OTTAWA (2 jan 07) -
Les services canadiens de renseignement trouvent "plutôt
surprenant" que des terroristes n'aient pas encore fait exploser
une bombe radioactive rudimentaire, étant donné
la disponibilité du matériel requis pour la fabriquer,
et la facilité avec laquelle ce matériel pourrait
être transformé en arme meurtrière.
Selon une étude du Service canadien du renseignement de
sécurité (SCRS) qui vient d'être dévoilée,
une "bombe sale" est le moyen le plus vraisemblable
de disséminer délibérément des radiations
mortelles.
Mais toujours selon cette étude, dont la Presse Canadienne
a obtenu copie en vertu de la Loi sur l'accès à
l'information, "un groupe terroriste déterminé
et ingénieux" pourrait se livrer à des formes
plus élaborées d'attaque nucléaire ou radiologique.
Des extrémistes pourraient acquérir un engin explosif
nucléaire existant, élaborer une arme improvisée
à partir de matériel trouvé sur le marché
noir ou saboter des installations nucléaires dans le but
de causer une fuite radioactive.
Pour arriver à cette évaluation des menaces, le
SCRS se fie principalement à des résultats de recherches
déjà publiées.
Une bombe radioactive de fabrication artisanale pourrait consister
en un explosif conventionnel auquel on aurait ajouté du
matériel radioactif qu'on trouve couramment dans les laboratoires
d'universités, les centres de traitement contre le cancer,
les établissements de recherche ou les sites industriels.
L'explosion d'un tel engin, sans faire énormément
de victimes initialement, pourrait contaminer une vaste superficie,
suscitant la panique et le chaos, notamment économique.
Le SCRS note par ailleurs que les buts des terroristes ne seraient
plus d'infliger des pertes massives en vies humaines, mais plutôt
de causer de graves dommages économiques.
Cependant l'étude ne permet pas d'évaluer la réelle
probabilité d'une attaque radiologique ou nucléaire,
estime le professeur Wade Deisman, criminologue et directeur du
projet de sécurité nationale de l'Université
d'Ottawa.
Jim Bronskill
A lire:
- Les dangers du nucléaire et le terrorisme
- Du risque majeur à la société autoritaire
- Trafic de substances radioactives
- Les centrales nucléaires vulnérables
à des attaques aériennes suicide
(42 mn, Viméo, basse définition) Un film de Hesi Carmel, Jean-Marc Gonin et Richard Puech (coproduction France3-Capa) qui enquête sur les menaces, réelles ou supposées, d'attentat terroriste nucléaire. |
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Un film de Hesi Carmel, Jean-Marc Gonin et Richard Puech (coproduction France3-Capa) qui enquête sur les menaces, réelles ou supposées, d'attentat terroriste nucléaire. Hesi Carmel est un journaliste d'investigation israélien, ancien adjoint au chef du Mossad, Jean-Marc Gonin est rédacteur en chef au Figaro, en charge du service société-enquêtes, Richard Puech, journaliste à l'agence Capa, est réalisateur de plusieurs documentaires. Cette enquête est notamment étayée par des témoignages de Graham Allison, vice-ministre de la Défense de Bill Clinton, Sam Nunn, sénateur américain, promoteur du programme d'aide américain pour la non dissémination des armes nucléaires de l'ex URSS, Yosef Bodansky, conseiller antiterroriste auprès du Congrès, le général Alain Baer, spécialiste français de l'hyperterrorisme, ou le journaliste pakistanais Hamit Mir qui a interviewé Ben Laden à trois reprises dans son repaire afghan. Tous formulent des inquiétudes précises basées sur les trafics de matériaux radioactifs de l'ex URSS, les liaisons dangereuses des réseaux terroristes avec les mafias locales notamment russe et tchétchène, les états nucléaires comme le Pakistan dont les installations sont jugées insuffisamment sécurisées, les déclarations de Ben Laden. Le 11 septembre 2001, après l'attentat contre les "twin-towers" et le Pentagone, l'administration américaine a déclenché la procédure d'alerte nucléaire, témoigne Graham Allison. Selon le document, Ben Laden a affirmé au journaliste Hamit Mir qu'il se serait procuré une arme nucléaire, la "bombe valise", une arme nucléaire portative inventée à l'époque de la Guerre froide par les savants soviétiques. Selon d'autres, il pourrait préparer l'explosion d'une "bombe sale" radioactive. Les intervenants sont en tout cas unanimes à estimer que la mobilisation des Etats et des peuples et les moyens mis en oeuvre ne semblent pas en rapport avec la menace décrite.
Le Monde, 15/11/05:
L'unique réacteur nucléaire d'Australie
était visé, selon la police australienne, par certains
des dix-huit suspects arrêtés, les 7 et 8 novembre
à Sydney et à Melbourne, dans la plus vaste opération
antiterroriste jamais menée dans ce pays. Trois d'entre
eux avaient été interrogés en décembre
2004 alors qu'ils se trouvaient à bord d'un véhicule,
à proximité immédiate du réacteur
de Lucas Height, une installation scientifique de recherche située
à 40 km au sud-ouest du centre de Sydney.
Ils avaient affirmé être venus essayer une bicyclette
présente dans leur véhicule mais avaient donné,
séparément, des "réponses divergentes"
aux enquêteurs. Ils avaient été relâchés.
La quasi-totalité des personnes arrêtées étaient
sous la surveillance des services de sécurité australiens
depuis un an et demi. Selon l'acte de police soumis à un
tribunal intermédiaire de Sydney et rendu public lundi
14 novembre, l'interpellation à Lucas Height serait à
rapprocher de la découverte d'un verrou brisé sur
la clôture entourant le réacteur. Des arsenaux et
des notes informatiques sur la fabrication d'un explosif (triacétone
tripéroxide) ont été trouvés à
leurs domiciles.
Presque tous sont naturalisés australiens ou résidents
permanents d'origines libanaise, ex-yougoslave et indonésienne,
tombés sous l'influence d'un imam radical arrivé
d'Algérie en 1989, Abdul Nacer Benbrika, dit Abou Bakr,
lui aussi détenu.
Souvent évoquée, la menace terroriste nucléaire
n'a jamais réellement effrayé les experts. Le rapport
de la commission d'enquête américaine sur le 11 septembre
2001 avait mentionné, sans insister, l'hypothèse
de l'attaque d'une centrale à l'aide d'un avion, envisagée,
lors de la préparation des attentats, par Al-Qaida.
Aux Pays-Bas, la police a découvert cet été,
chez l'extrémiste marocain Samir Azzouz, des plans de la
centrale nucléaire de Borssele. Les enquêteurs n'ont
toutefois pu conclure que cet homme, libéré puis
de nouveau arrêté, préparait une attaque.
L'idée que des groupes pourraient viser un site nucléaire
est prise en compte un peu partout. Elle ne convainc pourtant
pas Bruno Tertrais, chercheur à la Fondation pour la recherche
stratégique. "Les groupes islamistes se sont peu
intéressés à cette option, parce qu'en réalité
ils connaissent mal la question nucléaire", note
l'auteur de La Guerre sans fin (Seuil). Seul le chef tchétchène
Chamil Bassaev semble avoir eu recours à cette menace.
En 1995, il a averti que quatre valises contenant du césium
137 avaient été placées à Moscou.
Un colis fut effectivement découvert.
L'explosion d'un engin nucléaire ferait des milliers de
victimes. Mais les difficultés techniques d'un tel projet
sont grandes, même si la dissémination des matériaux
radioactifs après, notamment, la disparition de l'URSS
ne permet pas de l'exclure. Autre hypothèse, l'explosion
d'une bombe plus "artisanale" disperserait des éléments
radioactifs. Quant à un attentat-suicide à l'aide
d'un véhicule, il ne permettrait sans doute pas de percer
le blindage entourant les réacteurs.
Francis Deron et Jean-Pierre Stroobants
14 Novembre 2005 - Depuis
l'arrestation la semaine dernière à Sydney et Melbourne
de dix-huit terroristes présumés, l'Australie sait
qu'elle a échappé à un attentat. Mais ce
qu'elle vient de découvrir a de quoi effrayer le pays.
Car d'après les enquêteurs, l'unique réacteur
nucléaire australien était la cible probable des
militants islamistes. Un attentat visant un site nucléaire,
donc. La menace que redoutent tant de pays.
Lors des perquisitions conduites le 8 novembre, la police avait
découvert 165 détonateurs ainsi que des substances
chimiques permettant de fabriquer des explosifs. Depuis, les suspects,
qui ont suivi un entraînement au Djihad, ont été
inculpés de participation à une organisation terroriste
et de détention d'explosifs en vue de préparer un
acte terroriste. Trois d'entre avaient déjà été
interpellés à proximité du réacteur
de Lucas Heights, dans la banlieue de Sydney. Ce jour-là,
on avait constaté qu'un verrou d'une des grilles de l'enceinte
du réacteur avait été récemment cassé.
29/08/2005 - Des
experts nucléaires australiens ont découvert dans
"deux pays" d'Asie du sud-est des "sources importantes"
de matériaux permettant la fabrication d'une "bombe
sale", bombe nucléaire du pauvre, indique lundi le
quotidien The Australian.
Une équipe de l'Organisation australienne de la technologie
et de la science nucléaire (ANSTO), en mission en Asie
du Sud-Est, a mis la main sur des matériaux en quantité
suffisante pour contaminer le coeur d'une ville importante, selon
le quotidien. "Il y a deux pays où nous avons trouvé
des sources assez importantes", a déclaré au
journal le responsable des opérations de l'Organisation,
Ron Cameron, refusant d'identifier les pays tant que les matériaux
n'étaient pas placés en sécurité.
Sur un site, un morceau "significatif" de cobalt utilisé
dans le traitement du cancer a été retrouvé
abandonné après la fermeture d'un centre de radiothérapie.
Une bombe conventionnelle couplée à un morceau de
cobalt radioactif de quelques centimètres seulement de
diamètre et d'une trentaine de long pourrait contaminer
une partie importante d'une ville, accroître les risques
de cancer et contraindre les habitants à abandonner leur
résidence durant des décennies, selon la Fédération
des scientifiques américains. "S'il y a une région
du monde où les terroristes peuvent mettre la main sur
ces matériaux, c'est là où ils iront",
a averti le responsable de l'ANSTO.
La "bombe sale", surnommée "bombe nucléaire
du pauvre", est considérée par les experts
comme le moyen le plus probable de dissémination intentionnelle
d'une pollution radioactive par un groupe terroriste. On appelle
"bombe sale" l'association d'explosifs conventionnels
à des radio-éléments qui seraient dispersés
lors de l'explosion et contamineraient une zone sensible (centre
commercial, aéroport, etc...).
Le Monde, 17/05/05:
Existe-t-il des moyens pour protéger
la population civile contre une attaque de nature nucléaire,
radiologique, biologique ou chimique (NRBC) ? Non. Est-il possible,
financièrement et politiquement, de mettre en place une
telle politique ? Pas davantage. Peut-on, au moins, intervenir
sur les lieux d'un attentat ou d'un accident lié à
la menace NRBC, en raccourcissant les délais et en se dotant
de matériels plus sophistiqués et efficaces ? Oui.
Tels est l'enseignement du séminaire international NRBC
qui s'est tenu à Avignon, du 10 au 12 mai, et a réuni
300 participants, venus d'une trentaine de pays.
L'attentat au gaz sarin de Tokyo, en 1995, les attaques terroristes
du 11 septembre 2001 contre New York et Washington, les lettres
contaminées au bacille du charbon ou à l'anthrax
aux Etats-Unis, la découverte d'un projet d'attentat à
la ricine par la police britannique, les bombes meurtrières
du 11 mars 2004 à Madrid ou encore l'accident de l'usine
AZF de Toulouse, le 21 septembre 2001, sans parler de l'épidémie
de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), en
2003, ont rappelé que les risques menaçant les populations
civiles, qu'ils résultent d'accidents, de causes naturelles
ou d'attentats terroristes, sont réels et de plus en plus
diversifiés.
Pour tenter d'apporter une réponse aussi pertinente que possible, les armées, les autorités civiles et les industriels travaillent en étroite collaboration. Ce qui n'empêche pas une grande inégalité entre le monde militaire et le monde civil : les armées s'équipent et se protègent, la société civile peut espérer, au mieux, gérer les conséquences d'une attaque de grande ampleur, avec des moyens insuffisants. (Voir aussi: "Les simulations d'accident")
Pendant la guerre froide, seules les armées s'étaient dotées de moyens de lutte contre le risque NRBC. La menace venait alors d'un ennemi clairement identifié, que l'on gardait à distance par la dissuasion. Une telle approche ne suffit plus. "Les menaces ne sont plus aux frontières, mais il n'y a plus de frontières aux menaces", a rappelé le colonel Lentilhac, coordinateur NRBC pour l'armée de terre.
Il faut désormais livrer des "guerres asymétriques" , a souligné le général Jean-Jacques Scellos, chef de la division maîtrise des armements à l'état-major des armées (EMA), puisque les terroristes "visent délibérément les populations civiles" .
L'armée française s'est adaptée, à la fois en prenant en compte le risque industriel, en se dotant de moyens (tenues NRBC, abris, moyens de détection et de décontamination, etc.) permettant d'opérer en ambiance NRBC, et en étendant cette capacité à toutes les opérations extérieures. Elle s'efforce de combler ses lacunes, surtout dans le domaine biologique et, instruits par l'expérience des armes de destruction massive en Irak, les spécialistes s'équipent de matériels pour rapporter la preuve juridique d'une attaque NRBC.
L'approche du monde civil est très différente, un équilibre incertain devant être trouvé entre la sensibilisation au risque et le souci de ne pas provoquer de panique inutile. "Il ne servirait à rien de distribuer 60 millions de masques à gaz en France, explique le général Scellos, et il serait contre-productif de provoquer une paranoïa au sein de la population."
C'est sans doute ce qui explique l'approche hésitante des pouvoirs publics : les exercices de protection civile se multiplient, tout en étant peu nombreux et souvent réservés aux spécialistes. Les moyens, en particulier de décontamination, sont insuffisants, puisque c'est essentiellement aux départements de se prendre en charge. En France, seul le ministère de la défense dispose des financements nécessaires. Dans le monde civil, la protection NRBC est limitée aux intervenants (équipes de secours, de déminage, de décontamination) et aux lieux à risque (usines, centrales, etc.). Il n'existe pas, par exemple, de stocks stratégiques de masques à gaz pour la population, laquelle, contrairement à ce qui se passe dans des pays comme Singapour, ne fait pas l'objet de campagnes de sensibilisation de masse. L'accent est mis sur la formation des personnels et sur les structures d'accueil hospitalières.
Les militaires savent qu'une attaque NRBC serait difficile à gérer. "Nous serons forcément surpris, insiste le colonel Garrigues, de l'EMA, et il faudra savoir communiquer, vis-à-vis des soldats, de leurs familles, et de l'opinion publique. Or cette communication aura un impact sur la capacité opérationnelle des forces." Pendant la première guerre du Golfe, rappelle-t-il, "nous avions 300 000 gars qui se mettaient en tenue NRBC à chaque départ de missile Scud ! C'était ridicule. La priorité est donc d'évaluer la menace", tâche qui relève des services de renseignement.
Un exercice de crise a été présenté à Avignon, avec regroupement, puis décontamination des victimes ( progression dans un sas, douche de décontamination, etc.), dont on imagine qu'il serait moins ordonné dans des circonstances réelles. Pendant deux jours et demi, les responsables militaires et civils ont côtoyé les industriels du Groupement d'intérêt économique (GIE) NRBC, qui regroupe 13 industriels du secteur, avec un chiffre d'affaires global d'environ 100 millions d'euros par an, dont 80 % proviennent des exportations.
Des matériels de détection et de protection de dernière génération ont été présentés, dans un curieux mélange de préoccupations commerciales, de soucis de protection civile et d'efficacité militaire, d'où il ressort que la protection contre le risque NRBC demeure très aléatoire.
Laurent Zecchini
LONDRES (16/03/2005) -
Une conférence internationale sur la sécurité
nucléaire s'est ouverte mercredi à Londres, organisée
par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA)
en coopération notamment avec l'Union européenne.
La conférence, intitulée "Conférence
internationale sur la sécurité nucléaire,
directions internationales pour l'avenir", entend permettre
"d'échanger des informations sur comment combattre
de la meilleure manière les menaces nucléaires criminelles
et n'émanant pas d'Etats", a précisé
l'AIEA, soulignant la "portée considérable"
du terrorisme international, "mieux organisé et mieux
financé que jamais auparavant".
Parmi les intervenants à cette conférence, également
organisée en coopération avec Europol, Interpol
et l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération
en Europe), figurent notamment Mohamed Elbaradei, directeur général
de l'AIEA, ainsi que Annalisa Ginaella, représentante de
Javier Solana, Haut représentant pour la politique extérieure
de l'UE. Aucune résolution ou vote n'est attendu durant
cette réunion qui s'achevera vendredi.
Madrid, 11/03 -
La communauté internationale se doit d`agir rapidement
contre le terrorisme pour éviter que des activistes ne
commettent un attentat nucléaire, a déclaré
jeudi Kofi Annan.
Les dirigeants du monde entier doivent adopter au plus vite un
traité global de lutte contre le terrorisme, a dit le secrétaire
général des Nations unies lors d`une conférence
internationale organisée à Madrid au premier anniversaire
des attentats du 11 mars 2004 qui avaient fait 191 morts dans
la capitale espagnole.
Ce sommet, auquel assistent une vingtaine de chefs d`Etats et
de gouvernements, mais aussi des experts du terrorisme et des
questions islamiques, doit permettre de définir une stratégie
contre le terrorisme.
Si des activistes perpétraient une attaque nucléaire,
a prévenu Annan, "cela n`occasionnerait pas seulement
des destructions très importantes, mais cela ébranlerait
l`économie mondiale et rejetterait des dizaines de millions
de personnes dans une situation de grave pauvreté",
a dit Annan.
Il a exhorté les pays membres de l`Onu à passer
outre à leurs divergences sur la définition même
du terrorisme, une question qui a souvent entravé l`élaboration
d`une stratégie mondiale de lutte contre les activistes.
PARIS (26 décembre 2004) - Une semaine avant la date butoir du 1er janvier 2005,
les assureurs français restent dans l'incertitude au sujet
de la couverture de l'assurance terrorisme pour les particuliers,
car la décision sur l'éventuelle garantie illimitée
de l'Etat se fait toujours attendre. La France est le seul pays
où la loi interdit aux assureurs d'exclure le risque "attentat"
des contrats d'assurance dommages (automobile, habitation, etc.).
Mais les deux premiers réassureurs mondiaux -Munich Re
et Swiss Re- ont décidé de ne plus couvrir le risque
lié à la "bombe sale", c'est-à-dire
de type nucléaire, bactériologique ou chimique (NBC).
Par conséquent, à partir du 1er janvier 2005, les
assureurs vont être "coincés" entre l'obligation
légale de garantir leurs assurés, et l'impossibilité
de se couvrir eux-mêmes contre des risques d'envergure,
dont le coût est difficilement quantifiable. Une partie
des assureurs plaide donc pour la mise en place d'un dispositif
de type pool de marché, pour leur fournir une couverture
de réassurance (assurance des assureurs) pour les contrats
de particuliers.
Après plusieurs semaines de discussions avec les pouvoirs
publics, "c'est toujours le statu quo", a expliqué
Jacques Deparis, président du pool Gareat (gestion de l'assurance
et de la réassurance des risques attentats et actes de
terrorisme). "Nous espérons une décision de
l'Etat avant la fin de l'année, sinon il sera trop tard
pour 2005", a-t-il confié. Le pool Gareat a été
créé pour les "grands risques" -dont la
valeur assurée est supérieure à 6 millions
d'euros- au lendemain des attentats de septembre 2001 aux Etats-Unis,
et bénéficie d'une garantie illimitée de
l'Etat au-delà de 2 mds EUR. Les assureurs estiment que
l'Etat doit "accepter sa responsabilité" en donnant
sa garantie illimitée pour un Gareat "risques simples",
c'est-à-dire pour les contrats d'assurance dommages des
particuliers et des petites entreprises. Un tel dispositif ne
peut fonctionner efficacement qu'avec une telle participation
de l'Etat ce qui, à l'heure actuelle, semble loin d'être
acquis. "Tout le monde attend de savoir ce que va faire l'Etat
mais cela va se débloquer au dernier moment, entre Noël
et le jour de l'An", a regretté M. Deparis. Mais les
discours des assureurs sont divergents: les mutuelles du Groupement
des entreprises mutuelles d'assurances (Gema) ont trouvé
des capacités (offre de réassurance) pour couvrir
le risque attentat, tandis que les membres de la Fédération
française des sociétés d'assurances (FFSA)
disent rencontrer des difficultés.
Une source proche du dossier à la direction du Trésor
indiquait fin novembre avoir conscience des enjeux, "mais
la nécessité pour l'Etat d'intervenir n'est pas
encore complètement démontrée" et "les
assureurs ne sont pas tous d'accord entre eux". Le Gareat
a donc décidé de préparer une section "risques
simples" facultative ouverte à "toutes le compagnies"
qui ont des manques de capacités, a expliqué M.
Deparis. Selon lui, entre 30 et 50% du marché français
serait dans ce cas. Si la garantie illimitée de l'Etat
est finalement octroyée, cette section adaptera son fonctionnement.
"Nous avons envoyé aux sociétés d'assurances
le projet de montage et nous attendons les retours pour avoir
une idée plus concrète du manque de capacités
et déterminer les plafonds d'intervention", a précisé
M. Deparis.
L'Union de Reims, 14/10/2004 :
Faux accident nucléaire au camp de Sissonne
PARIS (10 octobre 2004) - Une
simulation grandeur nature de secours et
de traitement hospitalier de victimes contaminées par un
attentat radioactif s'est déroulée dimanche à
Paris, une première à cette échelle en France.
L'exercice coordonné par le préfet de police de
Paris, préfet de la zone de défense d'Ile-de-France,
Jean-Paul Proust, et le "patron" du SAMU d'Ile-de-France,
le professeur Pierre Carli,
a consisté à soigner sur place quelque 53 personnes
contaminées par une "dirty
bomb" ("bombe sale") ayant explosé dans
le métro à 8h25. Le "plan blanc" qui mobilise
spécifiquement l'ensemble des services médicaux
a été déclenché.
Des sas et tentes de décontamination ont été
dressés dans l'hôpital Necker (Paris XVe) pour les
victimes de cet attentat, jouées par des élèves-infirmiers
plus vrais que nature, hurlant leur douleur ou manifestant la
détresse consécutive à un attentat.
Trois des 53 blessés, plus grièvement contaminés
ou polytraumatisés, ont été soignés
directement au bloc opératoire et emmenés à
l'hôpital Necker par le SAMU. Les autres blessés
s'y sont rendus par leurs propres moyens.
Il s'agissait de tester l'efficacité des services de secours
et médicaux en cas d'attentat provoqué par une "bombe
sale" qui aurait dispersé des éléments
radioactifs dans le métro.
Selon les organisateurs, cette simulation -- une première
en France en milieu hospitalier à cette échelle,
selon M. Carli --, était le prolongement de l'exercice
d'attentat chimique qui avait eu lieu, dans la nuit du 22 au 23
octobre 2003, dans la capitale. Ce premier exercice grandeur nature,
en conditions réelles, avait été simulé
à la gare RER des Invalides afin de tester la capacité
de forces de police et de secours à faire face à
une telle attaque. L'exercice de dimanche a été
baptisé "R (pour radioactif) 53 (pour le nombre de
victimes)", a indiqué M. Carli, et était de
nature différente. "Il a ses écueils",
a précisé le professeur Carli. "Il s'effectue
dans un temps limité et les tentes de décontamination
ont été dressées avant l'attentat".
"Il permet d'évaluer
la performance des personnels et de faire travailler ensemble
plusieurs services de l'Etat", a-t-il
expliqué. Un souci partagé par le préfet
qui a salué l'effort pour monter les tentes de décontamination:
"treize minutes", au lieu d'une quarantaine aux Invalides
il y a un an. Le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy,
et celui des Collectivités locales, Jean-François
Copé, se sont rendus sur les lieux.
Le premier a indiqué que "la pire chose, c'est l'improvisation"
dans les situations de crise. Il faudra pratiquer cet exercice
dans tous les hôpitaux, a-t-il dit, rappelant les moyens
engagés pour former et équiper les personnels hospitaliers
en NRBC (Nucléaire, radiologique, bactériologique,
chimique). Les deux ministres ont évoqué la "menace
globale" pesant dans le monde à laquelle il "faut
s'habituer". "La gestion de crise fait de plus en plus
partie des moeurs", a déclaré M. Douste-Blazy. Reste maintenant à tirer les
leçons de cet exercice. Globalement positif, de l'avis
général, bien qu'il faille mieux gérer l'arrivée
des victimes, a dit M. Carli. Le préfet
a promis, dans un an, une autre simulation d'un attentat. Des
"centaines de victimes", selon lui, et, cette fois,
"toute la chaîne" des urgences au travail, pompiers,
médecins ou policiers.
Communiqués de presse du Réseau
Sortir du nucléaire, 10/10/2004 :
Simulation d'attentat nucléaire à Paris : une mystification
STOCKHOLM (12 octobre 2003) - Réunis ce week-end à Stockholm, des experts internationaux se sont penchés sur un des pires scénarios catastrophes: que faire si des terroristes parviennent à fabriquer une bombe à fission nucléaire et en font usage?
Un diplomate spécialisé dans le domaine nucléaire et proche de la Commission internationale de protection radiologique (ICRP) a confié à un groupe de journalistes que cette question était l'un des problèmes abordés par la Commission lors de cette réunion.
Prié de préciser ce que serait à son avis le scénario du pire dans le domaine nucléaire, il a répondu: "Une bombe atomique, même très mal faite".
Après les attentats du 11 septembre 2001, l'Agence internationale à l'énergie atomique (AIEA) a exhorté tous les pays à renforcer encore les mesures de protection autour des sources radioactives pour empêcher que des terroristes ne s'en saisissent pour fabriquer des "bombes sales" (ou radiologiques), utilisant un explosif conventionnel pour disperser des particules radioactives.
Mais l'AIEA a également toujours cherché
à relativiser cette menace. D'une part parce qu'il est
difficile de se procurer de l'uranium ou du plutonium et d'autre
part parce que la fabrication de cet engin requiert des compétences
techniques et scientifiques rares.
QUELQUES KILOGRAMMES SUFFISENT
Mais le diplomate interrogé ne partage pas cet optimisme.
"Pensez-vous vraiment que cela puisse être difficile?" a-t-il demandé quand un journaliste a déclaré qu'il était presque impossible de trouver de la matière nucléaire.
"S'il faut 25 à 35 kilogrammes d'uranium hautement enrichi pour fabriquer une bombe conventionnelle, il est possible d'en faire une moins efficace avec seulement quelques kilogrammes".
"L'efficacité de l'explosion ne serait pas terrible, mais elle n'en produirait pas moins une réaction en chaîne", a-t-il expliqué, précisant qu'elle ne provoquerait sans doute pas le fameux champignon atomique.
Sans donner de précisions, il a déclaré qu'un engin rudimentaire à fission nucléaire provoquerait des dégâts importants, par opposition à une "bombe sale" dont le but est davantage d'entraîner des réactions de panique.
En décembre 1994, la police tchèque avait découvert à l'arrière d'une voiture à Prague 2,72 kg d'uranium fortement enrichi, ce qui reste la plus grosse prise mondiale de matière nucléaire. Elle avait été enrichie à 87,7% par de l'uranium-235, l'uranium fissile. Cette cargaison aurait été idéale pour fabriquer une bombe atomique.
Le diplomate a expliqué que le métro londonien serait l'endroit idéal pour perpétrer un attentat à la bombe sale et que le matériau utilisé serait probablement la poudre césium-137, hautement radioactive. Ayant une consistance proche du talc, elle est utilisée par tous les hôpitaux.
"Le métro est une arme de dispersion extraordinaire", a-t-il déclaré, en précisant qu'il n'y aurait qu'à libérer la poudre à l'arrivée d'une rame.
"Le train jouerait le rôle d'un piston. Le césium se répandrait dans tout le métro. Rien ne se produirait d'un point de vue sanitaire, mais les gens seraient affolés."
Reste que le césium peut avoir de graves conséquences. Une boîte rempli de cette poudre avait été retrouvée chez un ferrailleur de Goiania, au Brésil, en 1987, et provoqué alors la pire contamination depuis Tchernobyl. Quelque 249 personnes avaient été exposées, dix avaient été grièvement blessées et quatre autres avaient trouvé la mort.
"Il n'y a jamais eu d'attentat à la bombe sale", a reconnu le diplomate, qui a toutefois estimé que ce n'était qu'une question de temps avant qu'une telle attaque ne se produise.
Le quotidien du médecin 13/05/03
Le Secrétariat général du gouvernement (SGDG) vient de valider une circulaire sur les moyens de secours et de soins face à une action terroriste nucléaire, à paraître prochainement au « Journal officiel ». La France se dote ainsi d'un schéma d'organisation qui n'aurait pas d'équivalent dans le monde et que « le Quotidien » s'est procuré. A la clef, une formation de base qui sera bientôt mise en place ; un premier test a eu lieu à Paris, sous la houlette du SAMU. Un travail de fond destiné à tous les professionnels de santé et qui demandera des années pour « assurer la ligne de flottaison ».
La formation de base des médecins à
la prise en charge des victimes radiocontaminées a déjà
fait l'objet d'un test (DR)
S'agissant des risques NRBC (nucléaire, radiologique, biologique
et chimique), le N et le R sont les lettres les moins bien loties
: la culture du secret défense a occulté celle du
risque, de sa prévention et de son traitement. Une longue
histoire que certains experts, dénonçant d'importantes
lacunes, voudraient réécrire (« le Quotidien
» du 3 avril).
« C'est vrai, convient le Pr Pierre Carli,
directeur du SAMU de Paris, alors qu'on a beaucoup gambergé
ces dernières années sur le risque chimique après
l'attentat au sarin (Tokyo, 1995) et sur le risque biologique
(alertes au charbon en cascade en 2002 à Paris, élaboration
du plan variole), face au nucléaire, on est parti médicalement
de pas grand-chose. »
Le seul risque pris publiquement en considération concernait
celui d'un accident survenant dans une centrale nucléaire.
Mais les attentats du 11 septembre ont fait prendre conscience
aux autorités du spectre d'une
action terroriste, par explosion, épandage ou dissémination
de sources radiologiques.
D'où la « circulaire relative à la doctrine
nationale des moyens de secours et de soins face à une
action terroriste mettant en Suvre des moyens nucléaires
». Un texte réglementaire élaboré sous
l'égide du SGDG, avec la direction générale
de la Sûreté nucléaire et de la Radioprotection,
le haut fonctionnaire de défense au ministère de
la Santé, la direction de l'Hospitalisation, le Service
de santé des armées, les SAMU, ainsi que le Service
de protection radiologique des armées (SPRA).
Sa parution est imminente.
S'y retrouveront les principaux éléments d'un autre
texte (circulaire du 2 mai 2002 consacrée à l'organisation
des soins médicaux en cas d'accident nucléaire ou
radiologique), augmentés d'éléments sur la
collaboration entre les SAMU, les sapeurs-pompiers, les services
de police.
Le document fait le point en une trentaine de pages sur les procédures
spécifiques, détaillant un plan national élaboré
en complément du plan gouvernemental Piratome et décliné
sur le plan zonal (selon les sept zones de défense, avec
chacune un établissement de santé de référence
et des services de santé correspondants, nucléaires,
radiothérapiques et radiologiques), sur le plan départemental
(rôle dévolu à chaque établissement
dans une optique de complémentarité, avec la désignation
d'établissements ciblés en mesure de traiter un
grand nombre de victimes) et sur le plan local (chaque établissement
élabore son propre plan blanc).
Trois catégories de victimes
La circulaire rappelle que « la prise
en charge des victimes doit se faire conformément à
la doctrine habituelle de médecine de catastrophe »
: organisation d'une noria entre le site de l'accident et le poste
médical avancé (PMA) effectuée par des personnels
munis de matériel de radioprotection, mise en place d'un
PMA en dehors de la zone d'exclusion, évacuation des victimes
vers les établissements de soins appropriés, avec
constitution, si nécessaire, d'un centre médical
d'évacuation.
Quant à la prise en charge des victimes, elle découle
de leur catégorisation : groupe 1 pour les personnes atteintes
de lésions conventionnelles (brûlés thermiques,
chimiques, traumatisés, blessés...), associées
ou non à une contamination ou à une irradiation
; groupe 2 pour les victimes non blessées mais avec suspicion
d'irradiation ou de contamination en raison de leur présence
ou de leur activité à proximité de l'événement.
Et groupe 3 pour les populations établies au voisinage
du site de l'accident.
Depuis mars 2002, un guide national d'intervention nucléaire
ou radiologique, élaboré par une vingtaine d'experts
(SAMU, DGSNR, CEZA, SPRA, DHOS, DGS), propose un ensemble de fiches
pratiques pour favoriser la réactivité des acteurs
de santé face à « un événement
calamiteux mettant en jeu des substances radioactives ».
Y figurent quelques généralités («
Soigner un irradié externe n'entraîne aucun risque
pour le personnel soignant » ou : « En cas de lésions
chirurgicales associées, l'urgence conventionnelle prime
»), des directives pour une bonne démarche diagnostique,
les règles de protection des sauveteurs (masque respiratoire
avec port d'une tenue antipoussière, deux paires de gants
en latex pour les aérosols, port d'une combinaison spéciale,
étanche et pressurisée, pour les radioéléments
diffusibles par voie transcutanée, port d'un dosimètre
à lecture directe en cas de risque d'irradiation associée.
Et, bien entendu, conduite à tenir pour la prise en charge
des urgences, absolues et relatives, avec les techniques de décontamination
externe, le déshabillage et le lavage devant obéir
à des règles strictes. Le traitement initial des
radiocontaminations internes est également détaillé
pour les composés les plus importants (américium,
césium, cobalt, iode, plutonium, tritium et uranium).
Une formation d'une journée
Un module de formation d'une journée,
intégré dans la formation générale
NRBC, a déjà été testé par
le SAMU de Paris en association avec le SPRA et la DGSNR, avec
une trentaine de médecins franciliens participants. «
Nous leur avons dispensé des notions théoriques
de biophysique et des conduites à tenir très concrètes,
avec la projection de 250 diapositives », explique l'un
des maîtres d'oeuvre de l'enseignement, le Pr Carli. Des
observateurs venus d'autres régions, urgentistes et médecins
de catastrophe, étaient présents pour étudier
les formations qui vont être mises en place au sein des
zones de défense, sur une durée allant de deux heures
(formation de base systématique) à quatre jours,
selon le degré d'implication de l'établissement.
« Nous devons maintenant faire progresser ces formations,
explique au « Quotidien » le Pr Michel Bourguignon,
directeur général adjoint de la DGSNR, pour asssurer
une ligne de flottaison nationale ; le meilleur contre-feu contre
le terrorisme nucléaire, qui a vocation à créer
la panique jusqu'au sein du système de santé, c'est
de former les professionnels à une juste perception du
risque radionucléaire. Comparé au risque chimique,
celui-ci est assurément plus faible. A condition que les
professionnels de santé soient armés pour lutter
contre la psychose qu'il génère. »
Un travail de fond vient donc de commencer. La montée en
puissance contre les risques liés à un attentat
nucléaire prendra des années.
Christian DELAHAYE