » sur un développement dans le nucléaire, tout en précisant toutefois qu'il n'avait pour l'instant aucun programme particulier. Parmi les voies concrètes possibles, d'aucuns soulignaient fin février que le français pourrait fort bien vouloir investir dans des mines d'uranium à l'instar d'un Gazprom par exemple, soit réactiver son projet de centrale nucléaire au Canada, dans la province de l'Alberta.
C'est que le groupe pétrolier n'ignore pas qu'il doit d'ores et déjà préparer l'après-pétrole. Parce que les hydrocarbures fossiles (pétrole et gaz naturel notamment) sont devenus plus que jamais une ressource rare ; parce que certains Etats (Russie, Vénézuéla, Algérie, Iran) se détournent des « majors » et reprennent la main sur leurs champs pétrolifères, le poids-lourd de la cote parisienne se doit d'explorer des alternatives énergétiques crédibles pour les décennies à venir. Car les énergies renouvelables ne suffiront pas à couvrir tous les besoins de la planète.Sans se montrer très disert, le nouveau patron de Total a simplement levé quelques hypothèques. Pour commencer, il a botté en touche sur le dossier Areva, précisant que « le gouvernement n'a pas décidé d'offrir d'action Areva à d'autres partenaires » . Ensuite, Christophe de Margerie a indiqué qu'une éventuelle diversification ne passait pas par une alliance avec EDF, GDF ou même Suez.
En outre, le numéro quatre mondial du
pétrole a expliqué qu'il s'apprêtait à
se délester « probablement à court
terme » de sa participation dans Sanofi-Aventis,
dont il est le premier actionnaire. Or, celle-ci se monte tout
de même à 13,1% du numéro trois mondial de
la pharmacie. Ce qui représente la bagatelle de 12 milliards
d'euros environ au regard de son actuelle capitalisation boursière.
Concrètement, Total prévoit de céder son
bloc de 13% au fil de l'eau pour ne pas embarrasser son partenaire
pharmaceutique par une « politique un peu maladroite »
. Un bloc dont le groupe a hérité au gré
de ses fusions/acquisitions : Sanofi étant l'ancienne
filiale pharmaceutique d'Elf qu'il a lui-même avalé
en 1999. Jusque là, Total avait expliqué qu'il n'avait
pas vocation à rester éternellement au sein du groupe
présidé par Jean-François Dehecq. Mais le
dossier de son retrait ne revêtait pas un caractère
d'urgence. Désormais, la direction semble se faire plus
pressante. Car il lui faudra financer ses « investissements
considérables » et ses « efforts
significatifs » dans la recherche.
Le Monde, 6/02/2007:
Christophe de Margerie, qui doit succéder à Thierry Desmarest à la tête de Total le mercredi 14 février, a d'ores et déjà indiqué que le groupe pétrolier français allait effectuer un virage stratégique en s'intéressant à l'énergie nucléaire. Dans un entretien publié le lundi 5 février par le Financial Times, M. de Margerie explique : " Un jour, nous participerons certainement à cette aventure. "
Le virage ne devrait pas être brutal. Mais Total, comme ses concurrents, envisage désormais l'après-pétrole. M. de Margerie, qui a longtemps été directeur de l'exploration-production de Total, n'a jamais caché son scepticisme sur d'éventuelles percées technologiques qui permettraient d'augmenter significativement la production pétrolière. Comme les autres " majors ", Total est convaincu que le nationalisme pétrolier des pays producteurs ne peut que s'accentuer dans les années à venir. De plus, le débat mondial sur le réchauffement climatique va mettre à mal l'exploitation à outrance des énergies fossiles.
Pour toutes ces raisons, les grands groupes pétroliers cherchent à se diversifier. Ce n'est pas un hasard si les dirigeants de BP (ex-British Petroleum) ont détourné ces initiales de leur sens premier. Désormais, elles symbolisent le " beyond petroleum " (au-delà du pétrole). Total est d'ores et déjà présent au capital d'Areva, et Thierry Desmarest est administrateur du groupe nucléaire français.
Fort de ses profits historiques (12 milliards d'euros en 2005, sans doute davantage en 2006), le groupe a les moyens d'investir dans des mines d'uranium, voire d'exploiter des centrales nucléaires. Avec cette déclaration, M. de Margerie veut aussi faire taire les rumeurs qui contestaient sa nomination en raison de sa mise en cause dans divers dossiers judiciaires.