Euractiv.com avec Reuters, 27 juin 2023:
L'avenir de l'industrie nucléaire
espagnole dépend des élections du mois prochain,
le parti d'opposition désormais en tête des sondages
faisant campagne pour étendre l'utilisation des centrales
que le gouvernement souhaite fermer à partir de 2027.
Le débat, qui survient alors
que le pays fait face à un été étouffant
imputé au changement climatique, reflète des points
de vue divergents entre le Parti populaire (PP) d'opposition conservateur
et le Parti socialiste au pouvoir sur la manière de décarboner
l'économie.
S'en tenir au nucléaire nécessite d'investir dans
des centrales électriques vieillissantes, mais offre l'assurance
d'une énergie stable et pourrait améliorer les liens
avec la France voisine, dépendante du nucléaire.
Entre-temps, une transition plus rapide vers l'énergie
solaire et éolienne offre une production moins chère,
mais pourrait nécessiter une refonte du réseau pour
faire face à des approvisionnements plus intermittents.
"Mon gouvernement aura pour politique d'annuler le déclassement
prévu et de prolonger la durée de vie de nos centrales
nucléaires", a déclaré lundi à
Barcelone le leader du PP, Alberto Núñez Feijóo.
Les centrales nucléaires espagnoles produisent environ
un cinquième de l'électricité du pays. "Nous
ne pouvons pas débrancher 21 % de l'énergie installée
en Espagne sans avoir 21 % supplémentaires capables de
fonctionner avec des énergies renouvelables", a déclaré
Feijóo, ajoutant que dans un tel scénario "le
prix de l'énergie augmentera de façon exponentielle".
Pendant ce temps, les socialistes ont été l'un des
principaux défenseurs en Europe d'une transition plus dure
et plus rapide vers une économie zéro carbone, privilégiant
les énergies renouvelables telles que le solaire et l'éolien.
Avec un soleil et un vent abondants, ainsi que de vastes étendues
de terres vides, l'Espagne détient toutes les cartes pour
devenir un leader européen en matière d'énergies
renouvelables, et certains experts en énergie estiment
qu'un revirement nucléaire serait en contradiction avec
la croissance attendue de ces sources d'énergie.
Jorge Morales de Labra, directeur de la société
énergétique Proxima Energia, a déclaré
que le maintien des réacteurs « découragerait
les investissements dans les énergies renouvelables ».
Néanmoins, des membres de l'équipe de Feijóo
ont déjà eu des entretiens avec le secteur, a déclaré
à Reuters une source proche des discussions. "Un gouvernement
PP est plus susceptible de favoriser un atterrissage en douceur
qui inclut le recours au nucléaire et un rôle plus
important pour les technologies à faibles émissions
de carbone telles que les biocarburants", a déclaré
Ana Barillas d'Aurora Energy Research. "Mais une évaluation
des coûts de ces technologies sera probablement une considération
clé."
Des milliards d'euros
Les experts et les acteurs industriels
évaluent à plusieurs milliards d'euros le coût
du maintien en activité des centrales nucléaires.
"D'un point de vue technique, les centrales nucléaires
espagnoles peuvent continuer à fonctionner pendant des
décennies", a déclaré Ignacio Araluce,
président du groupe de pression Foro Nuclear. "Mais
ils doivent être rentables." Il estime qu'il faudrait
investir au moins 4 milliards d'euros sur deux décennies
rien que pour faire fonctionner les centrales. Il a également
appelé les décideurs politiques à alléger
la pression fiscale, qui représente environ 40 % des quelque
60 euros qu'il en coûte pour produire un mégawattheure
d'énergie nucléaire, afin de garantir la durabilité
et la compétitivité de l'entreprise. Maria del Mar
Rubio Varas, économiste de l'énergie à l'Université
publique de Navarre, favorable à une prolongation, a déclaré
que le nucléaire pourrait difficilement rivaliser avec
les énergies renouvelables en termes de prix en raison
de ses coûts élevés, mais « il peut
rivaliser sur la stabilité et la grande quantité
d'électricité qu'il peut produire ». fournir
tout le temps. Une option prudente serait que tout futur gouvernement
continue à exploiter seulement quelques usines les plus
récentes, a-t-elle déclaré.
La première usine devant fermer ses portes en 2027, une
décision doit être prise au plus tard à la
mi-2024, a déclaré Araluce. Outre les coûts,
il y a des considérations politiques à prendre en
compte. Un changement de politique nucléaire aurait des
implications plus larges en Europe, l'Espagne se joignant au coeur
mené par la France pour que l'UE accorde un meilleur traitement
à l'énergie nucléaire dans le cadre de son
plan de transition zéro carbone. Cela pourrait également
apaiser les tensions autour d'un projet de pipeline d'hydrogène
reliant l'Espagne et la France, a déclaré Barillas.
Araluce a déclaré qu'il voyait « de la place
pour tout le monde » dans le cadre de l'ambition de l'Espagne
de devenir une puissance énergétique verte. Dans
un secteur énergétique plus large, un gouvernement
conservateur considérera probablement plus favorablement
les technologies à faibles émissions de carbone
comme les biocarburants, qui ont suscité un intérêt
considérable de la part des investisseurs étrangers
en Espagne et des appels des entreprises à Madrid pour
qu'il redouble d'ambition. "L'Espagne a un énorme
potentiel en termes de production de biométhane",
a déclaré Loreto Ordonez, PDG d'Engie Espana, lors
d'un récent événement sur l'énergie,
ajoutant que le plan déployé par le gouvernement
"est insuffisant" et "il existe une marge d'amélioration
très importante". .
Équipe éditoriale d'EFEverde, 4 janvier 2023 Madrid:
Les déchets radioactifs de Vandellós I retourneront en Espagne dans un entrepôt temporaire
Les déchets radioactifs de la centrale nucléaire de Vandellós 1 (Tarragone), qui a arrêté son activité en 1989 après un incendie, retourneront de France vers un entrepôt temporaire en Espagne, selon la version révisée du septième Plan Général des Déchets Radioactifs en cours de traitement. [...]
10/10/2014
Alors que 25 ans se sont écoulés
depuis l'accident de Vandellós I (Tarragone), nous nous
trouvons dans une situation décevante dans laquelle notre
gouvernement continue de miser sur les centrales nucléaires,
en utilisant comme arguments les hypothétiques avantages
de cette source d'énergie, malgré le fait que la
réalité persiste. en les niant encore et encore.
Mais de plus, les avantages hypothétiques ne sont pas contrebalancés
par les problèmes que pose cette source d'énergie.
Le risque d'accident est l'un des plus préoccupants.
Ni les graves accidents survenus dans le monde, ni celui domestique
qui nous concerne, n'ont poussé nos autorités à
décider d'abandonner cette source d'énergie. Ces
lignes sont une petite contribution pour tenter de faire avancer
le débat dans la société. Le souvenir de
la catastrophe de Vandellós I est une bonne occasion pour
tenter d'inscrire le débat nucléaire à l'agenda
politique. Après tout, l'option de l'énergie nucléaire
implique un déficit démocratique, à une époque
où les exigences de transparence et de participation sont
plus grandes. Il s'agit d'une option énergétique
qui nuit à la majorité et profite à une minorité.
Le risque nucléaire, de par ses caractéristiques,
est un exemple clair de l'imposition d'un danger que la société
n'a pas accepté.
C'était l'accident
Le 19 octobre 1989, à 21 h 39, se produit l'accident nucléaire
le plus grave de l'histoire atomique espagnole. À ce moment-là,
un incendie s'est déclaré dans l'alternateur numéro
2, dans le bâtiment des turbines, où est produite
l'énergie électrique. Ce bâtiment était
adjacent au réacteur et au bâtiment des systèmes
auxiliaires électriques où se trouve la salle de
contrôle.
L'incendie s'est produit à la suite d'une défaillance
mécanique de la turbine [1] due à des fissures dans
les ancrages. Ces fissures auraient d'ailleurs pu être détectées
grâce à des contrôles de maintenance avec des
techniques bien connues [2]. Ces essais n'ont pas été
réalisés en 1986, malgré les recommandations
du Conseil de sûreté nucléaire (CSN).
En plus de cette recommandation, la CSN exigeait une série
de modifications à l'usine qui, en 1989, n'avaient pas
encore été mises en pratique. Il convient de noter
qu'aucun système de refroidissement d'urgence n'a été
installé et que le réacteur n'a pas été
isolé du système électrique. Si cela avait
été mis en pratique, l'accident aurait été
moins grave.
La centrale de Vandellós I (Tarragone), propriété
de l'entreprise franco-espagnole HIFRENSA, a commencé à
fonctionner en 1972. Elle avait une puissance de 480 MW et se
distinguait considérablement du reste des centrales nucléaires
espagnoles. Les centrales nucléaires ordinaires sont refroidies
et modérées par l'eau, tandis que Vandellós
I était refroidie par du gaz et sa réaction nucléaire
était modérée par du graphite. Cela entraîne
des inconvénients notables du point de vue de la sécurité,
car lorsqu'une perte de liquide de refroidissement se produit
dans une centrale nucléaire ordinaire, le modérateur
est également perdu, de sorte que la vitesse de la réaction
diminue et qu'elle est moins difficile à contrôler
[c'est la théorie
des promoteurs du nucléaire pour les REP].
Cependant, dans le cas de Vandellós I, la perte de liquide
de refroidissement n'impliquait pas, bien au contraire, l'arrêt
de la réaction.
De plus, dans ce type de réacteurs, le traitement des déchets
est soumis à des garanties pour éviter la prolifération
nucléaire car leur combustible usé contient du plutonium
qui peut être extrait à des fins militaires. Un autre
problème est que le graphite radioactif ne peut pas être
géré comme un déchet de moyenne ou faible
activité et ne peut donc pas être transporté
à El Cabril (Córdoba). En effet, le carbone 14,
l'élément radioactif du graphite, a une demi-vie
de plus de 5 000 ans, qui dépasse celle autorisée
à être déposée dans ledit entrepôt
de déchets. En fait, des solutions folles telles que son
incinération ont été proposées autrefois
pour son élimination. Il se trouve actuellement dans l'usine
elle-même, en attente d'une forme de gestion adaptée
aux déchets de haute activité en Espagne. Les projets
d'ENRESA sont de déposer les quelque deux cents mètres
cubes de graphite radioactif dans le futur Entrepôt Transitoire
Centralisé (ATC) lorsqu'il commencera à fonctionner.
L'incendie qui s'est déclaré dans la turbine a progressé
dans les trains de câbles et a brûlé plusieurs
canalisations et équipements clés de l'usine. Le
batiment du réacteur a même été inondé
par l'eau de mer. L'eau a rendu inutiles deux des quatre turboréacteurs
à gaz qui refroidissaient le réacteur. Pendant quelques
instants, les paramètres du réacteur furent sur
le point de dépasser les valeurs de sécurité,
ce qui aurait entraîné une fusion du coeur, une explosion
et une fuite massive de radioactivité. Heureusement, l'eau
de mer n'est pas montée plus haut et les deux autres turbosoufflantes
ont continué à fonctionner. Le hasard a joué
ici un rôle favorable. [...]
Le CSN avait demandé à plusieurs reprises à
l'usine de contrôler ces défauts de turbine, ce que
Hifrensa n'a pas fait. Ce non-respect aurait pu donner lieu, comme
on l'a vu, à un accident nucléaire aussi grave que
celui de Fukushima et, malgré cela, le CSN n'a pas arrêté
la centrale [...] Ce que la CSN a fait, c'est demander à
deux reprises au ministère de l'Industrie de sanctionner
l'usine, ce que cette instance a fait. Mais ces sanctions s'élevaient
respectivement à 600 000 et 1 million de pesetas (3 600
et 6 000 euros), ce qui était ridicule. Lors de sa comparution
devant la Commission de l'Industrie du Parlement, Donato Fuejo,
président de la CSN, a déclaré que l'accident
était dû à des défauts de conception
originale et non au vieillissement des installations.
Étonnamment, Donato Fuejo a ajouté que l'organisme
qu'il présidait ne disposait d'aucun pouvoir, ni de mécanismes
coercitifs, ni de moyens personnels et techniques pour remplir
sa mission [3]. Au cours de la même comparution, Fuejo a
déclaré que tous les systèmes de sécurité
sont tombés en panne les uns après les autres et
que l'accident n'a pu être évité que grâce
à l'habileté des opérateurs. Il convient
également de noter la confusion qui s'est produite après
l'accident, tant au CSN qu'à l'installation elle-même.
Ces événements ont été portés
devant la justice, l'avocat Marc Viader étant chargé
de l'accusation populaire. La sentence a été prononcée
le 6 mars 2000 et, étonnamment, il s'agissait d'un acquittement
puisqu'elle proclamait que l'accident de Vandellós I était
fortuit et imprévisible. Les groupes Acció Ecologista
et AEDENAT [4] ont souligné à juste titre que dans
ce cas, il devrait y avoir un arrêt préventif de
toutes les centrales, nucléaires ou non, dotées
de turbines similaires à celle de Vandellós I, car
à tout moment des incendies de ce type pourraient survenir.
L'attitude des directeurs techniques du CSN, également
considérés comme accusés, a été
déterminante.
Finalement, la fermeture définitive de l'usine est décidée.
Il s'agit de l'accident le plus grave survenu dans une centrale
nucléaire en Espagne [...]. Aujourd'hui encore, les représentants
du Forum Nucléaire osent affirmer qu'il ne s'agissait pas
d'un accident nucléaire et qu'en réalité,
il n'était pas si grave. Et cela avec toutes les circonstances
aggravantes qui ont été évoquées.
Le risque nucléaire
Le risque nucléaire a la particularité d'être
difficile à percevoir, car il combine une faible probabilité
d'accident avec les effets énormes et destructeurs qu'il
entraîne. La probabilité réelle qu'un accident
se produise est environ 20 fois plus élevée que
celle estimée, mais les accidents nucléaires restent
suffisamment rares pour que le public oublie ce risque. Bien que
les accidents graves soient relativement rares, comme cela a été
dit, leurs effets sont si dévastateurs et si étendus
qu'il n'est pas judicieux de maintenir les centrales nucléaires
en activité. [...]
Par conséquent, outre le danger que représente le
maintien de l'énergie nucléaire elle-même,
cela implique un grand déficit démocratique car
il met en danger des personnes qui ne l'ont jamais accepté.
Bien qu'il existe d'autres activités industrielles qui
font également des victimes, comme les accidents d'aviation,
celles-ci ont la particularité que les utilisateurs acceptent
le risque de prendre l'avion.
Bien qu'ils aient tous en commun les dommages potentiels qu'ils
provoquent et la faible probabilité d'occurrence, chaque
accident nucléaire est différent et possède
ses propres caractéristiques. Après un accident,
toutes les parties intéressées analysent ce qui
s'est passé et tentent d'en tirer des conclusions, depuis
les groupes antinucléaires jusqu'à l'industrie nucléaire.
Cette dernière n'hésite jamais à affirmer
qu'elle tire les leçons et les applique dans les réacteurs
qui continuent de fonctionner et dans ceux qui sont nouvellement
construits. Mais la question est pertinente : jusqu'à quand
continueront-ils à apprendre ? Combien d'accidents devrons-nous
encore subir pour atteindre des niveaux de sécurité
acceptables ? Il n'y a pas de solution : nous sommes humains,
nous sommes parfaits, nous ferons toujours des erreurs et laisserons
une faille ouverte à la production de nouveaux accidents.
En fin de compte, c'est un problème éthique. L'industrie
nucléaire veut continuer à bénéficier
des avantages économiques générés
par l'énergie nucléaire et que la population ne
partage pas. Et les problèmes générés
par cette source d'énergie, notamment le risque nucléaire,
ne suffisent pas à les dissuader de l'utiliser. Les pouvoirs
publics doivent, dans ce cas comme dans d'autres, défendre
l'intérêt commun des citoyens et procéder
à la fermeture progressive des centrales nucléaires.
Mais il est une fois de plus confirmé que le pouvoir économique
a une grande influence sur la politique et que notre gouvernement
est parfaitement aligné sur les intérêts de
l'industrie nucléaire. Et cela sans même ouvrir un
débat public digne de ce nom.
Maintenant Garoña et puis les autres
Le plus probable est que la prochaine usine dont la fermeture
sera définitivement décrétée sera
celle de Garoña, même en tenant compte des tentatives
de Nuclenor de la maintenir ouverte, avec le soutien flagrant
du gouvernement PP. Cela a amené à modifier la Réglementation
des Installations Nucléaires et Radioactives (RINR [5]
) pour convenir à Garoña. Il est insensé
de dépenser des ressources et d'utiliser les forces de
la CSN pour examiner toute la documentation que Nuclenor enverra
audit organisme. Mais il est également frappant d'insister
pour maintenir la Garoña ouverte dans les conditions de
sécurité douteuses dans lesquelles elle se trouve.
Cela montre que les leçons n'ont pas été
tirées de Vandellós I, de Fukushima, de Tchernobyl
ou d'Harrisburg.
Il convient d'ailleurs de noter la diversité des usines
qui ont subi des accidents. Pour s'en tenir aux exemples cités
: Harrisburg était une usine à eau sous pression
modérée par de l'eau, Fukushima était une
usine à eau bouillante modérée par de l'eau,
Tchernobyl était refroidie par de l'eau et modérée
par du graphite et, enfin, Vandellós I était refroidie
par du gaz et modérée par du graphite. Malgré
cette diversité de modèles, ils ont tous en commun
le caractère instable de la réaction nucléaire
en chaîne, difficile à arrêter une fois les
mécanismes d'arrêt défaillants.
La Catalogne a certainement eu le malheur de ne posséder
ni plus ni moins que quatre des dix réacteurs nucléaires
mis en service dans notre pays, ce qui représente en soi
une menace pour le territoire. Deux d'entre eux, Vandellós
I et II, se trouvent au bord de la mer, avec les risques que Fukushima
a montrés pour ce type de centrales : au-delà du
fait qu'un tsunami est plus ou moins probable, il faut penser
au grave problème que représente implique que la
radioactivité atteint la mer soit par la surface, soit
par les eaux souterraines, et contamine les écosystèmes
marins, la pêche, les plages, etc. Et les deux autres centrales,
Ascó I et II, sont refroidies par l'Èbre, qui serait
un vecteur de premier ordre pour propager la radioactivité
en cas de fuite hypothétique.
Le plus judicieux est donc de fermer les centrales nucléaires
par étapes, en tenant compte notamment du fait que l'énergie
qu'elles fournissent peut être avantageusement remplacée
par d'autres sources.
Conclusions
L'accident de Vandellós I et d'autres survenus dans le
monde ont montré que l'énergie nucléaire
est intrinsèquement dangereuse. On a vu que ce risque est
transversal, puisque différents modèles de centrales
électriques basés sur des technologies différentes
et des réacteurs situés dans différents pays
ont subi des accidents : États-Unis, ex-Union Soviétique,
Japon,... Les résistances à tirer ces leçons
et insistent pour maintenir en fonctionnement les réacteurs
qui fonctionnent encore. Cela ne peut s'expliquer que par une
confiance absolue dans le fait que les moyens de sécurité
fonctionneront à 100%, ce que la réalité
s'obstine à nier encore et encore, ou parce que les intérêts
d'une minorité passent avant ceux de la majorité.
L'utilisation de l'énergie nucléaire elle-même
comporte un risque présentant des caractéristiques
particulières qui le rendent très difficile à
gérer. La probabilité
qu'un accident se produise est
faible, mais ses effets sont si dévastateurs que le
risque est inabordable. En revanche, il s'agit d'un risque global,
non localisé, qui relève d'un des paris technologiques
du XXe siècle. À l'heure actuelle, nous devrions
déjà avoir suffisamment de maturité pour
distinguer les technologies qui apportent des avancées
dans nos vies de celles dont les inconvénients ne compensent
pas leurs apports, comme c'est le cas des centrales nucléaires.
Le problème est que le monde d'aujourd'hui repose sur la
souveraineté des États et qu'il n'existe aucune
forme de gouvernance mondiale qui nous permette de faire face
à ces risques.
L'imposition du risque nucléaire, précisément
en raison de sa nature mondiale, est profondément antidémocratique.
Les gens sont obligés d'accepter ce danger, sans aucun
bénéfice et sans que leur opinion soit prise en
compte. Les pouvoirs publics, le gouvernement espagnol dans notre
cas, décident de faire passer les intérêts
des bénéficiaires de l'industrie nucléaire
avant ceux de la majorité de la population.
Francisco Castejón,
Écologistes en action.
[1] Les aubes de turbine se brisent à
cause de la rupture de leurs ancrages, qui étaient fissurés.
La rupture génère plusieurs points chauds qui finissent
par enflammer le pétrole et l'hydrogène.
[2] Les plus courants sont les rayons X, les liquides pénétrants
ou les ultrasons. Les courants de Foucault peuvent également
être utilisés.
[3] El País, 22/02/1990
[4] Actuellement, les deux groupes font partie d'Ecologistas en
Acción.
[5] Le RINR est la pierre angulaire de la réglementation
de la sûreté nucléaire en Espagne. Le changement
introduit permet à une usine de demander sa réouverture
pendant un an à compter de la délivrance de son
arrêt d'exploitation, "à condition que ce ne
soit pas pour des raisons de sécurité". Ainsi,
les Cessations d'Exploitation ne peuvent être considérées
comme définitives qu'un an après leur délivrance
par le CSN.
Libération, 28/8/2008:
Outre-Pyrénées, la sortie du nucléaire prévue en 2028 n'incite pas à investir dans la sécurité. [???]
«Il faut mettre un terme au manque de
sécurité dans les centrales nucléaires espagnoles.»
Le Conseil de sûreté nucléaire (CSN) a perdu
patience. Devant la réitération d'incidents dans
les centrales (une trentaine depuis le début d'année),
les exploitants des huit réacteurs espagnols ont été
sévèrement réprimandés. Et convoqués,
début septembre, à une réunion extraordinaire.
«Nous allons faire un inventaire complet et approfondi des
incidents et des risques qui persistent. Nous seront intraitables»,
a commenté le CSN. En outre, les quatre groupes électriques,
propriétaires des centrales (Iberdrola, Union Fenosa, Endesa
et HC Energia), sont sommés d'investir massivement dans
la prévention : le CSN est persuadé que la majorité
des incidents déclarés auraient pu être évités
si les «dispositifs humains et matériels» avaient
été plus «conséquents».
Incendie. La dernière frayeur en date remonte au week-end
dernier. Un incendie s'est déclaré dans la salle
des générateurs de la centrale de Vandellos II,
au sud de la Catalogne. L'incident a heureusement eu lieu hors
du réacteur (arrêté jusqu'à nouvel
ordre), sans avoir de conséquence radiologique. Endesa
et Iberdrola qui contrôlent le consortium qui gère
la centrale assurent que l'incendie ayant endommagé un
générateur est dû à la vibration excessive
dans l'alternateur. Soupçonneux, le CSN a envoyé
trois inspecteurs sur place afin de déterminer si la cause
de l'incident est liée à des failles techniques
connues de ses services depuis des mois. Les écologistes,
Greenpeace en tête, affirment que l'incendie est dû
à une fuite d'hydrogène qui a explosé au
contact de l'air, ce qui augmenterait la gravité de l'incident.
Les revers de ce type se multiplient. La semaine dernière, le réacteur de la centrale de Garoña, près de Burgos, a aussi dû être arrêté. Plus grave : la centrale de Cofrentes, dans la région de Valence, totalise dix incidents cette année. Et en avril, le CSN avait annoncé qu'une fuite radioactive s'était produite dans la centrale d'Asco I (Catalogne). La presse indique que les propriétaires d'Asco I ont caché cette fuite au CSN pendant six mois. Fou de rage face à cette «opacité irresponsable», l'autorité recommande au gouvernement d'infliger aux gérants du réacteur une amende record pouvant aller jusqu'à 22,5 millions d'euros.
Perspective. Ce débat sur la sécurité
nucléaire survient dans une conjoncture difficile. Le gouvernement
Zapatero est déterminé
à abandonner progressivement l'option nucléaire
- qui produit 18 % de l'électricité consommée
en Espagne. Ainsi, en 2028, si le plan est maintenu, le dernier
réacteur espagnol aura cessé de fonctionner. Comme
le notent divers experts, une telle perspective n'est pas faite
pour encourager les exploitants à investir pour le renforcement
de la sécurité dans les centrales. [Sauf que les accidents et incidents graves n'attendent pas la sortie progressive
du nucléaire pour avoir lieu !!!]
RIA-Novosti, 7/5/2008:
Une fuite de substances radioactives s'est
produite dans une usine de combustible de la compagnie Enusa dans
le village de Jusbado (Salamanque), annonce mercredi la Radio
nationale espagnole (RNE), se référant au Conseil
espagnol de sécurité nucléaire (CSN). "La
fuite s'est produite lors d'une vérification de routine
de l'état des machines dans l'atelier de production du
combustible destiné aux centrales nucléaires",
lit-on dans le communiqué. Selon le CSN, "l'incident
est dû à une erreur de l'opérateur, qui s'est
mis à démonter un appareil, sans l'avoir déconnecté
au préalable". "La fuite de particules radioactives
s'est produite après que l'opérateur a ôté
le couvercle de la machine. Lui et six de ses collègues
ont été évacués en urgence afin de
subir des analyses médicales", annonce RNE. La radio
souligne que "la fuite n'a pas eu d'influence sur la santé
des travailleurs, qui portaient des masques respiratoires et que
la radiation ne s'est pas répandue au-delà de l'atelier".
Le travail de l'usine a été suspendu pendant deux
heures, et une opération de désactivation a été
organisée. En Espagne, la dernière fuite de substances
nucléaires avait eu lieu dans la centrale nucléaire
d'Asco (Tarragone) en novembre 2007.
15/4/2008 - Une centrale nucléaire de la province espagnole de Tarragone (nord-est), appartenant au groupe Endesa, a minimisé l'importance d'une fuite radioactive et s'expose à des sanctions, a-t-on appris mardi auprès du Conseil de sécurité nucléaire (CSN) espagnol. Le CSN indique dans un communiqué qu'il pourrait sanctionner le groupe d'électricité Endesa, propriétaire de la centrale Asco I, pour avoir fourni des "informations incomplètes" et erronées à propos de cette fuite radioactive intervenue le 26 novembre lors d'une opération de maintenance. Lors d'une visite de contrôle, entre le 5 et le 7 avril, visant à faire la lumière sur cet incident révélé le 4 avril par la centrale, le CSN a constaté que la fuite avait été significativement plus importante que ce qu'Endesa lui avait communiqué. L'importance de la fuite "est cent fois supérieure à ce que la centrale a déclaré la semaine dernière", a déclaré au quotidien El Pais le sous-directeur de la protection radiologique de cet organisme, Manuel Rodriguez. "L'impact radiologique qui résulte de ces nouveaux renseignements reste presque insignifiant pour la population voisine de la centrale et en-deçà des limites légales pour le personnel de la centrale", relativise toutefois le CSN dans son communiqué. A la suite de son inspection, l'organisme de contrôle espagnol a décidé de reclasser l'incident du niveau 1 au niveau 2 de l'échelle internationale des incidents nucléaires, qui en compte sept au total. Endesa va effectuer des mesures de radioactivité auprès des personnes passées par ou à proximité de la centrale depuis l'incident, soit entre 700 et 800 personnes, employés, visiteurs et riverains. Le 4 avril, 44 élèves ont notamment visité la centrale et le directeur de leur établissement a exigé qu'ils soient soumis à des examens. Selon le CSN, Endesa a déjà réalisé des mesures auprès de 579 personnes sans rencontrer aucune trace d'assimilation de matériel radioactif. Le CSN a indiqué qu'il allait lui-même entamer dès maintenant une campagne indépendante de surveillance radiologique. "Il s'agit d'un des quatre incidents les plus graves de l'histoire nucléaire espagnole", selon le quotidien El Pais. Greenpeace avait révélé en premier l'existence de la fuite radioactive. La centrale nucléaire ASCO I l'avait détectée le 14 mars mais n'en avait informé le CSN que le 4 avril.
Amende record de 1,6 million d'euros pour une
centrale nucléaire espagnole
2/8/2006 - Le
gouvernement espagnol a annoncé mercredi avoir infligé
une amende record de 1,6 million d'euros à une centrale
nucléaire qui avait connu en 2004 une avarie de son système
de refroidissement.
Le ministère espagnol de l'Industrie a indiqué dans
un communiqué avoir imposé trois amendes d'un montant
total de 1,6 million d'euros à la centrale nucléaire
Vandellos II, exploitée depuis 1987 par les compagnies
d'électricité espagnoles Endesa (72%) et Iberdrola
(28%).
Il souligne que cette sanction, prise sur recommandation du Conseil
de la sécurité nucléaire (CSN), "est
la plus importante jamais infligée en Espagne à
une installation de ce type", et se justifie par le "caractère
prioritaire de la sécurité des centrales nucléaires".
La centrale Vandellos II, située dans la région
de Tarragone (nord-est), avait subi le 25 août 2004 un incident
sérieux, avec la rupture d'un joint de tuberie de son système
de refroidissement liée à un problème de
corrosion, qui avait été "sans conséquences
pour ses employés et l'environnement".
Ses responsables sont triplement sanctionnés pour leur
mauvaise maintenance à l'origine de l'accident, pour ne
pas avoir effectué les réparations exigées
par le CSN et pour avoir omis de signaler à ce dernier
les premiers problèmes de corrosion de l'installation,
qui remontaient à 1993.
MADRID - Pour la première fois en Espagne, une centrale nucléaire a définitivement arrêté sa production dimanche, après 38 ans de fonctionnement, sur décision politique. Il s'agit du plus ancien des sept réacteurs nucléaires du pays.
Carte de 1993 extraite de l'Atlas du nucléaire
civil et militaire de Gérard Chaliand et Michel Jan.
1 mai 2006 - Cet
arrêt, salué comme une "victoire" par les
écologistes, intervient alors que, facture pétrolière
aidant, une nette inflexion en faveur de l'option nucléaire
est récemment apparue dans le discours des socialistes
espagnols au pouvoir.
L'arrêt définitif de la centrale José Cabrera,
à Almocinad de Zorita, près de Guadalajara (centre),
était prévu dimanche soir.
Il fait suite à une décision politique et aux critiques
des écologistes qui la jugeaient peu sûre. Son propriétaire,
le groupe Union Fenosa, assure qu'elle aurait pu boucler sans
problème son cycle de 40 ans de production et fermer en
2008 comme initialement prévu.
Greenpeace a saisi l'occasion pour exiger du chef du gouvernement
socialiste, José Luis Rodriguez Zapatero, qu'il tienne
sa promesse électorale d'annoncer un calendrier de fermeture
progressive de toute la filière nucléaire espagnole.
Extrait de l'Atlas du nucléaire
civil et militaire de Gérard Chaliand et Michel Jan, 1993.
"Il existe actuellement beaucoup trop
d'ambigüités sur ce thème au sein du gouvernement",
a déclaré le directeur des campagnes de Greenpeace
en Espagne, Mario Rodriguez à l'agence Europa Press.
La gauche espagnole, animée d'un fort courant antinucléaire
et anti-Otan au début des année 1980, s'est ralliée
au pragmatisme défendu par l'ancien gouvernement de Felipe
Gonzalez.
L'avenir de l'énergie nucléaire fait l'objet d'un
débat entre pouvoirs publics, écologistes et industriels,
à l'initiative du ministère de l'Industrie qui organise
des séances de travail mensuelles en vue de présenter
des conclusions lors du prochain débat sur l'Etat de la
nation.
Les centrales nucléaires espagnoles génèrent
actuellement 22,88% de la production d'électricité.
Union Fenosa prévoit de remplacer la centrale José
Cabrera par une centrale électrique classique à
cycle combiné, dotée de deux groupes de 400 mégawatts
et cinq fois plus puissante que la précédente. (ATS)
27/5/2005 - Les techniciens du Conseil de la sécurité nucléaire (CSN) en Espagne ont expliqué aux Cortès à Madrid leur version de l'incident survenu à Vandellos II, versant de nouvelles contradictions à la polémique qui ébranle l'organisme public.
Les huit experts responsables du rapport sur l'incident du mois d'août sur la centrale de Vandellos II, le plus grave depuis 1992, ont expliqué que le CSN avait depuis 1991 exempté l'installation catalane d'essais de contrôle de la canalisation dont la rupture en 2004 est à l'origine de l'incident. La présidente du CSN, María-Teresa Estevan Bolea avait affirmé, il y a un mois, devant les mêmes députés ne pas savoir pourquoi ces essais n'avait pas été effectuées dans la centrale et soutenu que ces vérifications auraient évité l'accident.
Mais la contradiction vient de l'intérieur, la directrice technique à la sécurité nucléaire du conseil, Isabel Medallo, considérant ledit examen «n'est pas le moyen le plus adéquate pour détecter ce genre de problème. Il aurait même pu ne pas servir à détecter la corrosion de la conduite», a-t-elle déclaré au sortir de sa comparution, lundi. I.Medallo estime également que les services de Vandellos II «ont préféré la production à la sécurité», le redémarrage du réacteur en août «s'est effectué dans des conditions de sécurité qui n'étaient pas les plus adéquates», a-t-elle insisté.
Un des experts a y compris déclaré aux groupes de l'Assemblé que l'incident du 25 août pourrait être reclassé de niveau 3, ce qui ne s'est plus vu depuis 1989, lors d'un incident sur Vandellos I. Les députés des Cortès sont sortis sceptiques de l'audience des experts qui contredisent leur présidente, le groupe socialiste réitérant son intention de réformer le CSN.
18/3/2005 - La
production d'un tiers des neuf centrales nucléaires en
fonctionnement en Espagne se trouve paralysée à
la suite de différentes pannes, a-t-on appris vendredi
auprès du Conseil supérieur du Nucléaire
(CSN). Deux des réacteurs de la centrale d'Asco I (Tarragone,
nord-est) ont dûs être arrêtés à
la suite d'une panne dans les transformateurs électriques
de sortie qui ne devrait pas être réparée
avant deux semaines. Une fuite d'huile s'est produite, sans provoquer
de risques pour la population, selon le CSN. La centrale de Vandellos,
située également dans la région de Catalogne,
a suspendu ses activités pour recharger son combustible
après la détection d'un problème dans le
système d'eau de "services essentiels" de la
centrale. Elle devrait reprendre ses activités dans un
peu plus d'un mois. Enfin, la production de la centrale de Garona,
près de Burgos (centre-nord de l'Espagne) a été
arrêtée pour une recharge de combustible prévue
depuis deux mois, mais au cours d'une inspection, une anomalie
dans le système de ventilation a été repérée.
Le responsable du nucléaire de l'organisation écologiste
Greenpeace, Carlos Bravo, a dénoncé le "mauvais
fonctionnement" des centrales nucléaires catalanes
et "le manque de sécurité de la technologie
nucléaire espagnole, intrinséquement dangereuse".
Il existe neuf centrales nucléaires en fonctionnement en
Espagne, peu en comparaison à d'autres pays européens
comme la France, le Royaume-Uni ou même l'Allemagne.
Revue GAIA, N°13, décembre 1997:
Le démantelement de Vandellos I (PDF)
L'auteur Miguel Mutliz Gutiérrez est membre du groupe Acciô
Ecologista.
Wise Amsterdam n°320, 3/11/89:
(Référence 320.2207, Wise Tarragone)
Les maires de quatre municipalités proches
de Vandellos (Mont Roig, Tivissa, Pradip et l'Ametlla) demandent
l'arrêt des réacteurs 1 et 2 jusqu'à ce que
les niveaux de sécurité soient conformes aux directives
du Conseil de Sûreté nucléaire (en 1988 il
y a eu trois incendies à Vandellos 2 en l'espace de cinq
mois, voir WISE 305.3048).
D'après un article de "El Pais" du 25 octobre,
l'AIEA a dit que l'accident de Vandellos 1 était l'incident
le plus grave dans une installation nucléaire depuis Tchernobyl.
Mais l'AIEA démentirait.
Les causes de l'accident
du 19 octobre proviennent de l'arrêt de brusque (pour des
raisons encore inconnues) d'une turbine. Le poids de la machine
(cinq tonnes) a réchauffé l'huile de lubrification,
qui s'est décomposée et a dégagé de
l'hydrogène qui à son tour a explosé. La
turbine a alors pris feu.
Comme la centrale n'a pas d'équipement contre l'incendie,
elle a fait appel à des pompiers des environs (jusqu'à
ceux de Bella Terra, située à 100 km). L'incendie
a duré quatre heures et demi et sérieusement affecté
deux des quatres liaisons entre la turbine et le système
de réfroidissement de la centrale.
Le Conseil de Sûreté
nationale et le gouvernement ont d'abord déclaré
qu'il n'y avait pas eu de fuite radioactive, mais les autorités
ont contredit par la suite cette affirmation en disant qu'il n'y
avait pas de niveau de radiation significatif et que les populations
des environs ne couraient aucun risque. WISE
Tarragone a publiquement demandé aux autorités de
Catalogne de rendre publiques les mesures qu'elles fait faire
près de la centrale.
Les Commissions ouvrières, syndicat auquel sont rattachées
des organisations de pompiers, dit que les pompiers ont risqué
leur vie parce qu'ils ne disposaient pas des équipements
prévus par le plan d'urgence nucléaire et qu'ils
n'avaient été, prévenus des risques de radioactivité.
Ils ont ainsi commis des erreurs : ils ont d'abord utilisé
de l'eau parce qu'ils ne connaissaient pas la nature du sinistre
(ce qui a provoqué des courts-circuits supplémentaires
dans le système électrique). La fumée importante
qui s'est dégagée au-dessus du site serait venue
des isolateurs électriques (d'après Carlos Fernandes
Palomero).
Les pompiers ont ensuite été emmenés à
Vandellos 2, où on a vérifié leur niveau
de contamination, les analyses se sont révélées
négatives, mais Ils ont demandé, lors une conférence
de presse, qu'il soit procédé à un nouvel
examen par des médecins indépendants de l'industrie
nucléaire.
Vandellos 1 est arrêtée, sans doute pour six mois
au moins. L'Hifrensa, consortium franco-espagnol qui exploite
la centrale, envisage de refaire démarrer ce réacteur
avec une seule turbine, à 50% de ses capacités.
Le réacteur de Chinon A 3, de même nature que Vandellos
et qui connaît des problèmes de corrosion analogue,
doit être démantelé. Une de ses turbines pourrait
être transportée à Vandellos.
Le prototype de Vandellos 1, la centrale de St-Laurent-des-Eaux
a également connu de nombreux incidents. Le 13 mars il a été le théâtre
de l'accident connu le plus grave dans une installation française.
L'unité 1 de St. Laurent doit être démantelée
en avril 1990, et l'unité 2 en 1992.
Vandellos 1 a une longue histoire de surchauffe et de corrosions
(de son système de refroidissement, justement). Le réacteur
n'était qu'à 80-85 % de sa capacité quand
l'accident s'est produit. Après l'accident de Tchernobyl,
le Conseil de Sûreté national a ordonné cinq
modifications, mais deux seulement avaient été menées
à bien. L'une de celles qui n'ont pas été
accomplies est directement liée à l'accident :
le CSN avait demandé que les quatre alimentations du système
de refroidissement soient rendues plus indépendantes les
unes des autres. Une cinquième liaison aurait été
rendue impossible par suite de son coût. Si le système
de refroidissement avait cessé de fonctionner, les 3000
tonnes de graphite auraient pris feu.
Le CSN a admis que cet accident était le pire jamais survenu
dans une centrale espagnole, mais le public n'a pas été
depuis tenu au courant des investigations sur ses causes. D'après
WISE Tarragone, l'incendie aurait pu être évité
parce que le même type d'accident était déjà
arrivé à l'un des deux réacteurs d'Asco (autre
centrale nucléaire espagnole). Les opérateurs de
Vandellos n'en avaient pas tiré d'enseignement. Toujours
d'après WISE Tarragone, le système de défense
incendie de Vandellos 1 ne répondrait pas aux normes de
l 'AIEA.
Des organisations antinucléaires de la région ont
appelé à une manifestation le vendredi 27 octobre
devant le siège de l'Hifrensa à Barcelone. Une manifestation
devant la centrale a été appelée par les
municipalités voisines de Vandellos pour le 4 novembre.
(sources WISE-Tarragone, "El
Pais" des 22, 24, 25, 27 et 28 octobre 1989 ;
Nuclear Power Reactors in the World, édition d'avril 1989).
Der Spiegel, 30/10/89:
Le jeudi 19 octobre, les habitants des environs
de la centrale de Vandellos ont pu voir s'élever la fumée
d'un incendie situé sur le site nucléaire. Ce n'est
qu'au cours des jours suivants qu'ils ont pu apprendre ce qui
s'était passé.
Une des deux turbines de
la centrale a explosé et s'est enflammée. L'incendie,
alimenté par huile lourde des compartiments de la turbine
s'est étendu et a mis en danger le système de refroidissement
du réacteur.
On n'a sans doute évité l'accident majeur que de
justesse. Les antinucléaires pensent
qu'il s'agit là de l'accident de centrale le plus grave
depuis Tchernobyl. Les autorités et les équipes
de secours ont également sombré dans la confusion
devant l'accident qui touchait ce vieux réacteur, "de
l'époque de De Gaulle" (d'après le ministre
de l'industrie espagnol).
Il est entré en service en 1972, utilise de l'uranium naturel
et est refroidi par du dioxyde de carbone. L'eau de mer circule
dans le secondaire pour évacuer la chaleur excédentaire,
et 3000 tonnes de graphite servent de "modérateur".
Quatre pompes fournissent le dioxyde de carbone nécessaire.
L'arrêt de cette alimentation entraînerait l'incendie
du graphite et produirait un accident comparable à celui
de Tchernobyl. Or l'incendie de la turbine a endommagé
deux des quatre pompes et menacé les deux autres. Le circuit
secondaire a même connu des périodes de déséquilibre
au cours de la nuit de l'accident : les deux pompes encore
en état de marche ont connu des moments de dysfonctionnement.
L'accident a pris naissance "loin du réacteur"
(d'après les paroles d'un représentant de la centrale) :
une des turbines a dû être déconnectée
par suite de problèmes techniques, ce qui a produit de
violentes vibrations dans le circuit de refroidissement [...].
Une fissure est apparue, l'hydrogène est entré par
là et au contact de l'air s'est enflammé. L'incendie
s'est propagé jusqu'au système de cables électriques.
D'après le syndicaliste
Ruiz (des Commissions Ouvrières), lorsque les pompiers
sont arrivés, les techniciens étaient en pleine
confusion, et prenaient la fuite. Les pompiers
n'avaient pas été prévenus qu'il s'agissait
d'un feu d'huile et de cables électriques, et leur premier
véhicule ne contenait pas de la mousse, mais de l'eau (pour
les feux de forêts). Même avec la mousse, l'incendie
ne s'arrêtait pas parce qu'il était alimenté
par des canalisations souterraines. Les pompiers ont finalement dû combattre directement
le foyer sans vêtements de protection,
et sans savoir s'ils subissaient
des radiations.
L'action de sauvetage a presque causé la catastrophe :
l'eau initialement déversée a envahi les sous-sols
de la centrale et menacé de provoquer l'arrêt des
systèmes de sécurité encore en état.
Il a fallu la pomper, mais on a retiré beaucoup plus d'eau
que ce qui avait été déversé. "Nous
ne savions pas, à ce que dit un membre des équipes
de secours, si le circuit secondaire n'avait pas explosé
et libéré toute cette eau, ou si nous l'avions nous
même transférée du bassin alimentation du
système".
Ce n'est que le jour suivant que la température du réacteur
est revenue à sa valeur normale.
Les négligences ne se sont pas arrêtées là :
les pompiers n'ont n'ont été soumis à un
contrôle de radioactivité que quatre jours plus tard
(la poussière radioactive éventuelle ne pouvait
plus être détectée). Dans toute la Catalogne, les pompiers n'ont à
leur disposition que trois combinaisons pour intervenir en milieu
irradié. Ils menacent de ne pas se déplacer pour
un incendie de centrale à l'avenir s'ils ne reçoivent
pas d'appareil de mesure de radioactivité.
Le mardi 24 octobre, un transformateur auxiliaire de la centrale
a subi un court-circuit, avec un fort relâché de
fumée. L'affaire n'a pas eu de suite mais la population
ne s'en est pas moins inquiétée.
Les autorités veulent remettre en marche Vandellos 1 dans
quatre mois (elle est sensée fermer en 2003) en remplaçant
la turbine par un appareillage venu de la centrale analogue de
Saint Laurent
El Pais, 29/10/89:
Ce sont des habitants proches de la centrale qui ont indiqué vers 21 H 40 à la police que de la fumée sortait par moments de la centrale. L'avarie s'est produite dans le turbogénérateur du groupe primaire. L'hydrogène est entré en contact avec l'air, provoquant une explosion. La salle de contrôle située à 15 m du réacteur a commencé à être envahie par une épaisse fumée. Il a fallu utiliser des masques à oxygène pour continuer à travailler. Des conduites amenant de l'eau de mer ont été rompues par l'incendie et la salle a été remplie d'un mètre d'eau (ce qui a bloqué divers systèmes de sécurité).
Le Gouvernement Civil a décidé
après 22 h de déclencher le Plan d'Urgence nucléaire
de Tarragone. L'anné
précédente, en sept mois de fonctionnement, Vandellos 2
avait connu trois incendies. Ce n'est qu'à
22 h 21 que le Gouvernement Civil a su où était
située l'avarie. L'intervention
des pompiers a eu lieu dans une confusion considérable,
et dans une atmosphère de peur d'une fuite radioactive.
A 23 h 33, la direction de la centrale admet que la réfrigération
du coeur subit des interruptions. A 23 h 36, l'incendie est contrôlé,
mais non pas étouffé. Ce n'est que vers 2 h du matin
que la centrale peut dire que que le feu est éteint et
que le refroidissement du coeur fonctionne.
Au matin, les autorités prétendent qu'il n'y avait
pas de danger (mais la Protection Civile affirme le contraire).
II est probable que le Conseil de Sûreté nucléaire
va exiger des réaménagements tels que les travaux
seront longs (un à trois ans) et le coût énorme.
Le réacteur s'est trouvé arrêté 32
secondes après le début de l'incendie (on ne sait
pas si c'est à la suite d'une réaction automatique,
ou de l'action d'un opérateur). L'EDF qui possède
des parts de Vandellos a déclaré qu'elle ferait
tout pour que ce réacteur reste en fonctionnement jusqu'à
l'an 2003, comme prévu. Vandellos 1 est une centrale au
graphite-gaz d'un type voisin de celui des quatre réacteurs
français qui vont être arrêtés au cours
des trois prochaines années. EDF explique que la situation
en France est différente : elle possède des
centrales produisant du courant moins cher, ce qui n'est pas le
cas de l'Espagne (EDF n'admettrait l'arrêt que si les parois
du réacteur avaient subi des dommages structurels dans
l'incendie).
La conception du réacteur
était défectueuse en ceci que les vents ont poussé
les flammes vers l'intérieur, vers le réacteur.
Les autorités centrales espagnoles sont plus sceptiques
sur l'avenir de Vandellos 1 et envisagent d'en faire une poubelle
nucléaire.
Un plan d'urgence contesté
L'attitude de la direction de la centrale,
qui a prévenu les pompiers avant l'autorité chargée
du Plan d'Urgence nucléaire de Tarragone, pouvait compromettre
l'efficacité du plan (dont la Protection civile a la charge).
Par ailleurs, les groupes écologistes locaux considèrent
que l'objectif réel de ce plan est d'empêcher la
fuite de la population irradiée (pour qu'elle n'entre pas
en contact avec les populations non contaminées). II prévoit
qu'en cas de fuite radioactive, les routes passent sous contrôle
de la Garde civile, et que celle-ci aurait le droit de soumettre
les gens à des examens radiologiques (dans des Unités
de Répartition et de Decontamination qui d'après
les écologistes ressembleraient plus à des camps
de concentration qu'à des services d'aide sanitaire).
Pour que le plan puisse fonctionner, il faudrait que l'administration
centrale fournisse des moyens qui font encore défaut (amélioration
des voies de communication pour rendre possible des évacuations
d'urgence, installation de mégaphones pour prévenir
la population de la zone).
L'Ametlla (le comité antinucléaire) appelle à la grève générale pour demain 30 octobre afin d'obtenir le démantèlement de Vardellos 1
Ametlla de Mar est une ville (d'environ 5000
habitants) située à 9 kilomètres de la centrale.
Le comité antinucléaire a convoqué une grève
générale de 24 heures, qui est soutenue par la municipalité.
On demande le démantèlement immédiat de Vandellos
1, et le démantèlement progressif de Vandellos 2,
Asco 1 et Asco 2 (toutes situées dans la province de Tarragone).
Les habitants des environs s'estiment gravement lésés
par les annulations de réservations hôtelières
et d'achats de résidences d'été.
Le programme de la journée de grève comprend une
"cacerolada" à dix heures du matin, un hommage
à 12 heures à l'attention de trois femmes qui avaient
été arrêtées en 1974 pour avoir manifesté
contre le projet initial des centrales nucléaires, et une
manifestation à 17 heures.
Le Comité antinucléaire est soutenu par les jeunes
de la localité, et a reçu des facilités de
la municipalité (locaux, lignes téléphoniques).
Le fait qu'un circuit pour motocyclettes soit à moins de
deux kilomètres de la centrale semble une source importante
de motivation.
Les municipalités de Montroig, Pratdip et Tivissa sont
moins engagées (ils demandent aussi la fermeture de Vandellos
1 et le gel du second réacteur tant que les carences du
Plan d'Urgence ne seront pas comblées). Une manifestation
a également été appelée par les étudiants
pour le lundi 30 octobre. Diverses forces syndicales essayent
de constituer un mouvement de citoyens antinucléaire à
Tarragone. Le CDS doit proposer à la prochaine séance
de la municipalité de cette ville le démantèlement
de la centrale qui a subi l'incendie.
Les pompiers se sont de
leur côté indignés de l'attitude du personnel
de la centrale pendant l'accident. D'après Josep Pino,
chef du détachement de pompiers de Amposta (près
de Tarragone) : "Les techniciens ont fui de la zone
du sinistre et nous sommes restés seuls pendant qu'on entendait
des cris "ça va sur le réacteur", "ça
va sur le réacteur". La direction
de la centrale et la société Hifrensa ont démenti
ces informations, et on parle de sanctionner l'auteur de ces paroles.
El Pais, 27/10/89:
Le Conseil de Sûreté nucléaire,
CSN, a déclaré dans un communiqué le 26/10/89
que l'accident du 19 octobre peut être considéré
comme "l'événement le plus grave jamais survenu
dans une centrale nucléaire espagnole". Un court-circuit
s'est encore produit le 26 (dans un autre réacteur de Vandellos,
mais n'a pas provoqué d'incendie). Un turbogénérateur
principal a été détruit le 19, et le problème
majeur portait sur le refroidissement du réacteur, qui
n'était pas direct ement concerné par l'incendie.
L'article signale quelques déclarations d'un porte-parole
de WISE.
(voir aussi AFP du 24/10/89 qui rapporte qu'une enquête
a été ouverte en raison du retard avec lequel l'accident
a été annoncé aux autorités compétentes,
et que la société propriétaire de la centrale,
l'Hispano Francesa de Energia
Nuclear, est pour 25 % propriété d'EDF. Selon un communiqué de WISE, World Information
Service on Energie, l'accident de Vandellos 1 est le plus important
depuis celui de Tchernobyl).