Aux antinucléaires

La tempête du 27 décembre au soir: ce qui s'est passé à la centrale du Blayais, sur l'estuaire de la Gironde, montre que l'accident grave est possible et qu'il faut sortir du nucléaire sans attendre, avec les moyens énergétiques dont on dispose.

- Oui ce qui s'est passé au Blayais est très grave, oui cela aurait pu dégénérer en accident. Personne ne peut nous garantir le contraire : que se serait-il passé si, pur hasard, au lieu d'un modeste coefficient de marée de 77 la marée avait été de 118 ? Le coeur des réacteurs à l'arrêt aurait-il été convenablement refroidi si les débris charriés par la Gironde avaient bouché toutes les prises d'eau, si l'inondation des galeries souterraines avait entraîné le noyage de toutes les pompes, s'il y avait eu un problème sur le circuit d'alimentation en eau des générateurs de vapeur ? De plus, avec l'inondation du bâtiment combustible, l'eau n'aurait-elle pas pu atteindre les combustibles usés stockés en hauteur ?
- Oui il y a eu défauts de conception dès le départ : placer cette centrale sur les marécages de Braud-et-St Louis. Démarrer les travaux des 4 tranches de la centrale en 1976 et 1977 et mégoter sur la construction en mettant la plate-forme à 4,5 m d'altitude, trop bas pour qu'elle soit insubmersible.
- Oui le contrôle qualité n'a pas été respecté : les galeries n'ont pas été protégées contre l'inondation, les portes coupe-feu se sont déformées et ont laissé passer l'eau ; des parois, mal rebouchées après l'installation de câbles électriques, ont été enfoncées par le flux d'eau.
- Oui, après la règle fondamentale de sûreté promulguée le 12 avril 1984 sur la prise en compte du risque d'inondation d'origine externe on a rehaussé la protection en bordure de Gironde par une digue. Mais cela revenait à remonter la protection contre l'inondation de 70 cm seulement. (D'ailleurs cette digue n'est pas un vrai mur de 5,2 m de haut mais un enrochement).
- Oui les niveaux d'eau atteints dans l'estuaire en décembre 1995 et février 1996 ont amené un réexamen du problème du risque d'inondation et, en 1998, l'autorité de sûreté réclamait un rehaussement supplémentaire de la digue de 50 cm ce qui n'a pas été fait. En novembre 1999 l'autorité de sûreté attirait à nouveau l'attention sur l'état de la digue.
- Oui il y a un bras de fer entre EDF et les autorités de sûreté qui n'arrivent pas à imposer leur point de vue.
- Les autorités de sûreté ont-elles fait appel à leurs ministères de tutelle (industrie et environnement ) pour exiger la mise en conformité aux normes ? Si oui, qui est intervenu pour soutenir EDF dans son refus de faire les travaux dès 1998 et attendre la visite décennale de 2002 ?
- Oui les autorités de sûreté sont coincées entre : dire assez de choses pour que l'opinion l'aide vis-à-vis d'EDF et pas trop pour qu'il n'y ait pas de panique
- Oui " l'incident " a été bien géré, la cellule nationale de crise a relativement bien fonctionné, pour la première fois ce n'était pas un exercice de simulation mais un suivi en temps réel. Mais cela ne prouve en rien que tous les incidents possibles dans des situations que l'on dira après coup qu'elles ont été exceptionnelles pourront être gérés de façon à éviter l'accident grave.
- Oui les travailleurs EDF ont travaillé d'arrache-pied et grâce aux pompiers sont venus à bout des 90000 mètres cubes d'eau qui avaient envahi l'installation. (L'eau a été rejetée en Gironde, les normes de radioactivité des rejets auraient été respectées nous dit-on)
- Oui l'autorité de sûreté demande que soient revues les protections contre l'inondation dans les autres centrales. C'est bien admettre qu'elles ne sont pas conformes aux normes ou que les normes ont été mal établies à partir de calculs dont les hypothèses de départ sont erronées.

Le Blayais nous prouve une chose : ce n'est qu'après coup que peut se faire l'analyse du phénomène naturel complexe ayant pris naissance dans l'océan et qui s'est propagé dans l'estuaire. De plus il semble bien que pour Le Blayais et ailleurs, nulle part dans les calculs de sûreté on a tenu compte des vagues. Or ce sont les vagues qui sont passées au-dessus de la digue. Un problème de fond se pose, comment tenir compte des vagues dans les modèles de calcul et surtout, est-ce modélisable ?
Inondation, séisme, acte de malveillance, erreur de conduite du réacteur etc. sont-ils modélisables ? La prochaine fois, ailleurs, que se passera-t-il ?
Doit-on attendre l'accident grave ? Il sera trop tard pour sortir du nucléaire. Il faut arrêter de se bercer de chimères : les énergies alternatives et les économies d'énergie ne peuvent pas remplacer l'énergie électrique nucléaire. Il faut faire avec ce que l'on a, aujourd'hui. Et ce que l'on a encore, ce sont des centrales classiques à charbon et à fioul et on pourrait mettre à l'arrêt 70% des réacteurs. Attendre est irresponsable.

Bella Belbéoch, 21 janvier 2000.

Il faut sortir du nucléaire sans attendre, avec les moyens énergétiques dont on dispose :

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Pourquoi ? Quand ? Comment ?
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Sortir de l'impasse nucléaire avant la catastrophe, c'est possible !
(Idem en PDF)
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Postface
- Mise au point