Les Echos, 18/3/2008:
La compagnie Bruce Power vient de demander l'autorisation de construire quatre réacteurs en Alberta pour produire le courant nécessaire au chauffage des sables bitumineux.
La frénésie de production d'hydrocarbures qui s'est emparée du Canada depuis quelques années soutient, paradoxalement, le développement du nucléaire. Le groupe privé d'énergie nucléaire Bruce Power, qui fournit déjà un cinquième de l'électricité de l'Ontario, vient ainsi de solliciter auprès de la Commission canadienne de sécurité nucléaire (CNSC) l'autorisation de construire quatre centrales nucléaires en Alberta, province du centre ouest.
Un projet d'une dizaine de milliards de dollars canadiens (7 milliards d'euros) permettant d'installer à terme une puissance de 4.400 mégawatts. Une stratégie que Bruce Power souhaite réaliser en s'appuyant sur la petite société privée Energy Alberta, dont elle vient de prendre le contrôle.
Il s'agit du premier projet nucléaire dans cette province qui connaît un boom pétrolier sans précédent grâce à l'exploitation désormais rentable de ses sables bitumineux. Mais cette extraction nécessite d'énormes quantités d'énergie pour chauffer les sables. Une opération aujourd'hui très polluante, car techniquement dépendante des centrales au gaz naturel et au charbon, grandes émettrices de CO2.
Le gouvernement fédéral d'Ottawa a déclaré la semaine dernière qu'il souhaitait interdire, à partir de 2011, la construction de nouvelles unités au charbon, si elles ne capturent pas leurs émissions de gaz à effet de serre afin de les stocker sous terre. Une exigence qui, selon Duncan Hawthorne, le PDG de Bruce Power, renchérit de 50 % le coût de production de chaque mégawatt- heure par rapport au nucléaire.
Le PDG a par ailleurs souligné sa volonté d'ouvrir le projet à toutes les technologies actuellement disponibles, sans privilégier celle d'Atomic Energy of Canada Limited (AECL) et son nouveau ACR-1000. Le Canada compte aujourd'hui 18 réacteurs de type Candu (à base d'eau lourde), assurant 15 % de l'énergie du pays, mais Bruce Power serait prêt à étudier des projets concurrents émanant d'Areva, de Westinghouse ou de General Electric allié à Hitachi. [Lire: Le spectre de l'accident nucléaire]
Malgré cette ouverture, la nette domination du nucléaire canadien par AECL ne semble pas menacée. Au contraire, le Nouveau-Brunswick, une des provinces maritimes du pays qui mise sur le développement énergétique tous azimuts, vient de terminer l'étude de faisabilité pour la construction d'un deuxième réacteur ACR-1000 à Point Lepreau.
L'actuel, en fonction depuis vingt ans, va
être arrêté le 30 mars pendant dix-huit mois
pour des opérations de maintenance et de modernisation.
« Une opération de 1,4 milliard de dollars canadiens
à laquelle Areva va apporter sa contribution sur le volet
de la technologie de la sécurité », a précisé
le week-end dernier Jack Keir, le ministre de l'Energie du Nouveau-Brunswick.
Ces travaux permettront de porter la puissance du réacteur
de 640 à 780 MW.
CNW, 27/8/2007:
Energy Alberta Corporation (Energy Alberta) est ravie d'annoncer le dépôt d'une Demande de permis de préparation d'un site auprès de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN).
CALGARY, le 27 août /CNW/ - Energy Alberta Corporation (Energy Alberta) est ravie d'annoncer le dépôt d'une Demande de permis de préparation d'un site auprès de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN).
"Il s'agit d'un moment historique pour le Canada, l'Alberta et le secteur de l'énergie nucléaire", estime Wayne Henuset, coprésident du conseil et président d'Energy Alberta Corporation. "Nous sommes fiers de faire oeuvre de pionnier et d'offrir à l'Alberta les avantages de l'énergie nucléaire, qui est propre, sécuritaire et fiable."
Energy Alberta a fait équipe avec Énergie atomique Canada limitée (EACL) pour faire bénéficier l'Alberta de la technologie nucléaire CANDU(MD). La demande porte sur l'installation d'un ou de deux réacteurs CANDU avancés(MD) à unités doubles ACR-1000(MD). Energy Alberta entend d'abord construire un ACR-1000 à deux unités qui produira ultimement un total net de 2 200 MW. La mise en service est prévue pour le début 2017.
"Le dépôt de la demande de Permis de préparation du site est la première étape dans un parcours qui compte de nombreuses demandes de permis en vue de construire le réacteur", rappelle M. Henuset. "La construction d'une centrale nucléaire est un processus long et rigoureux. Il s'agit du début d'un processus public et réglementaire qui comprendra des évaluations environnementales, sanitaires et sécuritaires. La consultation du public représentera un élément essentiel de ce processus."
Le site choisi, après des mois de dialogue avec les résidants de la région, est une propriété privée adjacente au lac Cardinal, à environ 30 km à l'ouest de la ville de Peace River, en Alberta.
Energy Alberta a choisi la région de la rivière de la Paix pour s'implanter à cause de l'appui donné par la population, de l'existence d'infrastructures et de services essentiels ainsi que pour la faisabilité technique.
M. Henuset a ajouté : "Nous devons aussi féliciter toutes les municipalités des régions de Whitecourt et de la rivière de la Paix, qui ont démontré un leadership exceptionnel depuis le début de ce projet. Tous devraient être très fiers de la façon dont leurs élus les ont représentés au cours des derniers mois."
"Au nom de la Ville de Peace River et de ses quatre municipalités voisines, nous souhaitons la bienvenue à Energy Alberta dans notre région", a déclaré Lorne Mann, maire de la Ville de Peace River. "Nous savons qu'il s'agit du début d'un long processus et nous sommes ravis d'avoir l'occasion de mieux nous renseigner sur l'énergie nucléaire. Avec l'annonce d'aujourd'hui, Wayne Henuset, Hank Swartout et les autres membres de l'équipe d'Energy Alberta offrent à notre région un avenir dynamique, enthousiasmant et durable."
L'ACR-1000 est un réacteur de troisième génération d'une puissance de 1200 MW(e), héritier de la technologie nucléaire CANDU d'EACL, qui a fait ses preuves. L'ACR-1000 reprend 80 % des caractéristiques techniques de la conception CANDU 6, comme les canaux de combustible horizontaux, un modérateur à eau lourde à basse pression, un caisson rempli d'eau ordinaire, deux systèmes indépendants d'arrêt sécuritaire et la capacité de réapprovisionnement et d'entretien sans arrêt du réacteur.
Le chef de la direction d'EACL, Ken Petrunik, a eu ce commentaire : "Nous sommes ravis de collaborer avec Energy Alberta pour implanter l'ACR-1000 dans l'ouest du Canada. L'ACR-1000 est une solution canadienne qui, croyons-nous, représente le meilleur choix pour l'Alberta en ce qui a trait à la sécurité, au rendement et à la gestion de projet."
Energy Alberta sait que le projet de construction de nouveaux réacteurs sera assujetti à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et se dit fin prête à participer à une évaluation environnementale rigoureuse. Energy Alberta apprécie aussi les efforts de la CCSN, qui a clairement expliqué ses exigences.
Energy Alberta
Energy Alberta est une société privée constituée à Calgary en octobre 2005. Wayne H. Henuset et Hank B. Swartout en sont les dirigeants.
La mission qu'Energy Alberta s'est donnée est de devenir un fournisseur responsable d'électricité sûre, fiable, peu coûteuse et à faibles émissions pour le réseau électrique albertain et les sociétés exploitant les sables bitumineux et faisant appel à la technologie nucléaire. Energy Alberta estime que l'énergie nucléaire peut remplacer efficacement l'énergie produite au moyen de combustibles fossiles tout en diminuant les émissions de gaz à effet de serre.
EDMONTON (18 juillet 2007) - Les membres de deux conseils municipaux albertains ont accepté un voyage tous frais payés pour ensuite accorder leur appui à un projet de construction de deux centrales nucléaires, promu par l'entreprise qui les avait invités.
Les deux maires et 14 conseillers ont été invités par Energy Alberta Corp., une compagnie récemment créée et liée à Energie atomique du Canada, dans l'espoir d'obtenir les autorisations nécessaires pour ériger deux centrales au nord-ouest de l'Alberta.
Le maire de Woodlands County, Jim Rennie, a indiqué qu'Energy Alberta avait demandé à la municipalité une lettre d'appui, ce qui est une des exigences du processus fédéral.
Le voyage de deux jours que les élus ont accepté comportait une visite de la centrale de Pointe Lepreau, au Nouveau-Brunswick. Energy Alberta a aussi payé la tournée de homards à tous les invités.
Le maire Rennie a dit en entrevue qu'il s'agissait d'une mission d'information. Il a ajouté que sa localité était en compétition avec une autre pour l'obtention du projet et qu'il fallait donner une chance au coureur.
Selon lui, il fallait à tout le moins accorder une lettre d'appui, dans l'intérêt supérieur des contribuables, en vue de leur épargner de l'argent.
Peu après leur voyage, les conseils municipaux de Woodlands County et de Whitecourt ont tous deux acheminé une lettre d'appui au projet, de même que d'autres communautés du nord de la province.
Or, cette semaine, 55 des 4000 citoyens de Woodlands County ont fait parvenir une lettre au conseil pour lui demander pourquoi son appui avait été accordé aussi rapidement.
En séance du conseil mardi, plusieurs des résidants ont mitraillé le conseil de questions. Ils jugent que l'évaluation est insuffisante, que l'appui est prématuré, et font ressortir que le modèle de réacteur Candu proposé n'a jamais été construit et agréé au Canada et nulle part ailleurs.
Au dire du porte-parole d'Energy Alberta, Guy Huntingford, il s'agissait d'un "voyage éducatif". Il a expliqué qu'il n'existe aucune centrale nucléaire en Alberta et que les dirigeants doivent disposer d'un cadre de référence provenant d'une communauté qui vit aux alentours d'un réacteur nucléaire.
Jim Macdonald
Radio Canada, 25/6/07:
ALBERTA - Au
moins deux entreprises albertaines évoquent la construction
d'un réacteur nucléaire pour fournir de l'énergie
et de la vapeur sur les sites des sables bitumineux à Fort
McMurray. Le projet suscite
de plus en plus l'intérêt puisqu'il permettrait des
économies d'argent et une réduction de la pollution.
L'extraction des sables bitumineux est principalement faite à
l'aide de vapeur sous haute pression. L'eau est chauffée
au gaz naturel. En plus d'être coûteux, ce procédé
produit une grande quantité de gaz à effet de serre
(GES). C'est le principal argument des compagnies en faveur de
la construction d'un réacteur nucléaire.
Il existe deux projets actuellement: le Candu-6, d'Énergie atomique du Canada et celui de la compagnie française AREVA.
Avis partagés
Bertrand Losier, qui travaille pour les compagnies pétrolières de la région depuis dix ans, s'inquiète de la sécurité d'un tel réacteur pour les générations à venir.
« Ça va être bon pour nous autres, mais nos enfants qu'est-ce qu'ils vont faire quand ça commencera à fuir. Ça, je suis contre totalement », tranche-t-il.
Plusieurs habitants de Fort McMurray croient, en revanche, que l'énergie nucléaire serait plus propre et contribuerait à réduire la pollution.
« Je pense que c'est propre. Je ne crois pas que ça nuit à l'environnement et c'est mieux que d'autres alternatives », estime Jim Arsenault, un résident de Fort McMurray.
Le conseiller de la Ville John Vyboh croit pourtant que la population de Fort McMurray n'est pas très optimiste de vivre à côté d'un réacteur nucléaire. « Ce n'est pas exactement quelque chose que tu veux voir si près de la ville de Fort McMurray. Je pense que la plupart des gens veulent voir des formes d'énergie plus vertes », dit-il.
Europe1, vendredi 23 septembre 2005:
Voila qui peut surprendre : une centrale atomique pour récupérer du pétrole. Mais, voilà, avec un pétrole de plus en plus cher, la donne est en train de changer. Car maintenant que le baril, c'est à dire 159 litres, se vend près de 70 dollars, hé bien de nombreux champs pétroliers (en mer profonde, ou bien de mauvaises qualités), deviennent rentables. C'est le cas, notamment de ce champ pétrolier en Alberta, dans l'Ouest canadien, exploités par Total. Un champ qui regorge d'huile dite lourde, c'est à dire un pétrole de mauvaise qualité, mélangé à du sable, qui n'intéressait personne autrefois, mais qui est maintenant rentable. Naturellement ce pétrole lourd est compliqué à extraire et ensuite à raffiner. Cela demande beaucoup d'énergie. D'ou cette idée de Total d'installer une centrale nucléaire à coté de ce champ pétrolier. Centrale qui fournirait l'énergie nécessaire pour faire remonter ce pétrole lourd à la surface et ensuite le traiter. Alors bien sûr, pour l'instant, ce n'est qu'un projet. Il va notamment falloir convaincre les habitants de l'Alberta de cumuler les nuisances du pétrole et du nucléaire. Mais enfin, Total explique que cette centrale pourrait également alimenter en électricité l'ouest canadien. Voila qui confirme, en tous les cas, les ambitions de Total dans le nucléaire. D'ailleurs le groupe Total est entré au capital d'Aréva, le champion français du nucléaire, dont il détient 1 %. Car, les pétroliers doivent déjà penser à l'après pétrole. Et naturellement le nucléaire fait parti de cet avenir. C'est pourquoi, Total ne se présente plus comme une compagnie pétrolière, mais comme un groupe énergétique.