Le Dauphiné libéré, 1/10/2009:
Areva a annoncé dans un communiqué que « la dernière phase des essais d'ensemble de la future usine d'enrichissement d'uranium Georges-Besse II a commencé et se terminera début novembre 2009. La mise en rotation de la première cascade de centrifugeuses est confirmée en fin d'année avec un objectif de production à pleine capacité prévu pour 2016 ».
Areva poursuit : « Les travaux se déroulent conformément aux prévisions malgré les aléas couramment rencontrés dans l'exécution d'un chantier d'une telle ampleur. Récemment, Areva a ainsi mis en évidence des anomalies sur un certain nombre de soudures réalisées par la société Fives Nordon sur un circuit de l'unité Sud du chantier de l'usine. Un plan d'actions correctives a été immédiatement mis en oeuvre pour réparer les soudures concernées. La sûreté de l'installation n'est pas mise en cause par ces non-conformités, ce qu'a confirmé l'Autorité de sûreté nucléaire lors d'une récente réunion d'information ».
La sûreté n'est pas remise en cause
Le communiqué d'Areva arrive à peu près en même temps qu'un article du "Canard enchaîné" du mercredi 30 septembre, faisant état des fautes d'un employé de la société précitée, qui aurait falsifié certains documents. Le "Canard" affirme aussi que l'incident aurait fait prendre "un énorme retard" au chantier.
Interrogé hier à ce sujet, Gérard Perrat, directeur général de la Société d'enrichissement du Tricastin (SET), qui gérera la future usine, confirme le problème concernant les soudures. Il précise : « Certaines soudures doivent être contrôlées par radio. Un employé de Nordon a masqué certains films qui montraient une non-conformité, pour ne pas avoir à réparer. Cela a été repéré par nos services et nous avons demandé à notre prestataire de réparer ».
Le directeur général du SET précise que la sûreté de l'installation n'est nullement remise en cause, d'autant que les soudures concernaient des circuits ne transportant pas de matières radioactives. Il ajoute aussi que le chantier n'a pas pris de retard et que le calendrier sera maintenu. Il est même en avance.
Implantée sur le site nucléaire
du Tricastin, entre Drôme et Vaucluse, l'usine dont le chantier
a commencé il y a trois ans sera à terme constituée
de deux unités d'enrichissement. Grâce à son
caractère modulaire, elle atteindra une production globale
de 7,5 millions d'UTS (Unité de travail de séparation)
par an en 2016, soit deux ans avant la date initialement prévue,
qui était 2018.
Les Echos, 21/7/2009:
Après avoir accueilli GDF Suez, les japonais Kansai et Sojitz ainsi que le coréen KHNP, le champion français du nucléaire ouvre la porte à d'autres investisseurs potentiels. Une chose paraît certaine : EDF ne sera pas de la partie.
On se croirait dans un film de science-fiction des années 1970. Eurodif, l'usine d'enrichissement d'uranium d'Areva située au Tricastin, dans la Drôme, c'est 1.400 tuyaux d'acier géants, chacun de la puissance d'un TGV, qui font circuler en permanence 3.000 tonnes d'uranium. Pour faire fonctionner ce site stratégique démarré en 1979, EDF a construit quatre réacteurs nucléaires, dont un de secours. « C'était l'époque où l'on n'avait pas peur de mettre les moyens sur la table », lance Gérard Perrat, cadre dirigeant d'Areva et vieux routard du nucléaire.
Eurodif, tuyauterie de la cascade d'enrichissement.
A l'époque, la France avait convaincu la Belgique, l'Italie, l'Espagne et la Suède d'entrer au capital de l'usine. Lorsque cette dernière a décidé de se retirer, le chah d'Iran, qui avait des projets de centrales, s'est porté acquéreur des parts. Entre-temps, la révolution des mollahs a changé la donne. La France n'a pas livré l'Iran, mais la République islamique est restée actionnaire, via un holding du nom de Sofidif. Trente ans plus tard, Areva veut aussi partager le coût de 3 milliards d'euros de sa nouvelle usine, Georges-Besse II, qui doit livrer ses premiers produits en fin d'année.
La Société d'enrichissement du Tricastin (SET), son véhicule juridique, a déjà accueilli à son capital GDF Suez (à hauteur de 5 %), les sociétés japonaises Kansai et Sojitz (2,5 %) ainsi que l'électricien coréen KHNP (2,5 %). « Le tour de table n'est pas fini, indique François-Xavier Rouxel, directeur de l'enrichissement chez Areva. Nous serions ravis que l'Italie et l'Espagne nous rejoignent et on ne s'interdit pas de regarder ailleurs. » Citant l'Asie et l'Europe, il refuse de dire si la Chine ou l'Inde, deux clients clefs du groupe français, pourraient en faire partie.
Une chose paraît cependant certaine,
EDF ne sera pas de la partie alors qu'il est de loin le premier
client d'Areva dans l'enrichissement. L'électricien tricolore
assure en effet la moitié du chiffre d'affaires d'Eurodif.
Il aurait voulu entrer dans le capital de GBII à des conditions
privilégiées, mais Anne Lauvergeon, la patronne
d'Areva, ne voulait pas désavantager les autres partenaires.
En revanche, EDF a signé en 2008 un contrat d'une vingtaine
d'années avec Areva qui définit les conditions dans
lesquelles il enlèvera une partie de la production de la
future usine.
« Coup de génie »
D'autres électriciens soucieux de sécuriser leur approvisionnement devraient être séduits. Contrairement à son prédécesseur, qui doit fermer en 2012 et fonctionne par diffusion gazeuse, GBII utilisera la technologie de l'ultracentrifugation. Celle-ci consomme 50 fois moins d'électricité. Concrètement, le site va consommer 60 mégawatts, contre 3.000 actuellement [donc 3 des réacteurs du Tricastin deviennent soit disponibles soit inutils], ce qui correspond à la consommation de l'Ile-de-France. Autre avantage économique, GBII emploiera 450 personnes, contre 1.100 salariés actuellement chez Eurodif.
Si le champion français du nucléaire peut exploiter cette technologie, c'est grâce à « un coup de génie », déclare Gérard Perrat, qui dirige la SET. Au début des années 2000, son concurrent européen Urenco, détenteur de la technologie par ultracentrifugation, cherche un partenaire pour l'aider à supporter ses coûts. Ses actionnaires - l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas - tirent la langue. « Plus personne ne croyait au nucléaire à l'époque, sauf Areva », relate Gérard Perrat. De son côté, Areva a besoin de préparer l'après-Eurodif.
Il signe une lettre d'intention en 2002 et
crée une coentreprise avec Urenco en 2006. Les analystes
estiment qu'Areva a payé environ 500 millions d'euros pour
cette opération, qui l'impose comme codétenteur
de la technologie. Le groupe est très discret sur le sujet,
mais ses marges devraient bondir dans l'enrichissement, où
il réalise 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires par
an. Son concurrent américain Usec, qui utilise encore la
technologie par diffusion gazeuse, affiche une marge opérationnelle
de 14 % en 2008, contre près de 50 % pour Urenco.
La Provence, 19/5/2009:
Le Premier ministre François Fillon a inauguré, hier, la première unité de production de la nouvelle usine Areva d'enrichissement d'uranium du Tricastin, à Pierrelatte. Baptisée Georges Besse II, cette usine devrait être mise en service entre fin 2009 et début 2016, avec deux ans d'avance sur le calendrier initial.
Le Premier ministre François Fillon a inauguré, hier, la première unité de production de la nouvelle usine Areva d'enrichissement d'uranium du Tricastin, à Pierrelatte. Baptisée Georges Besse II (1), cette usine devrait être mise en service entre fin 2009 et début 2016, avec deux ans d'avance sur le calendrier initial. Elle produira de l'uranium enrichi, produit de base des assemblages combustibles pour les réacteurs nucléaires civils, par centrifugation et non plus par diffusion gazeuse, comme le faisait jusqu'à présent l'usine Eurodif située sur le même site.
Cinquante fois moins consommatrice en énergie, "ce qui libèrera trois des quatre tranches de la centrale du Tricastin pour d'autres usages", s'est rejoui François Fillon, cette technologie ne nécessite pas de refroidissement et va donc permettre de "supprimer totalement les pompages dans le Rhône", a indiqué le Premier ministre dans son discours inaugural. In fine, l'usine Georges Besse II comptera 112 unités de production, (ou cascades) contenant chacune plus de 1000 centrifugeuses, de hauts cylindres où l'uranium 235 et l'uranium 238 sont séparés sous l'effet de la force centrifuge, première étape du processus d'enrichissement.
Après avoir visité la première cascade équipée de ses centrifugeuses en compagnie d'Anne Lauvergeon, la patronne d'Areva, François Fillon a rappelé que la filière nucléaire demeurait un "pilier de la politique énergétique du pays" et constituait "une chance historique" en période de crise, expliquant que la France était "prête à accompagner les efforts des pays décidés à appuyer leur développement sur le nucléaire civil", alors que les ressources fossiles traditionnelles (pétrole, gaz, charbon) s'épuisent. [Les ressources d'uranium s'épuisent elles aussi!]
Saluant la "renaissance du nucléaire" partout dans le monde, le Premier ministre a rappelé que cette filière restait "un atout majeur pour la compétitivité de notre économie", dans la mesure où c'est "la maîtrise complète" du cycle nucléaire - "de la mine jusqu'au déchet ultme", a précisé Anne Lauvergeon- qui rendait "nos opérateurs particulièrement compétitifs sur le marché mondial". Pour compléter sa démonstration, François Fillon a même convoqué les écologistes qui "hier, rejetaient le nucléaire", alors que "certains d'entre eux" commencent aujourd'hui "à penser qu'une énergie sans gaz à effet de serre, sans rejets de particules, est sans doute une solution d'avenir." Les temps changent.
(1) Ancien patron de Cogema, Georges Besse dirigeait la Régie Renault lorsqu'il fut assassiné par Action Directe, en 1986.
Le Dauphiné libéré, 18/5/2009:
"Les salariés du Tricastin et leurs représentants sont les grands oubliés de la venue du Premier ministre". La CFDT-Tricastin résume ainsi ce que devrait être l'inauguration de la première "cascade" de l'usine Georges-Besse II aujourd'hui : un rassemblement d'officiels autour de François Fillon et d'Anne Lauvergeon.
Élus locaux, députés, préfets de la Drôme et du Vaucluse devraient se retrouver sur le chantier sud, le plus avancé, sur le territoire de Bollène entre 11h et 13h. Les salariés, eux, ne semblent donc pas conviés. D'où ces propos assez durs de la CFDT : le premier ministre "ne verra que les paillettes qu'on voudra bien lui montrer, une usine fraîchement sortie de terre qui aura coûté de l'ordre de 4 milliards d'euros et qui n'emploiera au final que 300 salariés".
La CGT -Tricastin n'y va pas non plus de main
morte : "le chef du gouvernement et la présidente
d'Aréva viennent parader", lâche le syndicat
qui distibuera des tracts, ce matin dès 7h à l'entrée
d'Eurodif.
Le Dauphiné Libéré, 10/11/2008:
Le réseau "Sortir du nucléaire" a souhaité réagir à la lecture du dossier sur l'usine GB2 (notre édition d'hier). « Ce qu'Areva se garde bien de révéler, de peur d'écorner le mythe de la France supposée être "à la pointe du nucléaire", c'est qu'elle ne possède pas la technologie d'enrichissement de l'uranium qui sera utilisée dans l'usine GB2.
Cette technologie, basée sur l'utilisation de centrifugeuses très spécifiques, va donc être louée -très cher- à l'entreprise Urenco (Pays-Bas, Allemagne, Grande-Bretagne). Les centrifugeuses seront utilisées dans le cadre de protocoles particuliers qui empêcheront Areva d'accéder à cette technologie. Dans le jargon de l'industrie, on parle d'une "boîte noire". Il est assez amusant de voir que la France ne maîtrise pas la technologie des centrifugeuses, contrairement à certains pays comme... l'Iran ».
"Opacité habituelle"
Autre précision : « actuellement, et depuis le début
du fonctionnement d'Eurodif en 1979, l'Iran possède 10
% des parts de cette usine. Pire : pendant des années -l'opacité
habituelle du nucléaire français empêche d'en
savoir plus- la France a fourni à l'Iran 10 % de l'uranium
enrichi produit au Tricastin, aidant ainsi largement ce pays à
avancer sur le chemin de l'arme nucléaire, qu'elle est
maintenant sur le point de maîtriser. Il est là aussi
"amusant" de voir la France se joindre aux États-Unis
et à d'autres pays pour contester les projets nucléaires
iraniens... »
Midi Libre, 9/11/2008:
Pour une fois, l'image correspond. Les deux tours aéroréfrigérantes d'Eurodif, symbole du site du Tricastin (Drôme), tournaient pourtant en boucle sur les chaînes de télévision début juillet lors de l'incident Socatri. L'usine d'enrichissement d'uranium, elle aussi filiale d'Areva, n'était alors pour rien dans la pollution de deux affluents du Rhône.
Tout a changé ce vendredi. Une fuite a été constatée sur un circuit secondaire de refroidissement de l'usine Georges-Besse. Quelques heures après une visite de presse vantant les mérites de la future installation Georges-Besse-II... La fuite d'eau contenant du bore (produit ralentisseur de neutrons mais non radioactif) s'est produite dans une canalisation et a atteint une galerie technique puis un caniveau d'eau pluviale. Le tout s'est jeté dans le cours d'eau de la Gaffière. C'est la préfecture de la Drôme qui a précisé en soirée le nom de la rivière. La communication d'Areva ne le mentionnait pas.
Peur d'évoquer les mauvais souvenirs ou malheureux oubli ? La Gaffière et le Lauzon, un autre affluent du Rhône, avaient accidentellement accueilli 74 kg d'uranium liquide le 4 juillet dernier.
Malgré les communiqués rassurants de l'Autorité de sûreté nucléaire, les écologistes sont hier montés au front. Le réseau Sortir du nucléaire conteste pour sa part « les communiqués lénifiants des autorités ». La préfecture parlait d'une pollution en deçà de la norme sanitaire. Réponse des écologistes : « Une contamination reste une contamination. » [Rappel: Rejet accidentel, fuite à l'usine FBFC-CERCA, scandale des 700 tonnes de déchets enfouis à même le sol en toute illégalité!]
Le Dauphiné Libéré,
9/11/2008:
Pour le Réseau "Sortir du nucléaire", la fuite chimique sur le site du Tricastin (notre édition d'hier) est la goutte qui fait déborder le vase. Et la construction d'une nouvelle usine par Areva n'augure rien de bon pour l'avenir. "Le meilleur moyen de ne rien trouver, c'est de ne pas chercher". « On oublie souvent de dire que l'industrie nucléaire est l'une de celles qui produit le plus de pollutions chimiques pour l'environnement », estime Stéphane Lhomme. Les gardes-fous, les contrôles, le porte-parole du réseau "Sortir du nucléaire" n'y croit guère. « Faire des mesures n'a jamais empêché les fuites et les pollutions », martèle-t-il. Pour les anti-nucléaires, la seule solution acceptable est l'arrêt pur et simple des centrales au profit des énergies renouvelables. Le dernier incident en date apporte, une fois de plus, de l'eau à leur moulin. « On est obligé de faire avec les chiffres d'Eurodif. Qu'en est-il de la contamination des puits des riverains ? Le problème, c'est qu'aucune mesure ne sera faite. Le meilleur moyen de ne rien trouver, c'est de ne pas chercher », se désole Stéphane Lhomme. Et ce dernier de s'agacer des conclusions récentes du Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire qui conclut à l'absence de pollution radioactive dans les eaux souterraines. « M. Revol est l'un des pires pro-nucléaire du Parlement et c'est lui qui dirige le comité de transparence ! ». Le porte-parole s'insurge aussi contre l'innocuité du bore sur l'organisme humain. « Le souci, c'est qu'on n'en connaît pas les risques à long terme. On sait que le bore perturbe le développement du foetus chez l'animal et même son système reproductif. Chez l'homme, on constate des irritations des yeux et des voies respiratoires ».
8/11/2008:
Fuite d'eau borée au Tricastin: communication "lénifiante",
selon "Sortir du nucléaire"
Politis, 27/3/2008:
Alors qu'une nouvelle usine va bientôt produire de l'uranium enrichi sur le site le plus nucléarisé du monde, dans la Drôme, Areva fait tout pour éviter une véritable enquête locale sur les cancers.
Communiqué satisfait d'Areva, fin février : la construction de son usine Georges Besse II, démarrée en juillet 2006 au Tricastin (Drôme), progresse « dans le strict respect des échéances du projet ». Elle est prête à recevoir ses premières centrifugeuses d'enrichissement d'uranium, et devrait entrer en service au premier semestre 2009.
Destinée à remplacer la vieille unité d'enrichissement par diffusion gazeuse, qui produit sur le même site du combustible pour les centrales depuis 1978, cette usine est présentée comme « une réelle avancée économique et environnementale » : le passage à la technologie de centrifugation diviserait par 50 la consommation d'électricité et réduirait les rejets radioactifs, « car elle ne nécessite pas de prélèvement d'eau dans le Rhône pour son refroidissement ». Est-ce la raison pour laquelle l'opérateur, appuyé par les pouvoirs publics, tente d'éviter que soit menée une enquête sur les cancers ?
Cette demande est formulée en juin 2006 au cours de l'enquête d'utilité publique précédant la mise en chantier. Conclusion encourageante : trois mois plus tard, alors que la nouvelle loi sur la transparence nucléaire vient d'être adoptée par le Parlement (en juillet 2006), le rapport des commissaires enquêteurs approuve l'idée.
Il endosse même la proposition de créer au plus vite un registre des cancers [1] , à la suggestion des directions départementales des affaires sanitaires et sociales (Ddass) de la Drôme, du Gard et du Vaucluse. Trois départements, avec l'Ardèche, à la frontière desquels est localisé le site du Tricastin, réputé le plus nucléarisé au monde [2].
Ce n'est pas la première fois que l'on suspecte les installations nucléaires d'être, par leurs inévitables rejets radioactifs autorisés dans l'air ou l'eau, à l'origine de cancers. Même si plusieurs études n'ont rien révélé de significatif, comme le recensement des leucémies infantiles mené par l'Inserm entre 1990 et 1998 autour des 29 sites nucléaires français, quelques enquêtes ont jeté le trouble : autour du complexe nucléaire britannique de Windscale-Sellafield, on a relevé, depuis 1984, des cancers de l'enfant dépassant de beaucoup en nombre (jusqu'à dix fois) ceux que l'on pouvait attendre en moyenne.
En France, l'épidémiologiste François Viel, par une étude qui a fait couler beaucoup d'encre dans les années 1990, montrait une incidence de leucémies infantiles près de trois fois supérieure à la moyenne au voisinage du centre de retraitement des déchets radioactifs de La Hague (Manche).
Plus récemment, en décembre dernier, une étude présentée par l'Office fédéral allemand de protection contre les rayonnements concluait à une « augmentation significative » du risque de leucémie (plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale) pour les enfants vivant à proximité des centrales nucléaires du pays.
C'est le genre de résultat qui déclenche immédiatement une polémique : comme il ne s'agit, dans l'absolu, que d'un petit nombre de cas (de quelques unités à quelques dizaines), il est difficile d'interpréter ces études « positives ». Est-ce la conséquence d'une exposition aux rayonnements, comme le redoutent les écologistes ? Les défenseurs du nucléaire leur opposent que les doses sont très faibles, et qu'il peut s'agit de « hasards statistiques ».
C'est le coeur du débat actuellement en cours au Tricastin. À la suite du rapport des commissaires enquêteurs, la Commission locale d'information du Tricastin (Cigeet) [3], saisie par la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature (Frapna), vote à l'unanimité, le 21 mars 2007, le principe d'une enquête d'évaluation des cancers autour du site. Ce qui nécessite la définition d'un cahier des charges, confiée à un groupe d'experts, avant le lancement d'un appel d'offres.
Mais, le 19 décembre dernier, à l'occasion de la dernière réunion de la Cigeet, petit coup de théâtre : à la demande de la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (Drire) de la Drôme, Areva a fait circuler un ancien rapport (élaboré par l'Institut national de l'environnement et des risques, Ineris) concluant à l'absence de nocivité des rejets. « C'est le préfet lui-même qui l'a présenté, expliquant qu'il avait provoqué le renoncement des Ddass au projet de l'enquête cancer, proteste Jean-Pierre Morichaud, qui représente la Frapna au sein de la Cigeet. De quel droit les représentants de l'État, volant au secours d'Areva, se permettent-ils d'aller consulter à nouveau les acteurs, dans le but de remettre en cause les conclusions des commissaires enquêteurs ? » [4]
Le groupe d'experts chargé de définir le cahier des charges de l'enquête se trouve donc aujourd'hui en présence de la proposition initiale (soutenue par la Frapna), approche sanitaire consistant en un relevé des cas de cancers autour du site (distance, âge, sexe, type de cancer, etc.), et, désormais, de celle de la Drire et d'Areva, concurrente, qui entend orienter l'enquête vers un simple inventaire des rejets radioactifs et de l'exposition des populations.
Celle-ci a toutes les chances de conclure à l'absence de risque, puisque le modèle sanitaire d'impact des émissions radioactives officielles reste fondé sur des expositions fortes et brèves, du type accidentel. Alors que le contact prolongé avec des émissions faibles (ce qui est probablement le cas au Tricastin) est mal connu ? d'où l'intérêt d'une investigation des cas de cancers.
La Cigeet doit se réunir à nouveau en mai prochain, au plus tard. Et devra impérativement trancher sur la méthode. « À défaut, la production d'uranium enrichi par la nouvelle usine commencerait avant même que nous disposions des résultats de l'enquête », s'inquiète Jean-Pierre Morichaud.
Areva peut-il permettre des entraves à son calendrier de marche ? L'investissement ? trois milliards d'euros [5] ? est présenté comme une clé de sa politique de développement. Le géant mondial du nucléaire, qui détient 25 % des capacités mondiales d'enrichissement, n'entend pas se laisser déposséder d'une miette de ses parts de marché.
*****************
[1] Permettant un suivi exhaustif et continu de cette pathologie. Il n'en existe actuellement que dans environ 20% des départements.
[2] Outre l'usine d'enrichissement d'uranium, sont implantées sur 600 hectares une centrale nucléaire et diverses unités d'Areva ou du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), employant au total 6000 personnes.
[3] Ces commissions mixtes (exploitants, pouvoirs publics, associations), présidées par un représentant du conseil général, sont au nombre de 30 en France, autour des sites nucléaires. Inscrites dans la loi de juillet 2006 sur la transparence nucléaire, elles viennent de voir préciser, par un décret du 14 mars 2008, leur composition précise ainsi que leur autonomie financière (pour lancer des études, notamment).
[4] En 2004, déjà, la Commission nationale du débat public (CNDP) avait confié à Areva l'organisation du débat public sur Georges Besse II (le premier concernant un projet industriel nucléaire en France).
[5] (C'est l'une des quatre chantiers majeurs du nucléaire actuellement, avec les réacteurs EPR (Flamanville) et Iter (Cadarache), ainsi que le centre d'enfouissement des déchets radioactifs de Bure (Meuse).
19/2/2008 - Le calendrier de construction de l'usine d'Areva d'enrichissement d'uranium Georges Besse II, au Tricastin (Drôme), est strictement respecté, a indiqué mardi le groupe nucléaire français Areva. Areva "vient de remettre à Enrichment Technology Company (ETC) les clés du bâtiment d'assemblage des centrifugeuses de l'usine" et cet événement "confirme le strict respect des échéances du projet", affirme le groupe dans un communiqué. ETC, filiale d'Areva et du britannique Urenco, "assemblera à partir de l'été prochain les centrifugeuses en provenance de ses ateliers allemands et hollandais", où la fabrication des composants s'y poursuit "conformément au calendrier prévu", ajoute Areva. La construction de cette usine d'enrichissement par centrifugation a débuté en juillet 2006. Sa mise en service est prévue au premier semestre 2009, avec une montée en puissance jusqu'en 2017 pour atteindre une capacité de production de 7,5 millions d'unités de travail de séparation (uts, unité de mesure dans l'enrichissement). L'usine Georges Besse II doit remplacer l'usine d'enrichissement par diffusion gazeuse Eurodif, exploitée depuis 1978 au même endroit. La centrifugation permet d'enrichir l'uranium avec 50 fois moins d'électricité que la diffusion gazeuse. Il s'agit d'un investissement de 3 milliards d'euros. Avec cette usine, Areva "entend conforter sa position sur le marché de l'enrichissement, où le groupe détient 25% des capacités mondiales disponibles", selon le communiqué.
Le Dauphiné Libéré, 29/10/2006:
Les 350 mètres de long et 160 de large du chantier semblent un peu moins nus depuis l'arrivée voilà un mois des premières grues. Des engins à l'image du terrain : plutôt imposants.
Après la phase de terrassement, le génie
civil a débuté sur la commune de Bollène
où sera construite la première tranche de l'usine
en attendant la deuxième à Pierrelatte. «
Le projet prend vraiment corps aujourd'hui », se réjouit
Philippe Horteur, directeur de la Société d'enrichissement
du Tricastin (SET), filiale d'Areva, qui a en charge le chantier
et la préparation de l'exploitation d'une usine qui doit
produire sa première unité en 2009.
Chez Areva depuis 1983 et sur le site du Tricastin depuis 1988,
l'homme connaît le dossier sur le bout des doigts. Sur le
terrassement, il explique : « Pour renforcer le sol, alluvionnaire,
nous avons surélevé le terrain avec un remblai de
près de cinq mètres et nous avons posé environ
20 000 colonnes ballastées ou induites. »
Les équipements para-sismiques ont fait l'objet d'une attention
toute particulière : « Comme à Eurodif ou
à Cruas, nous avons isolé le sol avec des cubes
de caoutchouc sur lesquels nous posons des dalles anti-sismiques
qui doivent être parfaitement horizontales, parce que par
rapport au procédé de centrifugation la nouvelle
usine doit être parfaitement stable.»
Une usine dite "modulaire". Concernant une éventuelle
attaque terroriste sur ces installations les plus sensibles, la
construction répond aux exigences en la matière
suivant le principe des « poupées gigognes »
indique le directeur. Autre particularité, permise par
le procédé de centrifugation : l'une usine est dite
"modulaire" c'est-à-dire que lorsqu'une cascade
de centrifugeuses sera achevée, elle passera en phase d'exploitation,
sans attendre la réalisation de l'ensemble des cascades
constituant un module. « Mais dans l'ensemble, précise-t-il,
les techniques utilisées sont classiques dans le BTP. L'usine
ressemblera à de grands bâtiments très grands
mais pas très hauts. On ne verra qu'une cheminée
de 30 à 35 mètres de haut ». Le plus gros
investissement industriel en France de ces dix dernières
années n'en est pas pour autant le plus gros chantier...
Les premiers bâtiments seront construits d'ici à
la fin 2007. Il s'agira des ateliers destinés à
recevoir les centrifugeuses. Car si le chantier est important,
ce sont avant tout les machines qui constituent la véritable
spécificité du gigantesque projet GB II. Pour preuve,
il correspond peu ou prou à la moitié des trois
milliards d'euros investis dans le projet.
Le Monde, 10/10/2007:
Pour enrichir l'uranium, la France renonce à la technique de la diffusion gazeuse et se tourne vers celle de l'ultracentrifugation, moins coûteuse
La France nucléaire s'apprête
à négocier un virage technologique délicat.
L'usine d'Eurodif - filiale d'Areva - du Tricastin, sur la commune
de Pierrelatte (Drôme), va réduire son activité
d'enrichissement de l'uranium. Elle cédera la place d'ici
à 2009 à une nouvelle unité voisine, dont
la construction vient de commencer. Ce passage de témoin
sonnera le glas de la technologie d'enrichissement par diffusion
gazeuse : la France se convertira à l'ultracentrifugation,
moins coûteuse en énergie et donc plus compétitive.
Les Etats-Unis sont engagés sur la même voie.
L'enrichissement est l'opération par laquelle l'uranium
naturel devient utilisable dans un réacteur nucléaire.
A l'état naturel, ce minerai est composé à
plus de 99 % d'uranium 238. Il contient 0,7 % d'uranium 235, seul
utilisable dans le cadre des réactions de fission. Ce taux
doit être porté à environ 5 % pour un usage
civil et à plus de 90 % pour un usage militaire.
Trois procédés peuvent permettre de doper ce taux : la diffusion gazeuse, la centrifugation et l'enrichissement par laser. La première de ces techniques est celle qui a été choisie en France, au milieu des années 1970, par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA). A l'époque plus performante que ses concurrentes, elle souffre pourtant de nombreux inconvénients. D'abord, le procédé ne peut être interrompu. Démarrée en 1979 et fonctionnant à pleine puissance depuis 1982, l'usine d'Eurodif n'a jamais été arrêtée. La diffusion gazeuse est aussi d'une considérable voracité énergétique. Ce défaut, qui passait pour mineur en 1970, est aujourd'hui un vice cardinal.
Sur le site du Tricastin, quatre réacteurs de 900 mégawatts (MW) sont installés à la seule fin d'alimenter l'usine d'Eurodif. En fonctionnement normal, sa puissance est en effet de 3 000 MW. L'usine Georges Besse II d'ultracentrifugation, qui prendra sa suite, ne consommera que 50 MW. EDF va donc virtuellement " gagner " une nouvelle centrale nucléaire d'ici quelques années. Même si les centrifugeuses doivent être capables de tourner à 100 000 tours par minute, l'utilisation de nouveaux matériaux très légers et résistants a permis d'augmenter l'efficacité de cette technologie sans alourdir pour autant la facture en électricité.
OBSOLESCENCE
Négocier ce virage technologique n'a pas été sans péril pour Areva. Au début des années 2000, lorsque l'obsolescence de la diffusion gazeuse est devenue évidente, " Areva a frôlé la mort ", assure un responsable de l'entreprise. Pourquoi ? Simplement parce que le CEA ne maîtrisait pas de technologie alternative. L'enrichissement par laser, objet de nombreuses recherches en France, s'est révélé prometteur mais pas immédiatement déployable au niveau industriel. L'ultracentrifugation n'était pas suffisamment maîtrisée.
Areva est sortie de ce mauvais pas en acquérant en 2003 - pour une somme demeurée confidentielle - la technologie d'un de ses concurrents, Urenco, un consortium anglo-germano-néerlandais qui détient environ 25 % du marché mondial de l'enrichissement. Les deux sociétés ont fondé une filiale, ETC, détenue à parité et chargée de développer les technologies d'ultracentrifugation.
Confronté au même obstacle technologique
qu'Areva, l'américain Usec (environ un quart du marché
mondial) a pris une option différente en développant
lui-même ses propres centrifugeuses. Ce choix, audacieux,
n'est pas du goût de certains de ses clients historiques.
" Les Sud-Coréens sont par exemple spontanément
venus vers nous, il y a quelques mois ", dit un cadre d'Areva.
Signe que des tensions sont prévisibles sur ce secteur
sensible, le contrat signé par la société
française avec l'électricien coréen court
jusqu'en... 2030.
Extrait de la lettre d'information du Comité Stop Nogent-sur-Seine n°107,
mai-septembre 2005:
La France va abandonner le procédé d'enrichissement par diffusion gazeuse actuellement utilisé à l'usine Eurodif pour un procédé par centrifugation. Ceci nécessite la création d'une nouvelle installation nucléaire de base et devrait susciter une mobilisation antinucléaire nationale car l'enrichissement de l'uranium est à la base de toute l'industrie nucléaire civile et aussi militaire.
Rappelons que des trois isotopes U238, U235,
U234 de l'uranium naturel, seul l'uranium 235 est fissile. Alors
que sa concentration en poids est d'environ 0,71% dans l'uranium
naturel (pour 99,28% d'U238 et 0,005% U234) il est nécessaire
d'augmenter la concentration en U235 pour utiliser l'uranium dans
les réacteurs nucléaires. Elle est enrichie entre
3 et 6% dans le combustible des réacteurs actuels. Il est
envisagé un enrichissement à 15% pour les réacteurs
dits de 4ème génération.
L'étape de l'enrichissement intervient après l'extraction
du minerai d'uranium puis de sa concentration en uranium sur le
site minier par des traitements aboutissant à un produit
pâteux (le « yellow cake ») et de la conversion
des concentrés d'uranium en hexafluorure d'uranium UF6
à Pierrelatte (Drôme) dans les installations de COMURHEX.
L'enrichissement s'effectue sur l'UF6 gazeux à l'usine
Eurodif de Pierrelatte, rebaptisée Georges Besse I, par
le procédé de diffusion gazeuse.
Remarquons que s'il y a enrichissement de l'uranium d'une part,
il reste bien évidemment de l'uranium appauvri d'autre
part : la conversion de 8 kg d'uranium naturel à 0,71%
d'U235, produit 1 kg d'uranium enrichi à 3,7% et 7 kg d'uranium
appauvri (UA) à 0,25%.
Eurodif,
tuyauterie de la cascade d'enrichissement.
Le projet annoncé par AREVA de passer
de la diffusion gazeuse à un autre procédé
par centrifugation, a fait l'objet d'un débat public en
Rhône-Alpes du 1er septembre au 22 octobre 2004. A notre
connaissance, la seule réaction sur place a été
une conférence de presse menée par la CRIIRAD et
le Réseau « Sortir du nucléaire ».
Or, en Limousin nous sommes aussi concernés, qui dit enrichissement
de l'uranium dit aussi qu'il en résulte de l'uranium appauvri
(UA) nous le savons et pour cause, puisqu'à Bessines nous
avons hérité de l'UA résultant de l'enrichissement
effectué à Eurodif. Dans une ICPE, installation
classée pour la protection de l'environnement, a été
autorisé « l'entreposage » de 199 900 tonnes
d'oxyde d'uranium appauvri sous forme de poudre ! Cette ICPE personne
n'en voulait en 1995, ni la population ni les élus ni les
commissaires enquêteurs malgré l'argument développé
par COGEMA d'un ré-enrichissement ultérieur de UA
grâce à une merveilleuse technique par laser, le
procédé SILVA. Aussi, dès que nous avons
appris l'existence du nouveau projet AREVA nous avons saisi par
courrier les élus des Conseils Régional et Général,
et par tract distribué à Limoges la population,
tous s'étant autrefois massivement prononcés contre
le projet d'entreposage de UA.
Vue partielle d'un groupe de diffusion.
Nous nous sommes procurés la pub AREVA
sur le sujet en téléphonant à COGEMA-Pierrelatte,
une somptueuse plaquette, ainsi que le « Dossier du maître
d'ouvrage » ces deux documents étant destinés
au débat public.
Ce que nous avons appris, entre autres, sur l'enrichissement par
laser qui nous fut présenté en 1995 comme une solution
d'avenir pour la matière première que serait l'uranium
appauvri a, comme on dit, « retenu toute notre attention
». Lors du dépôt du dossier d'enquête
publique, le laser était « la » solution
retenue qui permettrait de reprendre les 199 900 tonnes d'UA pour
les ré-enrichir, tout cela afin de convaincre les élus
et la population qu'il s'agissait bien d'un entreposage et non
d'un stockage, que cet UA serait enlevé pour être
enrichi au bout d'une vingtaine d'années voire moins, voulant
prouver par là que cet UA n'est pas un déchet. Or
voilà la chose abandonnée, bien qu'elle ait «
fait la preuve de sa capacité théorique à
enrichir l'uranium, son utilisation industrielle se heurtant à
des coûts rédhibitoires... » ? Comme quoi les
prévisions à court terme dans le nucléaire
sont aussi fiables que la météo du lundi pour le
week-end...
La surprise de la centrifugation (procédé adopté pour Georges Besse II) c'est l'économie d'énergie qui est annoncée pour une capacité annuelle nominale voisine de celle de la diffusion gazeuse. La capacité de production est évaluée en unités dites UTS, « unité de travail de séparation* », 10 millions d'UTS pour Eurodif et 7,5 à 11 millions d'UTS pour Gorges Besse II. (D'après Wise-Paris** en 2001 Eurodif a produit 2 165 tonnes d'UF6 enrichi à partir de 18 194 tonnes d'UF6 naturel fourni par Comurhex-Pierrelatte. D'après la documentation AREVA la production de 1 kg d'uranium enrichi à partir de 8 kg d'uranium naturel correspond à 5 UTS et un réacteur de 900 MW consomme annuellement 100 000 UTS.)
Eurodif utilise 3 réacteurs du Tricastin à pleine puissance et on peut faire pareil avec seulement 50 MW ! On voit que le gaspillage n'est pas l'exclusivité des ménages ! Pourquoi avoir choisi la diffusion gazeuse alors que le procédé par centrifugation est aussi ancien ?
Le calendrier prévisionnel semble avoir
quelque retard. Début 2005 devait voir l'attribution du
« Permis de construire » et le début des enquêtes
publiques DAC (décret d'autorisation de création
de l'installation nucléaire de base INB) et DARPE (demande
d'arrêté de rejet et de prélèvement
d'eau). La DRIRE nous a confirmé en juin 2005 que les dossiers
d'enquête publique n'étaient toujours pas arrivés
dans ses services.
Ce retard est-il dû au fait que des études de sûreté
concernant le risque de sismicité, le risque de criticité
et le risque de chute d'avion ont été demandées
par l'autorité de sûreté nucléaire
(ASN) ? Ces études sont-elles terminées et ont-elles
donné satisfaction à l'ASN ?
Le débat public : qu'en dire, sinon que la Commission
Nationale de Débat public ayant décidé que
l'organisation du débat public serait confiée au
maître d'ouvrage, AREVA ( ! ) on peut lire qu'une «
commission de pilotage composée de quatre membres indépendants
du groupe AREVA, est chargée d'animer le débat public
». Pas d'autres indices nous permettant de mieux cerner
« l'indépendance » de ces quatre membres...
Mais il y a bien longtemps que nous avons appris qu'en matière
de nucléaire, tout n'est qu'une affaire de croyance, qu'il
s'agisse de transparence, d'information objective, d'infaillibilité
des concepteurs ou de celle des exploitants, des enseignements
du « retour d'expérience » après incidents
ou accidents.
Pour en savoir plus : www.debatpublic-gbesse2.org
Au fond notre critique porte sur ce qui
ne figure pas au projet de débat public et qui devrait
impérativement en faire partie, à savoir :
- que deviennent les déchets de l'enrichissement, où
sont-ils censés aller ? Les réunions publiques ayant
été organisées dans les communes situées
aux alentours du site nucléaire du Tricastin, le débat
contradictoire n'a pas été accessible aux habitants
du Limousin. Cette carence du dossier sera passée inaperçue
alors que 7 kg d'UA sont produits par kg d'uranium enrichi !
- Où entreposer l'uranium appauvri ? Sur place ? Sur quelque
site minier propriété de COGEMA ?
- Où iront les tonneaux de fluorine provenant de la défluoration
de l'U appauvri et qui contiennent de l'uranium ? Sur quelle décharge
publique ? (A notre connaissance la réaction de l'association
ASPCV*** qui s'oppose à la mise en décharge
de ce type de déchets a été la seule réaction
locale à ce jour). Les enquêtes publiques concernant
les ICPE (installations classées pour la protection de
l'environnement) prévoient, dans le cas de porcheries ou
de poulaillers industriels, les conditions de stockage ou d'évacuation
des lisiers, des fientes etc. Les autorisations sollicitées
pour les rejets et prélèvements de la nouvelle INB
d'enrichissement Georges Besse II ne concernent que l'eau, nous
avons donc quelques sujets d'inquiétudes quant au devenir
de l'UA et de la fluorine dopeé à l'uranium pour
ne citer que ceux là !
Nous attendrons les dossiers des enquêtes publiques et ferons
critiques et observations sur les cahiers d'enquête mais
ce faisant nous savons d'expérience que nous alimenterons
une procédure « consultative » qui se veut
nécessaire et « démocratique » alors
que les jeux sont faits et que les conclusions et avis défavorables
tant de la population, des élus et de la commission d'enquête
peuvent être ignorés par le Préfet. C'est
bien ce qui est arrivé en Limousin en 1995 pour l'entreposage
d'uranium appauvri à Bessines sur Gartempe. (Tandis qu'à
Pierrelatte la population n'a pas été désavouée,
ni la commission d'enquête. Il s'agissait, il est vrai,
de la régularisation d'une installation existante mais
saturée).
S'il s'agit de sortie ou d'abandon du nucléaire, le dossier
Georges Besse II nous semble stratégiquement au moins aussi
bien placé que celui de l'EPR. En effet la production d'uranium
enrichi alimente notre parc nucléaire et l'exportation.
Mais on nous fait remarquer que l'EPR est plus mobilisateur. Pourquoi,
alors que Georges Besse II, plus sûrement encore qu'un EPR
à Flamanville et l'autre en Finlande, signifie la relance
incontestable du nucléaire ? D'ailleurs une dépêche
AFP de fin mai annonce que les commis voyageurs du nucléaire
français vont aller démarcher Khadafi en Lybie !
Un client de plus pour Georges Besse II !!!
Pour finir, reprenons le dossier du Maître d'ouvrage AREVA
et son calendrier prévisionnel :
- Fin 2007... Première production de l'usine Georges Besse
II
- Vers 2020.. Fin des opérations de démantèlement
d'Eurodif.
A quand la sortie crédible du nucléaire prônée par ceux qui prétendent qu'une sortie immédiate avec les moyens existants (comprenant le thermique classique) ne serait pas réaliste ?
CLADE (Collectif Limousin Antidéchets),
6, rue Porte Panet Limoges 87000.
* Selon AREVA, l'UTS (Unité de Travail de Séparation)
est l'unité de mesure utilisée comme standard international
pour quantifier les besoins en enrichissement des réacteurs
et la capacité des usines d'enrichissement, quelle que
soit la technologie utilisée.
** Beaucoup de renseignements sur l'enrichissement de l'uranium
dans : www.wise-paris.org/francais/nosbreves/annee_2002/nosbreves021018c.html
*** ASPCV, association de sauvegarde du patrimoine et du
cadre de vie, Solérieux (Drôme).