Dauphiné Libéré, 15/3/2009:
Les villes voisines du site nucléaire du Tricastin dans un rayon de dix kilomètres vont faire l'objet d'une étude épidémiologique, appelée "étude cancers" (notre édition du 28 janvier). Reste à choisir le prestataire qui sera chargé de mener cette enquête.
Alors qu'un appel d'offres est en cours, lancé par le conseil général qui cofinance l'étude avec l'Autorité de sûreté nucléaire, Jean-Pierre Morichaud, représentant la Frapna à la Cigeet(*) et à l'origine du projet, a exprimé, lors d'une conférence de presse donnée hier matin à Pierrelatte, ses doutes sur l'indépendance du futur prestataire.
« Le nucléaire, c'est l'État ». Il a indiqué que, contrairement à ce que prévoyait le cahier des charges établi par le groupe de travail, le choix du prestataire devrait revenir « uniquement au conseil général et à l'Autorité de sûreté nucléaire avec comme expert l'Institut de veille sanitaire. » L'Institut national de veille sanitaire étant un établissement public d'État, selon Jean-Pierre Morichaud, un tel scénario poserait « des doutes sur l'indépendance car le nucléaire, c'est l'État. »
Tout en précisant que les commissions locales d'information (Cli) sont en train de se réorganiser afin d'avoir le statut des associations loi 1901 « pour pouvoir faire elles-mêmes des études en toute indépendance », le représentant de la Frapna affirme que « quatre prestataires ont présenté leur candidature ». L'un d'eux aurait déjà été « éliminé » de la course. Le choix doit être dévoilé à la fin du mois lors de la prochaine Cigeet.
(*) Commission d'information auprès des grands équipements énergétiques du Tricastin.
Le Parisien, 17/7/2008:
EN DECEMBRE dernier une étude scientifique allemande suscitait une certaine inquiétude. Publiée par la très sérieuse revue « International Journal of Cancer », elle indiquait que « le risque pour les enfants de développer une leucémie est 2,2 fois plus élevé lorsque l'on habite dans un rayon de 5 km autour d'une centrale nucléaire ». Les chercheurs indiquaient que « le risque allait décroissant avec la distance, mais restait supérieur à la norme dans un périmètre de 50 km autour des centrales ». Cette publication créait la polémique et des études complémentaires étaient lancées en France pour en savoir plus. Les conclusions de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, publiées fin avril, étaient paradoxales. La conclusion générale était rassurante, précisant que « l'ensemble des études disponibles en France et dans le monde ne montre pas d'augmentation de la fréquence des leucémies, chez les enfants, mais aussi chez les adultes, à proximité des sites nucléaire » en citant une centaine d'études portant sur deux cents sites de dix pays. Mais, preuve que le sujet est loin d'être évident, l'IRSN n'arrivait pas à trouver d'explications à des « excès de leucémie » dans trois endroits : autour des installations nucléaires de Sellafield en Angleterre, de Dounreay en Ecosse et près de la centrale de Kruemmel en Allemagne. En France, à la fin des années 1990, le professeur Jean-François Viel avait publié des travaux montrant « un excès de leucémies dans un rayon de 35 km autour du site nucléaire de La Hague (Manche) ». Ses recherches avaient été publiées dans le prestigieux « British Medical Journal ». Mais d'autres médecins avaient remis en cause ses hypothèses. L'enquête du Tricastin permettra peut-être d'affiner les connaissances sur ce sujet.
Le Monde, 4/5/2008:
RECTIFICATIFS ET PRÉCISIONS
(...)
Après la publication de l'article sur le surcroît
de leucémies infantiles observé au voisinage de
certains sites nucléaires (Le Monde du 24 avril), qui affirmait
que "les rejets radioactifs des installations nucléaires,
inférieurs à la radioactivité naturelle,
ne peuvent être suspectés", le réseau
Sortir du nucléaire précise que le débat
sur l'impact sanitaire d'une exposition prolongée à
des faibles doses de rayonnements ionisants n'est pas tranché:
[Le débat n'est
pas tranché en France, 1er pays élecronucléarisé
au monde... lire: Radioactivité: les normes qui tuent (Science & Vie n°757,
octobre 1980 en PDF) - Effets sur la santé de l'irradiation par
des faibles doses (Alice
Stewart) - Interiew du docteur Alice Stewart (dans Le Généralite)]
"Les rejets des centrales sont de composition différente
de la radioactivité naturelle et, surtout, ils viennent
s'ajouter à elle pour multiplier les risques de cancer.
Ils peuvent entraîner des contaminations par inhalation
de particules radioactives qui, même avec une intensité
très faible, sont immensément plus dangereuses que
de "simples" irradiations."
Radio Suisse-Romande, 28/4/2008:
Le nucléaire, une problématique d'actualité
Une étude allemande fait grand bruit
dans le monde du nucléaire. Explications.
Les enfants de moins de 5 ans vivant à 5 km d'une centrale
nucléaire ont 2,2 fois plus de leucémie que la moyenne
nationale.
Cette étude remet en question
les "seuils admissibles" de radiation,
qui ne sont pourtant que très faiblement plus élevés
à proximité des centrales nucléaires que
la radiation naturelle.
Ceci en marge de l'exposition temporaire sur le nucléaire
intitulée IN-SECURITY et visible au Musée
International de la Croix-Rouge à Genève et du 22ème
anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl, qui a eu lieu le
26 avril 1986.
Avec Michel Fernex, Professeur Emérite de la Faculté
de Médecine de l'Université de Bâle, ancien
membre des Comités Directeurs pour la Malaria et les Filarioses
à l'OMS, ainsi que Vassili Nesterenko, Directeur de l'Institut
Indépendant Biélorusse de Protection Radiologique.
Il travaille principalement sur les conséquences de la
catastrophe de Tchernobyl.
Un dossier d'Adrien Zerbini.
Liens:
- Un résumé de l'étude du Professeur Edmund
Lengfelder, Strahlenbiologisches Institut de l'Université
Ludwig-Maximilian de Munich
- Michel Fernex sur Wikipédia
- Vassili Nesterenko sur Wikipédia
- L'exposition temporaire IN-SECURITY au Musée International
de la Croix-Rouge à Genève a lieu jusqu'au 27 juillet
2008
Le Monde, 24/4/2008:
POURQUOI observe-t-on, au voisinage de certaines installations nucléaires, davantage de leucémies infantiles que dans le reste de la population ? En dépit de plus d'une centaine d'enquêtes épidémiologiques menées dans une dizaine de pays, les experts n'ont toujours pas de réponse à cette question. [Ce sont les experts du lobby nucléaire qui n'ont toujours pas de réponse...]
Le débat a été relancé en décembre 2007 par une étude allemande qui montrait que, parmi les enfants de moins de cinq ans ayant grandi dans un rayon de cinq kilomètres autour d'une des seize centrales nucléaires germaniques, les cancers du sang étaient 2,2 fois plus fréquents qu'au niveau national. Le risque allait décroissant avec la distance, mais restait supérieur à la norme dans un périmètre de 50 kilomètres autour des centrales.
Pour en avoir le coeur net, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) français vient de réaliser une revue critique de toutes les études internationales conduites sur ce sujet, dont elle a communiqué les résultats mardi 22 avril. Il en ressort, indique Dominique Laurier, du Laboratoire d'épidémiologie des rayonnements ionisants, que le cas allemand "n'est pas conforté par les études conduites dans d'autres pays". En particulier en Grande-Bretagne et en France, où les enquêtes multisites, couvrant l'ensemble du territoire, n'ont pas mis en évidence d'excès général de leucémies à proximité des installations nucléaires.
TROIS CAS PARTICULIERS
En revanche, des taux anormaux ont été relevés autour de trois sites particuliers en Europe : les usines de retraitement de Sellafield et de Dounreay, en Grande-Bretagne, et la centrale de Krummel, en Allemagne, que jouxte un centre de recherche nucléaire. Le risque y est de deux à quatre fois supérieur à la moyenne et même, selon une des études sur Sellafield, vingt fois plus élevé.
L'IRSN ne classe pas les environs de l'usine française de retraitement de La Hague (Manche) parmi les zones présentant un "excès confirmé" de leucémies, mais seulement un "excès possible", jugeant que le faible nombre d'individus concernés n'est statistiquement pas significatif. Le réseau Sortir du nucléaire a contesté, mardi, l'indépendance de l'IRSN.
Les scientifiques s'avouent impuissants à trouver une explication aux trois cas européens d'agrégats de leucémies, comme à la spécificité allemande. Sauf accident, les rejets radioactifs des installations nucléaires, inférieurs à la radioactivité naturelle, ne peuvent être suspectés.
Les chercheurs en sont réduits à évoquer l'hypothèse d'un phénomène infectieux non identifié favorisé par le brassage de populations autour des chantiers nucléaires ou de possibles facteurs environnementaux sans rapport direct avec l'activité atomique. [Probablement la faute aux extraterrestres...]
"Des études de grande ampleur sont
nécessaires pour améliorer les connaissances sur
les causes des leucémies qui, de façon générale,
sont inconnues dans 90 % des cas", estime Dominique Laurier.
Une nouvelle approche, fondée sur la répartition
dans l'environnement des effluents radioactifs gazeux, pourrait
y aider. [Tous le temps
"Des études de grande ampleur" sera du temps
de gagné pour l'industrie nucléaire...]
L'Humanité, 10/1/2008:
Le réseau Sortir du nucléaire souhaite la mise en place d'une étude statistique équivalente à celle menée en Allemagne par l'université de Mayence, sur demande de l'Office fédéral de protection contre les radiations. Révélée début décembre, celle-ci montre que le nombre d'enfants atteints d'un cancer ou d'une leucémie augmente de 60 % lorsque ceux-ci habitent à moins de 5 kilomètres d'une centrale nucléaire. L'augmentation est perceptible jusqu'à 50 kilomètres autour des centrales. Même si les scientifiques n'ont pas pu prouver, concrètement, la relation de cause à effet, cette statistique renforce le camp des sceptiques. Menée en France, ce genre d'étude pourrait conduire aux mêmes conclusions. À condition qu'elle soit menée par un organisme indépendant et qu'elle porte sur l'ensemble des installations nucléaires françaises, y compris celles qui sont en cours de démantèlement...
Martine Lozano - Militante associative,
Paris.
Le Monde, 13/12/2007:
Le Réseau Sortir du nucléaire, formé par près de 800 associations de France et d'Europe, a demandé, jeudi 13 décembre, dans une lettre au président de la République, aux ministres de l'écologie et de la santé, que soit diligentée une étude comparable à celle ayant révélé en Allemagne un risque de cancer accru près des centrales nucléaires. Selon cette étude de l'Office fédéral allemand de protection contre les radiations, révélée samedi 8 décembre par le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, le risque de leucémie augmente de façon "statistiquement significative" chez les enfants de moins de cinq ans résidant à moins de 5 km d'une centrale nucléaire. Dans ces zones, les auteurs ont comparé le nombre d'enfants atteint d'un cancer au nombre d'enfants sains, résultat qu'ils ont ensuite comparé à la fréquence des cancers infantiles au niveau national : 37 cas de leucémies ont été dénombrés dans ces zones, au lieu de 17 sur le plan national, soit 117 % de plus que la normale. En dehors des leucémies, le nombre de cancers infantiles est dans ces zones 60 % plus élevé que dans le reste du pays. (voir Le Monde du 12 décembre).
"FAIRE APPARAÎTRE LA TRISTE RÉALITÉ"
Dans sa lettre au chef de l'Etat et aux ministres de l'écologie
et de la santé, Sortir du nucléaire souhaite que
cette étude soit "mise en uvre de toute urgence"
en France et qu'elle soit "confiée à des organismes
totalement indépendants de l'industrie nucléaire
et de ses appendices (IRSN, Autorité de sûreté
nucléaire, ministère de l'industrie, etc.)".
Par ailleurs, souligne le réseau, l'étude "doit
englober l'ensemble des installations nucléaires françaises,
y compris celles qui sont en cours de démantèlement".
"Un des aspects les plus immoraux du nucléaire est
qu'il est quasiment impossible d'apporter la preuve directe qu'un
cancer est causé par les rejets d'une installation ou d'une
centrale (...) mais des études statistiques sérieuses
sont susceptibles de faire apparaître la triste réalité",
estime Sortir du nucléaire.
Le matin (Suisse), 13/12/2007:
Bientôt une étude sur les risques de cancers
La Libre Belgique, 12/12/2007:
L'incidence des leucémies chez les jeunes enfants serait deux fois plus forte près des centrales nucléaires. L'étude universitaire est sérieuse, mais contredit les explications scientifiques. Un embarras pour le plan énergétique d'Angela Merkel.
Nouveau coup dur pour le nucléaire en Allemagne: une étude de l'université de Mayence montre que, parmi les enfants de moins de cinq ans grandissant à moins de cinq kilomètres d'une des seize centrales atomiques du pays, les cas de leucémie sont deux fois plus fréquents que dans d'autres régions. Même si les scientifiques n'ont pas pu prouver de relation de cause à effet, cette statistique inquiétante renforce le camp des sceptiques.
L'accord sur la sortie du nucléaire, passé entre le gouvernement Schröder et les groupes d'électricité, prévoit la déconnexion de la dernière centrale en 2023. Tant les protagonistes que les adversaires du nucléaire admettent que l'étude est sérieuse. L'université de Mayence tient depuis longtemps un registre du cancer des enfants. Sur demande de l'Office fédéral pour la protection contre les radiations, elle a étudié les cas de leucémie apparus dans un rayon de cinq kilomètres autour des centrales nucléaires.
Plus du double de cas Résultat: entre 1980 et 2003, 37 enfants de moins de cinq ans vivant dans le voisinage des réacteurs ont été atteints de leucémie; dans les régions éloignées, la moyenne statistique est de 17 cas. Les auteurs de l'étude en concluent que 20 enfants supplémentaires ont été atteints en l'espace de 23 ans, parce qu'ils vivaient près des centrales, soit moins d'un cas critique par an. De plus, de 1980 à 2003, en Allemagne, près de 5900 enfants de moins de cinq ans ont été frappés par ce mal. L'étude de l'Université de Mayence semble prouver que la leucémie apparaît plus fréquemment à proximité des centrales nucléaires qu'ailleurs.
Mais les auteurs ne veulent pas exclure comme explication des "facteurs perturbateurs" non précisés, un effet de sélection ou simplement le hasard. Le ministre de l'Ecologie social-démocrate, Sigmar Gabriel, pourtant un adversaire du nucléaire, relève "que l'étude ne prouve pas de relation de cause à effet entre centrales et leucémie", et indique que, pour cette raison, il ne peut pas simplement fermer les centrales nucléaires. Il a confié le dossier à la Commission fédérale de protection contre les radiations. Le désarroi est grand: sur le plan médical, il est avéré que la radioactivité des centrales est mille fois trop faible pour déclencher un cancer dans le corps d'un petit enfant.
[Lire: "Les faibles doses inoffensives ça n'existe pas", Le Généraliste n°937, mardi 29 septembre 1987.]
Radioactivité minime. En Allemagne, la radioactivité mesurée à proximité des réacteurs ne doit pas dépasser 0,3 milli-Sievert (mSV) par an. Il s'agit là d'un seuil très bas, puisque la radioactivité naturelle dans la Forêt Noire ou les Alpes atteint 1,4 mSV par an et celle des appareils médicaux 1,8 mSV. L'étude alarmante est publiée à un moment délicat pour la chancelière Angela Merkel: la physicienne, qui vient de faire adopter un programme climatique ambitieux, est convaincue que, pour atteindre ses objectifs anti-CO2, l'Allemagne devra prolonger la durée de fonctionnement des centrales nucléaires qui n'émettent évidemment pas de gaz à effet de serre.
Extrait de la lettre d'information Stop-Nogent n°109/110:
C'est ce que Jean-Yves Nau (expert sur les
problèmes de la contamination des transfusions françaises
pour le sida) nous explique dans un article du Monde du
24 janvier 2006 [voir ci-dessous].
Les résultats expérimentaux obtenus autour de certains
centres nucléaires concernant les leucémies sont
assez curieux tels qu'ils nous sont présentés. Les
travaux épidémiologiques ont été effectués
par l'INSERM (dont la servitude vis-à-vis des autorités
a été évidente dans bien des cas - l'amiante,
le sida).
Voici ce qui paraît bizarre dans cette étude rapportée
par Le Monde. Le journaliste mentionne que sur les 29 sites
examinés seuls 2 montrent des excès de leucémie
(Chinon et Civaux) et que pour les autres il y a un déficit
de cas. Comment expliquer cette curiosité : des sites nucléaires
sont favorables à une diminution des leucémies mais
deux seulement montrent un excès. Comment ramener ces surprises
dans le domaine scientifique ? Les experts de l'INSERM et de l'IRSN
(des vertueux de l'expertise !) ont fait appel à un «
correcteur dit de Bonferroni » qui permet de tout ramener
dans le normal. Ce fameux correcteur de Bonferroni date de 1936
et le journaliste du Monde ne donne aucune explication
le concernant. Référons-nous aux données
de ce scientifique des années 30 (ce que ne semble pas
avoir fait Jean-Yves Nau). Lorsque dans un milieu homogène
on tire des cohortes au hasard et qu'on trouve des résultats
hors des moyennes attendues en plus ou en moins, il s'agit de
voir, suite à des calculs probabilistes, si ces résultats
sont ou ne sont pas significatifs. Mais il s'agit de tirages dans
des domaines homogènes où les probabilités
des événements sont identiques partout. En gros
on est dans les statistiques des probabilités de la théorie
des jeux.
Il est évident qu'en ce qui concerne la fréquence
des leucémies il est absurde de prendre comme postulat
que la totalité de la France est homogène et que
les sites nucléaires pourraient ne pas être conformes
à la moyenne nationale.
Appliquer le « correcteur de Bonferroni » aux études
épidémiologiques permet de remettre dans la normale
ce qui est inférieur à la moyenne nationale (une
curiosité) ou ce qui est supérieur à la moyenne
à cause de la présence d'une industrie rejetant
des radioéléments liquides et gazeux leucémogènes.
Si l'INSERM adopte a priori le « correcteur de Bonferroni
» qui permet de remettre dans la normale toute analyse particulière
on ne voit pas pourquoi il est nécessaire de faire les
études épidémiologiques que cet institut
effectue puisque avec ce fameux « correcteur » quoi
qu'on observe on peut toujours se ramener à être
dans la normale.
Monsieur Jean-Yves Nau du Monde qui s'était fait
remarquer lors des problèmes de sida liés aux transfusions
par sang contaminé, s'est-il renseigné au sujet
de la validation scientifique de ce fameux « correcteur
de Bonferroni » dont on n'avait jamais entendu parler dans
les études épidémiologiques avant son article
?
La science au service de la sécurité mentale des
populations avec la complicité des responsables médiatiques
Le mot « statistique » d'après le Petit
Robert viendrait du mot latin statisticus, « relatif
à l'Etat ». La première signification
donnée dans le dictionnaire est : « Étude
méthodique des faits sociaux par des procédés
numériques (...) destinée à renseigner et
aider les gouvernements (souligné par moi) ».
Aider le gouvernement à gérer les problèmes
sociaux afin d'éviter les turbulences est bien la préoccupation
majeure des statisticiens.
Roger Belbéoch mai 2006.
Le Monde, 24 janvier 2006:
Le prochain Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) no 4/2006 de l'Institut de veille sanitaire (InVS) publie une étude de nature à mettre un terme à la vieille polémique concernant les risques de leucémie auxquels seraient exposés les enfants vivant à proximité des sites nucléaires.
Ce travail, qui a été dirigé par Jacqueline Clavel (unité 754 de l'Inserm) et auquel ont participé des chercheurs de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (Fontenay-aux-Roses) constitue la première étude systématique sur l'incidence des leucémies de l'enfant autour de l'ensemble des installations nucléaires françaises sites et centrales métropolitaines. Pour leur étude, les chercheurs ont choisi d'étudier la population de tous les enfants âgés de moins de 15 ans et résidant à moins de 20 kilomètres de 29 sites nucléaires.
« Nous avions publié les résultats de ce travail en 2004 dans une revue scientifique britannique spécialisée », rappelle Mme Clavel. Mais « ces informations n'étaient pas alors sorties du cercle de notre communauté de chercheurs. Au vu des nombreuses questions régulièrement soulevées sur ce thème par les différents responsables sanitaires au niveau national, mais aussi régional et départemental, il nous a semblé nécessaire d'en publier une synthèse dans le BEH ».
Tous les cas de leucémies aiguës diagnostiqués entre le 1er janvier 1990 et le 31 décembre 1998 ont été recensés. Dans chaque zone, le nombre des cas de leucémies « attendus » a été obtenu à partir des effectifs de la population et des taux d'incidence de leucémies tel qu'il est établi par le Registre national des leucémies et lymphomes de l'enfant. Les auteurs ont aussi cherché de diverses manières s'il existait une décroissance des « ratios d'incidence standardisés » (SIR) en fonction de la distance aux sites nucléaires pris en compte dans cette étude.
Chinon et Civaux en excès « Au total, 670 cas de leucémies ont été observés entre 1990 et 1998 (...) pour 729,09 cas attendus, concluent les auteurs. Globalement il n'apparaît aucune hétérogénéité des SIR entre les zones concentriques de distance au site, ni de tendance du SIR avec cette distance. » Les chercheurs précisent toutefois que l'analyse par site montre un excès significatif d'incidence autour des centrales nucléaires de Chinon (Indre-et- Loire) et de Civaux (Vienne). Sur ces deux sites, le nombre des cas attendus était respectivement de 6,64 et de 2,95 alors que celui des cas recensés a été de 14 et de 7. A l'inverse, les auteurs de l'étude concluent à un déficit significatif d'incidence autour des sites de Bruyères/Saclay/Fontenay, où 471 cas ont été observés, contre 520,91 cas attendus.
Toutefois, les chercheurs qui ont établi ce rapport précisent que, contrairement aux apparences, ces résultats n'ont pas de signification statistique. « Compte tenu de la multiplicité des comparaisons auxquelles nous procédons dans ce travail, nous nous devions d'avoir recours à une correction statistique dite de Bonferroni, explique Denis Hémon (unité 754 de l'Inserm), cosignataire de ce travail. Une fois cette correction effectuée, ces excès ou ce déficit perdent toute signification statistique. »
En d'autres termes, rien ne permet d'établir un lien de causalité entre les cas de leucémies observés dans la région de Chinon et de Civaux et l'activité nucléaire de ces sites. Tout comme, dans l'autre sens, on ne peut conclure que l'activité des sites de Bruyères/Saclay/Fontenay pourrait expliquer une incidence de leucémie inférieure à la moyenne nationale.
Jean-Yves Nau
Le Généraliste n°906, 24 avril 1987:
De nombreux pays mettent un frein à
leur programme nucléaire. Les incidents en série
finissent par ébranler la sérénité
française dans ce domaine... Une étude anglaise
montre que, même en fonctionnement normal, il ne fait pas
bon pour les enfants vivre à proximité d'une centrale.
L'équipe du Dr Roman, du
département d'épidémiologie de l'hôpital
universitaire de Londres, a évalué l'incidence des
leucémies chez l'enfant à proximité des centrales
nucléaires. Entre 1972 et 1985, les auteurs ont diagnostiqué
89 cas de leucémies chez des enfants âgés
de moins de 14 ans dans les régions dans lesquelles sont
implantées des centrales nucléaires, Berkshire,
Basingstoke Ouest, et Hampshire Nord.
L'augmentation de l'incidence de leucémies chez l'enfant
a été significative dans une zone de 10 km de rayon
autour des centrales nucléaires. Ainsi, 41 enfants de moins
de 14 ans ont été atteints de leucémies dans
le périmètre de ces zones, contre 28,6 (rapporté
au même nombre d'enfants) dans la population générale
dans cette tranche d'âge. Cette élévation
de l'incidence de leucémies a été particulièrement
marquée chez les enfants de moins de 4 ans: 29 cas de leucémies
observés contre 14,4 prévus.
Dans les régions plus éloignées des centrales,
l'augmentation du risque de leucémie n'a pas été
significative. Au dessus de 14 ans, le taux observé a été
semblable à celui de la population générale.
Dans cette étude, le taux estimé de leucémies
a été de 2 cas par an pour les 60 000 enfants âgés
de moins de 14 ans, contre 3 cas par an en réalité.
Autour de la centrale
de Dounreay, une augmentation de l'incidence de leucémies
chez l'enfant a également été notée.
Selon Darby et coll., de l'hôpital Radcliffe d'Oxford, cette
élévation n'est pas liée ou pas seulement, aux radiations nucléaires
constatées dans cette région, à moins que
les doses reçues au niveau de la moëlle osseuse n'aient
été sous-estimées. Les auteurs évoquent
la nécessité de prendre en compte la manipulation
de matériaux différents selon les centrales, la
survenue possible de maladies infectieuses, ou d'un facteur environnemental
non identifié, qui retentiraient sur l'incidence de leucémies.
Le débat est ouvert, et avant d'être une question médicale, il s'agit plutôt d'un choix politique et économique.
Dr Catherine COUSERGUE
Réf. : Bmj, 1987, 294, 6572, 591-592, 597-607.