La Tribune, 6/2/2012:
En dépit du froid et du nombre de centrales nucléaires divisé par deux, l'Allemagne résiste bien à la vague de froid grâce à ses centrales conventionnelles et à sa production d'énergie solaire. Et elle réussit à exporter de l'électricité vers la France.
La France pourrait battre ce soir ou demain matin son record de consommation électrique du 15 décembre 2010, de 96.710 mégawatts (MW). Certes, EDF assure faire face « sans problème » à ce pic, grâce à 55 de ses 58 réacteurs nucléaires actuellement en état de fonctionnement, à ses barrages électriques et à ses 21 centrales thermiques (gaz, fioul, charbon). Les spécialistes de l'effacement électrique (capables en agrégeant des consommateurs individuels ou industriels d'annuler momentanément une partie de la demande) apportent également leur contribution. EnergyPool, par exemple, a « libéré » 600 MW dans la journée de vendredi.
Mais ce sont aussi les importations d'électricité, notamment en provenance d'Allemagne, qui devraient permettre à la France de passer le cap. Le ministère allemand de l'Environnement s'est d'ailleurs réjoui ce lundi que le pays ait pu exporter de l'électricité ces derniers jours, alors que huit de ses dix-sept réacteurs nucléaires sont arrêtés depuis la catastrophe de Fukushima. De quoi contredire nombre d'observateurs qui lui prédisaient un hiver difficile, et conforter au contraire sa décision de sortir totalement du nucléaire d'ici à 2022.
Débat sur les réductions d'émissions
Si l'Allemagne résiste bien aux pics de consommation d'électricité liés au froid, cela tient à plusieurs facteurs. D'une part, son. taux d'équipement en chauffage électrique est très inférieur à celui de la France. Aussi, alors qu'en France un degré de moins appelle une puissance supplémentaire de 2.300 MW, en Allemagne elle n'est que de 500 MW (600 MW au Royaume-Uni et 300 MW en Italie). D'autre part, l'Allemagne recourt massivement à des centrales au fioul et au gaz, et même d'anciennes centrales au charbon restées en veille, rapidement opérationnelles en cas de pic de demande.
C'est d'ailleurs un sujet qui fait fortement débat outre-Rhin et alimente la polémique entre le gouvernement et les industriels d'un côté, et les écologistes de l'autre. Ces derniers doutent en effet de la capacité de l'Allemagne de maintenir ses objectifs ambitieux de réduction d'émissions de gaz à effet de serre si elle remplace majoritairement ses centrales nucléaires par des centrales au charbon et au gaz.
Les énergies renouvelables au rendez-vous
Mais les énergies renouvelables, dans lesquelles le pays a massivement investi (21 % de son l'électricité provient déjà du solaire, de l'éolien et de la biomasse, et cette proportion doit passer à 35 % en 2020 et 80% en 2050 !), ont également tenu leur rôle. En particulier, les installations solaires implantées dans le Sud du pays se sont révélées efficaces par temps froid. Ce qui tombe bien, car le gros de la demande se situe également dans le Sud. Les éoliennes, en revanche, notamment offshore, sont implantées dans le Nord et le transport massif d'électricité du Nord au Sud du pays nécessiterait de renforcer le réseau électrique.
En France, le syndicat des énergies renouvelables (SER) s'est réjoui dans un communiqué de la production du parc éolien français, qui a fourni en moyenne jeudi dernier 4 % de la consommation électrique et une puissance de 4.000 MW, l'équivalente de la consommation de la ville de Paris. Une performance d'autant plus remarquable que les périodes de grand froid sont souvent associées à des périodes sans vent, car elles correspondent en général à des situations anticycloniques. Les anti-éoliens font d'ailleurs remarquer que les pointes de production ont eu lieu pendant la nuit alors que le pic de la demande se situe, lui, en milieu de journée et en début de soirée, soulignant par la même occasion les inconvénients lié à l'intermittence des énergies renouvelables en l'absence de réelle solution de stockage...
Dominique Pialot
Berlin, 5/2/2012 - L'Allemagne a exporté de l'électricité ces derniers jours, malgré les températures très basses et la fermeture de réacteurs nucléaires, a souligné lundi une porte-parole du ministère de l'Environnement.
Les opérateurs de réseau nous disent que la situation sur le réseau est très stable et que ces derniers jours il y a eu des exportations d'électricité, a-t-elle dit lors d'une conférence de presse régulière, sans donner de chiffres précis.
Cela montre que nous sommes sur la bonne voie avec notre révolution énergétique, qui vise à abandonner progressivement l'énergie nucléaire d'ici la fin 2022, et que le développement des énergies renouvelables joue un rôle stabilisateur, a-t-elle ajouté.
La situation est tendue mais sous contrôle, assure une porte-parole de l'Agence allemande des réseaux, qui supervise les lignes électriques en Allemagne, en faisant valoir que le pays avait pris ses précautions dès l'été, en choisissant notamment de ranimer de vieilles centrales conventionnelles (gaz, charbon), gardées à l'état de veille.
La porte-parole a fait valoir que les conditions météorologiques étaient par ailleurs favorables depuis quelques jours aux énergies renouvelables: Heureusement nous avons une météo certes froide, mais stable et ensoleillée.
L'Allemagne, qui a déjà éteint huit de ses 17 réacteurs nucléaires, est confrontée comme toute l'Europe à une vague de froid, avec des températures de moins de -20°C en de nombreux endroits dans la nuit de dimanche à lundi.
Mails elle défie jusqu'ici les prévisions les plus pessimistes, selon lesquelles le pays risquerait de payer l'abandon de l'énergie nucléaire par des coupures de courant en cas de grand froid.
L'Allemagne se chauffe par ailleurs majoritairement au fioul et au gaz, ce qui la rend un peu moins sensible au froid que la France, où le chauffage électrique est très répandu.
Le problème de l'Allemagne est d'ordre géographique, avec une concentration au nord de la production d'énergie éolienne, et au sud de la demande, a expliqué la porte-parole de l'Agence des réseaux, faisant valoir que la pire situation pour le pays serait un jour sans soleil ni vent, avec un pic de demande.
Le Journal du Dimanche, 5/02/2012:
Lundi, la consommation électrique devrait battre son record. Au moindre incident, comme hier à Fos-sur-Mer, la peur de la grande panne refait surface
8 h 06, samedi matin. Une alarme retentit dans la salle de commande du centre national d'exploitation de RTE (Réseau de transport d'électricité), filiale d'EDF qui gère la haute tension. La centrale au gaz CycoFos, à Fos-sur-Mer (Bouchesdu- Rhône), vient de tomber en carafe. "Un incident lié au froid", confirme l'exploitant, GDF Suez. D'un coup, 424 mégawatts (MW) en moins sur le réseau. Il y a urgence. Les agents de RTE doivent au plus vite compenser cette perte. Ils savent que la centrale de Provence, à Gardanne (Bouches-du- Rhône) une centrale au charbon appartenant à E.ON France , est à l'arrêt mais disponible.
Après quelques échanges téléphoniques, la décision est prise. Couplée au réseau, la centrale livrera 380MW à 13 heures, 110 supplémentaires à 15 heures. "Il fallait qu'on se remette en sécurité avant la pointe de consommation du soir", explique Jean-Paul Roubin, directeur du dispatching national chez RTE.
Lundi, 98.000 MW attendus
La vague de froid qui se prolonge incite les Français à régler leurs radiateurs électriques sur maximum. Après les 96.377MW consommés jeudi à l'heure de pointe, 95.828 vendredi et 91.037 hier, le record absolu du 15 décembre 2010 (96.710 MW) devrait tomber lundi, avec 98.000 MW estimés. Tapis au fond d'une impasse sous étroite surveillance, à quelques kiomètres de Paris, six ingénieurs de RTE veillent en effet au grain vingt quatre heures sur vingt-quatre. Sur les murs de ce PC, des chiffres, et une énorme carte de France : celle du réseau 400.000 volts, ces "autoroutes de l'électricité" qui sillonnent l'Hexagone et sont reliées aux pays voisins.
Rivés à leurs écrans d'ordinateur, formés aux situations de stress, ces agents spéciaux ont pour mission d'acheminer l'électricité et donc d'équilibrer l'offre et la demande en gérant au mieux le réseau. Avec un impératif absolu: éviter le très redouté black-out, la panne générale. "On doit savoir perdre une ligne électrique, un réacteur nucléaire, une centrale thermique ou autre sans que le réseau s'effondre. Tout doit rester en sécurité", explique Jean-Paul Roubin. Pour anticiper la demande d'électricité, RTE reçoit une masse d'informations : de Météo France sur les températures à venir; des industriels sur leurs besoins ; d'EDF et des autres fournisseurs sur leurs capacités de production "Si la consommation s'avère plus faible ou plus forte que prévu ou s'il y a une défaillance, comme ce samedi dans le Sud, nous devons rattraper les écarts en temps réel."
"On pourrait encore importer un peu plus"
Nucléaire, thermique, hydraulique, éolienne, photovoltaïque Chez EDF, toutes les sources d'énergie sont sollicitées (lire cidessus). Outre 55 réacteurs nucléaires (59.000 MW) sur 58 couplés au réseau, les centrales thermiques (charbon-fioul-gaz) fournissent 9.000 MW. Au total, la capacité de production de l'électricien était vendredi de 90.000 MW. Ces derniers jours toutefois, la production nationale n'était pas suffisante. Sur les écrans de RTE, les importations en provenance d'Angleterre s'affichaient hier matin à 1.198 MW (plus 980 venus d'Espagne, 914 de Belgique, 321 de Suisse, 180 d'Allemagne), tandis que la France exportait 1.511MW vers l'Italie.
Solde importateur? Environ 2.000MW. "J'essaye de trouver le meilleur compromis économique entre nos sources de production et ce qui existe sur les marchés, en Allemagne ou ailleurs", explique Marc Ribière, directeur du centre d'optimisation-production- marchés chez EDF. Vendredi, 5.600 MW ont ainsi été achetés à l'étranger, dont 2.800 en Allemagne. "On pourrait encore importer un peu plus", assure-t-il.
Une baisse de tension de 5% décidée samedi soir en Paca
En cette période critique, des efforts sont aussi demandés aux consommateurs. RTE a ainsi lancé son "alerte Ecowatt orange" en demandant jeudi aux usagers des "péninsules électriques" de Bretagne et de Côte d'Azur de modérer leur consommation entre 18 heures et 20 heures, une alerte levée vendredi en Bretagne. Mais que se passerait-il si la France était encore plus gourmande ces prochains jours? "Avec la relance de centrales à l'arrêt et des importations plus importantes, on saurait absorber un besoin de 100.000 MW et au-delà", promet Jean-Paul Roubin.
Et si des "aléas" survenaient, baisse inattendue de production ou températures très en deçà des prévisions? Là, deux solutions. D'abord, RTE ordonne une baisse de tension "imperceptible par l'usager" ; ce qui s'est passé samedi à 19 heures où une baisse de 5% a été décidée dans le Var et les Alpes-Maritimes, la hausse de la consommation étant bien plus forte que prévue. En dernier recours, pour éviter "l'effondrement total du système", des délestages peuvent être décidés. De vraies coupures de courant appelées pudiquement "coupures ordonnées de la distribution". Mais ça, affirme Jean-Paul Roubin, "nous n'y pensons pas".
Richard Bellet
13/1/2010 - Les exportations nettes d'électricité de la France ont chuté de moitié en 2009, tombant à leur plus bas niveau depuis le milieu des années 1980, a annoncé le Réseau de Transport d'Electricité (RTE) mercredi dans son bilan annuel.
Le solde net des exportations d'électricité françaises a atteint 24,6 térawattheures (TWh) en 2009, en baisse de 47% par rapport à 2008. Il s'agit du chiffre le plus bas depuis le milieu des années 80, époque à laquelle le parc nucléaire français était encore en cours de construction.
La France, qui est traditionnellement exportatrice d'électrons grâce à ses 58 réacteurs nucléaires, a été importatrice nette d'électricité pendant 57 jours en 2009, contre 6 jours seulement en 2008. Elle avait été en octobre importatrice nette d'électricité sur un mois entier, pour la première fois depuis 27 ans. Le pic d'importation a été atteint le 16 décembre, avec 140 gigawattheures (GWh) net d'importation.
"Cette évolution est liée à la baisse de la production française d'électricité", qui a reculé de 5,5% en 2009, indique RTE, qui gère les lignes à haute tension. La filiale d'Electricité de France (EDF) précise que la production des centrales nucléaires française a baissé de 6,8% en 2009, à 390 TWh, atteignant ainsi son plus bas depuis 1999.
De nombreux réacteurs nucléaires ont été arrêtés cet hiver, au plus fort de la demande hivernale, pour des accidents divers ou des opérations de maintenance. En outre, des grèves intervenues ce printemps ont désorganisé le planning de maintenance et de rechargement en uranium des réacteurs.
La production des centrales hydrauliques a elle reculé de 9,2%, tombant à son plus bas niveau depuis 2006. EDF, qui gère 640 barrages en France, impute ce déficit de production à de moindres précipitations dans les Alpes et le centre de la France.
Les lacs étant moins remplis qu'à l'accoutumée, EDF n'a pas pu déclencher ses turbines aussi souvent que l'an dernier. La production des éoliennes a elle bondi de 40% (elle a été multipliée par 20 en 6 ans) mais elle ne représente toujours que 1,5% seulement de l'électricité française.
La consommation d'électricité
est elle en baisse de 1,6% à 486 TWh, sous l'effet de la
crise économique. Les grandes industries ont vu leur consommation
baisser de 8,6%, tandis que celle des PME-PMI reculait de 3%.
En revanche, les particuliers, services publics et petits professionnels
ont consommé 2% d'électricité en plus qu'en
2008.
1/1/2010: - Nicolas Sarkozy a annoncé vendredi qu'il prendrait prochainement des mesures pour assurer l'approvisionnement énergétique de la France, mis à rude épreuve ces dernières semaines en raison des conditions météo. Lors d'une réception en l'honneur des personnes qui ont travaillé pendant la nuit de la Saint-Sylvestre, en particulier dans les services publics, le chef de l'Etat a notamment pris soin de remercier les gaziers et électriciens.
"Vos interventions sont cruciales, particulièrement en cette période hivernale", a-t-il déclaré. L'approvisionnement du pays en énergie est "un sujet majeur sur lequel nous devons engager une réflexion de long terme pour consolider les bases de notre indépendance et de notre sécurité énergétiques", a-t-il ajouté. "J'aurai à prendre des décisions en la matière très bientôt." Un tiers des habitants de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) ont été privés d'électricité le 21 décembre.
En outre, comme c'est régulièrement le cas, la France a dû récemment importer de l'électricité pour surmonter un pic de consommation dû à des températures inférieures aux normales saisonnières. Avec 80% d'énergie électrique d'origine nucléaire, la France a un système mal adapté à ce type de pics, qui nécessitent la mise en oeuvre de moyens de production d'électricité supplémentaires en un temps très court. "Il est dommage qu'on soit obligé d'importer de l'électricité parce qu'on a un taux d'entretien des centrales nucléaires qui est insuffisant", déplore l'Elysée.
Cette situation est notamment due à des grèves dans les centrales nucléaires françaises, qui ont retardé la maintenance de réacteurs cet été. Le nouveau PDG d'EDF, Henri Proglio, a fait savoir qu'il souhaitait relever le taux de disponibilité des centrales nucléaires à 85% d'ici trois ans, contre 78% en moyenne en 2009. Paca et la Bretagne sont les deux régions jugées les plus vulnérables à cause d'une faible production locale et d'un réseau de transport électrique arrivé à saturation.
Le Monde, 17/12/2009:
La "France électrique", si fière de son parc [très surdimensionné] de 58 réacteurs nucléaires exploité par EDF, s'est réveillée de ses certitudes avec la vague de froid: elle n'est plus à l'abri de coupures de courant. Le pays devrait frôler, jeudi 17 décembre à 19 heures, le record historique de consommation atteint le 7 janvier 2009 (92 400 mégawatts, MW), a indiqué Réseau de transport d'électricité (RTE).
Gestionnaire des 100 000 kilomètres
de lignes à haute tension, la filiale d'EDF chargée
de l'équilibre entre l'offre et la demande pour éviter
les délestages, voire un "black-out", juge que
"la situation est tendue". Surtout en Bretagne et en
Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Les températures sont inférieures de 6ºC à
8 ºC aux normales saisonnières, indique Météo
France. Or en cette période de l'année, prévient
RTE, "une baisse de 1ºC entraîne une augmentation
de la consommation d'électricité d'environ 2100
MW, soit l'équivalent de deux fois la consommation de Marseille".
RTE n'exclut pas qu'un refroidissement sévère en
fin de semaine soumette le système de production et de
transport d'électricité à des tensions plus
fortes.
IMPORTATIONS LIMITÉES
EDF a dû importer d'Allemagne 4400 MW lundi soir (la puissance de quatre réacteurs nucléaires), puis 5100 MW mardi pour passer la pointe de 19 heures, quand les usages domestiques (chauffage, appareils électroménagers, télévisions) font bondir la consommation. Or le réseau français ne peut pas supporter plus de 9000 MW d'importations, et à condition que les entrées soient réparties entre l'Allemagne, la Belgique et l'Italie. Si la France reste exportatrice d'électricité, elle est depuis quelques années déficitaire vis-à-vis de l'Allemagne. En octobre, elle a plus importé d'électricité qu'elle n'en a exporté, une première depuis l'hiver 1982-1983, quand le parc nucléaire était en construction.
Le PDG d'EDF, Henri Proglio, le patron de RTE, Dominique Maillard, et le président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), Philippe de Ladoucette, devaient s'expliquer sur "l'approvisionnement de la France en électricité cet hiver", mercredi, devant les députés et les sénateurs de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. RTE avait prévenu fin octobre d'un fort risque de coupures "en cas de froid intense et durable".
Les pics de demande s'expliquent, notamment, par le développement du chauffage électrique: 7 millions de foyers français en sont équipés, soit la moitié du parc installé en Europe. Le problème est structurel. La France a un modèle unique au monde, fondé sur le "tout nucléaire" (85% de la production), mal adapté aux périodes de pointe. En dépit d'une relance des investissements depuis 2005, EDF manque de centrales utilisables en quelques minutes (cycles combinés à gaz). Ce retard s'est conjugué à des grèves dans le nucléaire, à des incidents et à un calendrier de maintenance inapproprié.
"PROBLÈME INDUSTRIEL MAJEUR"
Le parc nucléaire lui-même connaît des ratés, un point que M. Proglio a souligné avant même sa nomination à la tête d'EDF, fin novembre. Une dizaine de réacteurs sont encore à l'arrêt. En 2009, la durée de fonctionnement des centrales (taux de disponibilité) est tombée à 78% en 2009, loin derrière les entreprises les plus performantes. Une situation jugée "anormale" par le premier ministre, François Fillon. "C'est le résultat d'un manque de prévention dans la maintenance, qui entraîne des arrêts inopinés, mais aussi d'une pression sociale et syndicale qui ne va pas dans le sens de la productivité", analyse le responsable d'une société prestataire d'EDF. Le patron d'un grand groupe européen de l'énergie juge que "la baisse de régime des centrales est le problème industriel majeur d'EDF dans l'immédiat".
Puissante chez EDF, la CGT n'est "pas étonnée". Elle juge que des investissements à l'étranger ont été faits au détriment de l'entretien du parc français."Dans la production nucléaire comme dans les autres secteurs, la dégradation est palpable, assure Sud Energie: comment garantir une sécurité maximale en situation de sous-effectif, d'éclatement des équipes, de course aux gains de productivité, de dégradation des relations avec la direction?"
[Lire :
- Intermittents, les esclaves du nucléaire
- Les résultats du nouveau management dans le nucléaire
- Rationalité instrumentale et santé au travail :
Le cas de l'industrie nucléaire
- Et le Rapport d'enquète de psychopathologie du
travail au Centre de
Production Nucléaire de Chinon.]
Confortés dans leurs thèses, les antinucléaires exigent l'arrêt des chantiers français et finlandais de l'EPR, le réacteur de troisième génération. "C'est la faillite de l'option "centrales nucléaires + chauffages électriques" censée assurer notre indépendance énergétique", dénonce le réseau Sortir du nucléaire. "Aucune politique d'économies d'énergie n'a jamais été lancée en raison du coût du nucléaire", accuse Greenpeace.
D'autres concluent à l'urgence d'investir dans les nouvelles technologies. "Les électriciens doivent agir sur la maîtrise de la consommation en utilisant compteurs et réseaux intelligents, indique Colette Lewiner, du consultant Capgemini. L'installation de ces compteurs dans le tertiaire et chez les particuliers permettra de mieux gérer les pics de demande, d'améliorer le pilotage du réseau et de créer de nouvelles relations avec le client." EDF ou GDF Suez doivent aussi, selon elle, déployer des "smart grids" (réseaux intelligents) permettant à la distribution de gérer les productions centralisées (nucléaire) et décentralisées ou intermittentes (éolien)
17/12/2009 - Le réseau associatif "Sortir du nucléaire" fustige l'option française du tout nucléaire et tout électrique qui conduit « le royaume du nucléaire » à devoir importer de l'électricité d'Allemagne en période hivernale.
« C'est la faillite totale de l'option française » centrales nucléaires + chauffages électriques « qui était censée assurer l'indépendance énergétique », affirme le mouvement antinucléaire dans un communiqué.
L'association juge que cette situation va s'aggraver en raison de la « politique insensée de développement du chauffage électrique », et parce que les centrales ont vieilli, alors que les périodes permettant la maintenance des réacteurs se sont réduites avec l'essor de l'utilisation des climatiseurs l'été.
La France achète du courant à l'Allemagne. Sortir du nucléaire souligne que, contrairement à une idée répandue, « depuis 2004, c'est l'Allemagne qui est exportatrice nette d'électricité vers la France : 8,7 TWh (térawatts/heure) en 2004, puis 9,7 TWh en 2005, puis 5,6 TWh en 2006, et 8,2 TWh en 2007, et carrément 12,6 TWh en 2008, c'est-à-dire environ la production annuelle de deux réacteurs nucléaires ».
Selon les statistiques du transporteur RTE pour 2008, les échanges entre la France et les pays voisins restent excédentaires, mais le solde exportateur est en baisse de 15,4 % par rapport à celui de 2007.
Les antinucléaires soulignent que « la France exporte de l'électricité lorsque les prix sont bas et elle en importe lorsque les prix sont très élevés, en particulier en hiver ». « Il est clair que, sous peu, la France dépensera plus d'argent en achetant de l'électricité qu'elle n'en gagnera en en vendant », prédit Sortir du Nucléaire.
RTL, 17/12/2009:
La chronique de Christian Menanteau.
C'est presque un rendez vous : dès que le thermomètre baisse, l'électricité manque. C'est quand même curieux : à quoi servent donc nos centrales nucléaires ?
C'est certainement la question que se posent tous ceux qui risquent, aujourd'hui ou demain, de subir des coupures de courant. Les fameux délestages. En théorie, nous sommes suréquipés, avec le plus grand parc de centrales nucléaires du monde. Nous en avons 58. EDF est capable de produire près de 80% de l'électricité française. Le problème, c'est l'écart entre la théorie et l'interrupteur. On pourrait appeler cela "les ratés du nucléaire". Ils sont de deux sortes :
- Les temporaires,
- Et les structurels.
Dans la première catégorie, il y a la mobilisation, très insuffisante, des centrales. Au début du mois dernier, sur 58 unités, 18 étaient en panne, en révision ou en phase de chargement de combustible. A ce jour, il en reste encore 8 à l'arrêt.
Alors, quelles que soient les raisons : grève du printemps, pépins techniques sérieux consécutifs à des défauts d'entretien ou mauvaise coordination, ce sont près de 20% des moyens de production qui sont, aujourd'hui, inutilisés. C'est difficilement compréhensible de la part d'un leader mondial comme EDF.
Dans la deuxième catégorie, les problèmes structurels, plus sérieux, il y a d'abord le taux de rendement de chaque centrale nucléaire d'EDF qui est insuffisant. Il est de 10 à 15% inférieur à celui des centrales qui sont, par exemple, gérées par GDF-Suez en Belgique.
Il y ensuite le boulet que représente le chauffage électrique : il a pris une place démesurée. La moitié des radiateurs électriques européens sont dans l'hexagone. Plus de 7 millions de foyers français sont chauffés à l'électricité. Ce modèle unique au monde, qui a été imposé par EDF au détriment d'une politique d'économie d'énergie, est très vulnérable dès que la consommation augmente.
EDF peut-elle rapidement redresser la barre ?
En mettant tous ses ufs dans le même panier, EDF a permis à la France, certes, de disposer d'une expertise reconnue, d'un prix de l'électricité compétitif, mais a perdu toute flexibilité. Une centrale nucléaire, c'est comme un manège : une fois lancé, ça tourne toujours à la même vitesse. Or, la consommation d'électricité, c'est une succession de creux et de bosses. Du coup, on a trop de courant dans les creux et pas assez dans les bosses. Depuis le début de la semaine, nous avons acheté aux allemands l'équivalent de la production de 4 à 5 centrales nucléaires.
L'électricité ne se stocke pas. Heureusement, le nouvel EPR va tout résoudre !
Je ne le pense pas. L'EPR est une vitrine de
la compétitivité de la filière nucléaire
française. C'est un futur gros produit d'exportation, comme
les Airbus, mais ce n'est pas une machine dont nous avons actuellement
besoin. La gestion des pointes de consommation, c'est l'affaire
de quelques centrales à gaz, pas chères à
construire et qui fonctionnent à la demande. A la décharge
d'EDF, qui en construit une actuellement à Montoir, dans
la Loire, il y a une demi-douzaine d'autres projets de centrale
à gaz, mais ceux-là sont bloqués par des
oppositions locales.
17/12/2009 - Sous "alerte rouge" à cause des grands froids qui augmentent les risques de coupures d'électricité, la Bretagne peine à trouver des solutions pour réduire sa dépendance énergétique alors qu'elle ne produit que 8% de sa consommation. A défaut de mieux, le Réseau de Transport d'Electricité (RTE) en a été réduit à appeler les consommateurs "à des gestes citoyens" pour soulager le réseau local pendant les pointes de consommation, entre 17H00 et 20H00.
"N'allumer que l'éclairage nécessaire, ne pas allumer les appareils dont l'usage peut-être différé (lave-vaisselle, lave-linge), éteindre les appareils en veille", résume Jean-Michel Colin, directeur délégué RTE Ouest. Côté production, la centrale thermique de Ploufragan (Côtes d'Armor), principale réponse proposée par GDF pour compenser le déficit énergétique breton à l'horizon 2010, est en plein statu quo.
Pour GDF, la centrale était le seul moyen de "produire 120 MW en 14 minutes" et répondre aux pics de consommation. Mais le projet a suscité une levée de boucliers des riverains, des élus de tous bords et des associations écologistes qui critiquaient la grande consommation de gaz et d'eau. Inquiète pour l'avenir, la région Bretagne a organisé le mois dernier des assises sur le dossier énergétique avec un programme en tryptique: économies, développement des énergies renouvelables et, éventuellement en complément, installation de petites unités de production, type biogaz.
Dans une région marquée par une forte proportion de maisons individuelles et un suréquipement des logements en chauffage électrique, "on a calculé que des économies de l'ordre de 100 mégawatts (mgw) étaient un objectif possible", explique Isabelle Thomas, conseillère régionale (PS), présidente de la commission environnement et cadre de vie. La région table aussi sur le développement des énergies renouvelables qui peinent encore à prendre de l'envergure, comme partout en France.
Pour l'éolien terrestre, "nous en sommes à 950 MGW de permis de construire validés alors que nous avions prévu 1.000 MGW en 2010", se félicite cependant Mme Thomas. Du fait de la géographie bretonne, les possibilités de l'éolien offshore sont immenses mais "il faudrait que le législateur prenne ses responsabilités" au niveau national pour favoriser la création d'une filière industrielle, souligne l'élue.
Les agriculteurs bretons, eux, proposent de favoriser la co-génération sous serres, dont le rendement est de "plus de 85%". Mais pour ce, "l'Etat doit autoriser la revente d'électricité sur le marché libre d'avril à octobre", quand les serres n'ont plus besoin de chauffage, a rappelé mercredi un communiqué de la FRSEA (Fédération régionale des syndicats d'exploitants agricoles).
De son côté, l'association "Sortir du nucléaire" a profité de l'alerte rouge pour répéter que "l'option française +centrales nucléaires+chauffages électriques+ fait actuellement la preuve de son absurdité" en souhaitant "faire de la Bretagne la preuve exemplaire qu'une politique énergétique propre et durable est possible".
La secrétaire d'Etat à l'Ecologie
Chantal Jouanno a pour sa part reconnu qu'il fallait "tous
agir sur la maîtrise de la demande d'électricité,
car c'est pour l'heure notre seul levier d'action". Elle
a aussi rappelé que malgré le retard du projet de
Ploufragan, "l'engagement a été clairement
pris de réussir à mettre en marche cette centrale
en 2012".
Le Dauphiné libéré, 16/12/2009:
Les régions Bretagne et Paca sont appelées à réduire leur consommation électrique pour éviter des coupures. Réseau de Transport d'Electricité (RTE) vent en effet de placer la première en alerte rouge jusqu'à jeudi, la seconde en alerte orange jusqu'à vendredi.
Ces deux régions souffrent des mêmes maux: faibles productrices d'électricité, elles dépendent grandement de leurs "importations", et donc de leur réseau de transport d'électricité relativement sous-dimensionné.
Grosse consommation et coupures potentielles
La situation devient difficile en période de grand froid,
en raison du recours massif des Français au chauffage électrique,
encouragé au lendemain de la construction du parc nucléaire
hexagonal.
Selon RTE, la France dans son ensemble devrait d'ailleurs frôler son record historique de consommation électrique demain. L'Hexagone devrait consommer 92 000 mégawatts, alors que les températures devraient être inférieures de 7 à 8°C aux normales saisonnières.
L'arrêt de nombreux réacteurs
nucléaires en cause
Fin octobre déjà, RTE avait de manière générale
mis en garde contre des risques de coupure d'électricité
en cas de froid "intense et durable" en France.
Aux difficultés particulières s'ajoute une production d'électricité nationale actuellement plus faible que lors des hivers précédents, en raison de l'arrêt de nombreux réacteurs nucléaires. 18 sur 58 fin novembre, une dizaine selon un dernier décompte effectué hier.
Pour faire face à ce déficit de production, la France devait importer, hier soir, 5 100 MW d'électricité, principalement d'Allemagne, soit l'équivalent de la production de cinq réacteurs nucléaires.
La "faillite totale" de l'option
nucléaire ?
Une situation dénoncée par le réseau associatif
"Sortir du nucléaire". Ce dernier a d'ailleurs
fustigé cet état de fait : "C'est la faillite
totale de l'option française centrales nucléaires
chauffages électriques qui était censée assurer
l'indépendance énergétique".
Et l'association juge que cette situation va
s'aggraver en raison de la "politique insensée de
développement du chauffage électrique", et
parce que les centrales ont vieilli, alors que les périodes
permettant la maintenance des réacteurs se sont réduites
avec l'essor de l'utilisation des climatiseurs l'été.
14/12/2009 - Le système électrique français est "dans une situation tendue" en raison de la vague de froid qui frappe actuellement la France, a prévenu lundi le Réseau de Transport d'Electricité (RTE), appelant les Français à réduire leur consommation pour éviter les coupures. "Le système électrique français est dans une situation tendue, particulièrement dans l'Ouest et en région PACA" (Provence-Alpes-Côte d'Azur), prévient la filiale d'EDF dans un communiqué.
RTE invite donc "tous les consommateurs d'électricité, en particulier ceux habitant ces deux régions, à mieux maîtriser leur consommation d'électricité, notamment au moment de ces pointes de consommation, entre 17H00 et 20H00", ajoute le gestionnaire de réseau. Le gestionnaire de lignes à haute tension prévoit "des niveaux de consommation d'électricité très élevés et durables pour toute la semaine, en particulier à la pointe du soir, aux environs de 19H00".
Le record de consommation du 7 janvier 2009
"pourrait même être dépassé en
fin de semaine", ajoute la société. La France
va ainsi devoir importer 4.400 mégawatts (MW) ce lundi
à 19H00, et 5.100 MW (l'équivalent de la production
de 5 réacteurs nucléaires) mardi 15, à la
même heure. Fin octobre, RTE avait mis en garde contre les
risques de coupure d'électricité en cas de "froid
intense et durable" en France.
Ouest-France, 10/12/2009:
Centrales nucléaires en petite forme, augmentation de la consommation : avec la baisse attenduedes températures, le risque de coupure générale n'est pas nul. En première ligne, la Bretagne.
Assurée par les centrales nucléaires à plus de 80 %, la production d'électricité, en France, risque-t-elle de faire défaut cet hiver ? Selon RTE (Réseau de transport électrique), « la situation est nettement moins favorable que les années précédentes. Le risque de rupture d'approvisionnement est néanmoins modéré, sauf en cas de froid intense et durable ». Une semaine de températures inférieures de 7 °C aux normales saisonnières et c'est tout le réseau de distribution qui pourrait tomber en rideau.
Raisons de ces inquiétudes ? Trop de réacteurs nucléaires à l'arrêt, en panne ou en révision. La situation pourrait demeurer tendue jusqu'à la fin janvier. On s'attend aussi à un passage très difficile, au tout début 2010, avec une pointe de consommation estimée à 83 500 MW. Voire beaucoup plus en cas de grand froid. « Une baisse de 1 °C peut accroître la pointe de consommation d'environ 2 100 MW », soit l'équivalent d'un réacteur nucléaire et demi. Certes, les éoliennes montent en puissance, de nouvelles centrales thermiques sont raccordées. « Leur arrivée ne compense pas la baisse conjoncturelle de la production. »
Il va falloir importer
Le secours des barrages ? Non : eux aussi devraient fournir un peu moins de jus, compte tenu des prévisions d'apports hydrauliques à la baisse. Dans le sud Manche, le gouvernement vient même de décider d'araser deux ouvrages qui alimentent aujourd'hui 15 000 personnes. Pour pallier ces déficiences, il va falloir acheter de l'électricité chez nos voisins européens. « Un comble ! », disent les écologistes, qui ne manquent pas de railler les limites de l'option nucléaire.
« Le niveau d'importation est estimé à 4 000 MW entre novembre et janvier », calcule RTE. En cas de froid intense, 9 000 MW seraient nécessaires. C'est la capacité maximum que peut absorber, en plus, le réseau national. Ces importations en provenance de centrales au charbon et le recours massif aux unités thermiques « vont alourdir, de manière significative, les émissions de CO2 », souligne l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) de Basse-Normandie.
Pour éviter le « black-out » et les soirées à la bougie, trois mesures sont envisagées : « Effacements volontaires de certains industriels ; baisse temporaire de la tension électrique qui réduit artificiellement la demande et, en dernier recours, mesures de délestage sélectives. » L'Ademe invite par ailleurs les élus locaux à mieux gérer leurs illuminations de Noël. « Elles représentent 10 % de la consommation annuelle de l'éclairage public. »
L'EPR n'apportera rien à la Bretagne
Deux régions sont particulièrement menacées : Provence-Alpes-Côte d'Azur et Bretagne. « Les Bretons ne produisent que 7 % de l'énergie qu'ils consomment alors que leur demande, comme celle des Vendéens, croît plus vite que la moyenne française », souligne Didier Bény, directeur RTE de la région Ouest, à Nantes. Dynamisme économique des PME-PMI et forte croissance démographique (25 000 habitants supplémentaires chaque année) expliquent cette forte demande d'énergie.
La mise en service de l'EPR de Flamanville réglera-t-elle ce déficit ? « Il n'apportera rien au réseau breton, dont les lignes sont déjà à saturation. » La solution ? « Renforcer les lignes, mettre en service une unité capable de gérer les heures de pointe et gérer plus finement encore le réseau avec l'apport des énergies renouvelables », précise Didier Bény. Par ailleurs, un programme expérimental, Ecowatt, vient d'être engagé. Il consiste à informer, en temps réel, des usagers témoins pour qu'ils réduisent leur consommation.
17/11/2009 - La France a été importatrice nette d'électricité en octobre pour la première fois depuis l'hiver 1982-1983, a annoncé mardi le Réseau de Transport d'Electricité (RTE), filiale d'EDF. Traditionnellement exportatrice d'électricité, du fait de la taille [très surdimensionné] de son parc nucléaire, la France a importé au mois d'octobre 458 gigawattheures (GWh) d'électricité auprès de ses voisins européens.
C'est la première fois depuis l'hiver 1982-83 que le pays a été importateur net d'électricité durant un mois complet. Cette situation s'explique par les nombreux arrêts de réacteurs nucléaires en octobre, pour accidents et opérations de maintenance. Les 58 réacteurs nucléaires français (qui fournissent 75% de l'électricité du pays) ont ainsi produit en octobre 8,9% d'électricité de moins qu'un an auparavant. La production des centrales hydrauliques a elle chuté de 19,7% en raison d'une plus faible pluviométrie.
Le 19 octobre, la France a dû importer 123 GWh d'électricité, un record historique. EDF a annoncé la semaine dernière que la production nucléaire française allait chuter en 2009 à son plus bas niveau depuis 10 ans. Une partie de ce manque de production est imputable aux grèves qui ont désorganisé le planning de maintenance et de rechargement en uranium des réacteurs d'EDF au printemps.
Le parc nucléaire a aussi été victime de plusieurs accidents, notamment sur des générateurs de vapeur et des alternateurs. Début novembre, 18 des 58 réacteurs français étaient à l'arrêt, soit près d'un sur trois.
Le Monde, 15/11/2009:
Veuillez vérifier qu'il y a des bougies dans le tiroir de la cuisine. Pourquoi ? Pour passer l'hiver, tiens. Pourquoi ? Ben, il y a plein de nucléaire en France, donc il faut revenir à la bougie. Quoi, quoi, quoi ? Bougie, nucléaire ! Ben oui, beaucoup de nucléaire = retour à la bougie. Vous ne saviez pas ?
Expliquons. Le 30 octobre, Réseau de transport d'électricité (RTE) a annoncé que la "disponibilité prévisionnelle du parc de production français pour cet hiver" sera en "très net retrait". Des importations d'électricité seront nécessaires entre novembre et janvier.
Mais "avec des températures de 7 à 8 °C durablement sous les normales saisonnières, [tous ça c'est la faute au "réchauffement" climatique -:) ] le niveau d'importation pourrait atteindre la limite technique". Auquel cas, il faudra envisager des actions de sauvegarde, telles que "baisse de tension de 5 %, voire délestage de consommation" - c'est-à-dire coupures, c'est-à-dire bougies.
Remarquez, c'est très moderne, les bougies. Sur le Net - consultez avant la panne, parce que bien sûr, l'ordinateur... -, vous trouverez des magasins bien approvisionnés, on peut payer par carte Bleue.
Bon, mais des températures inférieures de 7 à 8 °C aux normales saisonnières, ce doit être très rare, non ? Non.
"Allô, Météo France ? - Attendez, je regarde les chiffres. Voyons, voyons : une journée inférieure de 8 °C à la normale saisonnière en janvier 2009, deux jours inférieurs à 6 °C en 2008, deux jours inférieurs à 7 °C en 2006, oh, tiens, un coup de froid inférieur à 9,7 °C le 27 février 2005." Aïe, aïe, aïe, ce n'est pas si rare. Et en 1987, dix jours inférieurs à 10 °C par rapport à la normale, près de dix jours en 1985...
Voyons les choses du côté positif : s'il fait froid, le nucléaire va relancer la production française de bougies, et donc... la croissance ! Whaoô, trop génial !
Au fait, comment nous retrouvons-nous dans cette situation, alors que, cocorico !, la France dispose de cinquante-huit réacteurs nucléaires que le monde entier nous envie ? Eh bien voici :
1 - pour justifier le suréquipement nucléaire, on a stimulé le chauffage électrique ; l'inconvénient du chauffage, c'est qu'on s'en sert quand il fait froid. Donc, en hiver, il y a des pointes très fortes de demande ;
2 - aucune restriction n'étant suggérée à nos concitoyens, la consommation d'électricité croît rapidement : de 450 térawattheures en 2002 à 494 en 2008 ;
3 - le parc nucléaire français connaît plein de problèmes techniques. Plus de dix réacteurs, sur cinquante-huit, sont en ce moment à l'arrêt.
Les solutions existent. La solution gros boeuf : on augmente la production, on construit des centrales thermiques, on construit des centrales nucléaires.
La solution élégante : on réduit la consommation d'énergie, on s'interroge sur ce dont on a vraiment besoin, on fait attention à l'environnement. Le test de l'hiver : gros buf, ou élégant ?
Hervé Kempf
12/11/2009 - Le déficit de production des réacteurs nucléaires français, dû à des grèves et à des incidents techniques, va amputer le bénéfice opérationnel (Ebitda) d'EDF à hauteur de 1 milliard d'euros, a annoncé Daniel Camus, directeur général délégué Finances du groupe public.
"L'impact total (de la baisse de la production nucléaire, ndlr) se traduira par une perte d'Ebitda d'environ un milliard d'euros", a affirmé M. Camus, lors d'une conférence téléphonique avec les analystes financiers. La production d'électricité d'origine nucléaire va reculer à 390 térawattheures (TWh) en 2009, son plus bas niveau depuis la fin des années 1990.
Quinze réacteurs nucléaires étaient à l'arrêt mardi 10 novembre, sur les 58 réacteurs que compte le parc français, a indiqué EDF jeudi dans un document transmis aux analystes. L'année dernière à la même date, dix réacteurs seulement étaient arrêtés.
M. Camus a en outre précisé que le taux de disponibilité du parc nucléaire français se situerait entre 78% et 78,5% en 2009, contre 79,2% en 2008 et 83,4% en 2005. Le groupe avait annoncé en début d'année qu'il comptait atteindre 81% en 2009 et 85% en 2011. "Le rythme auquel cet objectif de 85% sera atteint devra être précisé au premier trimestre 2009", a indiqué M. Camus.
12/11/2009 - Affectée par des grèves et des accidents, la production d'électricité des réacteurs nucléaires français va tomber cette année à son plus bas niveau depuis dix ans, une situation qui va obliger la France à importer de grandes quantités d'électricité cet hiver.
Le parc nucléaire français devrait produire environ 390 térawattheures (TWh) d'électricité en 2009, le niveau le plus faible depuis 1999, date de mise en service du dernier des 58 réacteurs français. Une grande partie de ce déficit de production est imputable aux grèves du printemps, qui ont désorganisé le planning de maintenance et de rechargement en uranium des réacteurs, affirme EDF.
Mais si l'impact des grèves est important, il n'explique pas tout. Ainsi, sur les quinze réacteurs arrêtés en France mardi, seuls trois l'étaient du fait des mouvements sociaux. En outre, le taux de disponibilité du parc nucléaire, qui ne prend pas en compte l'impact des grèves, baisse continuellement depuis quatre ans. Il est tombé de 83,4% en 2005 à 79,2% en 2008 et devrait encore régresser à 78% en 2009.
A tel point que le Premier ministre lui-même a dénoncé cette situation: "ce n'est pas seulement un problème technique, mais d'organisation et de calendrier de maintenance", a jugé François Fillon la semaine passée. De fait, les parcs nucléaires étrangers affichent souvent des taux de disponibilité bien supérieurs à la France. Il dépasse par exemple les 90% pour les huit réacteurs belges.
Pour le réseau associatif Sortir du nucléaire, la cause est simple: les réacteurs français sont "vieillissants" et dans un "état extrêmement dégradé", ce qui accroît les risques d'accidents.
L'argument est cependant réfuté par les experts qui soulignent que les réacteurs français ont un âge moyen de 23 ans seulement, pour une durée de vie prévisible [non, souhaitée par EDF] de 40 à 60 ans. A l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), on relève aussi qu'il n'y a "pas de tendance très nette ni à la baisse, ni à la hausse" du nombre d'incidents nucléaires.
"Dans trois accidents sur quatre, c'est lié à un facteur humain ou organisationnel, à un manque de rigueur dans l'exploitation des réacteurs", explique Olivier Gupta, directeur général adjoint de l'ASN. Pour certains syndicats, le parc souffrirait surtout d'un manque d'investissements remontant à la fin des années 90.
Mais depuis 2006, EDF a renversé la tendance, en lançant un programme de remplacement de pièces jugées défectueuses, comme les générateurs de vapeur ou les alternateurs. Ce sont d'ailleurs deux de ces pièces, dont le remplacement était prévu en 2010, qui sont à l'origine des plus gros accidents de l'année.
Par ailleurs, EDF affirme vouloir s'inspirer des méthodes américaines, par exemple pour procéder à des opérations de maintenance sans arrêter les réacteurs. Mais un problème de management empêche ces efforts de porter leurs fruits, estime un syndicaliste, qui pointe les mauvaises relations existant entre les chefs des centrales nucléaires et la direction parisienne de la production nucléaire.
La baisse de la production nucléaire a, quoi qu'il en soit, pour conséquence directe d'écorner le mythe de l'indépendance énergétique, aux fondements du choix nucléaire français [une drôle d'indépendence, avec de l'uranium importé à 100 %]. Cet hiver, la France va en effet devoir importer l'équivalent de la production de quatre réacteurs nucléaires pendant plusieurs semaines.
"EDF va devoir acheter très cher de l'électricité aux heures de pointe", remarque Jacques Percebois, professeur à l'Université de Montpellier. Le groupe a chiffré à déjà 1 milliard d'euros le coût de ce déficit de production.
Les Echos, 22/10/2009:
La France a vu son solde exportateur chuter de 40 % depuis le 1er janvier par rapport à l'an passé. En cause, la baisse de la production des centrales nucléaires d'EDF
Situation délicate pour EDF. Le groupe, qui va devoir céder l'an prochain du courant nucléaire à ses concurrents, a du mal à produire autant qu'il le voudrait. Résultat : il privilégie ses clients français et limite ses exportations. Selon les derniers chiffres du gestionnaire de réseau d'électricité RTE, les exportations d'électricité, qui étaient historiquement un atout de la France, se sont effondrées de 17 % depuis le 1er janvier par rapport à l'année dernière. Les importations, en revanche, ont bondi de 18 %. Résultat : le solde exportateur français a chuté de 40 %, avec un plongeon de 67 % sur le seul mois de septembre.
L'érosion de l'avantage concurrentiel de la France à l'export se confirme donc. En 2002, le solde exportateur français s'établissait à près de 77 térawattheures. Selon un consultant, cela représentait alors un apport de 2,7 milliards d'euros à la balance commerciale. L'année dernière, il était tombé à moins de 47 TWh. « Soit une perte de 1 milliard d'euros en six ans pour nos exportations », explique cet expert.
Une situation qui trouve sa cause immédiate dans la forte baisse de la production du parc nucléaire français. Elle devrait s'élever cette année à quelque 400 TWh, soit un recul de 18 TWh par rapport à 2008. Cela s'explique avant tout par les grèves dans les centrales nucléaires, qui ont entraîné une perte de production de 13 à 14 TWh, estiment les analystes de Morgan Stanley. Ils tablent sur une normalisation de la production nucléaire et un niveau de 425 TWh en 2011.
EDF a tout de même pu répondre
à la demande française car, selon les chiffres de
RTE, la consommation a reculé de 2,6 % en données
corrigées des aléas climatiques depuis le début
de l'année. Et de 11 % pour les seuls gros industriels
connectés au réseau. Les analystes de CM-CIC notent
que la baisse a ralenti en septembre. « Le recul de la demande électrique des industriels est enrayé », avec un rebond de près
de 30 % en séquentiel par rapport à la moyenne des
mois de juin, juillet et août.
Les Echos, 23/7/2009:
Compte tenu d'une demande modérée, et de nouvelles capacités de production, RTE estime que l'équilibre du système « devrait être assuré jusqu'en 2013 » . Mais pas forcément au-delà...
La réalité est parfois trompeuse. Cette année, et pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la consommation d'électricité dans le monde devrait baisser, conséquence de la crise économique. En France, le gestionnaire de réseau, RTE, prévoit une réduction de la demande de l'ordre de 1,3 % par rapport à 2008, corrigée des aléas climatiques. Sur les six premiers mois de l'année, elle a déjà baissé de 2,4 %. Selon Pierre Bornard, vice-président du directoire de RTE, il faudra attendre 2012 pour retrouver les niveaux de consommation de 2007. Pour le réseau électrique, cette demande modérée est une bonne nouvelle : RTE estime que l'équilibre du système « devrait être assuré jusqu'en 2013 ».
Mais dans son bilan prévisionnel à
l'horizon 2025, publié hier, la filiale d'EDF se montre
plus vigilante pour la suite. Dès 2014, elle chiffre à
1.800 mégawatts (MW) la puissance additionnelle nécessaire
pour conjurer le risque de défaillance, autrement dit de
black-out. C'est un peu plus que la capacité d'un réacteur
EPR [comme le hasard fait
bien les choses...]. Etant donnés
les nombreux projets d'investissement de production d'électricité,
notamment de centrales à cycle combiné, RTE ne veut
pas lancer de message d'alerte. En revanche, « 2015 apparaît
comme un horizon critique », avertit le gestionnaire de
réseau.
Pointes de consommation
La raison est simple : entre 2013 et 2015, certaines centrales thermiques seront arrêtées un peu partout en Europe, essentiellement pour obsolescence environnementale, conformément à la législation européenne. En France, par exemple, les centrales à charbon ont produit 21,5 terawattheures et ne produiront plus que 14,5 TWh en 2015. C'est peu comparé à la production nucléaire (418,3), mais c'est crucial pour répondre à la demande de pointe car on peut mettre en service une centrale thermique en quelques minutes.
Or si la demande globale devrait progresser à un rythme modéré de 0,8 ou 0,9 % d'ici à 2025, selon RTE, la demande de pointe va continuer à progresser à un rythme supérieur. Le développement du chauffage électrique et des pompes à chaleur augmentent en effet de plus en plus notre sensibilité au froid. Le record de consommation atteint le 7 janvier, en plein hiver, s'est élevé à 92.400 MW. RTE prévoit une pointe probable à 104.000 MW en 2015, contre 75.000 en 2001. Un facteur majeur de croissance des importations de courant. Et c'est sans compter sur le déploiement éventuel de la voiture électrique
Dans ce contexte, les moyens de production ou d'effacement de consommation, seront-ils disponibles ? Une partie de la réponse dépendra du niveau de rémunération de ces moyens. Concernant l'effacement, comme le souligne l'affaire Voltalis («Les Echos » d'hier), « il faut [encore] trouver un mécanisme qui permette un équilibre » entre les différents acteurs, reconnaît Dominique Maillard, le président du directoire de RTE. Mais le mode de rémunération est également l'objet de grosses incertitudes pour les moyens de production. La question est évidemment centrale pour les investisseurs, particulièrement en période de crise. Le ministère de l'Ecologie et de l'Energie travaille sur les deux sujets.
Reste que pour le gestionnaire de réseau, « il s'avère important de surveiller d'ici à 2015 les effets de la crise économique et financière qui peut retarder des projets de centrales en France mais aussi ailleurs en Europe ». Si la crise devait conduire à des annulations de projets, comme on a failli le voir pour celui de centrale à gaz de Poweo à Toul (en Meurthe-et-Moselle), la situation deviendra effectivement tendue. Dans ce cas, selon les experts, l'Europe pourrait décider de laisser tourner plus longtemps les centrales qui devaient arrêter en 2015.
22/7/2009 - La consommation d'électricité va devenir de plus en plus sensible aux vagues de froid dans les années à venir, ce qui va obliger la France à importer de plus en plus d'électricité à partir de 2013, a indiqué le Réseau de Transport d'Electricité (RTE) mercredi.
L'électricité ne se stockant pas en grandes quantités, la production doit à tout moment être équivalente à la consommation, afin d'éviter les risques de panne. Dans cette optique, RTE (qui gère les lignes à haute tension) réalise tous les deux ans un bilan prévisionnel de l'équilibre offre-demande d'électricité.
Dans son dernier bilan, publié mercredi, RTE estime que "la sécurité d'alimentation électrique de la France devrait être assurée jusqu'en 2013". Cependant, "la vigilance s'impose sur la consommation de pointe lors des vagues de froid, qui augmente rapidement", met en garde la filiale d'EDF. La France avait battu un record de consommation d'électricité le 7 janvier dernier à 19H00, avec une demande de 92.400 mégawatts (MW), alors que les températures étaient de 8°C inférieures aux normales saisonnières.
En 2015, la "consommation probable à la pointe" (le soir en hiver) pourrait atteindre 104.000 MW, prévoit RTE. "Le développement du chauffage électrique, notamment des pompes à chaleur, va augmenter la sensibilité de la consommation aux températures froides", explique la filiale d'EDF. Ainsi, dès 2013, l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité ne devrait plus "être strictement respecté", la France étant obligée de recourir de plus en plus aux importations d'électricité lors des pics de consommation.
La situation sera encore "plus critique" en 2015, du fait de l'arrêt programmé des centrales thermiques au charbon dans toute l'Europe, "essentiellement pour obsolescence écologique", prévient RTE. La France ne pourra alors plus compter sur les surcapacités de production de ses voisins européens.
RTE met aussi en garde quant à la sécurité d'alimentation des régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur (PACA) et Bretagne, qui sont isolées du reste du réseau électrique français et disposent de peu de moyens de production localement. "Sans nouveaux investissements de production, la sécurité d'alimentation de la région Bretagne ne peut être durablement assurée", prévoit RTE.
19/12/2007 - Malgré la nécessité d'économiser l'énergie, la France vient une nouvelle fois de battre son record de consommation d'électricité avec une puissance appelée de 88,9 GW à 19h, lundi 17 décembre et de 88,2 GW, mardi 18 décembre à 19h. Pourtant, si les températures sont fraîches, elles ne sont pas extrêmes. Alors comment expliquer une telle consommation qui contraint la France à importer de l'électricité ?
Cette situation est la conséquence directe du « tout nucléaire » imposé en France depuis trente ans : pour légitimer la construction de 58 réacteurs, EDF et l'Etat ont mis en place le plus grand parc de chauffage électrique d'Europe [1], qui entraîne une surconsommation d'électricité et qui, par ailleurs, est un mode de chauffage ruineux pour les consommateurs. Le chauffage électrique qui obère le pouvoir d'achat des ménages les plus pauvres est d'ailleurs interdit au Danemark dans toutes les constructions neuves.
Le nucléaire, dont la production manque de souplesse, est incapable de répondre aux pointes de consommation dont il est pourtant responsable. De fait, quand il fait froid comme actuellement, il faut faire fonctionner des centrales au charbon et au fioul fortement émettrices de CO2, mais aussi importer au tarif fort de l'électricité depuis les pays voisins. Mais ces derniers pourront-ils toujours fournir l'électricité manquante à la France ? La France n'est-elle pas sous la menace d'une pénurie d'électricité en cas de nouvelles baisses de la température et/ou d'indisponibilité de moyens de production ?
Or, il est possible de sortir rapidement de cette impasse énergétique. Selon l'étude sur des sorties du nucléaire en 5 ou 10 ans publiée par le Réseau « Sortir du nucléaire » [2], une campagne vigoureuse d'économies d'énergie et d'énergies renouvelables sur 5 ans pourrait diminuer la consommation électrique de la France de 20 %. Pour cela, il faudrait lancer un programme d'isolation du bâti ancien et remplacer les équipements les plus gourmands en énergie (électroménager et éclairage) par des appareils sobres. Il faudrait aussi remplacer le chauffage électrique et les chauffe-eau électriques par des installations de chauffage utilisant la biomasse (bois, résidus de récolte, déchets organiques) et par des panneaux solaires thermiques.
Economies d'énergie et énergies renouvelables permettraient à la France d'améliorer réellement son indépendance énergétique et diminueraient sensiblement sa facture énergétique. Ces programmes créeraient en outre beaucoup plus d'emplois que la construction du réacteur nucléaire EPR à Flamanville, un investissement inutile et dangereux.
Il est plus que temps de changer notre manière de produire et de consommer l'énergie pour éviter ces pics de consommation et les risques de pénurie.
[1] 7 millions de ménages se chauffent
à l'électricité en France.
[2] Voir en ligne
Le Figaro, 19/12/2007:
Le pic de consommation enregistré avant-hier a nécessité la mise en place d'un dispositif complexe.
Un chiffre et un seul : 88 960 mégawatts (MW). C'est le nouveau pic de consommation d'électricité en France, enregistré avant-hier à 19 heures. Le précédent remontait à plus d'un an. Un record certes, passé inaperçu pourtant, car en coulisses, la mécanique de la fée électricité a fonctionné à merveille.
L'un des centres névralgiques de l'organisation qui s'est mise en branle sans failles se trouve à Saint-Denis. C'est là, au Centre national d'exploitation du sys?tème électrique (Cnes), qu'une petite dizaine de personnes veille en permanence à l'alimentation du territoire, très gourmand en période hivernale. Géré par Réseau de transport d'électricité (RTE), le gestionnaire du réseau haute et très haute tension, le dispatching de Saint-Denis a la haute main sur la répartition des flux électriques en France.
« Ces jours-ci, on sent une intense concentration
de nos équipes. Les flux sont très importants, la
marge de sécurité est moins grande et la volatilité
impressionnante des échanges d'électricité
selon les besoins », explique Pierre Bornard, vice-président
de RTE. Ainsi, hier mardi, lendemain de ce record, la France est
passée en quelques minutes d'une situation importatrice
(à hauteur de 700 MW) à exportatrice (1 550 MW).
Si fortes que soient ces variations, elles ne prennent pas RTE
par surprise, qui s'appuie sans arrêt sur des prévisions
statis?tiques : historiques de la consommation, habitudes de la
population et, bien sûr, données météorologiques
« Dix jours à l'avance en moyenne, Météo
France nous donne des prévisions qui n'auront cessé
de s'affiner jusqu'à l'heure H », explicite ainsi
Pierre Bornard.
Le prix du mégawattheure s'envole. Tous ces éléments sont précieux. À cette période de l'année, une baisse de 1 °C de la tempéra?ture se solde par une progression de la consommation d'électricité d'environ 1 700 MW. Soit l'équivalent du double de la consommation de la ville de Marseille. L'équivalent aussi, et même un peu plus, du futur EPR de Flamanville, le réacteur nucléaire de troisième génération et de ses 1 600 MW. Au passage, il n'est pas inutile de rappeler la sensibilité électrique de la France au froid, la plus élevée en Europe occidentale. Ainsi, quand le Vieux Continent accuse une baisse de température de 1 °C, sa consommation électrique grimpe de 3 300 MW, dont 1 700 pour la France.
En marge de RTE, EDF est sur la brèche. Toute cette semaine, le groupe énergétique mobilise tous ses moyens de production disponibles, à commencer par ses centrales nucléaires, dont 54 tranches sur 58 fonctionnent actuellement. Ces réacteurs délivraient lundi 55 000 mégawatts auxquels se sont ajoutées l'énergie produite par les dizaines de barrages ainsi que la puissance des centrales thermiques. Mais ce n'est pas tout : avant-hier, à l'heure du record de consommation, la France a dû importer 5 100 MW venant d'Allemagne et de Suisse. Ironie de la situation, dans le même temps, les producteurs français exportaient 3 500 MW vers l'Angleterre, la Belgique, l'Italie et l'Espagne, soit 4 % de la consommation.
Cet approvisionnement sur le marché de gros a évidemment un prix. Selon les relevés de Powernext, la Bourse de l'électricité, le mégawattheure (MWh) se vendait lundi en fin de journée à près de 237 euros. Là aussi un sommet. En moyenne, à cette période de l'année, le MWh se négocie à cent euros. Toutefois, la flambée du MWh sur le marché de gros tient aussi compte du fait qu'il faut mobiliser certaines installations qui ne tournent pas avec la même intensité pendant le reste de l'année. Cette situation va-t-elle perdurer ? Interrogé hier sur la perspective d'un nouveau record dans un avenir proche, RTE répondait que les prévisions météo tablaient sur une légère remontée des températures.
Challenges, 6/12/2007:
Pierre Gadonneix, PDG d'EDF, ne veut pas entendre parler d'un concurrent nucléaire sur le sol français. Mais il ne le dit pas en ces termes. Le rusé patron, qui préfère persuader ses interlocuteurs qu'un second EPR est inutile, dit ne pas être oppose a la concurrence. La preuve ? Il vient de signer un accord sur le nucléaire avec Enel. Le groupe italien prendra à sa charge 12,5% de l'investissement dans l'EPR de Flamanville en échange de l'équivalent en production électrique. «Personne n'est exclu de cet investissement», ajoute Pierre Gadonneix, prêt à passer un accord avec GDF-Suez : un droit de tirage sur Flamanville, en échange de Distrigaz, la filiale de distribution dont le groupe franco-belge doit se séparer. Mais il s'oppose à la construction d'un second réacteur qui serait opéré par un autre que lui. «Il n'y a pas déplace pour du nucléaire supplémentaire avant 2020», observe-t-il. Et pour étayer sa démonstration, il s'appuie sur le dernier bilan prévisionnel du RTE, le gestionnaire des réseaux électriques, qui anticipe «une modération dans la consommation électrique» à cause des efforts d'économie d'énergie, tandis que quatre centrales au gaz à cycle combiné entreront en service et que de nouvelles éoliennes procureront 2000 mégawatts supplémentaires. EDF prévoit d'augmenter la puissance des centrales nucléaires existantes, ce qui produira encore 2 000 mégawatts de plus. Bref, les besoins seront couverts. Gérard Mestrallet, PDG de GDF-Suez, veut au contraire construire un second EPR en France. Il part du même bilan prévisionnel du RTE pour arriver à des conclusions opposées. Il ne croit pas un seul instant que les éoliennes ou l'augmentation de la puissance des centrales nucléaires existantes seront suffisantes pour faire face aux besoins, estimés par le RTE à 4000 mégawatts, soit l'équivalent d'au moins deux EPR. Derrière cet argument technique, Gérard Mestrallet envoie un signal clair à Pierre Gadonneix : il n'échangera pas Distrigaz contre un vague droit de tirage sur Flamanville. Il veut opérer sa centrale tout seul sur le sol français. C'est en tout cas à l'Etat de trancher cette délicate querelle d'experts.
27/11/2007 - La France importe de fortes quantités d'électricité depuis la mi-octobre, affirme dans un communiqué le réseau Sortir du nucléaire, qui s'étonne "du très fort déficit de production d'électricité nucléaire que connaît la France depuis plusieurs semaines". "Ce sont les pays voisins, qui ont peu ou pas de nucléaire, qui sauvent une nouvelle fois la France de la pénurie après les canicules 2003 et 2006, mais aussi lors de l'hiver 2005", estime l'association anti-nucléaire mardi. La France a dû importer des niveaux record d'électricité ces jours derniers en raison du froid, avait déclaré jeudi dernier à Madrid le président du Réseau de transport d'électricité français (RTE) Dominique Maillard, ajoutant que cela témoignait de la fin de l'excédent des capacités de production du pays. "Cet aveu, partiel et flou, est loin de répondre aux questions que chacun est en droit de se poser", rétorque Sortir du nucléaire, qui s'étonne que le parc nucléaire français, "pourtant surdimensionné, est dépassé alors que la température en France est loin d'être sibérienne". Pour l'association, "le déficit de production est dû à des problèmes sur plusieurs centrales" alors que "le parc français est vieillissant". Le réseau anti-nucléaire estime "qu'il faut de toute urgence lancer un plan de sortie du nucléaire, de développement des économies d'énergie et des énergies renouvelables, pour protéger l'environnement mais aussi pour assurer l'indépendance énergétique et la sécurité d'approvisionnement du pays".
Les Echos, 26/11/2007:
Une série d'anomalies et de problèmes techniques ont conduit l'opérateur à prolonger certaines opérations de maintenance. Sur l'année, la disponibilité du parc nucléaire devrait retomber autour de 80 %, le taux le plus bas depuis huit ans. Du coup, le groupe a dû importer des volumes record d'électricité pour satisfaire la demande ces derniers jours. Un scénario qui risque de se reproduire souvent cet hiver.
Le signal d'alarme avait été tiré voilà quelques semaines par le Réseau de Transport d'Electricité (RTE) : dans son traditionnel exercice prévisionnel, à l'approche de l'hiver, la filiale d'EDF indiquait au début du mois qu'en cas de vague de froid « intense et durable », l'approvisionnement électrique s'annonçait plus tendu que l'an dernier dans l'Hexagone. Par la voix de son président, Dominique Maillard, l'entreprise vient d'enfoncer le clou en soulignant que la France avait dû importer des « niveaux record d'électricité » ces jours-ci, pour satisfaire la demande.
La raison de cette tension soudaine ? La conjonction d'un brutal refroidissement - les températures observées mi-novembre étaient inférieures de 4 à 5 degrés aux normales saisonnières - et d'une « indisponibilité plus grande que d'habitude d'une partie du parc nucléaire ».
L'espace de quelques jours, EDF a donc été obligé de se fournir massivement à l'étranger pour répondre aux besoins de ses clients domestiques. Un scénario qui risque de se reproduire souvent cet hiver... Sur l'ensemble du mois d'octobre, la France a déjà augmenté ses importations de courant de 143 % et, en sens inverse, réduit ses exportations de 21 %, tout en restant exportatrice nette.
Des pépins en chaîne
C'est que l'opérateur historique a des soucis. Une série
d'anomalies et de problèmes techniques l'ont contraint,
ces derniers mois, à prolonger des arrêts de tranche
programmés. La plus grosse « tuile » concerne
les générateurs de vapeur d'une quinzaine de réacteurs.
Au cours d'inspections réalisées l'an passé dans des centrales comme Chinon, Saint-Alban et Cruas, un entartrage anormal de ces pièces a été constaté. Leur nettoyage nécessite un « lessivage chimique », qui rallonge à chaque fois la durée des arrêts de tranche, donc l'indisponibilité des unités concernées. En accord avec l'Autorité de sûreté nucléaire, EDF a décidé de lisser la remise en état des installations sur trois ans : à la fin de l'année, 4 réacteurs auront déjà été traités. Six tranches supplémentaires seront « lessivées » en 2008 et cinq autres en 2009.
Comme si cela ne suffisait pas, des problèmes techniques, liés au remplacement de certaines pièces, sont venus perturber les opérations de maintenance entamées à Bugey (Ain) et à Paluel (Seine-Maritime). Dans ce dernier cas, l'arrêt de tranche a dû être prolongé de cent jours...
La conséquence de ces pépins en chaîne est qu'EDF, déjà guère réputé pour la disponibilité de son parc nucléaire, a vu sérieusement chuter le taux d'utilisation de ses centrales. Sur l'ensemble de cette année, leur disponibilité globale devrait avoisiner les 80 %, le taux le plus bas depuis huit ans.
Feuille de route pas respectée
En dehors de l'entreprise, certaines sources estiment que l'électricien
français exploite actuellement ses centrales à seulement
77 % de leur potentiel. La performance d'EDF sera donc bien éloignée
des 84 % initialement visés pour 2007. Sur ce terrain,
le groupe s'était fixé pour objectif de se rapprocher
progressivement des meilleures pratiques de la profession, avec
en ligne de mire les 90 % d'utilisation affichés par le
belge Electrabel ou certains exploitants américains.
D'après ses calculs, EDF estimait que
1 point de disponibilité gagné améliorerait
son excédent brut d'exploitation de 100 millions d'euros.
Pour cela, le premier levier identifié était de
réduire à la fois le nombre et la durée des
opérations de maintenance. Dans les deux ou trois ans à
venir, cette feuille de route ne sera pas respectée. Amputant
d'autant les profits du groupe. Au premier semestre, les problèmes
des générateurs de vapeur lui ont déjà
coûté quelque 200 millions d'euros.