42 réacteurs de recherche en France
Dans le monde près de 600 réacteurs de recherche et assemblages critiques ont été construits
(voir la liste en 1964), il en reste 255 en service dans 57 pays et environ 70 % de ces réacteurs ont plus de 25 ans d'âge. (Contrôle n°128, avril 1999)



Réacteurs Osiris (70 MWth) et Orphée (14 MWth) du CEA à Saclay.
Sur la trentaine de réacteurs de recherche du CEA, 15 sont en exploitation, 11 ont été mis à l'arrêt et cinq ont été déclassés.


Les réacteurs de recherche en France

Attention, il n'y a pas que les réacteurs nucléaires d'EDF qui peuvent être redoutables. Les centres d'études nucléaires (des centres dits scientifiques) peuvent être menaçants.

En France, il y a deux réacteurs nucléaires de recherche technologique. L'un, Siloé, est situé sur le site CEA de Grenoble, l'autre, Osiris, est à Saclay en région parisienne.

Réacteur Siloé, vue du coeur depuis la passerelle.

Tout d'abord quelques précisions. Siloé, d'après le Petit Robert, est une piscine de Jérusalem où se baigne l'aveugle-né guéri par Jésus, (Jean IX,7) ". Pourquoi ce réacteur nucléaire a été baptisé ainsi n'est pas expliqué dans la littérature du CEA. Quant à Osiris, on trouve dans le Petit Robert " Dieu égyptien anthropomorphe représenté sous l'aspect d'une momie tenant d'une main le sceptre, de l'autre, le fouet ". Tout un programme ! Dans la publication du CEA " Les défis du CEA " (63, déc. 97/janv.98), on a quelques informations intéressantes sur ce problème des réacteurs de recherche technologique. Le CEA faisant le bilan de ses activités se rend compte que deux réacteurs c'est beaucoup trop pour ce qui reste des recherches nucléaires. Un seul réacteur devrait suffire. Lequel sacrifier ? Celui qui guérissait grâce à Jésus ou le dieu égyptien tenant le sceptre et le fouet ? C'est finalement le sceptre et le fouet qui ont été retenus. Les critères mythologiques ne sont pas déterminants mais leur sens symbolique est très significatif. Il y a d'autres critères plus décisifs dans notre société économique.

Réacteur Osiris, vue du coeur depuis la passerelle.

Dans l'article " Réacteurs à la loupe " de la revue déjà citée on a la réponse grâce au texte titré " Siloé passe le relais ". La motivation du CEA sur le choix de mettre au rancart l'un des deux réacteurs, est claire. L'article précise : " Dans la décision d'arrêter Siloé c'est le raisonnement économique qui a primé, estime Frédéric Tournebize, chef du service du réacteur Siloé (...) Osiris et Siloé n'avaient plus les plans de charge justifiant leur double exploitation. Restait à choisir lequel des deux resterait en lice. Osiris plus éloigné d'un site urbain s'est imposé (souligné par nous) ". Ainsi dans l'optimisation d'un site de recherche la non proximité d'une zone urbaine est prépondérante. Mais en quoi cela concerne-t-il le site si ce n'est la possibilité d'un accident nucléaire grave. Un site accidenté en zone urbaine causerait des problèmes sociaux beaucoup plus pénalisants que le même accident dans une zone rurale. Ainsi, Osiris à Saclay continuera à fonctionner car en cas d'accident les bourgades du voisinage, Saint Aubin, Orsay, Saclay, Gif-sur-Yvette, etc. poseraient moins de problèmes que Grenoble. A propos de l'accident de Tokai-mura on nous a dit que quelques personnes ont été bien irradiées sur le terrain de golf jouxtant le site nucléaire. Signalons qu'il y a un terrain de golf à la clôture de Saclay !

Roger Belbéoch, 6 octobre 1999.


 

Les réacteurs de recherche du CEA
(15 sont en exploitation, 11 ont été mis à l'arrêt et cinq ont été déclassés)

 

EL1 à Fontenay-aux-Roses (l'ancêtre des piles atomiques françaises, le nom de "pile atomique" donné aux premiers réacteurs nucléaires, provenant du fait qu'ils étaient constitués par un empilement de barreaux de matière combustible d'uranium au sein du modérateur.), ou ZOE, selon les initiales de Zéro, Oxyde d'uranium, Eau lourde. « Zéro » fait allusion au fait que ZOE était à l'origine « un réacteur de puissance nulle », c'est-à-dire ne produisant pas une énergie directement utilisable, sa puissance étant trop basse, ce fut Lew Kowarski, collaborateur de Joliot Curie, qui la baptisa ainsi. Entrée en divergence en 1948, cette pile n'est plus de puissance nulle depuis que l'oxyde d'uranium a été remplacé par de l'uranium métallique et elle a été rebaptisée EL1.
Le plutonium a été dès l'origine une préoccupation majeure du C.E.A.. Le 15 décembre 1948 le premier réacteur atomique français («Zoé») divergeait. Il contribua au programme nucléaire français en fournissant du combustible irradié d'où fut extrait en septembre 1949 le premier plutonium français (quelques milligrammes) dans l'usine du Bouchet où une cellule avait été spécialement construite à cet effet. Rapidement après le succès de Zoé, la décision fut prise par l'état-major du C.E.A. de construire à Marcoule le réacteur G-1 de 2 MW pour la production de plutonium à raison de 1 gramme par jour. On ne trouve, à cette époque, aucune justification de ce programme plutonium pour une activité civile du C.E.A.. Personne en France ne s'étonna alors de cet intérêt pour le plutonium. Il est bien évident que c'était la bombe qui était l'objectif prioritaire du C.E.A..

 

EL2 (2,8 MWth maximum), 1952, recherche et production des radioéléments, EL2 a fourni un peu moins de 300 g de plutonium pour la divergence de Prosperine. (Voir l'article de promo dans Science & Vie n°430, de juillet 1957)
Le réacteur de Dimona en Israël dans le Neguev et est une extrapolation à l'échelle 10 d'EL2.

 

Aquilon réacteur à Uranium naturel entré en divergence à Saclay en 1956.

 

EL3 (jusqu'à 18 MW thermique), un réacteur de recherche et d'essai entré en divergence à Saclay en 1957 (voir photo de la salle de commande). Fille de la légendaire ZOE c'est la troisième pile française modérée à l'eau lourde.

 

PROSPERINE (0,001 kW thermique), en 1958 première pile au plutonium du CEA pour l'étude des masses critiques de solution de plutonium puis de l'uranium 235.

 

MELUSINE (1 MW thermique, portée à 8 MW thermique en 1971), le premier réacteur piscine de France, entrée en divergence en 1958 à Grenoble pour la recherche fondamentale et technologique, et la radiographie.

 

MINERVE (0,0001 MWth), pile à Fontenay-aux-Roses destinée à l'analyse de pureté des matériaux est entrée en divergence en 1959.

 

Rubéole réacteur UO2 enrichi entré en divergence à Saclay en 1959.

 

TRITON (6,5 MWth), une pile piscine également installé Fontenay-aux-Roses, est consacré à l'étude de protection, entrée en divergence en 1959.

 

CESAR (0,01 MWth), assemblage critique à Cadarache entré en divergence en 1960.

 

MARIUS (0,0004 MWth), assemblage critique mis en service à Marcoule en 1960, puis à Cadarache en 1964.

 

PEGGY (0,001 MWth), 1961 à Cadarache, c'est la maquette critique de PEGASE.

 

ULYSSE (10 mW), réacteur d'enseignement il permet d'initier les étudiants et de perfectionner les exploitants à la neutronique, à l'instrumentation et au pilotage. Il a divergé en 1961 à Saclay.

 

La pile AZUR (Alliage Zirconium Uranium) diverge le 9 avril 1962, cette pile a expérimenté tous les coeurs des réacteurs destinés à la propulsion nucléaire: prototype à terre, sous-marins, porte-avions Charles de Gaulle.

 

CABRI (42 MWth), réacteur de recherche et d'essais à Cadarache et entré en divergence en 1963, il est destiné à étudier les « excursions de puissance », c'est-à-dire les augmentations très rapides de la puissance au-dessus du niveau normal de fonctionnement, en quelque sorte les « sauts de cabri » de la pile, d'où son appellation singulière (voir schéma).

 

SILOE (35 MWth), pile piscine de recherche à Grenoble et entrée en divergence en 1963.
Fusion d'un élément du combustible du réacteur de recherches Siloé (coeur en uranium enrichi à 90 % placé dans une "piscine" d'eau ordinaire), le 7 novembre 1967. Dégagement de 55 000 curies dans l'eau de la piscine et de 2 000 curies dans l'atmosphère.

 

PEGASE (35 MWth), réacteur de recherche et d'essais, divergence à Cadarache en 1963, c'est une pile où s'effectuent des essais de combustibles pour les piles refroidies au gaz. [Le bassin du réacteur Pégase a été convertis en 1980 pour le stockage de 2.703 conteneurs refermant 64 kg de plutonium.]

 

PAT, est le prototype à terre de réacteur pour sous-marins, qui a servi à l'étude du réacteur du Redoutable, son nom dérive des initiales de Prototype A Terre, cette pile est entrée en divergence à Cadarache en 1964.

 

SILOETTE (100 kW thermique), maquette critique à Grenoble depuis 1964 pour la formation du personnel d'EDF principalement, c'est en quelque sorte le diminutif de SILOE.

 

HARMONIE (0,001 MWth), entrée en divergence à Cadarache en 1965 se distingue de l'ensemble des réacteurs de recherche et d'essais en ce que c'est un réacteur source pour expériences neutroniques, c'est-à-dire conçu spécialement pour fournir un flux stable de neutrons. Réalisée dans le cadre de l'association entre l'EURATOM et le CEA.

 

OSIRIS (70 MWth), réacteur de recherche et d'essais, divergence à Saclay en 1966.
Lire à propos des implications possibles sur le plan de la prolifération des armements nucléaires: Le dossier Osirak (réacteur qui est une copie d'Osiris).

 

ISIS (réacteur d'irradiations technologiques) implanté à Saclay, au voisinage du réacteur OSIRIS dont il est la maquette neutronique, le réacteur ISIS est utilisé pour effectuer les essais des nouvelles configurations de coeur, etc.

 

MASURCA, 1966, maquette de surgénérateur à Cadarache (dont le nom signifie: MAquette SURgénératrice de CAdarache), utilise un combustible à 54% de plutonium dans un coeur de type SuperPhénix.

 

RAPSODIE (20 puis 40 MWth), un prototype d'étude entrée en divergence à Cadarache en 1967. C'est la première pile française surgénératrice à neutrons rapides et refroidie au sodium, son nom ayant été composé comme suit: RAP, comme rapides, et SODIE, comme Sodium.
Voir la présentation de cette première pile française au plutonium dans Science & Vie n°595 d'avril 1967 (en PDF).
Lors de son démantèlement en avril 1994, une centaine de kilos de sodium provoquent une explosion qui soufflent une dalle de béton de 300 m2 et tuent le principal expert français des feux de sodium.

 

RUS (0,1 MWth) en 1967 à Strasbourg. Le réacteur universitaire de Strasbourg (Université Louis Pasteur) principalement utilisé pour la réalisation d'irradiations expérimentales et la production de radio-isotopes à vie courte.

 

PROSPERO est en exploitation depuis 1968 sur le centre CEA de Valduc.

 

EOLE, à eau lourde. Le réacteur ÉOLE est structure d'accueil pour des coeurs expérimentaux de réacteurs à eau légère.

 

CALIBAN (réacteur d'irradiations technologiques) est en exploitation depuis 1970 sur le centre CEA de Valduc.

 

PHEBUS (40 MWth) démarré en 1972, réacteurs dédiés à l'étude des situations accidentelles en France, situés à Cadarache.
Lire: "Rejet gazeux" lors de la préparation d'un essai sur le réacteur Phébus, car même dans une installation prévue pour étudier et apprendre à "maîtriser" les accidents il y a des fuites !

 

RHF Réacteur à Haut Flux (puissance 57 MWth) de l'Institut Laue-Langevin démarré en 1972 à Grenoble.
Fuite de 2 500 curies d'antimoine-124 radioactif le 19 juillet 1974, dans la piscine du réacteur à haut flux (coeur en uranium très enrichi). En raison de déversements trop importants d'effluents radioactifs dans des égouts insuffisamment étanches, il y a contamination de la nappe phréatique. En certains endroits on y mesure neuf fois la concentration maximale admissible. Le SCPRI (Service central de protection contre les rayonnements ionisants) ne prévient pas la population grenobloise. [Lire: Grenoble 1974: première fuite en ville (Pdf 1,6 Mo) Laurent Broomhead.]

 

SILENE est en exploitation depuis 1974 sur le Centre CEA de VALDUC. Le réacteur a été conçu pour répondre aux besoins liés aux études d'accidents de criticité en milieu liquide.

 

Schéma extrait de "La génèse de la propulsion nucléaire en France".
CAP
(Chaudière Avancée Prototype), réacteur prototype de propulsion navale en 1978 à Cadarache.