Les jeûneurs anti EPR ont arrêté leur action

27/07/2004 - Dominique Masset et André Larivière ont arrêté la nuit dernière le jeûne qu'ils observaient depuis le 21 juin pour obtenir "un véritable débat démocratique" et l'abandon du projet de réacteur nucléaire de troisième génération EPR, ont annoncé les deux militants mardi lors d'une conférence de presse à Paris. Les trois jeûneurs anti-nucléaire -un autre militant, Michel Bernard, avait dû arrêter il y a dix jours pour raison médicale- ont expliqué que leur action se poursuivrait par d'autres moyens à la rentrée. Certains comités locaux du mouvement intitulé "Jeûne vivre sans nucléaire" poursuivent leur action, notamment à Lyon. Le mouvement a rassemblé 80 comités de soutien, soit près de 200 personnes participant au jeûne à tour de rôle. André Larivière a regretté que "les médias n'aient pris que partiellement le relais auprès du public" et a parlé de "succès assez mitigé". Si plusieurs journaux, dont le quotidien Libération, ont accordé une bonne place au jeûne, les télévisions et radios n'ont guère relayé l'information. Les trois militants ont jugé mardi "décevante" la réponse de l'Elysée à leurs revendications. Le président Jacques Chirac a répondu par lettre aux revendication exprimées vendredi par leur comité de soutien lors d'une rencontre à l'Elysée avec le conseiller Stéphane Dupré la Tour. Dans sa lettre, Jacques Chirac enjoint aux militants de participer aux "nombreuses concertations organisées dans les mois qui viennent", notamment au débat sur l'implantation d'un exemplaire de l'EPR qui sera confié à la Commission nationale du débat public. "Il noie le poisson", a estimé M. Larivière. "Il n'y a pas de débat démocratique (...) nous n'avons reçu aucune réponse à notre demande d'un audit de la filière nucléaire et de ses coûts, et les pouvoirs publics s'abritent derrière le secret défense et le secret industriel". "Comment peut-on dire que l'EPR coûtera 3 milliards d'euros, si on ne connaît pas le coût des anciens réacteurs?" a renchéri M. Bernard. "On n'est pas capable en France de communiquer des données assez complètes pour faire un bilan dépassionné de la filière", a déploré M. Larivière. Les jeûneurs ont dénoncé le "mythe de l'indépendance énergétique française" assise sur un uranium "importé à 100%" et prôné une réorientation vers les énergies renouvelables. "La France ne construit quasiment pas d'éolienne, nous prenons un retard considérable", a indiqué M. Bernard. La technologie de l'EPR, dont le coût est estimé à 3,2 milliards d'euros, est destinée à prendre le relais des 58 réacteurs qui équipent actuellement les 19 centrales nucléaires françaises.

 


27/07/2004

Communiqué de presse: Vivre sans nucléaire

Le 26 juillet, Jacques Chirac a répondu aux jeûneurs. Le Président manie une fois de plus la langue de bois et nous renvoie aux procédures administratives mises en place par les hauts fonctionnaires pour justifier le processus démocratique du choix de la relance d'un programme nucléaire. Un processus réellement démocratique tiendrait compte de la réalité : 60 % des Français sont contre et 20 % sont pour un nouveau réacteur, comme le montre les enquêtes du ministère de l'industrie, d'Edf ou les sondages d'opinion (pour plus de détails : www.vivresansnucleaire.org).

Il n'existe aucune donnée chiffrée sur le coût réel du nouveau réacteur, sur le coût de son fonctionnement et le coût de la gestion des déchets et de son démantèlement. Sans étude indépendante sérieuse sur ces questions aucun débat n'est possible. Or, il n'y a pas eu de débat démocratique et pourtant les choix sont faits.

Jacques Chirac ne répond pas non plus à la demande d'un audit général sur l'énergie qui permettrait de comprendre pourquoi la France entend poursuivre le nucléaire alors que depuis 22 ans plus aucun réacteur nucléaire n'a été mis en chantier dans l'Europe des 15. Cet audit permettrait de connaître les vrais coûts écologiques et financiers du nucléaire et de comprendre pourquoi tous les autres pays voisins ont choisi d'autres solutions pour assurer leur approvisionnement en électricité.

Jacques Chirac ne se prononce pas non plus sur la demande d'une réorientation de la recherche en faveur de la recherche appliquée dans le domaine des renouvelables et de l'efficacité énergétique. Là aussi la France prend un retard considérable sur ses voisins européens.

Pour des raisons médicales les deux derniers jeûneurs ont décidé d'arrêter leur jeûne au soir du 36e jour.

Si le jeûne n'a pas atteint la totalité de ses objectifs, il aura quand même permis d'alerter l'opinion sur la menace que constitue ce nouveau programme nucléaire. Il aura permis à de nombreux collectifs de se mettre en place sur cette question, ceux-ci devant se retrouver dès septembre au sein d'un collectif national anti-EPR qui, au-delà des habituels groupes antinucléaires, regroupera plus largement sur cette question.

Contact presse : Jocelyn Peyret 01 55 78 28 67 / 06 12 11 04 51
mardi 27 juillet 2004.



Voici la copie de la réponse de M. Chirac aux revendications déposées vendredi par les jeûneurs et le comité de négociations lors de leur rendez-vous à l'Elysée avec M. Dupré La Tour, responsable environnement à l'Elysée.

Réponse de l'Elysée

Le Président de la République Paris, le 26 juillet 2004

Le 23 juillet dernier, vous avez accompagné à la Présidence de la République MM. André LARIVIERE et Dominique MASSET, engagés depuis le 21 juin dans un jeûne volontaire avec M. Michel BERNARD. A cette occasion vous avez remis à l'un de mes collaborateurs une lettre à mon attention, que j'ai lue attentivement.

Vous avez ainsi souhaité appeler mon attention sur la nécessité que les Français soient pleinement informés des données relatives à l'avenir énergétique de la Franc. Je partage votre souci que la politique énergétique soit pleinement choisie et acceptée, dans le cadre démocratique qui est le nôtre. C'est pourquoi, dès mars 2002, à Avranches, j'avais exprimé le souhait que les Français puissent en débattre.

Le Gouvernement a organisé ce débat de grande ampleur, au cours duquel toutes les opinions se sont exprimées. Il a porté sur tous les enjeux de la politique énergétique, qu'ils soient écologiques (effet de serre, déchets, pollution locale...), économiques (coûts réels, dépendance des importations...) ou sociaux (droit à l'énergie pour les plus démunis), tant sur le plan national qu'européen et mondial. Il a également permis de rechercher une meilleure complémentarité des choix en matière d'économies d'énergie, d'énergies renouvelables, de recherche, d'énergie nucléaire et d'énergies fossiles, y compris le charbon.

Le Gouvernement a ensuite exposé ses propositions dans un Livre Blanc qui a été soumis à la concertation pendant plusieurs mois.

De nombreux rapports sont venus l'éclairer, comme ceux de l'Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Techniques,du Conseil Economique et Social, de la Cour des Comptes, de la Commission Nationale d'Evaluation, de la Direction Générale de la Sûreté Nucléaire et de la Radioprotection, de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique et de la Commission Européenne. J'attends des instances de contrôle et d'évaluation qu'elles continuent à jouer pleinement leur rôle, qu'il soit technique ou financier. Et cela vaut tout particulièrement pour le secteur électro-nucléaire civil.

Pour la première fois, le Parlement a été amené en 2004 à se prononcer sur les choix énergétiques de la France, y compris en ce qui concerne l'énergie nucléaire, d'abord au travers d'un débat général, puis à l'occasion du vote de la loi d'orientation sur l'énergie. Sans anticiper sur un décision de renouvellement général du parc nucléaire, dont il restera à débattre dans quelques années, notre politique énergétique s'inscrit dans une vision d'ensemble qui met désormais l'accent sur les économies d'énergie et le développement des énergies renouvelables, en particulier les biocarburants.

Concernant le débat sur l'implantation d'un exemplaire de l'EPR, la Commission Nationale du Débat Public sera chargée de l'organiser. Elle a pour mission de veiller à la bonne participation du public et en particulier à la mise à disposition des données techniques et financières. Je vous recommande de prendre dès à présent contact avec elle.

Pour compléter ce dispositif, j'ai demandé que le projet de loi sur la transparence nucléaire soit examiné par le Parlement dans les prochains mois. J'ai demandé aussi que l'on réfléchisse à l'échéance de la loi de 1991 sur les déchets nucléaires et à l'organisation d'un débat national sur cette question. De plus, à la rentrée, va se poursuivre le débat sur l'évolution de la recherche. Ce sera l'occasion de définir des priorités, en matière de nouvelles technologies de l'énergie, en prenant appui sur le rapport remis au ministre chargé de la Recherche en juin dernier.

Comme vous le voyez, le vote de la loi d'orientation sur l'énergie ne clôt pas le débat public. De nombreuses concertations seront donc organsées dans les mois qui viennent et je vous invite à y participer pleinement.

Je vous prie de croire, Mesdames, Messieurs, à l'assurance de mes sentiments les meilleurs.

Jacques Chirac
mardi 27 juillet 2004.

 

 

Ouest France, 26/07/2004.

Marcelin Grousselas a terminé son jeûne, samedi

Pique-nique antinucléaire à Mortagne

Trente personnes environ s'étaient déplacées à Mortagne, samedi, pour témoigner leur volonté de « sortir du nucléaire ». Cette journée coïncidait avec la fin du jeûne de Marcelin Grousselas. Une énorme banderole a été hissée dans le jardin public de Mortagne et un verre de l'amitié était organisé autour du perron de la mairie. C'est sous les applaudissements et dans une atmosphère festive que Marcelin Grousselas a mis fin à son jeûne, samedi midi. Ce dernier, qui avait cessé de s'alimenter normalement depuis 34 jours, a expliqué : « J'arrête le jeûne, mais non mon combat contre le nucléaire que je vais poursuivre.. La fatigue devenait trop importante. Le but du jeûne n'est pas de mettre la vie en péril et de gagner à tout prix, mais de sensibiliser les citoyens ». Marcelin Grousselas et son groupe de réflexion sur le nucléaire ont-ils atteint leur objectif ? Ils ont, selon eux, obtenu 300 signatures pour leur pétition et attiré les regards de nombreux passants lors de l'installation de l'énorme banderole de 10 m sur 15 m dans le jardin public, lors du marché hebdomadaire du samedi. « Le nucléaire tue l'avenir », telle était la formule lapidaire écrite sur cet énorme cerf-volant jaune et vert qui, très vite, a été gonflé par le vent.
« Faire pression »
Aucun dégât sur les parterres du jardin public que les représentants des Ecologistes, Collectifs contre l'enfouissement des déchets nucléaires, Confédération paysanne ont voulu respecter. La seule fleur cassée a été offerte à l'adjointe au maire venue sur les lieux, et qui est repartie soulagée après que les manifestants aient témoigné de leur volonté de « pacifisme et de convivialité ». La rencontre entre les militants et Jean-Claude Lenoir, député-maire, sur la relance du programme nucléaire n'a pas eu lieu, l'élu ayant émis la condition préalable de la fin de l'action de Marcelin Grousselas. Toutefois les anti-nucléaires considéraient que « l'opération Mortagne avait été réussie ». Ils se sont réjouis que « deux jeûneurs anti-EPR ont été reçus à l'Élysée. De nombreux élus ont soutenu notre action. Nous souhaitons une transparence et une démocratie totale. Notre devoir est de faire pression, car pour le moment, nucléaire ne rime pas avec démocratie ». Didier Anger, qui n'avait pu se rendre libre lors de la manifestation de samedi à Mortagne (il a accompagné les jeûneurs de Paris à l'Élysée) s'est déclaré « très admiratif face au jeûne de Marcelin Grousselas : il a permis, comme les autres jeûneurs, de poser la question sur la nécessité ou non de mettre en place des réacteurs supplémentaires et de renouveler les énergies non polluantes ». Jean-Claude Lenoir, de son côté, n'a pas souhaité ajouter de nouveaux


Les jeûneurs "anti-EPR" reçus à l'Elysée

23/07/2004 - Des militants anti-nucléaires qui jeûnent pour obtenir l'abandon du réacteur nucléaire EPR ont été reçus vendredi matin à l'Elysée, à leur demande, a indiqué leur comité de soutien. Dominique Masset, 52 ans, de l'"Appel pour une insurrection des consciences", et André Larivière, 56 ans, permanent canadien du réseau "Sortir du nucléaire", ont été reçus vendredi avec plusieurs membres de leur comité de négociation par le conseiller pour l'industrie et l'environnement de l'Elysée, Stéphane Dupré la Tour. Ce dernier s'est engagé, selon eux, à transmettre au président Jacques Chirac une lettre de revendication. Il a promis une réponse "dans les jours qui suivent". Les jeûneurs - MM. Masset et Larivière ainsi qu'un troisième militant, Michel Bernard, qui a dû interrompre son action samedi - ont démarré leur action le 21 juin. Ils demandent que l'EPR (réacteur européen à eau pressurisée), un réacteur de 3ème génération, ne soit pas lancé, et une réorientation des budgets de recherche vers les énergies renouvelables.

 


Libération 21/07/2004

Nucléaire. Les militants devraient se rendre au palais présidentiel vendredi.

L'Elysée muet face aux jeûneurs anti-EPR

L'Elysée muet face aux jeûneurs anti-EPR

Depuis trente jours, ils n'ingurgitent que de l'eau. Les deux militants antinucléaire, qui jeûnent depuis le 21 juin pour obtenir l'abandon du
réacteur EPR, sont fatigués. Leur demande d'audience à l'Elysée est toujours sans réponse. Alors ils iront sur place, quoi qu'il en soit, vendredi, soutenus par une délégation et des infirmiers. Dominique Masset, 52 ans, d'Appel pour une insurrection des consciences, et André Larivière, 56 ans, permanent canadien du réseau Sortir du nucléaire, sont dans un état de faiblesse avancé et ont perdu plus de douze kilos. Michel Bernard, 46 ans, fondateur de la revue écologiste Silence, a dû, lui, cesser le jeûne samedi pour raison médicale. «On fait comme s'ils n'existaient pas. Il a fallu que l'un d'eux aille mal pour qu'on en parle», regrette Didier Anger, l'un des négociateurs du jeûne. Malgré leur état, ils ne s'imaginent pas devoir arrêter avant d'avoir la promesse, sinon du retrait de l'EPR, au moins d'un vrai débat national sur le nucléaire et les énergies renouvelables. «Nous approchons très vite du terme de notre jeûne, vu notre état, confie Dominique Masset d'une voix pâle. Nous attendons au moins un acte officiel d'annonce, le départ d'une négociation réelle.» «Notre volonté est celle d'une majorité de Français, qui demande un vrai débat sur l'énergie», renchérit André Larivière. Ils sont soutenus par de nombreux responsables politiques et écologistes, dont la sénatrice Verte Marie-Christine Blandin. Des comités de soutien et un jeûne tournant (qui a mobilisé 200 personnes) se sont organisés dans toute la France. Mais sans une réponse rapide de l'Elysée, la faim, la fatigue et la lutte risquent bien de s'évanouir dans la torpeur estivale.

Marie KOCK

 

Le Canard Enchaîné 21/07/2004

Le jeûne ne paie plus

C'EST l'arme des faibles. De ceux qui n'ont pas d'armes. Qui ne voient pas d'issue. Qui malgré tout ne veulent pas renoncer. C'est l'arme qu'a récemment utilisée en prison Alain Marécaux, l'huissier de justice d'Outreau, qui criait son innocence. Ainsi que 17 clandestins repêchés dans une embarcation de fortune et enfermés au centre de rétention marseillais d'Arenc, qui ne voulaient pas être renvoyés chez eux. Et aussi 553 sans-papiers, à Lille, qui réclamaient des papiers. Ce n'est pas une arme très efficace : je me fais mal pour que tu arrêtes de me faire mal, généralement ça foire. La justice a condamné Marécaux. Les 17 clandestins ont été envoyés sur Paris pour embarquement. Les sans-papiers lillois ont reçu la promesse d'un « examen bienveillant » de leur dossier...Et les trois militants antinucléaires qui jeûnent depuis le 21 juin n'ont rien obtenu. Jeûner pour réclamer l'abandon du projet de réacteur nucléaire EPR, quelle idée ! Jeûner pour alerter l'opinion publique sur le fait que le gouvernement Raffarin, en lançant ce projet EPR, nous engage à nouveau dans cette filière sans qu'ait eu lieu de vrai débat, ni au Parlement ni ailleurs, quelle douce utopie! Jeûner, puis au bout de trois semaines écrire à Chirac (le 11 juillet) pour qu'il nomme un négociateur, quelle rigolade ! Chirac, bien entendu, ne leur a jamais répondu. L'opinion publique ne s'est aperçue de rien. Les trois jeûneurs « attendent désespérément les télévisions. Ils savent que rien ne bougera tant qu'elles ne seront pas passées », notait une journaliste dans « Libé » (16/7). Mais les télés ne sont jamais passées. Certes, les jeûneurs, soutenus par le Réseau Sortir du Nucléaire, avaient tout prévu: des groupes de soutien, des manifs avec banderoles, des pétitions, des envois de communiqués, des « défilés festifs », des « repas de protestation »... Tout cela a sans doute eu lieu, mais nous n'en savons rien : les médias ont été d'une discrétion exemplaire. « Il est probable que le jeûne s'arrêtera entre le 25 juillet (34° jour) et le 6 août (46° jour) », avaient calculé les trois militants. Et d'ajouter, modérément optimistes : « Il y aura alors une certaine dynamique, des débats dans les médias, et le nucléaire occupera un peu plus les esprits qu'aujourd'hui. »
Mais la France, le pays le plus nucléarisé du monde, reste celui dont les habitants sont le moins conscients des questions énergétiques, celui où le débat public sur l'énergie est le plus étouffé, le plus inexistant qui soit. Celui où il faut jeûner pour espérer lancer un débat. Et celui où ça ne marche pas.

Encore une belle victoire à l'actif du nucléaire !

Jean-Luc Porquet

 

Le Monde 18/07/2004

Quatre militants antinucléaires en grève de la faim contre le réacteur surpuissant EPR

Affaiblis mais déterminés, les activistes, qui en étaient samedi à leur 27e jour de jeûne, ont écrit au président de la République, qui n'a pas répondu.

Installé dans une caravane sur le parking situé derrière l'hôtel de ville de Mortagne-au-Perche (Orne), Marcelin Grousselas souffle au téléphone :"C'est dur, je commence à être fatigué. Mais je tiendrai : il faut interpeller les gens sur les dangers du nucléaire, montrer que la vie a du sens, porter le message collectif." Agé de 60 ans, cet électrotechnicien à la retraite jeûne totalement depuis le 21 juin. Il dit avoir perdu 12 kilos. A Paris, trois autres activistes mènent une grève de la faim. Vendredi, pour leur vingt-sixième jour de jeûne, deux d'entre eux sont venus au bas du Trocadéro, où leurs camarades avaient déployé une banderole sur laquelle il était écrit : "Le nucléaire tue l'avenir." Ils sont, le reste du temps, installés dans un appartement prêté par la Ville de Paris. "On n'a pas les moyens d'informer les gens à la façon d'Areva, qui dépense des dizaines de millions d'euros en publicité. Alors on jeûne. Notre intention est modeste : rendre prioritaire, dans l'opinion publique, les questions de l'énergie et du nucléaire, leur rappeler qu'une catastrophe comme Tchernobyl est toujours possible." André Larivière, un Québécois de 56 ans, parle avec calme et détermination. Ce salarié du Réseau sortir du nucléaire a décidé de ne plus s'alimenter, tout comme Michel Bernard, 46 ans, un des animateurs de la revue écologiste Silence, et Dominique Masset, 52 ans, membre de l'Appel pour une insurrection des consciences. Mais Michel Bernard présente un "affaiblissement prononcé", selon son médecin, et
l'arrêt de son jeûne est envisagé. A Mortagne-au-Perche et à Paris, les jeûneurs portent deux revendications : l'abandon du projet de nouveau réacteur EPR, et la réorientation des crédits de recherche vers l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables. L'EPR (European Pressurized Water Reactor) est le projet d'un nouveau réacteur nucléaire conçu par Areva. D'une puissance électrique annoncée de 1 600 MWe - ce qui en ferait le plus puissant du monde -, il s'inscrit dans la perspective du renouvellement du parc nucléaire à l'horizon 2020. Alors que le gouvernement Jospin avait repoussé son engagement, M. Raffarin, lui, a donné son feu vert. Le projet de loi sur l'énergie valide cette autorisation, mais il n'a pas encore été adopté définitivement par le Parlement. "Il y a un décalage énorme entre la classe dirigeante et l'opinion à propos de l'avenir du nucléaire, dit Michel Bernard. Tous les sondages indiquent que les Français ne veulent pas que l'on construise de nouveaux réacteurs nucléaires, alors que le gouvernement a imposé, au terme d'un débat bidon sur l'énergie en 2004, le lancement de l'EPR." Les grévistes de la faim s'appuient sur un mouvement antinucléaire qui a repris des couleurs depuis quelques années. Trente mille personnes soutiennent financièrement le Réseau sortir du nucléaire, et celui-ci a animé de nombreuses actions de protestation, depuis l'alerte sur les transports de déchets nucléaires en provenance d'Allemagne jusqu'à un "Tour de France antinucléaire", en avril et mai, en passant par une manifestation qui a rassemblé 6 000 personnes, selon la police, à Paris, en janvier. Les grévistes de la faim ont reçu la visite des Verts, de la Ligue communiste révolutionnaire, de la Confédération paysanne, de Corinne Lepage, de Renaud Guibert, délégué du Parti socialiste à l'environnement. Ils ont écrit au président de la République, qui ne leur a pas répondu. Ils espèrent "percer le black-out médiatique", selon l'expression d'André Larivière et qu'une "grosse tête" du Parti socialiste viendra saluer leur action, qui correspond à la ligne officielle du parti de gauche. A Mortagne-au-Perche, le député et maire de la ville, Jean-Claude Lenoir (UMP), parle de "chantage". "La majorité s'est exprimée démocratiquement, par un vote au Parlement, sur le sujet", note l'élu.

Hervé Kempf

 

Les anti-nucléaires alignent des "bidons radioactifs" à Carnac contre l'EPR

CARNAC (18 juillet 2004) - Une trentaine de militants anti-nucléaires ont dressé dimanche un alignement de "bidons radioactifs" factices sur la plage de Carnac (Morbihan), tout près des célèbres alignements mégalithiques, pour dénoncer le lancement du réacteur nucléaire EPR.
Revêtus de combinaisons de protection contre les radiations, ils ont déposé sur le sable à intervalle régulier des bidons jaunes marqués du trèfle nucléaire censés contenir des déchets radioactifs.

"Les alignements de menhirs de Carnac témoignent de ce qu'était l'activité humaine il y a 7.000 ans. Avec cette action symbolique, on veut montrer ce que notre société va laisser en témoignage pendant des dizaines de milliers d'années", a expliqué Alain Rivat, porte-parole du réseau Sortir du nucléaire. (lire: Les tombeaux de déchets nucléaires)

Par cette action, le réseau d'associations entendait attirer l'attention du public à quelques jours de l'annonce par EDF du lieu d'implantation du réacteur nucléaire de troisième génération EPR (réacteur européen à eau pressurisée).

Les militants souhaitaient également affirmer leur "solidarité" avec trois hommes qui jeûnent depuis le 21 juin à Paris pour protester contre le lancement du nouveau réacteur. L'un d'entre eux, Michel Bernard, 46 ans, fondateur de la revue écologiste Silence, a été hospitalisé samedi sur recommandation de son médecin.

Sortir du nucléaire a réclamé samedi un "débat public télévisé" sur "la question du nucléaire" au ministre de l'Economie Nicolas Sarkozy, "qui a fait voter par l'Assemblée (nationale) le lancement du réacteur nucléaire EPR", alors que "les citoyens n'ont toujours pas eu droit à un vrai débat sur la question du nucléaire".


Hospitalisation d'un des jeûneurs anti-EPR

17/07/2004 - Un des trois hommes qui jeûnent depuis le 21 juin pour protester contre le réacteur nucléaire EPR a été hospitalisé samedi à Paris sur la recommandation de son médecin, a annoncé un porte-parole coordonnant leur action, Jocelyn Peyret.

Il s'agit de Michel Bernard, 46 ans, fondateur de la revue écologiste Silence.

Les deux autres jeûneurs, Dominique Masset, 52 ans, un militant non violent, et André Larivière, 56 ans, permanent canadien du réseau "Sortir du nucléaire", poursuivent l'action, selon le porte-parole.

Les jeûneurs sont hébergés dans un appartement prêté par la ville de Paris dans le IIe arrondissement. Ils ont reçu la visite de l'ancienne ministre de l'Environnement, Corinne Lepage, présidente de Cap 21, ainsi que de plusieurs personnalités et députés de gauche.

L'EPR (réacteur européen à eau pressurisée), auquel le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a donné son feu vert début avril, est appelé à remplacer une partie du parc nucléaire à l'horizon 2015-20. EDF doit annoncer très prochainement le lieu où le "démonstrateur" (prototype) de ce réacteur de troisième génération sera construit.

Les trois jeûneurs anti-EPR ont adressé le week-end dernier une lettre au président Jacques Chirac pour demander la nomination d'un négociateur par l'Elysée. La missive est restée "sans réponse", selon M. Peyret.

L'action des jeûneurs a été lancée par l'association Vivre sans nucléaire avec l'aide du réseau Sortir du nucléaire, selon M. Peyret. Elle est soutenue par Les Verts, le Mouvement pour des alternatives non violentes et des associations écologistes (Agir pour l'environnement, Amis de la Terre et Greenpeace-France).

 

 

Libération 16/07/2004

Les jeûneurs anti-EPR au bout du rouleau dans l'indifférence

Nucléaire. Manifestation à Paris aujourd'hui pour sensibiliser l'opinion.
Les jeûneurs anti-EPR au bout du rouleau dans l'indifférence

Ils commencent à être dans un sale état. Les trois militants antinucléaires qui ont cessé de s'alimenter il y a près de quatre semaines pour réclamer l'abandon du projet de réacteur nucléaire EPR et la réorientation des budgets vers les énergies renouvelables sont aujourd'hui considérablement affaiblis et surtout déçus par le manque d'échos suscité par leur mouvement. Après avoir envisagé de manifester devant l'Elysée à l'heure de la garden-party du 14 Juillet (un projet auquel ils ont finalement renoncé compte tenu des complications policières probables), les quelques amis qui les soutiennent - dans le cadre de l'association Vivre sans nucléaire (1) - ont décidé d'organiser aujourd'hui à Paris une sortie publique des deux jeûneurs transportables avec manifestation et banderoles à la clé. Une sorte d'opération de la dernière chance pour sensibiliser à leur combat les autorités politiques, les médias et donc le grand public. Dimanche, voyant que leur jeûne ne suscitait guère d'intérêt, les trois militants ont écrit au président de la République pour demander la nomination par l'Elysée d'un négociateur. Hier, ils n'avaient toujours reçu aucune réponse. Leur problème, c'est qu'ils semblent être arrivés au bout des soutiens possibles. Tous ceux qui étaient susceptibles de passer les voir dans leur appartement parisien (prêté pour l'occasion par la mairie) l'ont fait : des députés Verts Yves Cochet et Noël Mamère à l'ancienne ministre de l'Environnement Corinne Lepage. «Ils attendent désespérément les télévisions. Ils savent que rien ne bougera tant qu'elles ne seront pas passées, raconte une journaliste qui réalise un documentaire sur leur action. Ils mettent leurs actes en cohérence avec leurs idées mais ils ne peuvent pas s'extraire d'un monde où la médiatisation est hyperimportante.» Pour eux, il y a urgence. L'un des trois est au bout du rouleau. Michel Bernard, 46 ans, fondateur de la revue Silence qui prône la décroissance, est dans un état «d'affaiblissement prononcé», notait lundi son bulletin médical. Il a perdu plus de 10 kilos, «présente des difficultés à se lever, des vertiges, des troubles digestifs et des douleurs abdominales». Même si sa détermination reste intacte, il n'est pas sûr de pouvoir continuer au-delà des prochains jours. Dominique Masset, 51 ans, du mouvement Appel pour une insurrection des consciences, a, lui, atteint la fin de ses réserves et s'en trouve considérablement affaibli. Celui qui tient le mieux le choc est le plus aguerri : animateur du réseau Sortir du nucléaire, André Larivière, 56 ans, a déjà effectué deux jeûnes de plus d'un mois en 1983 aux Etats-Unis contre la course aux armements, et en 1986 en Allemagne contre les euromissiles. Paradoxalement, les jeûneurs sont arrivés à confirmer (l'absence de débat autour du projet de loi sur l'Energie en avait déjà été un signe) que la question nucléaire ne mobilise plus les Français. Une prouesse dont ils se seraient bien passés.

Alexandra SCHWARTZBROD

 


Ouest FRANCE (Alençon)

L'anti-nucléaire jeûne depuis 3 semaines
Marcelin Grousselas souhaite être reçu en mairie

13/07/2004 - Marcelin Grousselas vient d'entamer à Mortagne-au-Perche, sa quatrième semaine de jeûne, dans le cadre d'une manifestation nationale «Vivre sans Nucléaire». Installé dans sa caravane sur le parc de stationnement situé derrière la mairie de Mortagne, il entend « dénoncer le mépris du Président de l'Assemblée nationale qui n'accepte pas de recevoir une délégation porteuse d'une pétition de 100 000 signatures ». Pourquoi ce choix de Mortagne ? «Parce que, expliquent les membres du groupe, Jean-Claude Lenoir exerce de nombreuses responsabilités concernant ce sujet. Il est, entre autres, rapporteur du projet de loi relatif au Service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières ». Marcelin Grousselas se dit prêt à quitter le parking à condition d'être reçu avec une délégation par Jean-Claude Lenoir. Dialogue de sourd puisque le député pose comme condition préalable à toute discussion, l'évacuation du parking. « Pas question de capituler avant de discuter », affirment les membres de la délégation qui le soutiennent. Jean-Claude Lenoir dénonce quant à lui, la pression des anti-nucléaires « qui veulent imposer de cette manière, ce qu'ils n'ont pas réussi par la voie démocratique » . Le débat au Parlement sur la politique énergétique ayant conclu, rappelle-t-il, à la poursuite du recours au nucléaire.

Monique Béguin

 

Trois jeûneurs contre l'EPR écrivent au président Jacques Chirac

11/07/2004 - Trois jeûneurs anti-EPR, qui ont entamé leur action le 21 juin dans le IIe arrondissement, ont écrit dimanche au président Jacques Chirac pour demander la nomination par l'Elysée d'un négociateur, selon la lettre envoyée à l'AFP.

Les trois jeûneurs - Michel Bernard, fondateur de la revue "Silence" (écologie, alternatifs, non-violence), et deux militants non-violents, André Larivière et Dominique Masset - demandent l'abandon du projet de réacteur EPR (réacteur nucléaire de troisème génération) décidé par le gouvernement et une réorientation des budgets vers les énergies renouvelables.

Ce jeûne, d'une durée indéterminée, est soutenu par plusieurs responsables politiques (les députés Verts Yves Cochet et Noël Mamère, l'ancienne ministre de l'Environnement Corinne Lepage ...) et associations (Réseau "sortir du nucléaire", les Amis de la Terre, les Verts, Greenpeace France, Agir pour l'environnement, Mouvement pour des Alternatives Non-violentes).