Le Dauphiné Libéré, 5/7/2008:
C'est un courrier anonyme qui a mis le feu aux poudres. Adressé à la Criirad (Commission de recherche et d'information indépendante sur la radioactivité, un labo né au lendemain de Tchernobyl, ndlr), il faisait état de la présence d'un tumulus sur le site du centre nucléaire du Tricastin dans la Drôme, abritant des fûts de déchets radio-actifs et chimiques.
Une provenance militaire classée
"secret Défense"
Après avoir conduit une étude documentaire qui confirmait
l'information, le labo indépendant a rendu celle-ci publique.
Roland Desbordes, son président, a profité de la
tenue hier à Valence de la Cigeet (Commission d'information
des grands équipements énergétiques du Tricastin),
pour demander des explications aux responsables d'Areva. "Il
est temps que cette situation s'arrête, nous demandons à
savoir ce qu'il y a précisément là dedans,
et que ce site soit nettoyé, les déchets repris,
reconditionnés et transférés dans un centre
de stockage."
Ce n'est pas tout à fait "circulez, y'a rien à voir" qu'a répondu le directeur sûreté Areva ... mais presque. Et M. Jany Petit d'expliquer que, dès 1990, l'information avait été transmise sur ce tumulus. En 1998, un rapport établissait que ces déchets - 1 400 m2 de fluorines mêlés à 700 m2 de barrières de diffusion d'uranium en céramique, recouverts par 15 000 m2 de limon argileux et installés à 2,50 m au-dessus du sol - accumulés entre 76 et 89, n'avaient pas d'incidence environnementale, préconisant toutefois une surveillance.
L'installation, référencée, est depuis lors surveillée comme les installations de production, et l'Autorité de sûreté nucléaire assurait hier n'avoir pas décelé, lors de ses visites inopinées, d'anomalies radiométriques. Avec notamment un taux de 8 mg/l d'uranium dans la nappe phréatique, soit deux fois moins que les recommandations de l'OMS. Ces déchets provenaient du site militaire, classé "secret Défense" - d'où l'absence de communication - et aujourd'hui en cours de démantèlement.
Assainir avant de reconstruire
Reste qu'on s'étonne d'une situation qui perdure alors
que le site du Tricastin doit accueillir la construction du centre
Georges-Besse
II et la nouvelle usine de chimie de l'uranium de la Comurrhex,
dont les mises en service sont prévues pour 2011 et 2012.
Pour la CGT, ce tumulus est le fruit du manque de transparence
qui accompagnait hier les actions militaires. "C'est un boulet
que vous traînez". La Criirad a, elle, maintenu son
désir de voir le site assaini et les déchets enlevés,
assurant vouloir se tourner vers le ministère de l'Environnement
si cela n'était pas fait.