Radio Canada, 17/12/2009:
La région du Saskatchewan a décidé de dire non, du moins pour l'instant, à des projets de construction de centrales nucléaires.
Voilà ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources, Bill Boyd, a annoncé jeudi matin lors de la présentation de sa stratégie sur le développement de l'uranium et de l'énergie nucléaire.
Le gouvernement renonce donc au projet de Bruce
Power, qui lorgnait le territoire de la Saskatchewan pour construire
une centrale nucléaire.
Bill Boyd a affirmé que le processus serait trop coûteux
pour les contribuables et ne permettrait pas de satisfaire les
besoins énergétiques grandissants d'ici 2020.
La décision du ministre de l'Énergie et des Ressources est bien accueillie par Peter Prebble de la Société environnementale de la Saskatchewan.
Le nucléaire reste cependant toujours dans la mire du gouvernement de Brad Wall. Ce dernier souhaite en effet devenir un joueur de premier plan dans la production d'isotopes médicaux tout en augmentant l'exploration et l'exploitation minière.
[ A propos de l'exploitation des mines d'uranium, voir le documentaire:
"Uranium"
(Canada - 1990) Un film du cinéaste indépendant Magnus Isacsson. Prix Golden Sheaf du meilleur documentaire, Yorkton Short Film and Video Festival (Saskatchewan, 1991). 48 mn en RealVideo 33kb Le Canada est le plus important pays producteur et exportateur d'uranium au monde. Or les résidus des mines d'où il est extrait sont à l'air libre, et si l'exploitation se poursuit au rythme de 1988, l'industrie nucléaire produira, avant dix ans, 250 millions de tonnes de résidus radioactifs qui continueront à contaminer les rivières et à empoisonner la chaîne alimentaire pour des centaines de milliers d'années... |
Le film est aussi disponible à environs 50kb sur Visions Autochtones |
La province encourage même Bruce Power à proposer un autre projet de réacteur après 2020. Dans une entrevue accordée à la Presse canadienne, l'entreprise ontarienne dit ne pas être déçue de la décision du gouvernement saskatchewanais.
Journal du Québec, 26/11/2009:
Nathalie Normandeau a été bombardée de... confettis jaunes jeudi, à l'Assemblée nationale, parce qu'elle défendait la décision du gouvernement d'aller de l'avant dans son projet de 1,9 milliard pour la réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2.
Majoritairement résidents de la Mauricie, les détracteurs de la ministre des Ressources naturelles dans ce dossier assistaient aux travaux parlementaires en raison du dépôt de deux pétitions de 2 000 signatures. Leurs protagonistes souhaitent le déclassement de la centrale de Bécancour.
Les esprits se sont d'abord échauffés lorsque le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, Sylvain Gaudreault, a fait part de ses inquiétudes devant l'impact du nucléaire sur la santé, le coût réel de la gestion des déchets nucléaires et autres dépenses que devra débourser l'État pour l'entretien de la centrale.
La période de questions interrompue
C'est au moment où Mme Normandeau soulignait que les travaux permettraient, entre autres, de sauver 800 emplois qu'une pluie de confettis jaunes - pour représenter le nucléaire - s'est mise à déferler sur elle. « L'orage atomique » provenait du haut de la galerie des invités, où huées et propos « non parlementaires » s'entremêlaient, des paroles et des gestes dont le Parti québécois se dissocie toutefois.
La séance a d'ailleurs été interrompue quelques minutes en raison de ces incidents, le temps que les agents de sécurité expulsent l'auteur du coup d'éclat, Sébastien Bois, qui a agi seul. « Le dépôt de pétitions devient souvent poussiéreux. On ne veut pas se faire irradier. On veut que le dossier devienne national, soutient M. Bois. Je veux que chaque fois que le gouvernement voit la couleur jaune, qu'il pense aux impacts du nucléaire sur la santé et sur les finances de l'État. Pourquoi investir des milliards dans une industrie périmée? Pourquoi ne pas prendre cet argent pour réorienter les travailleurs de Gentilly? »
Banni à vie
Le porte-parole de Citoyen(ne)s mauricien(ne)s soutient avoir été banni à vie de l'Assemblée nationale en raison de son petit manège. « Moi, je lance des papiers et on me bannit à vie, tandis que le gouvernement lance quotidiennement plus de 80 émissions radioactives. Les élus désinforment les gens et ne respectent pas la démocratie. Pourquoi ne sont-ils pas bannis, eux? » ajoute le Trifluvien de 34 ans.
Les travaux sur la centrale Gentilly-2 devraient débuter au printemps 2011, si Hydro-Québec recevait d'ici là l'approbation de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. La centrale de Gentilly-2 pourrait alors poursuivre ses activités pendant une trentaine d'années.
Dans le même ordre d'idées, les
promoteurs des pétitions contre la réfection de
Gentilly-2 dénoncent également l'acquisition par
Hydro-Québec de la centrale nucléaire de Pointe
Lepreau, au Nouveau-Brunswick, dans le cadre de l'entente de principe
récemment survenue entre Québec et Fredericton pour
l'achat d'Énergie NB. Environ 15 % de l'électricité
canadienne provient du nucléaire.
Radio Canada, 10/6/2009:
Les documents oubliés dans une station de télévision par une aide de la ministre des Ressources naturelles Lisa Raitt contenaient des détails au sujet de la construction de deux réacteurs nucléaires en Ontario. Selon un de ces documents, Énergie atomique du Canada craint déjà un important dépassement des coûts si elle est choisie. La province doit décider dans les prochaines semaines quelle compagnie obtiendra le contrat pour construire deux réacteurs à la centrale nucléaire de Darlington. La française Arèva et l'américaine Westinghouse sont également en lice.
Radio Canada, 2/06/2009:
La Société de gestion des déchets nucléaires a tenu une journée de consultations mardi, à Trois-Rivières, sur son projet de construire un site pour entreposer les déchets nucléaires produits par les centrales canadiennes. Le projet, qui se chiffre entre 16 et 24 milliards de dollars, soulève déjà le mécontentement de certains groupes, qui affirment que l'enfouissement de ce type de déchets comporte plusieurs risques.
La Société de gestion des déchets nucléaires souhaite enfouir un peu plus de 2 millions de grappes de combustible irradié par les centrales nucléaires du pays. À l'heure actuelle, par exemple, les déchets nucléaires produits à Gentilly-2 à Bécancour sont entreposés sur le terrain de la centrale. Pour le directeur de la Société de gestion des déchets nucléaires, il va de soi que le site doit se trouver dans une province qui produit déjà de l'énergie nucléaire.
« Par souci d'équité, le processus de sélection du site doit être concentré sur les quatre provinces nucléaires : la Saskatchewan, l'Ontario, le Québec et le Nouveau-Brunswick. Le Québec est une province nucléaire, donc il est tout à fait naturel pour nous de donner l'opportunité aux Québécois de formuler leurs opinions », affirme Ben Belfadhel.
Un projet controversé. Le groupe Citoyen mauricien pour le déclassement nucléaire a manifesté son opposition au projet à l'extérieur des locaux où était tenue la séance d'information de la Société de gestion des déchets nucléaires. Pour Nadia Bouthillette, l'une des porte-parole du groupe, ce projet est risqué. « Ils cherchent une région poubelle pour accueillir les déchets nucléaires sous prétexte que ça va donner des redevances à la municipalité choisie. [...] On trouve ça ridicule. »
Le débat sur l'entreposage permanent des déchets nucléaires s'impose, puisque ces déchets restent radioactifs durant une très longue période. De nombreuses années pourraient toutefois encore s'écouler avant que le choix final du site ne soit fait.
Le Devoir (Canada), 31/10/2008:
Le secteur privé ne se lance pas dans le nucléaire parce que la rentabilité de cette filière est chancelante, pour ne pas dire déficiente sans injection de fonds publics substantiels, directs ou indirects, au moyen de la fiscalité. C'est ce qu'affirme une récente analyse du Earth Policy Institute, présidé par Lester R. Brown, qui s'intitule The Flawed Economics of Nuclear Power.
«Dans les dernières années, explique Lester Brown, l'industrie nucléaire a misé sur les préoccupations du public en matière de changements climatiques pour défendre le retour de la filière. Même si les ténors de cette industrie ont convaincu quelques leaders politiques qu'il s'agissait d'une bonne idée, il y a peu d'indices qui démontrent que des capitaux privés sont investis massivement dans des centrales nucléaires pour vendre de l'électricité sur un marché libre.»
Lester Brown explique ce peu d'enthousiasme des investisseurs par une analyse d'un autre auteur célèbre, Amory B. Lovins, qui établit le prix de l'électricité produite à partir d'une centrale nucléaire à 14 cents (de dollar US) du kilowattheure, comparativement à 7 cents pour la même énergie produite avec une éolienne. Cette comparaison englobe le coût du carburant nucléaire, du capital, du fonctionnement, de l'entretien, du transport et de la distribution de cette électricité. Mais elle ne comprend pas le coût additionnel mais éventuellement incontournable de l'élimination sécuritaire des déchets radio-actifs, des assurances en responsabilité en cas d'accident nucléaire et de la démolition des centrales, dont une bonne partie des matériaux seront eux-mêmes radio-actifs pendant des générations.
Les États-Unis produisent 101 000 MW avec les 104 réacteurs de leur filière nucléaire. Ils prévoyaient investir en 2001 plus de 58 milliards pour construire le dépotoir nucléaire de Yucca Mountain, en Utah, un coût qui a grimpé depuis à 96 milliards pour un projet disponible seulement en 2017. Jusqu'ici, 119 réacteurs ont cessé leurs activités mais sont entreposés temporairement dans des endroits dont la sécurité est discutable. En cas d'accident, chaque opérateur de centrale nucléaire devra fournir 95,8 millions au pool de cette industrie, dont la couverture totale d'assurance atteint 10 milliards. Tout excédent sera payé par les gouvernements et donc les contribuables.
Présentement, 36 nouveaux réacteurs sont en construction dans le monde, dont 31 en Europe et en Asie. Plusieurs autres, comme ceux de la centrale de Gentilly au Québec, vont être restaurés pour prolonger leur vie utile, une décision gouvernementale soustraite à une évaluation environnementale indépendante et à tout débat parlementaire.
A lire:
- Blagues canadiennes, une centrale nucléaire pour puiser du pétrole
Radio-Canada, 11/6/2008:
L'Ontario pourrait payer plus cher la construction de ses nouvelles installations nucléaires. En juin 2006, la province annonçait la construction de deux nouveaux réacteurs au coût estimé de 26,5 milliards de dollars. Mais les prix pour la construction de centrale nucléaire sont hors de contrôle et ont bondi de 173 % en huit ans, selon Candida Scott, une experte en coût du nucléaire à la firme d'analyse Cambridge Energy Research Associate. La hausse des prix de l'équipement, de la main d'oeuvre, de l'acier et des matériaux de construction rend difficile la planification du coût d'un projet à long terme, ajoute-t-elle. Ces facteurs pourraient faire doubler le coût de construction de la nouvelle centrale nucléaire ontarienne et la facture pourrait être refilée aux consommateurs, prévient le député néo-démocrate Peter Tabuns, qui réclame une stratégie pour l'énergie renouvelable. Le gouvernement ontarien assure qu'il imposera des pénalités pour les retards et les dépassements de coûts à l'entreprise qui sera choisie pour construire la nouvelle centrale. Mais le ministre de l'Énergie, Gerry Phillips, reconnaît qu'il est impossible de garantir un prix fixe. Il se borne à dire que l'appel d'offres de l'Ontario sera flexible et qu'il tiendra compte de l'inflation pour les entreprises, tout en minimisant les risques pour les contribuables
Le Soleil (Québec), 21/1/2008 :
Le gouvernement conservateur joue-t-il à la roulette russe avec le nucléaire canadien? Le scandaleux congédiement, la semaine dernière, de Linda Keen, la présidente de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN), soulève d'importantes questions de sécurité et d'environnement. En fait, la situation montre tout le danger qu'il peut y avoir à laisser des politiciens jouer aux apprentis sorciers avec le risque de provoquer une catastrophe.
En novembre, la CCSN a maintenu la fermeture du réacteur nucléaire de Chalk River, vieux de 50 ans, pour des raisons de sécurité. Avant même cette fermeture, le réacteur avait été exploité de longs mois en violation de son permis. Malgré tout, Stephen Harper a forcé sa remise en marche. Un conflit subséquent avec Mme Keen a mené à son congédiement et ramené les dangers du nucléaire sous les feux de l'actualité.
En regard des changements climatiques, le nucléaire présente des avantages indéniables. Il permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre [non, lire: Nucléaire: L'escroquerie du discours sur l'effet de serre] en se substituant aux centrales thermiques (charbon, gaz naturel, etc.). Il assure aussi un approvisionnement constant et suffisant, ce qui n'est pas encore le cas de toutes les énergies renouvelables, malgré de belles percées (solaire, éolienne, maréemotrice, etc.).
On pourra toujours plaider que le risque d'une catastrophe nucléaire est si faible qu'il est acceptable. Ce serait oublier un peu vite la fusion partielle du coeur du réacteur de Three Mile Island (1979) et celle complète de Tchernobyl (1986).
Il y a également tous les accidents
évités de justesse et les lacunes parfois criantes
en matière de sécurité. Par exemple, en 1998,
l'Ontario a dû fermer 7 de ses
20 réacteurs à la suite d'un rapport d'experts indépendants.
Il est aussi commun, si on en croit son vice-président,
qu'Énergie atomique Canada comble ses lacunes de sécurité
bien après que celles-ci sont constatées.
Le nucléaire est si dangereux qu'il exige la plus grande transparence et le maximum d'informations et de débats publics sur la question [mais la "transparence" ne fait pas disparaitre le risque de catastrophe nucléaire!]. L'actuel gouvernement conservateur fait exactement l'inverse. Et il n'en est pas à ses premières frasques sur la question. Le Canada s'est joint, en novembre, au Partenariat mondial pour l'énergie nucléaire, une initiative américaine, sans qu'il y ait le moindre débat politique ou public.
Les risques de contamination de l'environnement existent, surtout dans un contexte de vieillissement des centrales. Sans parler de l'exploitation des mines d'uranium et de la problématique de la gestion des déchets radioactifs.
Plusieurs pays font face à un épineux problème. Le cinquième de l'électricité en Angleterre provient du nucléaire. Mais pas moins de 22 de ses 23 centrales vétustes doivent fermer d'ici 2023. Autrement dit, demain. Le gouvernement a donc donné le feu vert à la construction de nouvelles centrales nucléaires.
Mais même au Royaume-Uni, la question est loin de faire l'unanimité. L'Écosse s'est réjouie de ne pas faire partie du projet de modernisation. «Les risques et les incertitudes de l'énergie nucléaire sont de toute évidence beaucoup trop grands», a déclaré le ministre des Finances John Swinney.
Pourtant, en ce moment, la moitié des quelque 100 réacteurs et plus en construction ou projetés se retrouvera en Chine, en Inde ou dans un autre pays émergent. Le Viêtnam, la Thaïlande, l'Égypte et la Tunisie désirent leur premier réacteur. Disons qu'en termes de sécurité, ce n'est guère rassurant. Et c'est sans compter tous les incidents inquiétants qui ont marqué l'histoire du nucléaire.
L'industrie nucléaire japonaise doit encore redorer son blason après les révélations, il y a cinq ans, sur de faux rapports d'inspection d'incidents. Il y a aussi la défaillance partielle d'un mécanisme de fermeture d'un réacteur bulgare, rendue publique par un dénonciateur, deux mois après les faits. On pourrait trouver beaucoup d'autres exemples.
La science peut mener à la découverte de l'énergie atomique, mais elle ne peut pas nous préserver d'une catastrophe nucléaire, selon la formule de l'écrivain et ex-président de la République tchèque Vaclav Havel. Cela mérite réflexion.