Pour plus d'infos sur Fukushima, voir sur http://fukushima.over-blog.fr

 

Reporterre, 23 mars 2021:

Fukushima, le bilan humain est plus lourd qu'annoncé


Le bilan de l'accident nucléaire de Fukushima fait souvent débat. Un comité scientifique de l'ONU affirme qu'aucune conséquence significative n'est liée aux retombées radioactives. Une conclusion qui ne fait pas l'unanimité.

« Zéro mort, aucun cancer : le vrai bilan de l'accident nucléaire de Fukushima », titrait triomphalement l'hebdomadaire Le Point mercredi 10 mars 2021. Et ce n'est pas la journaliste qui l'affirme, mais un comité international de chercheurs, le Comité scientifique des Nations unies pour l'étude des effets des rayonnements ionisants (UNSCEAR), « qui fait référence ». « Le gouvernement japonais a-t-il surréagi en empêchant pendant de longues années le retour des populations, mais sans lien avec le risque sanitaire ? » interroge la journaliste en conclusion de son article.

Le 11 mars 2011, un tsunami a submergé la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, entraînant la fusion des coeurs des réacteurs no 1, 2 et 3, la surchauffe de la piscine d'entreposage des combustibles du réacteur no 4 et d'importantes retombées radioactives sur une partie du territoire japonais. Depuis, le bilan de cette catastrophe fait régulièrement débat. « Est-il vrai que l'accident nucléaire de Fukushima n'a causé aucun mort ? » interrogeait déjà le quotidien Libération le 20 avril 2019.

L'UNSCEAR a tenté pour la première fois de répondre à cette question dans un rapport complet publié le 2 avril 2014. Ce travail a régulièrement été mis à jour jusqu'en 2017 à travers trois livres blancs. Le document de 248 pages évoqué par Le Point, publié le 9 mars 2021, résume toutes les études sur les conséquences de la catastrophe publiées jusqu'à la fin de l'année 2019. Et, effectivement, il conclut qu'« aucun effet néfaste sur la santé des résidents de la préfecture de Fukushima n'a été documenté qui soit directement attribuable à l'exposition aux rayonnements résultants de l'accident ». (voir le rapport de l'UNSCEAR)

Plus de 200 cancers de la thyroïde suspectés ou confirmés

Mais le diable se cache dans les détails, comme le montre l'exemple du cancer de la thyroïde chez les enfants. Face à la fréquence de cette pathologie ayant explosé en Ukraine et en Biélorussie à la suite de l'accident nucléaire de Tchernobyl en 1986, le gouvernement japonais a lancé une vaste campagne de dépistage chez les Japonais de moins de 18 ans concernés par les retombées radioactives. Ce programme propose aux habitants de la province de Fukushima, ainsi qu'aux personnes évacuées âgées de moins de 18 ans au moment de l'accident, un examen de la thyroïde tous les deux ans jusqu'à l'âge de 20 ans, puis tous les cinq ans.

Au total, 300.472 personnes ont ainsi été testées entre octobre 2011 et avril 2015, à l'aide d'un équipement à ultrasons très sensibles. Bilan : 116 cancers de la thyroïde suspectés ou confirmés. Lors de la deuxième phase, en 2014-2015, 270.540 personnes ont repassé une échographie de la thyroïde et 71 nouveaux cancers ont été découverts ou suspectés. La troisième phase de dépistage, menée sur 217.921 personnes, a permis le diagnostic de 31 cas supplémentaires.


Les régions touchées par les épisodes (rapport de l'UNSCEAR). UNSCEAR

« Lors de la première phase de dépistage, les taux de cancer de la thyroïde [] se sont révélés beaucoup plus élevés que ceux documentés dans les registres de cancers d'autres préfectures du Japon, lit-on dans le rapport de l'UNSCEAR. Un groupe d'auteurs a fait valoir que les taux plus élevés fournissent la preuve d'un risque accru de cancer de la thyroïde en raison de l'exposition aux rayonnements. Cependant, la plupart des autres auteurs attribuent la différence de taux au dépistage ultrasensible de la thyroïde utilisé dans le FHMS [l'enquête sur la gestion de la santé de Fukushima]. »

En clair, pour la majorité des scientifiques qui se sont penchés sur ces résultats, il y a eu un « effet dépistage » qui a conduit à des surdiagnostics. Premier argument des auteurs du rapport, les doses estimées de radioactivité reçues par la thyroïde des enfants seraient insuffisantes pour entraîner un surcroît de cancers. Par ailleurs, aucune augmentation du nombre de ces cancers n'a été observée en Ukraine et en Biélorussie dans les quatre années qui ont suivi la catastrophe de Tchernobyl, en raison d'une période de « latence » entre l'exposition aux rayonnements et l'apparition de la maladie. Enfin, les cancers de la thyroïde ont été détectés sur de jeunes Japonais de plus de cinq ans exposés à la radioactivité, alors que les enfants âgés de 0 à 4 ans au moment de l'accident auraient dû être davantage atteints, car plus sensibles aux rayonnements.

Tout ceci a conduit certains experts médicaux, parmi lesquels le conseiller de la préfecture de Fukushima pour le risque radiologique, le Dr Shunichi Yamashita - celui-là même qui a prôné le relèvement de la norme de sécurité à 100 millisieverts (mSv) par an et qui soutenait que « les effets des radiations ne touchent pas les personnes qui sourient » -, à demander la réduction des programmes de dépistage.


Des grues près du réacteur 3 de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi.

Un dépistage tardif

Pourtant, ces arguments ne font pas l'unanimité. La chercheuse Hisako Sakiyama, qui a été membre de la Commission d'enquête indépendante sur les accidents nucléaires de Fukushima (NAIIC), lancée par le Parlement japonais en octobre 2011, en réfute certains dans une interview accordée à The Asia-Pacific Journal le 1er octobre 2020 : « Par surdiagnostic, [les experts médicaux] entendent l'examen de cas qui, autrement, ne provoqueraient pas de symptômes ou de décès au cours de la vie normale d'un patient. [...] Le Dr Suzuki Shinichi, professeur de chirurgie de la thyroïde à l'université médicale de Fukushima, qui a opéré la plupart des patients atteints d'un cancer de la thyroïde à l'université, [...] a présenté à la Société japonaise de chirurgie thyroïdienne des preuves que parmi les 145 patients opérés, environ 78 % avaient des métastases ganglionnaires et environ 45 % présentaient une croissance invasive. Sur la base de ces faits, il a déclaré qu'un surdiagnostic est peu probable. »

Le président de l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'Ouest (Acro), David Boilley, n'est pas non plus convaincu. « L'existence de cette période de latence entre l'exposition aux rayonnements et l'apparition de la maladie a été déduite des observations menées après l'accident de Tchernobyl. Mais il n'y a pas eu de dépistage systématique les premières années de la catastrophe, rappelle-t-il. Ce n'est qu'après l'apparition des premiers cancers avancés avec des signes cliniques, quatre ou cinq ans après, que le dépistage a commencé. »


Dans la préfecture de Fukushima, les restes d'une maison de retraite détruite par le tsunami, où plusieurs habitants ont perdu la vie.

Même incertitude concernant les travailleurs de la centrale de Fukushima Daiichi, bien plus exposés à la radioactivité que le reste de la population. Fin 2018, le gouvernement japonais avait indemnisé six travailleurs de la centrale, dont trois étaient atteints de leucémie, deux de cancers de la thyroïde et le dernier d'un cancer du poumon. « Une petite proportion de travailleurs [174 travailleurs, environ 0,8 %] a reçu des doses efficaces au cours de la première année de 100 mSv ou plus, avec une moyenne d'environ 140 mSv [soit sept fois la dose maximale annuelle réglementaire pour les travailleurs en France], lit-on dans le rapport. Dans ce groupe, une légère augmentation du risque de cancer pourrait être déduite au cours de la vie : les estimations de risque pour ce sous-groupe correspondent à environ deux à trois cas supplémentaires de cancer en plus d'environ soixante-dix cas qui surviendraient spontanément. »

Mais la plupart du temps, l'incidence des cancers chez ces travailleurs reste « indiscernable », reconnaissent les auteurs de l'UNSCEAR. « Indiscernable » ne signifie pas « zéro cancer » pour autant : « Le Comité souligne que son utilisation du terme "pas d'augmentation perceptible" n'équivaut pas à une absence de risque ou n'exclut pas la possibilité d'un excès de cas de maladie dû à l'irradiation », lit-on en introduction du rapport.

Les effets psychologiques des évacuations

Dans les mois qui ont suivi l'accident, plus de 80.000 personnes ont reçu un ordre d'évacuation et le même nombre de « réfugiés volontaires » a fui les communes. Selon les autorités japonaises, 2.300 personnes sont mortes prématurément à cause de ces déplacements forcés. Dans son rapport, l'UNSCEAR abonde dans ce sens : « Les effets psychologiques étaient particulièrement évidents chez les personnes évacuées et comprenaient un excès d'anxiété, une dépression, des problèmes de consommation d'alcool et des effets néfastes sur la santé psychologique des enfants et de leurs mères ».

En revanche, curieusement, le rapport ne propose aucune évaluation du nombre de maladies radio-induites ou de la mortalité évitées grâce à l'évacuation. Un angle mort qui ulcère David Boilley : « Des connaissances qui ont lu ce rapport m'ont dit que les gens avaient reçu des doses très faibles et qu'il n'était peut-être pas nécessaire d'évacuer. Mais les doses reçues sont faibles parce que les gens ont été évacués ! Il y a encore des territoires tellement contaminés dix ans après qu'on ne peut toujours pas y retourner. »

Ce désaccord a conduit l'Acro à quitter le projet européen Concert, dont l'objectif est de diminuer les incertitudes liées à la contamination pour éviter d'évacuer inutilement les riverains d'un site nucléaire accidenté. « Pour nous, ce projet devait également permettre d'intervenir plus rapidement là où c'est nécessaire. Par exemple, au Japon, des habitants de zones très contaminées situées à plus de 45 kilomètres de la centrale ont été évacués plus d'un mois après l'accident. Mais cette reformulation de l'objectif nous a été refusée, d'où notre départ. »


Dans les rues de Futaba, dans la préfecture de Fukushima, le gouvernement continue de mener des travaux de décontamination pour permettre aux habitants de revenir s'y installer un jour.

« Si c'était le vrai bilan, on n'aurait rien à craindre d'une guerre atomique »

Pour le président de l'association Enfants de Tchernobyl Belarus, Yves Lenoir, auteur du livre La Comédie atomique. L'histoire occultée des dangers des radiations (La Découverte, 2016), ces biais tiennent au caractère historiquement pronucléaire du Comité scientifique des Nations unies.

« L'UNSCEAR a été créé en 1955 pour informer sur les effets des radiations, dans l'optique de la fondation de l'AIEA [Agence internationale de l'énergie atomique]. Depuis, tous les rapports de l'UNSCEAR ont le même but : promouvoir le développement de l'énergie nucléaire, assure-t-il. Après l'accident nucléaire de Tchernobyl, c'est l'UNSCEAR qui a monté les groupes de travail qui ont produit le Tchernobyl Forum de 2005, lequel a décrété que le bilan final de la catastrophe s'établissait à 50 morts et 4.000 cancers. Cinquante morts, alors que le réacteur accidenté recrachait chaque heure l'équivalent de tous les produits de fission largués par une bombe atomique qui explose ! Si c'était le vrai bilan, on n'aurait rien à craindre d'une guerre atomique. Mais un an plus tard, les académiciens Yablokov et Nesterenko publiaient une compilation de plus de 1.100 articles scientifiques sur les effets de Tchernobyl qui, entre autres, établissait à 45 ans l'âge moyen de décès des liquidateurs. »

Selon Yves Lenoir, l'histoire se répète avec Fukushima. « Mikhaïl Balonov, qui fut le secrétaire général du Tchernobyl Forum et s'est distingué en invitant en 1986 une femme enceinte à vivre dans une zone très contaminée de Russie pour rassurer la population, a été chargé de coordonner le premier rapport de l'UNSCEAR consacré aux conséquences de l'accident de Fukushima - rapport qu'il a ensuite qualifié de "Bible". »

On ne saura probablement jamais combien de personnes sont mortes ou mourront de pathologies en lien avec les retombées radioactives de l'accident de Fukushima. On ne saura sans doute pas davantage combien de vies auront été épargnées par les opérations d'évacuation. Une chose est sûre cependant : le bilan de la catastrophe est lourd. Et s'il est moins important que celui de l'accident nucléaire de Tchernobyl, c'est que le vent, favorable au moment des explosions des réacteurs et de la surchauffe de la piscine d'entreposage du combustible, a poussé 80 % de la radioactivité vers l'océan Pacifique plutôt que vers les terres habitées.


l'ACROnique de Fukushima, 2 novembre 2017 ·

La taille et la croissance des singes de Fukushima affectées

La revue scientifique Scientific Reports de Nature vient de publier un article en libre accès sur des signes de la ville de Fukushima, situés à 70 km de la centrale nucléaire accidentée. Les auteurs ont mesuré les dimensions de 62 ftus de macaques japonais et les ont pesés : 31 conçus avant la catastrophe nucléaire et 31 après. Il apparaît que les 31 ftus conçus après ont une boîte crânienne plus petite par rapport à leur taille que ceux conçus avant et un poids plus faible.

Ces retards de croissance peuvent être dû au régime alimentaire des mères, mais les chercheurs n'ont trouvé aucune différence dans leur indice de graisse corporelle. Ils signalent qu'une modification du climat ou des nutriments pourrait avoir un impact, même si cela n'est pas mesuré, mais il n'était pas possible de trouver des singes abattus dans des zones voisines non-contaminées. Il n'y que dans la ville de Fukushima que des centaines de singes sont abattus.

Même si cette étude n'apporte pas de preuve définitive, les auteurs ne voient pas d'autre cause que la radioactivité pour expliquer ces retards de croissance. La quantité de césium dans la chaire des mères a été mesurée, toutes étaient contaminées à des niveaux très variables. Comme nous l'avions déjà rapporté, cette même équipe de chercheurs avaient déjà montre que le système immunitaire des singes avait été affecté.

A noter que les singes de la ville de Fukushima ne souffrent d'aucun stress post-traumatique lié à la catastrophe nucléaire...

 

 

28 mai, 2015

Le rapport de l'AIEA sur FUKUSHIMA présente de sérieuses lacunes

Greenpeace a, aujourd'hui, rendu public un rapport confidentiel de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) sur la catastrophe nucléaire de Fukushima. Le rapport présente de sérieuses lacunes, notamment en termes de santé, de sécurité et d'environnement. Greenpeace demande à l'AIEA de revoir le rapport en profondeur, de sorte qu'il reflète le véritable impact de la catastrophe de Fukushima Daichii.

Commençons par la "bonne" nouvelle: dans son rapport, l'AIEA confirme que la compréhension de la radioactivité après la fusion des réacteurs de Fukushima Daichii était incomplète et incertaine. Mais très vite, l'agence s'enfonce ensuite dans le brouillard nucléaire. Elle avance néanmoins qu'elle n'attend aucun impact perceptible sur la santé, ignore l'énorme ampleur et complexité de la contamination radioactive et néglige l'impact de la catastrophe sur la faune et la flore. En outre, elle n'arrive pas à démontrer que le Japon travaille à un meilleur contrôle de la sécurité nucléaire.

La mission de l'AIEA est la promotion et la stimulation de l'énergie nucléaire dans le monde entier. C'est ce qui ressort clairement de cette analyse superficielle des conséquences de la catastrophe nucléaire de Fukushima. Le rapport a, de plus, été élaboré sans concertation avec les personnes qui ont été les plus touchées par la catastrophe: les habitants de Fukushima.

Déjà-vu nucléaire

Après la catastrophe de
Tchernobyl en 1986, l'AIEA avait joué un rôle similaire, en essayant de minimiser les conséquences sur les personnes et l'environnement, et de prétendre qu'elle mettait tout en oeuvre pour la mise en place de mesures de sécurité internationales plus sévères. La réalité est en fait toute autre: le site aux alentours de Tchernobyl est tellement contaminé que la situation, 29 ans après la catastrophe, n'est toujours pas sous contrôle. Fukushima prouve de manière évidente que les régulateurs nationaux n'arrivent toujours pas à garantir notre sécurité nucléaire.

Ce rapport n'est de fait que du déjà-vu nucléaire. Tout comme en 1986, l'AIEA émet des critiques sévères sur la situation avant la catastrophe, mais en minimise les conséquences et ne propose pas d'amélioration crédible. Nous ne pouvons nous laisser endormir par ce type de propagande. [...]



7/08/13

Fukushima: 2.000 travailleurs exposés à un cancer de la thyroïde

La révélation devrait faire l'effet d'une bombe. La compagnie Tokyo Electric Power (Tepco) a annoncé, vendredi 19 juillet, que près de 2.000 travailleurs de la centrale accidentée de Fukushima présentaient un risque accru de cancer de la thyroïde, soit 10% des personnes ayant travaillé sur le site. L'opérateur japonais a réalisé des examens sanitaires pour 19.592 de ses travailleurs: 3.290 employés de la firme et 16.302 employés d'entreprises sous-traitantes. Résultat: 1.973 ouvriers ont vu leur thyroïde exposée à des doses cumulées de radiations supérieures à 100 millisieverts. Un niveau au-delà duquel un risque accru de développer un cancer a été démontré par les études épidémiologiques ­ la dose normale reçue par l'organisme étant de 1millisievert par an.

DIX FOIS PLUS DE PERSONNES CONCERNÉES

2.000 travailleurs exposés à un cancer de la thyroïde
Jusqu'à présent, seulement 522 travailleurs avaient vu leurs doses de radiations transmises à l'Organisation mondiale de la santé (OMS). En février, l'OMS avait alors conclu que 178 ouvriers présentait un risque accru de cancer. Mais le ministère de la santé avait fait part de doutes sur les critères choisis pour ces premières évaluations, et avait demandé à Tepco de revoir sa méthode d'estimation du niveau d'exposition aux radiations.

"Un risque de cancer accru près de la centrale de Fukushima"
Comment une telle évaluation a-t-elle été réalisée? "Le cancer de la thyroïde est essentiellement développé après une contamination interne à l'iode 131, c'est-à-dire après que ce radionucléide a été ingéré ou inhalé", explique Alain Rannou, expert à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Les relevés des dosimètres ­ des instruments qui mesurent l'exposition aux radiations externes ­ ne sont donc pas suffisants. "Il faut réaliser des mesures anthroporadiamétriques, qui détectent les rayonnements de l'organe ciblé, ou procéder à des examens urinaires pour connaître la quantité d'iode 131 sécrétée par les urines", poursuit l'expert.

Reste une difficulté: la demi-vie de l'iode 131, c'est-à-dire le temps nécessaire pour que la moitié des atomes se désintègrent naturellement, est de huit jours. "Il faut estimer à quel moment chaque travailleur se trouvait dans une zone contaminée. De façon à calculer, à partir des mesures, quelle quantité d'iode 131 il a en réalité incorporée", complète Alain Rannou.

VIOLATIONS DES RÈGLEMENTS SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ

En juin, des tests effectués sur 174.000 personnes habitant la préfecture de Fukushima, qui compte près de deux millions d'habitants, avaient conclu que 12 mineurs étaient atteints d'un cancer de la thyroïde, 15 autres cas étant suspects. "Les autorités n'ont pas mis en évidence d'effet sanitaire avéré de la catastrophe, prévient Alain Rannou. Les données scientifiques actuelles ne permettent pas de faire la différence avec le risque spontané de développer un cancer dans la population générale."

"Des cancers de la thyroïde confirmés chez des mineurs de Fukushima"
Malgré tout, les opérations de décontamination de la centrale détruite par le séisme et le tsunami du 11 mars 2011, sont régulièrement entachées de
révélations sur les conditions de travail illégales et les violations des règlements sur la santé et la sécurité des 3.000 "liquidateurs" qui se relaient jour et nuit sur le site. En décembre dernier, le quotidien Asahi Shimbun avait notamment révélé que la société de construction Build-Up aurait demandé à une dizaine de ses ouvriers de recouvrir de plomb leurs dosimètres lorsqu'ils intervenaient dans les zones les plus radioactives de la centrale accidentée afin de sous-déclarer leur exposition et permettre à la société de continuer à travailler sur le site.

 

 

TOKYO 31 juillet 2015:

Trois ex-cadres de TEPCO seront accusés pour le désastre nucléaire de Fukushima

Trois ex-cadre vont être mis en accusation pour la négligence criminelle dont ils auraient fait preuve dans le désastre nucléaire de la centrale de Fukushima. Un rapport dévoilé vendredi indique qu'un comité judiciaire indépendant a voté en faveur de la mise en accusation de Tsunehisa Katsumata, 75 ans, qui était président de la compagnie Tokyo Electric Power (TEPCO) au moment de l'accident, ainsi que des vice-présidents Sakae Muto, 65 ans, et Ichiro Takeguro, 69 ans. Les procureurs de Tokyo avaient précédemment rendu des décisions, en septembre 2013 et en janvier 2015, pour ne pas porter d'accusations, invoquant le manque de preuves pour que les autorités auraient pu prévoir le risque de tsunami. Or, la seconde décision du comité judiciaire formé de 11 citoyens  remet en cause cette vision.

Commentaire:
Force est de constater que Fukushima reste un accident gravissime mais que la responsabilité et des cadres et des autorités (contrôleurs, ministres...) met du temps à être acceptée. Notons que depuis 4 ans et 4 mois tous les réacteurs étaient à l'arrêt... Mais le Japon vient de relancer les réacteurs de Sendaï en juillet 2015. Pour tout dire ils sont relativement loin de Fukushima, mais très proche d'un volcan. Les riverains avaient bloqué le redémarrage avec une action en justice qui leur donnait raison: le gouvernement a passé outre. Le peuple japonais est contre ce redémarrage à 68% car finalement, même si le kW est un peu plus cher, le pays n'a pas souffert de pénurie

 

 

Mediapart, 12 septembre 2014:

Polémique sur le témoignage posthume de l'ancien directeur de Fukushima

Le témoignage de l'ancien directeur de la centrale de Fukushima, Masao Yoshida, interrogé très longuement par une commission d'enquête gouvernementale en 2011, provoque une tempête médiatique au Japon. Ce témoignage était resté confidentiel à la demande de Yoshida, qui est mort en 2013 d'un cancer de l'sophage.

Le gouvernement a finalement décidé, le 11 septembre, de mettre en ligne la transcription intégrale des auditions de Yoshida, après une série de fuites dans la presse. Cette publication a mis dans l'embarras l'un des deux plus grands quotidiens du pays, Asahi Shimbun, qui a reconnu avoir publié en mai dernier un faux scoop prétendument basé sur les propos de Yoshida. Le PDG du journal, Tadakazu Kimura, a fait des excuses publiques, annoncé le licenciement d'un des directeurs, Nobuyuki Sugiura, et pourrait même démissionner lui aussi.

L'article en cause, paru le 20 mai dernier, racontait que 90% des travailleurs avaient déserté la centrale le 15 mars 2011, quatre jours après le début de l'accident, en désobéissant aux ordres de Yoshida, et s'étaient réfugiés dans la centrale voisine de Fukushima Daini, à dix kilomètres. Asahi Shimbun affirmait s'être procuré le témoignage de Yoshida, alors non public, et y avoir trouvé la preuve de la désobéissance des employés. Ce scoop a fait le tour des médias mondiaux et a choqué le public, donnant l'image d'une centrale abandonnée par ses travailleurs.

À l'époque, les concurrents de Asahi Shimbun ont reproché au journal de ternir l'image des travailleurs, et ont ensuite publié des récits divergents, eux aussi censés s'appuyer sur le témoignage de Yoshida. Cette situation a conduit le gouvernement à divulguer l'intégralité de ce témoignage. Selon le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga, cité par le New York Times, «la préoccupation initiale (de Yoshida), à savoir que son histoire soit exposée sans vérification, s'est de fait réalisée», de sorte que «nous pensons que ne pas publier son témoignage aboutirait à un résultat contraire à sa volonté».

La transcription divulguée par le gouvernement a pris en défaut le récit de Asahi Shimbun, ce qui a conduit le journal à se rétracter. Dans une déclaration publiée le 11 septembre, le journal admet que son article est erroné et qu'il n'a pas pu démontrer que les travailleurs avaient quitté la centrale «contre les ordres» de leur directeur.

Selon les explications du journal concurrent The Mainichi, Yoshida n'a pas formellement ordonné à ses employés de se rendre dans la deuxième centrale à dix kilomètres, mais a jugé après coup qu'ils avaient eu raison d'y aller. Il apparaît que Yoshida voulait que les travailleurs se replient dans un lieu relativement peu exposé aux radiations mais à proximité de la centrale, et que, dans la confusion générale, son ordre a été interprété comme celui d'aller à Fukushima Daini. En tout état de cause, le témoignage de Yoshida fait ressortir le manque de préparation à un accident grave de l'équipe de Fukushima, et de Tepco, la société exploitante de la centrale. Le repli du personnel aurait normalement dû s'effectuer selon une procédure déjà prévue, et non dans l'improvisation.

Le témoignage de Yoshida s'oppose aussi à une allégation du gouvernement de Naoto Kan, Premier ministre au moment de la catastrophe, selon laquelle Tepco projetait d'abandonner totalement la centrale le 15 mars 2011. Yoshida affirme dans son témoignage qu'il n'était pas question d'évacuer l'installation, et qu'il a toujours veillé à maintenir un nombre suffisant d'agents sur place, même s'il a pu laisser partir certains personnels non indispensables.

Dans l'ensemble, Yoshida critique durement le gouvernement, à qui il reproche de n'avoir pas du tout perçu la gravité de la situation vécue par les travailleurs sur le site. Il raconte par exemple qu'il a entrepris avec son équipe une opération de ventilation pour faire baisser la pression du réacteur n°1, aux premières heures du 12 mars. Or, alors que les travailleurs s'efforçaient déjà depuis des heures d'effectuer la manoeuvre dans des conditions périlleuses, Yoshida a reçu du ministère de l'industrie l'ordre de la mettre en oeuvre... «Basiquement, (le gouvernement) pensait que les vannes (par lesquelles s'échappe la vapeur radioactive) s'ouvriraient au moment où le ministre l'ordonnerait», dit-il dans son témoignage. Yoshida s'est aussi vu reprocher d'avoir retardé ladite manoeuvre pour permettre au Premier ministre de survoler la centrale en hélicoptère. Ce qu'il conteste catégoriquement: «J'ai dit aux travailleurs d'actionner la vanne, mais ils n'ont pas pu (à cause de la difficulté de la situation). Peu m'importait que le premier ministre soit en train de voler au-dessus de la centrale, ou de faire n'importe quoi, les gens sur le site voulaient faire la manoeuvre rapidement, pour la sécurité du réacteur

 

 

Les effets de la catastrophe de Fukushima sur la santé

Depuis le début de la catastrophe de Fukushima, Pierre Fetet tient un BLOG http://fukushima.over-blog.fr où il recense les témoignages de la population japonaise. 9 mois après la catastrophe, la situation semble alarmante. 

Extraits :

Les mères de Fukushima avaient alerté le monde dès le mois de juin: les enfants avaient des saignements de nez, des diarrhées, de la toux, des thyroïdes enflées... Elles n'ont eu cesse d'informer et d'agir pour que tous les enfants soient évacués de la région de Fukushima. Encore dernièrement, elles se sont mobilisées à Tokyo pour sensibiliser la population, mais en vain pour l'instant. Pourtant, l'actualité semble leur donner raison. Un grand nombre d'informations convergentes indiquent que, suite à la catastrophe nucléaire, l'état général de la santé des Japonais vivant dans une vaste région correspondant au moins à 8% du Japon est en train de se dégrader.

Tweet d'un habitant d'Ibaraki: "Je travaille dans un hôpital d'Ibaraki. Il y a eu des patients avec des saignements de nez perpétuels en avril. Il y en a eu sans raison avec de la diarrhée et de la fièvre en juillet. Maintenant même les membres du personnel de l'hôpital souffrent de diarrhée sans raison... Ça commence à craindre.» Tweet d'un habitant de Fukushima: «Mon ami vit à Iwakashi. Il vient finalement de commencer à avoir de l'hématurie (sang dans les urines). Mes petits enfants ont des saignements de nez. Ils ne peuvent évacuer parce qu'ils n'ont pas assez d'argent.»" 

Même si ces tweets n'ont aucune valeur statistique, ils se rencontrent de plus en plus souvent et sont à mettre en relation avec l'augmentation de certaines pathologies, visible sur des graphiques mis en ligne par le gouvernement japonais : conjonctivites, pneumonies, et diverses autres maladies sont en nette augmentation en 2011.

On avait déjà remarqué chez les enfants de Fukushima que leur thyroïde avait été affectée. Un groupe de chercheurs, sous la direction du Professeur Satoshi Tashiro de l'Université de Hiroshima, avait contrôlé la glande thyroïde de 1.149 enfants de la préfecture juste après l'accident, en mars, de la centrale nucléaire. De l'iode 131 avait été détecté chez environ la moitié des enfants. Les enfants, que l'on a affublé de dosimètres, semblent ainsi être devenus des sujets de recherche!

Chez les jeunes évacués, on avait aussi remarqué des dysfonctionnements de la glande thyroïde. Plus au sud, dans la préfecture de Gunma, 80% des patients atteints de problèmes thyroïdiens voient aujourd'hui leur état s'aggraver. Devant l'inquiétude et la pression des parents, une étude à grande échelle sur les problèmes de thyroïde a commencé le 10 octobre: 360.000 enfants de la région de Fukushima seront suivis de manière régulière tout au long de leur vie.

D'autres anomalies ont été remarquées pour ces enfants vivant en zone contaminée comme la perte de poids, le ralentissement ou l'arrêt de la croissance et même des attaques cardiaques, ce qui peut être mis en lien avec la grande toxicité du césium-137. L'ACRO, laboratoire français, a aussi fait des mises en garde à plusieurs reprises, à partir d'analyses effectuées sur l'urine des enfants de Fukushima: 100% des prélèvements révèlent la présence des césiums radioactifs. Ainsi, plus de 4 mois après les rejets massifs de radioactivité dans l'environnement, ils étaient toujours contaminés alors que leurs parents font des efforts pour limiter cette contamination interne. Il est fort probable que cela est dû à la nourriture.

Et pourtant, cette nourriture contaminée, on la vante et on en fait la promotion pour ne pas laisser tomber la région de Fukushima et son économie agricole. Mais... un présentateur vedette de la télévision japonaise, Norikazu Otsuka, qui mangeait des produits irradiés devant les caméras «pour montrer leur innocuité», a dernièrement été diagnostiqué par son médecin comme ayant contracté une leucémie aiguë.

L'empereur du Japon hospitalisé


Un autre promoteur et consommateur des légumes de Fukushima, l'empereur du Japon lui-même, vient également d'être hospitalisé, ainsi que deux autres membres de sa famille. Akihito souffre d'une pneumonie, la princesse Aiko a contracté une Mycoplasma pneumoniae, et la princesse Masako serait victime de fièvre et de toux: ils ont tous les trois des symptômes communs. Or la pneumonie, nous l'avons vu, est une maladie qui augmente fortement au Japon cette année; Takeo Nishioka, Président de la Chambre des conseillers de la Diète du Japon est d'ailleurs décédé d'une pneumonie le 5 novembre 2011 à l'âge de 75 ans. Même si les cas de l'empereur et de sa famille n'auront pas forcément la même issue, on peut s'interroger sur ces cas à répétition. En avril, on tentait d'expliquer l'augmentation des cas de pneumonies dans la région de Tohoku par l'ingestion d'eau de mer: au moins 11 personnes étaient mortes de pneumonie et environ 150 avaient été hospitalisés dans la préfecture de Miyagi, le nombre de patients étant de cinq à six fois plus élevé que d'habitude. Mais aujourd'hui, comment expliquer cette augmentation? Comme pour Tchernobyl, il est probable que les radionucléides, en contamination interne, provoquent ces maladies respiratoires.

Le problème, ce sont ces irresponsables qui se bousculent à la télévision japonaise pour faire croire aux gens que la situation n'est pas grave. Ainsi, d'après plusieurs scientifiques médiatisés, le plutonium ne serait pas si dangereux. La radioprotection pour tous n'est pas un concept avancé au Japon. Et la population, quand elle ne s'organise pas de manière autonome, en fait les frais. Une télévision alternative, OurPlanet-TV, informe de manière indépendante en diffusant des émissions sur le sujet même de la santé. Par exemple, en juillet dernier, l'émission ContAct a invité Mika Noro, présidente de l'association "Le pont pour Tchernobyl", qui a partagé son expérience: s'étant rendue au Bélarus en 1993 (pays le plus touché par les retombées radioactives de Tchernobyl), elle a éclairé avec lucidité et compétences les symptômes cliniques chez les enfants de Fukushima. Après la catastrophe de Fukushima, Our Planet-TV a lancé une enquête pour savoir si les retombées radioactives avaient eu des effets sur la santé de la population. Suite à cet appel, ils ont été amenés à étudier plus de 500 cas. Cette enquête met ainsi en évidence que la radioactivité, même à faible dose, a des effets réels sur la santé, ce qui était déjà connu par ailleurs avec la reconnaissance de l'augmentation du risque de cancer.

Dans cette vidéo sous-titrée en français, on voit entre autres le Dr Masamichi Nishio, chef  du centre anti-cancéreux d'Hokkaïdo commenter le livre de Yablokov et Nesterenko et témoigner que la  CIPR (Commission  Internationale contre les rayonnements) a renoncé à étudier les effets des radiations internes car cela aurait gêné le développement de l'industrie nucléaire.

Pierre Fetet

 

 

fukushima-blog.com, 23 juillet 2012

Rapport de la commission indépendante nommée par la DIETE sur la catastrophe nucléaire de Fukushima

Pourquoi la vérité dévoilée ? Parce que le rapport de la commission indépendante nommée par le parlement japonais dénonce nombre de mensonges et d'erreurs sur la catastrophe nucléaire : risques sismiques sous-évalués, impréparation de l'opérateur, collusions, négligences de sécurité, suivi sanitaire des personnels et des populations insuffisant Bref une catastrophe créée par l'homme, qui pourrait en tous points se reproduire ailleurs dans le monde tellement les causes sont indépendantes de la géographie. [...]

La vérité dévoilée : La commission indépendante nommée par la diète japonaise vient de mettre en ligne son premier rapport de 88 pages en anglais : de l'inouï, de l'inédit, du jamais vu ? à ma connaissance ? de la part d'une commission nommée par un parlement ! [...]
Ce premier rapport étonne et tranche avec le récent rapport de l'ASN française dont nous avions fait une synthèse récemment. Il étonne car à l'évidence il pointe les vrais dysfonctionnements et les responsabilités des uns et des autres, il tranche car il étudie en détail les malversations et le système de complicités étendues mises en place à tous les niveaux alors que l'ASN se contente, en utilisant la langue de bois, de constater, de quémander et de se plaindre. Je rappelle ici quelques points du rapport de l'ASN afin que chacun puisse juger des énormes différences d'approche.
[Lire la suite, résumé et commentaire par Jean-Marc ROYER]

 

 

Libération, 21/2/2012:
Besson en campagne pour le nucléaire à Fukushima
[no comment] ... «J'appartiens à un pays qui produit l'essentiel de son électricité avec l'énergie nucléaire et continue de croire à un nucléaire civil avec le plus haut niveau de sécurité, nous comptons sur vous pour redonner vie à ce secteur», a déclaré sur place M. Besson à des responsables et employés.

Le ministre a passé en tout cinquante minutes sur le site, se disant finalement assez «rassuré» par une situation qu'il considère comme moins catastrophique qu'il ne l'imaginait...
[no comment]

 


Le Parisien , 20/2/2012:

Des singes cobayes à Fukushima
[Besson aussi pourrait se rendre utile ?]

Equipés de dosimètres et de GPS, des primates vont être envoyés dans les zones contaminées de la région de la centrale. Le but : évaluer les dégâts là où l'homme ne peut plus aller.

La centrale de Fukushima (Japon) est située dans une région forestière.

Après avoir lutté pendant des mois pour stabiliser les réacteurs en perdition de la centrale de Fukushima, les autorités nippones s'attellent désormais à un chantier colossal : assainir les terres, contaminées à des kilomètres à la ronde. Afin de dresser une carte détaillée des zones irradiées, l'université de Fukushima a décidé d'équiper de GPS, de dosimètres et de compteurs Geiger des singes et des sangliers.

« Le fait d'utiliser ces animaux sauvages nous permettra d'établir une carte précise des niveaux de radiation au coeur des forêts qui couvrent 71% de la préfecture de Fukushima et sont parfois difficilement accessibles », nous explique le vice-président de l'université, Takayuki Takahashi.

Equipés de leurs bracelets électroniques, des primates ont déjà été envoyés en octobre dernier à proximité de la zone d'exclusion dans les forêts qui jouxtent la ville de Minamisoma mais le matériel de mesures n'a pas pu être récupéré ni les données analysées. Le professeur de robotique veut donc renouveler l'expérience en mars. L'utilisation de ces « cobayes » permettra de compléter les mesures de radioactivité effectuées en hélicoptère et en avion au-dessus des zones contaminées, devenues des no man's land.

Envoyer des primates en zone irradiée les expose évidemment à être contaminés mais permettra de mieux connaître l'étendue des dégâts là où l'homme ne peut plus aller. Les scientifiques espèrent ainsi connaître le niveau d'exposition des animaux et l'impact des radiations sur la faune qui vit à proximité de la centrale. Mais ils souhaitent surtout déterminer « le mouvement de la radioactivité » dans les forêts dont ils craignent qu'elles soient « hautement contaminées ».

La contamination des forêts aura de lourdes conséquences

« A Fukushima, les zones forestières sont les sources principales de bois, d'eau, de nourriture, souligne Takayuki Takahashi. La contamination au césium des forêts menace donc d'affecter à terme l'agriculture, la pêche et même les zones résidentielles situées à proximité. »

D'après l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'Ouest (Acro), plus de 2200 échantillons ont été prélevés dans une zone de 80 km autour de la centrale pour déterminer le niveau de contamination. Mais ces mesures ne concernent que des zones de plaine ou des secteurs bitumés « accessibles à l'homme », souligne le professeur japonais.

« Traiter les forêts est prioritaire car les pluies, en faisant ruisseler la radioactivité, recontaminent à chaque fois les zones habitées dans les vallées », explique le président de l'Acro, David Boilley. « Portés par le vent, les rejets massifs de radionucléides dans l'atmosphère ont duré dix jours au lendemain de la catastrophe, rappelle David Boilley. Il est clair que, dans certaines zones très contaminées, la radioactivité ne s'effacera pas avant des siècles. »

 


Chine Nouvelle, 17/02/2012:

Le Japon va fermer un autre réacteur nucléaire, seulement deux unités sont restées en ligne

Le Japon va suspendre le fonctionnement d'un autre réacteur actif restant, laissant que deux sur un total de 54 réacteurs commerciaux japonais en ligne, a déclaré vendredi l'opérateur, Kansai Electric Power Company.

Le réacteur de suspension, le réacteur n ° 3 à la centrale nucléaire de Takahama dans la préfecture de Fukui, sera arrêté pour un contrôle régulier mardi matin, selon l'opérateur. Les deux autres restants en ligne, le réacteur n ° 6 du Tokyo Electric Power Company de l' usine de Kashiwazaki-Kariwa de la préfecture de Niigata devrait être arrêté le 26 mars 2012, et le réacteur n ° 3 à Hokkaido Electric Power Company de l'usine de Tomari, à Hokkaido sera suspendu à la fin d' avril.

Les médias locaux ont rapporté qu'il est fort probable que le Japon n'aura [bientôt plus] de réacteurs nucléaires en pleine activité d'exploitation car ils ont tous été fermés pour la maintenance, comme aucun des réacteurs n' a repris ses activités après l' achèvement des examens depuis la catastrophe nucléaire de Fukushima en mars 2011.

Guo Jibu

 


Japon: des milliers de manifestants contre l'énergie nucléaire

TOKYO (12/2/2012) - Des milliers de personnes ont manifesté samedi à Tokyo contre le recours à l'énergie nucléaire, onze mois après le violent séisme et le tsunami qui ont endommagé la centrale nucléaire de Fukushima.

Kenzaburo Oe, 77 ans, Prix Nobel de littérature 1994, a déclaré devant des manifestants rassemblés à Yoyogi Park que "les déchets radioactifs des centrales nucléaires seront supportés par les nouvelles générations".

"Les êtres humains ne doivent pas passer cela sous silence. C'est contraire à l'éthique", a ajouté le romancier.

La manifestation a réuni 12.000 personnes selon les organisateurs, 7.000 selon la police.

Le séisme et le tsunami qui ont dévasté le 11 mars la région du Tohoku, dans le nord-est du Japon, ont fait quelque 19.000 morts et déclenché l'accident nucléaire de Fukushima, le pire depuis celui de 1986 à Tchernobyl.

En raison de l'élévation du niveau des radiations, des dizaines de milliers de personnes habitant aux alentours de la centrale située à quelque 220 km au nord-est de Tokyo, ont dû abandonner leur foyer.

La grande majorité des 54 réacteurs nucléaires japonais sont arrêtés du fait d'un mouvement d'opposition populaire provoqué par la crise de Fukushima.

L'acteur japonais Taro Yamamoto, qui aurait été écarté de plusieurs distributions du fait de ses prises de position contre le nucléaire, a déclaré aux manifestants : "Notre pays cessera d'exister s'il est confronté à nouveau à un grand séisme".

Une manifestation analogue, quoique de moindre importance, s'est déroulée dans la préfecture de Niigata, sur la côte de la Mer du Japon, où se trouve une centrale nucléaire.

A l'issue du rassemblement de Tokyo, les manifestants ont redescendu les rues de Shibuya, un des principaux quartiers commerciaux et de loisir de la capitale.

Ils ont scandé des slogans et déroulé des banderoles sur le thème "Sayonara (Adieu) aux centrales nucléaires", "Ayez le courage de dire non au nucléaire" et "Il y aura d'autres accidents si les centrales sont remises en marche".

 


Le Nouvel Observateur, 7/2/2012:

Fukushima: nouveau coup de chaud dans un réacteur

Selon la chaîne japonaise NHK World, la température dans la cuve du réacteur 2 de la centrale de Fukushima est repartie à la hausse, malgré l'"arrêt à froid".

La température dans la cuve du réacteur 2 de la centrale de Fukushima est repartie à la hausse, a indiqué lundi 6 février la chaîne japonaise NHK World. Les colossaux efforts pour refroidir le réacteur ­injection de 10 tonnes d'eau par heure- n'ont donc que partiellement atteint leur objectif.

La température dans le réacteur aurait augmenté de 45°C depuis les dernières mesures officielles, réalisées le 27 janvier. Et depuis le 2 février en particulier, elle aurait gagné une vingtaine de degrés, pour atteindre 70°C.

L'exploitant de la centrale, la Tokyo Electric Power Company (Tepco), a commencé à injecter davantage d'eau dans le réacteur vers 1 heure du matin lundi 6 février. Mais à 7 heures, la température indiquée par l'un des trois thermomètres avait atteint 73,3°C. Les deux autres indiquaient des températures d'environ 44°.

Selon Tepco, le circuit d'eau pourrait avoir changé de direction après une opération de pompage, et ne plus refroidir le combustible nucléaire fondu. Aucune trace de xenon, un gaz radioactif, n'a toutefois été détectée autour du réacteur.

Une situation toujours très instable

Ces informations confirment que la situation est loin d'être stabilisée dans les réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. A l'inverse de ce que laissait entendre le 3 décembre 2011 le gouvernement japonais et Tepco. Ils annonçaient alors que les trois réacteurs détériorés étaient en "arrêt à froid", selon une définition aménagée pour l'occasion.

Pour rester en deçà d'un seuil désormais fixé officiellement à 80°C, Tepco a annoncé qu'il augmenterait la quantité d'eau injectée dans le réacteur. La Nisa (Nuclear and Industrial Safety Agency), organisme gouvernemental, a indiqué de son côté qu'une étude était nécessaire pour déterminer si oui ou non, le réacteur pouvait être considéré en arrêt à froid. Elle a également souligné qu'un bref passage au-dessus des 80C° ne témoignait pas forcément d'un problème dans le système de refroidissement.

Morgane Bertrand,
Journaliste Société Planète

 


Le Nouvel Observateur, 5/2/2012:

Fukushima : un journaliste français arrêté

Un journaliste français, correspondant de la chaîne France 24 à Tokyo, a été arrêté le 3 janvier par les forces de l'ordre japonaises alors qu'il tentait de rentrer illégalement dans l'enceinte de la centrale nucléaire de Fukushima. [Question: Ce journaliste est-t-il suicidaire ???]

Une source proche du dossier avait d'abord indiqué au "Nouvel Observateur" que deux journalistes avaient été arrêtés avant de se rétracter et confirmer l'arrestation d'un seul correspondant.

D'après cette source, le journaliste français aurait tenté de pénétrer illégalement dans la zone de la centrale nucléaire de Fukushima. Il aurait scanné les pass spéciaux d'ouvriers travaillant sur le site pour déjouer les contrôles de sécurité et pénétrer ainsi dans la zone interdite.

Les autorités japonaises ont arrêté le journaliste pour l'interroger avant de le remettre en liberté. A la sortie, il aurait confié à un confrère qu'il risquait jusqu'à 5 ans de prison. Car si des journalistes sont déjà entrés dans la zone interdite, c'est la première fois que certains d'entre eux sont arrêtés en détention de documents frauduleux.

Une procédure judiciaire est en cours et le journaliste devrait être convoqué prochainement par la justice japonaise.

Le ministère français des Affaires étrangères procède à des vérifications.

Paul Laubacher, avec Benjamin Roger.

 


Novethic, 3/2/2012:

Japon: le devenir des déchets post-catastrophe en question

Alors que la menace nucléaire s'éloigne à Fukushima, la question de la gestion des déchets reste en suspens. Aux débris du tsunami vont maintenant s'ajouter ceux de la décontamination nucléaire. Incinération ou stockage, le gouvernement peine à trouver une solution satisfaisante au risque de propager la contamination dans tout le pays.

Le 26 décembre dernier, la fin officielle de l'accident de Fukushima était décrétée par le gouvernement japonais grâce à « l'arrêt à froid » des réacteurs*. Il envisage maintenant de mettre en place le plan de décontamination de la province de Fukushima et des alentours. Des déchets contaminés qui s'ajoutent à ceux du tsunami dont le sort n'est pas encore réglé. Car les derniers mois ont vu des « accidents » dans la gestion des premiers déchets de la catastrophe.

L'incinération, une voie critiquée

Au Japon, la principale voie d'élimination des déchets est l'incinération du fait de la place limitée existante dans le pays. Or dès le mois de mars, après l'accident, des déchets verts contaminés ont été incinérés dans des zones très éloignées de Fukushima dans des incinérateurs de déchets ménagers générant des cendres hautement radioactives (100 000 à 140 000 Bq/kg). « Les cendres concentrent dans un ordre de grandeur de 10 fois la radioactivité des déchets incinérés », expliquait Robin des bois dans son rapport d'étape en septembre. Par le biais de contrats d'échange de cendres entre provinces réalisés avant la catastrophe, celles-ci ont voyagé et ont été entreposées dans le nord du pays. En mai, l'ACRO (Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'ouest) montrait des résultats d'analyse inquiétants dans les alentours d'un incinérateur de boues de stations d'épuration contaminées dans la baie de Tokyo. Fin août, 42 incinérateurs dans le pays dépassaient 8000 Bq/kg, seuil au-delà duquel les cendres radioactives ne peuvent plus être entreposées avec les déchets ménagers classiques. Enfin, début janvier, c'est la ville de Kashiwa dans la banlieue de Tokyo qui a dû arrêter son incinérateur à cause de l'accumulation des cendres radioactives supérieures à 8000 Bq/kg. Pour Robin des Bois, « aucun protocole clair n'est mis en oeuvre presqu'un an après la catastrophe. On observe une lente répartition de la radioactivité post-Fukushima sur l'ensemble du territoire, en tout cas dans la moitié nord de l'archipel ». Au nord du Japon, Robin des Bois a estimé qu'à fin octobre 70 000 tonnes de cendres radioactives avaient été produites.

La population, inquiète, refuse désormais que les déchets du tsunami - a priori non contaminés- soient incinérés ce qui risque de générer des retards dans le stockage. Selon les sources, la quantité des déchets du tsunami pourrait représenter entre 25 millions de tonnes selon le gouvernement et 80 millions selon les experts du Japan Research Institute. Pour rassurer ses habitants, la métropole de Tokyo qui prévoit d'éliminer 500 000 tonnes de déchets issus du tremblement de terre envisage de mettre en place des contrôles de radioactivité chaque semaine à la sortie de l'incinérateur et dans les cendres.

Mais la radioactivité issues des déchets se retrouve parfois déjà jusque dans les nouveaux bâtiments, construits après la catastrophe. Car au Japon (comme en France) les cendres incinérées sont souvent recyclées et incorporées dans le ciment et le béton. Depuis la catastrophe, cette pratique se poursuit avec les cendres dont la teneur moyenne est inférieure à 8000 Bq/kg. « Il est prévu de renforcer la traçabilité du ciment contaminé et de le dédier à des usages non résidentiels mais les erreurs d'aiguillages pourront-elles toutes être évitées ? » s'interroge Robin des Bois.

Quant à certains matériaux contaminés directement par les rejets de la centrale, ils ont déjà été utilisés pour construire de nouveaux bâtiments. Des niveaux de radiation allant jusqu'à1,24 microsievert par heure (µSv/h) ont ainsi été relevés dans un immeuble de Nihonmatsu, une ville à 55 kilomètres de Fukushima a indiqué l'AFP. Le bâtiment, où vivaient 12 familles avait été construit avec du béton fabriqué à partir de gravier collecté en avril dans une carrière proche de la centrale accidentée. Le gouvernement japonais a ouvert une enquête le 16 janvier dernier : les habitants du bâtiment s'exposeraient en effet à un taux de radiation d'environ 10 millisieverts (mSv) par an [soit 1 Rem], soit la moitié du niveau fixé par les autorités pour décréter une évacuation

A la recherche d'un lieu de stockage pour les déchets contaminés

Pour les déchets issus de la décontamination de Fukushima, c'est un autre problème : « Pour le moment, il n'est pas question que ces déchets soient incinérés » explique David Boilley de l'ACRO. Mais c'est une autre quantité colossale de déchets qui risque d'être produite. La méthode, déjà employée pour décontaminer les cours d'école de Fukushima, consiste à racler la terre sur une profondeur de quelques centimètres et en forêt de ramasser tous les débris au sol. Et le gouvernement a annoncé qu'il prendrait en charge la décontamination de la province de Fukushima ainsi que de toutes les zones où la contamination dépasse 1mSv/an. « Pour Fukushima, cela représente 29 millions de m3 de déchets et hors de la province cela représente 13 000 km2 à décontaminer » explique David Boilley. Pourtant entre l'entreposage et l'incinération, il n'existe pas d'autres alternatives pour gérer cette quantité de déchets particulièrement importante. « Il existe bien des recherches pour laver les boues avec de l'eau et utiliser des résines échangeuses d'ions pour les décontaminer mais pour l'instant cela reste expérimental. », ajoute David Boilley.

Le gouvernement aimerait donc entreposé les déchets dans le district de Futaba extrêmement contaminé puisqu'il s'agit de celui où se trouve la centrale. Mais les maires des 8 municipalités concernées demeurent sceptiques car ils espèrent un retour de la population un jour et ces déchets posent problème. En attendant de trouver un lieu et pour la décontamination en dehors de Fukushima, les municipalités devront gérer elle-même l'entreposage de leurs déchets. Alors que le début de la décontamination est prévu pour le printemps prochain par le gouvernement, la capacité de gestion de ces déchets supplémentaires demeure pour l'instant compromise.

*L'arrêt à froid est décrété quand la température des réacteurs passe sous la barre des 100°C.

Pauline Rey-Brahmi

 


Le Monde, 1/2/2012:

A Fukushima, des maires français face à "l'ennemi invisible"


Une délégation d'élus venus de communes françaises s'est rendue à proximité de la centrale japonaise de Fukushima pour observer les conséquences de l'accident - ici, le 25 janvier 2012.

FUKUSHIMA ENVOYÉ SPÉCIAL - "Quand je vois défiler ces magnifiques paysages de Fukushima aujourd'hui contaminés, je ne peux m'empêcher de penser à ma région et de m'interroger sur le devenir de ces territoires." La remarque a fusé, empreinte d'une réelle émotion. Par la fenêtre du bus, l'adjoint au maire de Chinon (Indre-et-Loire), Yves Dauge, admire la nature généreuse du département de Fukushima. Des rizières au repos, d'immenses forêts, le tout sur fond de montagnes enneigées sous un soleil accroché dans un ciel sans nuages.

Une vraie carte postale qui séduit Yves Dauge comme les sept autres élus français venus passer quelques jours dans ce département du nord-est du Japon. Avec un objectif : "Voir comment les autorités locales japonaises gèrent la crise nucléaire et ses conséquences." Partant du constat que l'accident de mars 2011 à la centrale Fukushima Dai-ichi a marqué les esprits au Japon comme en France, Cités unies, organisation française de promotion des collectivités locales à l'international, et son équivalent japonais CLAIR ont organisé, du 12 au 14 janvier, ce voyage réservé à des élus de collectivités voisines de sites nucléaires, La Hague (Manche), Chinon ou encore Fessenheim (Haut-Rhin).

Quelques jours pour s'immerger dans un territoire marqué par le séisme et le tsunami du 11 mars 2011, et surtout par le pire accident nucléaire depuis Tchernobyl. Un drame d'une ampleur telle que Bertrand Gallet, directeur général de Cités unies, regrette que "les élus n'aient pas été plus nombreux à répondre à l'appel, tant ce voyage est instructif".


Une ville évacuée dans le périmètre d'exclusion de 20 km autour de la centrale.

Instructif et bouleversant. "Pour nous, ajoute Yves Dauge, ce voyage est un cas concret. Tout ce qui nous a été dit me perturbe beaucoup. A l'avenir, qui va vouloir s'installer ici ? Quelle entreprise va vouloir investir ?" Car, au fil de ces journées à arpenter l'un des plus vastes départements japonais, à contourner la zone interdite des 20 kilomètres établie autour de la centrale et à écouter élus locaux et habitants, les visiteurs ont pris la mesure réelle d'un drame à l'origine de l'évacuation de plus de 100 000 habitants, d'une crise qui pourrait durer quarante ans et d'un coût évalué à 1 151 milliards de yens (11,4 milliards d'euros). Le tout sans compter l'impact sur la santé de milliers de personnes, qui devrait être ressenti d'ici quelques années et le problème durable de la contamination radioactive.

Une situation qui n'incite guère à l'optimisme. L'adjointe au maire de Strasbourg, Françoise Buffet, pour qui les paysages de Fukushima évoquent les forêts des Vosges, déplore que l'environnement soit "aujourd'hui dangereux, interdit" par la présence massive des dépôts radioactifs. Ils atteignent parfois de tels niveaux qu'ils font réagir les dosimètres amenés par la délégation.

Cette pollution radioactive a été baptisée d'"ennemi invisible" par Norio Kanno, le maire d'Iitate, village qui avait misé sur l'agriculture bio et qui se situe à l'intérieur des terres, à une quarantaine de kilomètres au nord-ouest de la centrale. Les 6 000 habitants ont dû l'évacuer, car il a eu la malchance de se trouver sur la route du nuage hautement radioactif émis dans les premiers jours de la crise. "Nous avons été victimes d'un caprice du vent", regrette Norio Kanno, rencontré à Iino, dans la banlieue de la ville de Fukushima, où se trouve désormais sa mairie.

Son émouvant témoignage a mis en évidence l'enjeu complexe de la décontamination, qui empêche aujourd'hui d'envisager le retour chez eux des habitants. "Un jour, juge Jacques Maugein, président de la commission locale d'information (CLI) sur le nucléaire en Gironde, le gouvernement japonais devra avoir le courage de reconnaître que la décontamination est une épreuve du temps. Il faudra au moins quarante ans pour un retour à la normale."

De fait, a, par ailleurs, expliqué Ryo Ijichi, responsable de l'ONG On the Road et membre du secrétariat gouvernemental pour la reconstruction, "les efforts de décontamination ne donnent pas grand-chose". Le vent et la pluie déplacent les dépôts radioactifs accumulés dans les forêts et sur les montagnes. Et la centrale accidentée continue de rejeter du césium, à 70 millions de becquerels par heure. Si bien qu'une zone "nettoyée" est à nouveau polluée en quelques jours.

Outre le problème de la contamination, qui pousse au départ des milliers d'habitants, le plus souvent jeunes, les élus français ont pu noter le profond sentiment d'abandon ressenti dans les jours qui ont suivi l'accident par les responsables rencontrés. Katsunobu Sakurai, maire de Minami-Soma, ville côtière de 71 000 habitants, victime du tsunami et dont une partie se trouve dans la zone des 20 kilomètres, a évoqué "l'absence totale d'informations, de consignes, de ravitaillement. J'ai dû tout décider seul, notamment en matière d'évacuation". Réaction de Jacques Maugein : "En France, c'est le préfet qui a normalement l'autorité pour décider une évacuation. Que devraient faire les élus s'il ne la décide pas ?"

A la centrale aussi, les responsables se sont sentis bien seuls au moment du drame. Ce déficit de communication avec le siège tokyoïte de Tepco (compagnie d'électricité de Tokyo, propriétaire et opérateur de la centrale) fait dire à Jacques Maugein qu'aujourd'hui, en pareille situation, "EDF se serait comportée comme Tepco".

Triste constat qui en amène un autre : "Les Japonais vivaient avec l'idée du zéro danger du nucléaire, note Françoise Buffet. Cet accident leur a prouvé l'inverse." Elle se dit profondément marquée par le témoignage du maire d'Iitate. "Pour lui, le traumatisme, le choc violent du tsunami paraissent préférables au mal invisible et sans fin de la radioactivité. Car l'important dans ce genre de situation est de pouvoir reconstruire, ce que la nature du mal radioactif ne permet pas."

Même les plus attachés au nucléaire paraissent ébranlés. Michel Laurent, ancien d'Areva, maire de Beaumont-Hague (Manche), commune voisine du chantier de l'EPR et où se trouve le centre de traitements des déchets de la Hague, clame l'importance de "toujours penser à l'impensable quand on s'intéresse aux risques d'accident". "Ce drame confirme l'importance de ne pas faire d'économies sur la sécurité et de maintenir les exploitants sous le statut de sociétés nationales."

Michel Laurent souhaite également des réponses sur les indemnisations. Pierre Gaillard, vice-président de la CLI auprès de la centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne), veut rencontrer l'assureur d'EDF, ce qu'il n'a pas encore réussi à faire malgré plusieurs demandes. Il s'interroge également sur le déroulement des exercices réalisés tous les deux ans en France. "Est-ce que l'on peut exiger des chauffeurs de bus, des gendarmes ou des pompiers d'intervenir dans des milieux devenus aussi hostiles ? Avons-nous les moyens de garantir leur sécurité ?"

Certaines craintes s'expriment. Jacques Maugein rappelle que la centrale du Blayais (Gironde) a été inondée en 1999 et peut toujours l'être. "Que peuvent les protections mises en place contre la puissance de l'eau ?" Evoquant l'ancienneté de la centrale de Fessenheim et le fait qu'elle se trouve sous la menace des eaux du canal d'Alsace, Françoise Buffet rappelle que Strasbourg, comme plusieurs villes allemandes et suisses, en a demandé la fermeture, en vain.

Et, finalement, la question porte sur l'avenir du nucléaire, une technologie dont, constate Françoise Buffet, "nous ne maîtrisons pas l'ensemble du processus et qui peut avoir des conséquences désastreuses". Pour Yves Dauge, c'est clair, aujourd'hui "il faut affirmer la nécessité de sortir du nucléaire". "Cela doit être accompagné d'une réflexion sur la stratégie énergétique, précise-t-il. Mais c'est d'autant plus fondamental que le nucléaire devrait coûter de plus en plus cher."

Il ne croyait pas si bien dire, comme l'a démontré le rapport de la Cour des comptes sur "Les coûts de la filière électronucléaire". Dévoilé le 31 janvier, il soulignait les "grandes incertitudes" pesant sur ce secteur.

Philippe Mesmer

 


Fukushima Over Blog, 29 janvier 2012:
La piscine commune de combustible usé de Fukushima Daiichi

 


L'Express, 27/1/2012:

Fukushima: cinq comités de crise n'ont gardé aucun compte-rendu de leurs réunions

Pas moins de cinq comités de crise constitués pour faire face à la triple catastrophe naturelle et nucléaire du 11 mars au Japon n'ont gardé aucun compte-rendu officiel de leurs réunions, a admis vendredi un fonctionnaire de l'Etat.

Plus tôt cette semaine, le gouvernement avait avoué que la cellule spéciale réunie autour du Premier ministre de l'époque, Naoto Kan, pour gérer l'accident atomique de Fukushima n'avait gardé aucune trace des discussions tenues lors de ses réunions, ce qui a déclenché des interrogations sur les autres commissions ad hoc.

Le gouvernement a ainsi reconnu ne pas avoir non plus les minutes de quatre autres organes d'urgence, renforçant ainsi l'image d'une gestion brouillonne du désastre déclenché par le séisme et le tsunami survenu le 11 mars dans le nord-est de l'archipel, la pire crise connue par le Japon depuis la Deuxième guerre mondiale.

Trois des comités n'ont pas même établi de brefs résumés de leurs entretiens, tandis que deux autres groupes de travail n'ont noté que partiellement le contenu des rendez-vous.

Face à ce constat dont l'actuel gouvernement n'est pas responsable, puisque la plupart des membres ont changé entre-temps, le vice-Premier ministre en exercice, Katsuya Okada, a ordonné de recréer d'ici à la fin février des résumés des rencontres à partir de témoignages.

L'absence de documents officiels sur ces réunions est qualifié de "grotesque" par Kazuhiro Hayakawa, professeur agrégé de droit administratif, et relève même selon lui d'une violation de l'obligation légale de tenir des minutes.

"Peu importe la situation d'urgence et l'obligation d'aller vite, il est absurde que n'aient pas été établis de comptes-rendus", a-t-il souligné. "Je doute que cela ait été intentionnel de la part du gouvernement, mais je suppose que les fonctionnaires n'ont pas reçu clairement l'ordre de créer ces documents", a-t-il précisé, regrettant que cette erreur prive les experts de la possibilité d'étudier ce qui s'est exactement passé immédiatement après la catastrophe naturelle qui a fait plus de 19.000 morts et l'accident de Fukushima qui a forcé à évacuer une centaine de milliers personnes.

Cette énorme maladresse est pain béni pour l'opposition conservatrice qui y voit la preuve de l'inexpérience du Parti Démocrate du Japon (PDJ), formation de centre-gauche relativement jeune et arrivée au pouvoir en septembre 2009 après plus d'un demi-siècle de domination de la droite. "C'est symptomatique de l'imprudence du gouvernement", a déclaré Hirofumi Nakasone, un ténor du Parti Libéral-Démocrate (PLD).

 


Japon: arrêt d'un réacteur nucléaire, plus que 3 actifs en fin de semaine

TOKYO (24/1/2012) - La compagnie d'électricité de l'est du Japon, Tokyo Electric Power (Tepco), qui dessert la capitale, a annoncé mardi l'arrêt prochain pour maintenance de son avant-dernier réacteur atomique ce qui ne laissera plus que trois unités actives dans tout le pays en fin de semaine.

Le réacteur Kashiwazaki-Kariwa 5 (côte ouest), qui avait été remis en exploitation commerciale il y a environ un an, sera stoppé pour sa 13e session d'entretien régulier à compter de mercredi pour une durée d'au moins cinq mois, a précisé Tepco, compagnie qui gère aussi la centrale accidentée de Fukushima.

Le complexe Kashiwazaki-Kariwa, qui avait été endommagé par le tremblement de terre de Niigata en juillet 2007, compte sept unités dont cinq sont déjà hors service.

Les réacteurs japonais doivent subir des contrôles durant plusieurs semaines tous les treize mois environ.

Du fait de l'arrêt prévu de Kashiwazaki-Kariwa 5, suivi deux jours plus tard par celui de Shimane 2, exploité par la compagnie du centre Chugoku Electric, 51 réacteurs sur 54 seront suspendus dès cette fin de semaine.

Trois des neuf compagnies régionales nippones (Chugoku Electric Power, Shikoku Electric Power et Kyushu Electric Power) n'auront à ce moment plus aucun réacteur actif, et Tokyo Electric Power n'en aura plus qu'un sur les 17 qu'elle possède, le numéro 6 de Kashiwazaki-Kariwa.

Les trois unités du pays qui resteront encore en fonction doivent en outre aussi être suspendues d'ici au mois de mai au plus tard, et nul ne sait quand toutes les tranches inactives pourront être relancées.

A la suite du séisme et du tsunami qui, le 11 mars, ont engendré l'accident sur le site nucléaire Fukushima Daiichi (nord-est), une quinzaine de réacteurs ont été subitement arrêtés dans les centrales du nord-est, puis deux autres présentant des risques à Hamaoka (centre).

Le redémarrage de tous les autres réacteurs stoppés pour maintenance ou à cause des secousses sismiques est conditionné à de nouveaux tests de résistance (notamment vis-à-vis des catastrophes naturelles) et à l'approbation des autorités locales, ce qui retarde l'échéancier habituel.

Le ministre nippon de l'Industrie, Yukio Edano, a reconnu la semaine dernière que le Japon pourrait n'avoir plus aucun réacteur nucléaire en activité cet été et prévenu qu'il ne pouvait s'engager sur un calendrier pour la réactivation des tranches stoppées.

Nous devons dès lors prendre des dispositions au cas où plus aucune centrale nucléaire ne serait exploitée dans les prochains mois et surtout lors des pics de consommation estivaux, a-t-il insisté. Les compagnies d'électricité, qui appellent la population et les entreprises à réduire leur consommation, sont forcées de remettre en exploitation des centrales thermiques afin de compenser.

 


Le Japon nationalise l'opérateur de la centrale nucléaire «Fukushima-1»

21/1/2012 - Le gouvernement japonais compte nationaliser la compagnie-opérateur de la centrale nucléaire «Fukushima-1» Tokyo Electric Power (TEPCO) au minimum pour 10 ans. Ce n'est qu'une des mesures, adoptée par les pouvoirs du Japon pour le soutien de la compagnie. À cause des grandes pertes que TEPCO a subies après les avaries sur la centrale nucléaire, la compagnie n'est plus en mesure gérer les obligations financières qui lui ont été confiées. Il s'agit notamment du paiement des compensations aux habitants de la préfecture Fukushima qui ont été touchés par la catastrophe, et des travaux très difficiles du démantèlement de la station nucléaire.

 


Agora Vox, 18/1/2012:

Fukushima
L'élite japonaise s'offre une ville en Inde

En dépit des messages rassurants qui seuls percent (rarement) l'indifférence médiatique, la crise que le Japon traverse depuis le début de l'accident de Fukushima demeure ingérable et affectera durablement l'avenir du pays. Mais cet avenir n'affectera pas tout le monde. La prochaine ville japonaise sera... en Inde.

Le recouvrement achevé d'un des quatre bâtiments éventrés par une tente en nylon est loin de constituer une début de résolution de la crise environnementale que le Japon traverse.

Pour comprendre ce qui se passe derrière ce paravent pudique, je vous propose de regarder la situation en partant d'abord des décombres de la centrale nucléaire pour s'en éloigner progressivement. Une périple qui nous mènera jusqu'en Inde.

Sur le site même de Fukushima.

Il faut d'abord relever les conditions dramatiques et héroïques dans lesquelles les équipes sur place travaillent. Un quatrième employé, âgé d'une soixantaine d'année, est mort subitement le 11 janvier, officiellement d'un arrêt cardiaque. La police a emporté le corps pour autopsie.

La température dans le réacteur n° 2 a effectué de subites variations passant de 48.4°C à 102°C le 12 janvier puis atteignant les 142°C le 14 janvier. Une « panne de la sonde » selon TEPCO.

Les travaux de construction de la tente du bâtiment 2 ont été suspendus à partir du 5 janvier pour concentrer les efforts sur le bâtiment n° 4 dont plusieurs pans de murs ont été démolis depuis novembre. Il est acquis désormais que le couvercle de l'enceinte de confinement de ce réacteur git à plusieurs dizaines de mètres de son emplacement d'origine. Le réservoir de désalinisation du système de refroidissement de secours présente des fuites.

300 tonnes d'eau contaminée de Césium radioactif (49 à 69 Becquerels par cm2) a été trouvé le 13 janvier dans des tunnels proches de l'unité 3.

En zones contaminées

Les cartes des zones contaminées les plus récentes montrent que la contamination s'étend bien au delà ces précédentes évaluation. Deux zone très contaminées se trouvent dans les faubourgs de Tokyo. Les zones plus faiblement contaminées s'étendent j'jusqu'a 250 km au sud-ouest de la centrale, une zone où l'on rencontre une des plus hautes densités de population de la planète.

Dans le reste du japon.

Mais la contamination s'exporte aussi hors des zones directement atteintes. Ainsi une jeune habitante de la ville de Nihonmatsushia constaté avec stupeur que l'appartement dont elle venait de prendre livraison était anormalement radioactif. La raison en était qu'on avait intégré dans le béton des matériaux contaminés à la suite de l'accident de Fukushima.

Le même phénomène de dissémination affecte aussi les usines de traitement des eaux usées : Dans certains centres de traitement des eaux usées, les boues résultat du traitement concentrent des taux élevés de radioactivité, interdisant leur usage comme fertilisant. Les autorités les stockent sans savoir comment s'en débarrasser..

La fuite vers l'étranger.

Face à cette perte irrémédiable de terres habitable, le Japon se tourne vers l'étranger. Le gouvernement Japonais, accompagné des grands nom de l'industrie Japonaise, vient de signer un accord afin de créer une ville japonaise dans le sud de l'Inde.

D'une capacité de 50.000 personnes et d'une superficie d'environ 2 km2 cette « station balnéaire de qualité Japonaise » offrira tout le luxe de la vie moderne, « parc industriel, hôpital, galeries marchande, mini-golf ». Certains au Japon y voient un plan de l'élite Japonaise en vue d' abandonner le navire.

Les lignes de crédits que la banque du Japon a ouvert pour favoriser les échanges avec l'Inde ( 15 milliards de $) et la Corée du sud (70 milliards) indignent la population qui s'attendait à ce que la priorité aille à la reconstruction et la décontamination des zones dévastées au Japon même et à l'évacuation des zones trop fortement contaminées encore habités.

Bref, selon que vous serez puissant ou misérable, vous cohabiterez avec des becquerels ou vous jouerez au golf dans une station balnéaire bien loin de Fukushima.

Une ville balnéaire où vos enfants ne risqueront pas de jouer dans des bacs à sables rayonnant 20 µS/h, la norme pour le reste des enfants japonais.

Elle est pas belle la mondialisation ?

 


L'Usine Nouvelle, 18/1/2012:

Le Japon va revoir la durée d'exploitation des réacteurs

Selon les propos du porte-parole du gouvernement, Osamu Fujimura, le 18 janvier, le Japon prévoit d'inscrire dans la loi de porter à 60 ans la durée d'exploitation des réacteurs nucléaires.

"Les extensions seront exceptionnellement approuvées lorsque la sécurité est assurée", estime le porte-parole. En effet, le gouvernement prévoit d'étendre la durée d'exploitation des centrales, sous réserve d'obtention d'une autorisation spéciale au-delà de 40 ans. Il prend ainsi exemple sur ce qui a été fait aux Etats-Unis. "Nous nous inscrivons dans une ligne mondiale", a justifié un responsable du gouvernement

Cette annonce fait suite aux déclarations de Goshi Hosono, le ministre de l'Environnement également chargé du traitement de l'accident de Fukushima. Il avait précisé que le gouvernement voulait fixer une durée maximum légale de 40 ans. Une idée qui ne serait pas remise en cause selon le porte-parole : "il n'y a pas de changement à la limite de base de 40 ans, mais des exceptions".

Cette proposition d'extension a provoqué des réactions immédiates, notamment de la part des opposants à l'énergie nucléaire. "Le risque est inacceptable pour le peuple du Japon, surtout quand il souffre déjà des effets continus de la crise de Fukushima", précise Junichi Sato, directeur de l'association écologiste Greenpeace Japon.

Sur le parc de 54 réacteurs nucléaires japonais, 3 ont plus de 40 ans et 16 plus de 30 ans.

 


Aujourd'hui la Chine, 6/1/2012:

Fukushima: les mères japonaises organisent la vigilance citoyenne

La catastrophe de Fukushima a sonné la fin de la confiance aveugle de beaucoup de Japonais dans le gouvernement. Des mouvements citoyens s'organisent avec en première ligne les mères de famille, soucieuse de la santé de leurs enfants.

Au supermarché, Nakayama scrute les étiquettes à la recherche de l'origine des produits qu'elle achète. Légume, lait, thé ou riz, aucun ingrédient de sa cuisine n'a échappé à la vérification. "Cela double le temps de préparation des repas", confie-t-elle, mais cette mère de famille est prête à tout pour assurer à son fils de 3 ans une nourriture non contaminée. « Mes priorités ont changé, mon enfant passe désormais en premier», explique cette ancienne carriériste au Japan Times.

Parents inquiets

Comme beaucoup de parents nippons, Nakayama craint les retombées du désastre de Fukushima, et évite les produits en provenance du Nord-Est de l'île d'Honshu (région Tohoku et Kanto).

Quand elle ne barre pas l'entrée de sa cuisine aux isotopes radioactifs, elle lutte pour que ses exigences de sécurité soient adoptées dans les écoles. Dans son quartier de Setagaya, à Tokyo, elle anime un groupe de parents d'élèves très actifs dans la prévention des risques de contamination. Elle consacre donc plusieurs heures par jour à interpeller la direction des établissements scolaires, les politiques et les parents d'élèves : elle est désormais une activiste politique.

Ces groupes se sont multipliés depuis le mois de mars, et se sont organisés. En juillet, s'est formé le Réseau National des Parents pour la Protection des Enfants contre les Radiations, un rassemblement de plus de 250 groupes de quartier, qui compte aujourd'hui plus de 6000 membres.

Une manifestation de Japonais inquiets à Tokyo. Dans le cortège, beaucoup de mères de famille...

La plupart sont des mères de familles qui ne se sont jamais engagées politiquement et qui n'ont jamais voté, mais elles relaient le sentiment d'anxiété d'un nombre beaucoup plus importants de Japonais. Leurs actions consistent à partager et diffuser des informations sur la sécurité environnementale et alimentaire vis-à-vis du nucléaire, et à faire pression sur les autorités pour que des mesures soient prises.

Leurs appels ont forcé les municipalités à s'équiper. A Setagaya comme dans beaucoup d'autres villes, les écoles testent les repas dans les cantines scolaires. Les revendications remontent, et le Ministère de l'Éducation a lui-même déboursé 100 millions de yens pour permettre l'achat de tels équipements.

Leur engagement est d'autant plus remarquable que les Japonais sont traditionnellement peu intéressés par les questions politiques. La contestation directe, ou la revendication organisée a une image anticonformiste peu appréciée dans le société.

In Facebook we Trust

Quand elle est entrée dans son groupe, Madame Itoh a d'ailleurs été étonnée par le manque de plateforme permettant la communication politique. Internet s'est dès lors imposé comme un moyen d'organisation et de récolte d'informations, explique-t-elle à Associated Press. C'est ainsi que des milliers de « mère du bon sens » ont commencé à être très actives sur les réseaux sociaux. Sur Facebook, Twitter ou les autres médias sociaux japonais, elles échangent des informations sur les retombées de la catastrophe, organisent des rencontres avec des élus et font en sorte de diffuser leur message.

Une volontaire de la Station Citoyenne de Mesure de la Radioactivité de Setagaya, à Tokyo...

Yoshiko Fukagawa, 41 ans, fait partie du même groupe que Nakayama, à Stenagaya. Elle est arrivée dans cette localité avec ses deux enfants de 4 et 7 ans après avoir fui leur préfecture de Fukushima. 10 mois après la catastrophe, elle vit toujours dans un centre d'évacués et justifie son engagement par une phrase simple : "je ne peux pas croire le gouvernement". Car le moteur de cette nouvelle forme d'activisme, c'est aussi la chute de confiance des Japonais à l'égard du gouvernement et des médias traditionnels. Dès les premières semaines suivant la catastrophe de Fukushima, des voix se lèvent contre le « manque de franchise » du gouvernement. Les sondages révèlent que plus de 70% des Nippons pensent que les annonces officielles ne sont pas « dignes de confiance » et critiquent au passage la gestion politique de la crise. Pourtant, les télévisions et journaux de l'archipel continuent de s'aligner sur la communication gouvernementale : dans cet Etat "paternaliste", pour la première fois, les citoyens doutent de leur classe politique.

« Changer l'orientation du pays »

Avec l'échange entre internautes comme seule source d'information, les réseaux se mettent en place, et les écoles ne sont pas le seul champ de bataille. Les citoyens veulent avoir une participation active dans la reconstruction des zones sinistrées par le tsunami, et surveiller eux-même l'évolution du risque nucléaire. Aujourd'hui, une dizaine de Stations Citoyennes de Mesure de la Radioactivité sont en service, dans la province de Fukushima et à Tokyo. Les consommateurs et les producteurs apportent eux-mêmes des produits pour les faire tester, en échange d'une somme modique qui sert à couvrir les frais de fonctionnement.

Tous les résultats sont publiés sur le web : « Notre rôle est ce qu'ils appellent une deuxième opinion dans le monde médical », explique une responsable du mouvement.

Là encore, les mères de famille sont en première ligne. Elles qui considéraient internet comme une « source d'information douteuse » inondent la Toile de contre-expertises, et les Japonais suivent assidument. « Nous sommes en train d'évoluer vers une forme de démocratie plus active, dans laquelle les gens réalisent qu'ils sont les acteurs principaux, pas le gouvernement », explique Tatsuya Yoshika, fondateur d'un groupe de volontaire pour la reconstruction du Nord-Est.

L'importance de ces groupes reste pourtant à relativiser, face à l'impact médiatique des médias traditionnels et de la communication gouvernementale. Mme Itoh, mère de 48 ans reste toutefois optimiste : "Nous sommes toujours petits, mais les mères impliquées n'allaient même pas voter, et font aujourd'hui signer des pétitions", confie-t-elle au Today Online. "Je pense que c'est un facteur qui peut faire changer l'orientation de notre pays" conclut-elle avec optimisme.

Claude Lely

 


Les conséquences de Fukushima revues à la hausse

Une équipe internationale de chercheurs, dirigée par le Dr. Andreas Stohl [1] de NILU [2] a fourni de nouvelles informations sur la quantité de matière radioactive qui a été libérée dans l'atmosphère lors de l'accident de la centrale nucléaire de Fukushima, endommagée par le séisme et le tsunami au Japon en mars 2011. Cette étude a été menée par des chercheurs de NILU, de l'Université des Ressources Naturelles et des Sciences de la Vie de Vienne [3], de l'Institut Central Autrichien de Météorologie et Géodynamique [4], de l'Université Polytechnique de Catalogne [5], et de Goddard Sciences de la Terre, Technologie et Recherche (Columbia, USA) [6].

L'étude montre que les rejets radioactifs sont bien plus importants que ce que le gouvernement japonais a annoncé, mais également que les piscines utilisées pour stocker les éléments radioactifs ont contribué de manière significative aux émissions de césium 137, élément extrêmement dangereux tant pour ses propriétés physiques que pour sa longue période radioactive (30 ans). "Il ne fait aucun doute que l'accident de Fukushima est le plus grave accident nucléaire depuis Tchernobyl, notamment en terme d'émissions de xénon 133 et de césium 137", confirme Andreas Stohl.

Les travaux de recherche sont basés sur l'observation effectuée depuis plusieurs stations de surveillance dans le monde, un modèle de dispersion atmosphérique, ainsi que sur les informations concernant le cours des événements lors de l'accident. "Nos calculs sont basés sur environ 1.000 mesures effectuées au Japon, aux Etats-Unis et en Europe. Cette étude est la plus complète existant aujourd'hui sur le sujet.", dit Andreas Stohl.

Tout indique que les rejets de césium 137 ont à la fois commencé et se sont terminés, plus tôt que prévus. La quantité libérée est estimée à 36 PBq (unité de mesure de l'activité d'un radionucléide du système international, un pétabecquerel valant dix puissance quinze becquerels). Cela correspond à 42% des rejets de Tchernobyl, ce qui fait de l'accident Fukushima la deuxième plus grosse émission de césium 137. 80% de cet isotope serait parti dans l'océan, tandis que 19% aurait été déposé sur le territoire japonais.

Les résultats de l'étude montrent en outre que les rejets de xénon 133 ont été d'environ 16.700 PBq. C'est le plus grand rejet civil jamais enregistré, environ 2,5 fois plus élevé que lors de l'accident de Tchernobyl en 1986. Sa dispersion aurait commencé dès le matin du 11 mars, après le tremblement de terre. Le xénon 133 n'est absorbé que dans une faible mesure par le corps humain, ses effets sur la santé sont donc moins préoccupants. "Il est cependant primordial de comprendre ce qu'il s'est passé durant l'accident.", précise Andreas Stohl.

-[1] Dr. Andreas Stohl: ast@nilu.no
-[2] NILU: (institut norvégien de recherche atmosphérique)
-[3] 
- [3] BOKU: http://www.boku.ac.at
- [4] ZAMG: http://www.zamg.ac.at
- [5] UPC: http://www.upc.edu/eng
- [6] GESTAR: http://gestar.usra.edu/

 

 

Rue89, 30/12/2011:`

Fukushima: ce que dénonce le rapport d'enquête

Manque volontaire de prévention, mauvaise gestion de la crise, le rapport du comité d'enquête japonais n'est tendre ni avec Tepco, ni avec les autorités...

Les ruines du bâtiment qui abritait le réacteur n°3.

« Il est inexcusable qu'un accident nucléaire n'ait pu être géré parce qu'un événement majeur tel que le tsunami n'a pas été anticipé. » Tel est le ton sans concession adopté dans le rapport de la commission indépendante, dont une version intermédiaire a été publiée le 26 décembre.

Certes, personne ne pouvait imaginer qu'une vague de 15 mètres recouvre la centrale nucléaire de Fukushima Dai-ichi et transforme le périmètre des 20 km à la ronde en zone morte. Mais à la lecture de ce qu'écrit la commission d'enquête sur les accidents à la centrale nucléaire de Fukushima, on voit que l'impréparation était réelle, et que les responsabilités sont partagées par Tepco et le gouvernement japonais.

Mandatés le 24 mai, les experts ont mené 456 entretiens et rendront leur rapport définitif à la mi-2012.

Que faut-il retenir ? (voir aussi le résumé en anglais, de 22 pages, les phrases importantes surlignées en jaune)

1) Des ratés dans la gestion de la crise

Le centre de gestion de crise situé à 5 kilomètres de la centrale n'a pas pu fonctionner correctement à cause du tremblement de terre et du niveau élevé de radiation. En 2009, un programme public de prévention des risques avait signalé certains manquements, comme l'absence de filtres à air, mais rien de concret n'avait été fait.

Le 13 mars, après la perte des générateurs, un temps précieux a été perdu avant que de l'eau ne soit injectée pour refroidir le réacteur numéro 3, celui où s'est produit une explosion qui a généré d'importants rejets radioactifs. L'enquête devra préciser pourquoi la délégation de pouvoir ne s'est alors pas faite correctement.

La surveillance de la radioactivité juste après l'accident a aussi mal fonctionné : les patrouilles n'ont pas été opérationnelles sur un terrain cataclysmique, alors que justement il était urgent de prendre des mesures de protection de la population.

L'évacuation de dizaines de milliers de personnes s'est faite dans la confusion, notamment parce que les ordres venus du gouvernement n'étaient pas répercutés au niveau local. Des mesures spécifiques auraient dû être prévues pour les personnes les plus vulnérables.

Les déclarations officielles telles que « il n'y a pas d'impact immédiat sur la santé des populations » ont nui à la confiance que l'opinion publique porte au gouvernement. Le rapport final devra dire pourquoi les autorités ont tant minimisé la gravité des événements, préférant cacher les informations disponibles
[c'est une blague ou de l'humour noir ???].

2) Une prévention des risques insuffisante

La commission de sécurité nucléaire du Japon a passé cinq ans (2001-2006) à revoir ses réglementations par rapport aux séismes, mais aucun spécialiste des tsunamis n'en faisait partie. Si les experts notent que le risque de tsunamis est bien évoqué dans le nouveau guide réglementaire, ils s'étonnent qu'aucune mesure concrète n'ait été prise. Tepco avait bien envoyé aux autorités de sûreté nucléaire en 2002 ses évaluations, mais celles-ci n'ont pas fait de remarques particulières ou demandé de travaux.

Or la centrale de Fukushima Dai-ichi a été conçue sur la plus haute vague observée au port d'Onahoma après le tremblement de terre au Chili en 1960, à savoir 3,1 mètres au-dessus du niveau de la mer.

En 2008, quand Tepco a réévalué les risques de tsunami pour sa centrale de Fukushima Dai-ichi, plusieurs hypothèses lui ont été présentées : une vague de 9 mètres ou de 15 mètres. Mais Tepco a considéré que la probabilité d'un tsunami de grande envergure était faible, bien que le risque existât, et n'a pris aucune mesure concrète.

Autre exemple d'impréparation : la perte totale d'alimentation électrique n'a jamais été envisagée par Tepco. Ce qui a amené à l'envoi, dans la précipitation de camions de pompiers afin d'envoyer de l'eau destinée à refroidir les réacteurs.

3) Des réformes préconisées pour éviter une nouvelle catastrophe

Le 15 août, le gouvernement japonais a annoncé une réforme des instances de régulation du nucléaire. La commission réitère la nécessité que le nouveau régulateur : soit réellement indépendant et transparent, et doté de moyens en conséquence, développe une vraie expertise sur la prévention des catastrophes naturelles, soit pleinement conscient de la nécessité de fournir des informations justes et fiables.

En conclusion, les experts répètent ce que chacun doit avoir à l'esprit : même si les probabilités d'accident sont faibles, ceux-ci peuvent avoir des conséquences tellement graves qu'il faut que toutes les précautions soient prises.

Sophie Verney-Caillat

 

 

 

États-Unis: au moins 14 000 décès causés par les retombées de Fukushima

26/12/2011 - L'impact semble à peu près comparable à celui de Tchernobyl; Les petits enfants sont les plus durement touchés, une recherche en cours montre un comptage de décès sûrement plus élevé.

On estime que plus de 14.000 décès aux États-Unis sont liés aux retombées radioactives de la catastrophe des réacteurs nucléaires de Fukushima, selon un important article de l'édition de décembre 2011 du Journal International des Services de Santé. C'est la première étude spécialisée publiée dans un journal médical à faire connaître les risques sanitaires de Fukushima. Les auteurs Joseph Mangano et Janette Sherman ont écrit que leur estimation des 14.000 décès d'américains dans les 14 semaines après les fusions des réacteurs de Fukushima peut se comparer aux 16.500 décès dans les 17 semaines après la fusion de Tchernobyl en 1986. L'augmentation de décès rapportés après Fukushima a surtout été constatée chez des enfants américains de moins d'un an. L'accroissement de décès infantiles 2010-2011 a été de 1,8%, comparé à la diminution de 8,37% des 14 semaines précédentes.

Exactement 6 jours après la fusion des 4 réacteurs, (donc le 17 mars) des scientifiques ont détecté un nuage de retombées toxiques parvenu au-dessus des plages américaines. Des mesures ultérieures faites par l'Agence américaine de Protection de l'Environnement ont montré aux États-Unis des niveaux de radioactivité de l'air, de l'eau et du lait des milliers de fois au-dessus des normes. Les plus forts taux détectés d'iode-131 en précipitation ont été aux États-Unis les suivants (la norme est environ de 2 picocuries d'iode-131 par litre d'eau) : Boise, Idaho = 390 ; Kansas City = 200 ; Salt Lake City = 190 ; Jacksonville, Floride = 150 ; Olympia, état de Washington = 125 ; et Boston, Massachussets = 92.

L'épidémiologiste Joseph Mangano a dit : « Cette étude des risques sanitaires liés à Fukushima est la première à être publiée dans un journal scientifique. Elle ne fait qu'augmenter l'inquiétude et suggère fortement de continuer des études de santé pour comprendre le réel impact de Fukushima au Japon et autour du monde. Les découvertes sont importantes pour le débat actuel sur la construction de nouveaux réacteurs et combien de temps on doit conserver les réacteurs vieillissants en service. »

Mangano est directeur exécutif du projet Radiations et Santé Publique, et auteur de 27 articles de journaux médicaux et lettres. Janette Sherman, interne en médecine et toxicologue disait : « En se basant sur notre recherche en cours, le comptage réel des décès ici peut atteindre 18.000 personnes, si on ajoute les grippes et les pneumonies comme cause de décès, qui ont quintuplé dans la période en question. On a vu des morts dans toutes les tranches d'âge, mais nous continuons à réaliser que les petits enfants sont plus durement touchés car leurs tissus se multiplient rapidement, ils ont des systèmes immunitaires moins développés et les doses de radioisotopes sont proportionnellement plus importantes que pour les adultes. »

Le Dr Sherman est professeur adjoint à l'université du Michigan et co-éditrice de »Tchernobyl ­ conséquences d'une catastrophe pour les gens et l'environnement », publié en 2009 par l'Académie des Sciences de New York, et auteur de »Exposition chimique et maladie et Le délicat équilibre de la vie ­ Causes et prévention du cancer du sein. »

Les rapports hebdomadaires des centres de contrôle et de prévention des maladies établissent le nombre de morts pour 122 cités américaines avec une population supérieure à 100.000 habitants, c'est à dire entre 25 et 30% des États-Unis. Dans les 14 semaines après l'arrivée des retombées de Fukushima aux US (entre le 20 mars et le 25 juin), les morts rapportées aux centres de contrôle des maladies a augmenté de 4,46% par rapport à la même période de 2010, comparé aux seuls 2,34% dans les 14 semaines précédentes. Les décès en excédent pour tout les US pendant cette période sont d'environ 14.000.

[Remarques d'Infonucléaire: C'est le principe des études épidémiologiques d'arriver à distinguer un phénomène qui autrement serait passé inaperçu.

Ici on a affaire à de très faibles doses radioactives sur une population importante. Ce qui compte en premier c'est de savoir s'il n'y a pas d'autre cause pouvant expliquer l'accroissement des décès sur la période en question, car le nombre de décès varie au cours de l'année (très froid, très chaud, pollution atmosphérique plaquée au sol ou stagnante à cause d'un phénomène météo, etc).

S'il n'y a pas d'autre explication que Fukushima, les taux en iode-131 dans l'eau de pluie (Boise, Idaho = 390 ; Kansas City = 200 ; Salt Lake City = 190 ; Jacksonville, Floride = 150 ; Olympia, état de Washington = 125 ; et Boston, Massachussets = 92) sont très faibles, ça fait (sauf erreur de calcul) au max 14 becquerels en Idaho, et avec 14 becquerels en iode-131 on peut sans problème se faire doucher par une averse sans parapluies

Donc s'il y a relation avec Fukushima, c'est probablement une surmortalité chez des personnes extrêmement fragilisées ou malades chez qui cette pollution supplémentaire a suffi à faire passer de vie à trépas. Pour un adulte, un enfant, ou un bébé à naître sans problème particulier c'est une petite pollution comme ils en rencontreront bien d'autres au cours d'une vie (donc qui s'accumule pour produire des effets) mais qui ne peut avoir de conséquence funeste immédiate.]

 


Politis, 20/12/2011:

Fukushima: la "fable" du raz-de-marée

Avec un sens de l'humour qui doit être une spécialité nucléaire particulièrement japonaise, la Tepco, l'opérateur privé qui gère la centrale de Fukushima Daiichi, a annoncé il y a quelques jours que les réacteurs un, deux et trois étaient arrêtés. En réalité, bien sur, ils le sont depuis le jour de la catastrophe. Ce qui se poursuit, c'est la fusion [fonte] toujours non maîtrisée des réacteurs dont le contenu continue à ronger le béton qui les sépare du sous-sol et des nappes phréatiques. À l'appui de ses dires, la Tepco affirme que la température y serait redescendue autour de 100 degrés. Ce que de nombreux spécialistes japonais contestent. Tout comme ils mettent sérieusement en doute la fin des rejets radioactifs dans l'atmosphère. Il y a une quinzaine de jours, l'entreprise a dû avouer que l'eau de refroidissement continuait à gagner la mer. Une eau contenant, par exemple, du césium 137, de l' iode 131 et du strontium, ce dernier entraînant des risques élevés de cancer des os.

Loin, très loin de ce dernier avatar technique encore inexpliqué et que des ouvriers tentent d'endiguer, comme l'a montré brièvement la télé japonaise, avec des sacs de sable, les habitants de la région de Fukushima prennent progressivement conscience de ce qui leur arrive et du caractère approximatif des informations qui leur sont données sur la teneur en radioactivité de l'air : jusqu'à 10 microsieverts/heure, soit entre 150 et 300 microsieverts/an. Soit des doses largement supérieures aux normes internationales. D'autant que les teneurs moyennes ne tiennent pas compte des différences locales et de l'accumulation de la radioactivité dans les terres contaminées, en taches de léopard, au gré des vents, du relief et du hasard.

Confrontés à l'invisible

Théoriquement, il ne reste personne dans un rayon de 20 kilomètres autour de la centrale de Fukushima Daiichi, puisque plus de 90000 personnes ont été évacuées. Théoriquement... Quant aux habitants qui vivaient entre la zone comprise entre 20 et 30 kilomètres, ils sont partis, ou calfeutrés dans leurs maisons. Théoriquement encore... Car il n'est pas facile d'admettre, notamment pour des paysans, qu'il faut tout abandonner face à une radioactivité qui ne se voit pas. Pour la première fois, des dizaines de milliers de Japonais se retrouvent confrontés à l'invisible. Seules indications que la région a été projetée dans un autre monde : comme autour de Tchernobyl, la végétation commence à grignoter les routes ou les rues, les champs ne sont plus cultivés, les serres en plastique s'effilochent sous le vent, chiens et chats errent à la recherche de nourriture. Comme les quelques vaches et autres animaux domestiques que les paysans n'ont pas eu le coeur d'abattre. Ça et là, des ombres humaines discrètes reviennent les aider à survivre. Dans de nombreux villages, les traditionnelles maisons en bois abandonnées depuis des mois commencent à se délabrer, ajoutant à l'impression de désolation.

Peu d'habitants croient aux annonces gouvernementales expliquant que la région sera prochainement réhabilitée par grattage des terres contaminées, alors que nul ne sait où il serait possible de stocker les déchets de terre et d'arbres contaminés : pour une seule commune de moyenne grandeur, les débris couvriraient l'équivalent d'une trentaine de terrains de football. Les déclarations gouvernementales retentissent comme la promesse d'une renaissance miraculeuse. Une promesse qui ne correspond guère à la réalité de la contamination, qui empêchera les habitants de revoir un jour leurs paysages familiers.

Ne restent plus à ces Japonais, menacés ou évacués, que leurs yeux pour pleurer. Ils ne s'en privent pas. Passé le temps de la stupeur, des habitants désespérés expriment ouvertement leur chagrin : bon gré mal gré ils commencent à oublier le tsunami et ses dizaines de milliers de morts pour exprimer leur désespoir d'être condamnés à l'exil et au chômage. Quant aux personnes âgées, terrassées par le déracinement ou la solitude délibérément choisie, elles décèdent deux fois plus que dans le reste du pays.

Réacteurs brusquement mis à l'arrêt

Reste une autre réalité : les raisons de l'accident. Le réacteur le plus irrémédiablement touché, bien qu'il soit difficile de discerner une différence dans leur triste état 9 mois après l'accident, a été le réacteur numéro 1 de 460 Mw : il était opérationnel depuis 1970 et prévu pour fonctionner 40 ans. Le mois précédant l'accident, à la demande de la Tepco, l'opérateur privé qui l'a fait construire, le gouvernement japonais avait prolongé, de dix ans sa durée de fonctionnement sans consulter qui que ce soit en dehors d'un petit cercle d'économistes et d'ingénieurs pro-nucléaire. Les deux autres réacteurs datent de 1973 et de 1974. Contrairement à ce qui a été expliqué pendant des mois, l'entrée en fusion des trois réacteurs n'a pas été provoquée par le tsunami (Politis l'avait expliqué après la catastrophe). L'arrivée d'une grande vague de 13 mètres de hauteur, plusieurs heures après le séisme, n'a inondé que la partie basse des bâtiments. Selon une procédure automatique prévue à l'avance, les réacteurs (le numéro 6 étant en révision depuis plusieurs semaines) ont été brusquement mis à l'arrêt au moment du séisme de force 8,9 sur l'échelle de Richter alors que les prévisions et les précautions de l'opérateur n'avaient envisagé, avec l'accord des autorités de sûreté japonaises, qu'un tremblement de terre de force 7. Pour faire des économies lors de la construction qui avait d'ailleurs été effectuées par des compagnies différentes pour chaque installation.

Selon de nombreux spécialistes japonais qui en discutent depuis plus d'un mois, la faille de sécurité ne se situe donc pas vraiment dans la violence de la secousse, mais dans son caractère inopiné. Nul ne sait jamais, malgré les automatismes mis en place, comment un réacteur peut réagir à un brusque arrêt : bien ou mal, cela ressemble à une loterie technologique. En effet, le fonctionnement d'un réacteur et son refroidissement ­ essentiel ­ reposent sur un équilibre technique fragile qui peut être rompu par le moindre événement intérieur ou extérieur. Lorsqu'il s'arrête brusquement de fonctionner, il subit un choc brutal, comme si l'on arrêtait un véhicule ou un train lancés à grande vitesse. C'est exactement ce qui s'est produit dans les réacteurs 1, 2 et 3 et dans leurs organes auxiliaires, les générateurs de secours par exemple.

La fable du raz-de-marée

La situation a évidemment été aggravée par la vague du tsunami qui a privé la centrale d'une alimentation électrique extérieure. Les groupes électrogènes endommagés ne pouvant pas prendre le relais qu'ils avaient refusé dès la secousse tellurique. Or, en cas d'incident, un réacteur a besoin d'électricité pour que les systèmes de secours fonctionnent, notamment pour alimenter les circuits de refroidissement. L'enquête de la Commission gouvernementale, difficile politiquement et techniquement, lancée à contre-coeur par les autorités japonaises et dont les conclusions ont été partiellement publiques à la fin du mois de décembre 2011, a montré que le séisme a mis à mal la tuyauterie des systèmes de refroidissement...

Malgré cette réalité, la « fable » de la responsabilité du raz-de-marée a été utilisée en France, y compris par le gouvernement. Ce qui a permis d'expliquer au public que rien de tel ne pouvait survenir dans les réacteurs français puisque la plupart ont été construits loin de la mer et se trouvent donc hors de portée d'un tsunami. En oubliant de mentionner qu'à la fin de 1999, la centrale du Blayais, noyée par la tempête et la montée de la mer, avait failli connaître le même sort et donc un accident majeur. Mais le lobby nucléaire est à la fois sourd, aveugle et piégé par ses mensonges.

 


Le Nouvel Observateur, 15/12/2011:

Fukushima: radioactivité sous le tapis

Le césium ne s'est pas arrêté à la porte des riverains de la centrale de Fukushima. On le retrouve dans les assiettes et les poussières des habitations.

Après les urines d'enfants contaminées, les sacs d'aspirateur ! L'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'Ouest (Acro), l'un des deux laboratoires d'analyses indépendants créés en France après la catastrophe de Tchernobyl, a procédé à des analyses des poussières contenues dans les sacs d'aspirateur de treize habitations, situées dans un rayon de 200 km autour de la centrale de Fukushima.

Toutes les poussières contaminées

Résultat : toutes les poussières issues des sacs sont contaminées en césium 137 et 134. Sans surprise, la zone la plus touchée est la plus proche de la centrale : il s'agit du district de Watari (ville de Fukushima), à 50 km de la centrale, où la vente de riz vient d'être interdite. L'Acro y a trouvé "presque 20 000 becquerels par kilo de poussière pour les deux césiums", indique son communiqué.

Des contaminations significatives ont également été identifiées jusqu'à Ichinoseki (province d'Iwaté) et Kashiwa (province de Chiba), à quelque 200 km de la centrale. De quoi interroger, selon l'Acro, les critères d'évacuation du gouvernement japonais, qui "reposent uniquement sur la contamination des sols à l'extérieur et supposent implicitement qu'une fois chez eux, les habitants des zones contaminées ne courent plus aucun risque".

Les urines d'un enfant de Tokyo également touchées

L'Acro, laboratoire basé à Hérouville-Saint-Clair (banlieue de Caen), s'est notamment illustré en produisant, en mai et juillet dernier les analyses d'échantillons d'urines d'une quinzaine d'enfants de la ville de Fukushima, située à 60 km de la centrale. "Toutes contaminées", analysent alors les chercheurs, contredisant les statistiques officielles.

En ce qui concerne les analyses réalisées en septembre dernier, une bonne nouvelle : "Il n'y a plus 100% des urines analysées en provenance de Fukushima contaminées". Et deux mauvaises : de nombreux enfants continuent à être contaminés à des niveaux qui ne baissent pas depuis le mois de mai, et pour la première fois, des traces de césium ont été trouvées dans les urines d'un enfant de Tokyo.

"Il ne semble pas y avoir de corrélation claire entre la contamination des poussières et des urines" », indique l'association. Quand on sait que la quantité de césium dans le corps diminue de moitié en un mois chez un enfant qui mange sain, l'alimentation fait figure de principal mode de contamination interne. Un vecteur qui, une fois encore, n'est guère pris en compte dans les critères d'évacuation des autorités japonaises, souligne l'Acro.

 


Le Nouvel Observateur, 15/12/2011:

"Le Japon sera sorti du nucléaire au printemps prochain"

Interview.
David Boilley, président de l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'Ouest et fin connaisseur du Japon, analyse le tournant dans lequel se trouve le pays neuf mois après Fukushima.

Lait infantile contaminé, eaux radioactives Vu de France, le Japon semble subir un deuxième effet Fukushima.

- Au Japon, la catastrophe est dans les médias tous les jours. On en apprend toujours davantage sur la contamination de l'environnement. En ce qui concerne l'affaire du lait en poudre, le plus surprenant est qu'il s'agit d'un produit importé mais conditionné dans une usine de la province de Saitama, dans la banlieue de Tokyo. Suffisamment contaminée pour contaminer le lait.

Y a-t-il une méfiance particulière à l'égard des produits alimentaires locaux ?

- Le Japon importe 60% de sa nourriture, qui n'est, par principe, pas contaminée. Pour les 40% restants, le gouvernement a mis en place des contrôles dans les zones à risque, sans interdiction a priori. C'est-à-dire que les produits sont autorisés, mesurés, et ensuite seulement interdits si l'on y trouve du césium au-dessus de la limite.

Evidemment, de nombreux produits passent entre les mailles du filet. Le boeuf cet été, ou encore le thé vert de Shizuoka. Un cas d'école. En France, après la marée noire de l'Erika, la production de sel de Guérande a été suspendue pendant trois ans pour garder la confiance des consommateurs. Au Japon, les producteurs de thé voulaient que leur produit soit autorisé alors que ses feuilles étaient contaminées. L'an prochain, la nouvelle récolte sera bonne à la consommation mais les consommateurs n'auront plus confiance.

De même, ils boudent le poisson de Fukushima même si son niveau de contamination est inférieur au seuil légal. On n'est jamais totalement sûr. En septembre dernier à Hokkaido, au nord de l'archipel, on a pêché une morue à 80 becquerels par kilo. C'est sous la limite, mais étonnant pour une zone de pêche aussi éloignée.

Mais le principal problème reste le riz. A la différence du boeuf, c'est un aliment quotidien et symbolique. Le Japon est autosuffisant. La récolte a eu lieu entre la fin août et octobre. Les contrôles mis en place étaient plus stricts que pour les légumes. Mais ça n'a pas manqué: le riz de trois municipalités a été retiré du marché car contaminé.

Pourquoi le commercialiser si les gens n'achètent pas ?

- Si le gouvernement interdit ces produits a priori, il devra dédommager les agriculteurs, alors même qu'il tient déjà Tepco sous perfusion financière. Il y a aujourd'hui au Japon un conflit entre le coût sanitaire et le coût financier de l'après-Fukushima.

Le rapport d'étape de la commission gouvernementale chargée d'enquêter sur la catastrophe, qui doit être publié le 26 décembre, indique que les réacteurs auraient été fortement endommagés par le séisme plutôt que par le tsunami. Comment ces informations diffusées par le journal "Asahi" sont-elles reçues au Japon ?

Que Tepco ne soit pas prête face à un séisme, ce n'est pas nouveau. En 2007, la centrale de Kashiwasaki-Kariwa a subi une forte secousse et le transformateur électrique a brûlé. Des fûts radioactifs sont tombés, il y a eu ici et là des fissures, des fuites radioactives Et sur les sept réacteurs, certains n'avaient toujours pas redémarré en 2011. A Fukushima, le séisme est responsable de la coupure du courant et de l'eau. Le tsunami, lui, a empêché le fonctionnement des moteurs diesel destinés à l'alimentation de secours.

10% des séismes de la planète ont lieu au Japon, alors qu'un tsunami reste un phénomène exceptionnel. Au niveau des experts, personne n'a jamais cru que le tsunami avait seul causé tous les dégâts. Ces informations sont désormais publiques.

Le Japon est-il en train de sortir du nucléaire ?

- A ce jour, 8 réacteurs fonctionnent sur 54. L'un d'eux a encore été arrêté le 7 décembre à cause d'un incident, mais il l'aurait été de toute façon le 18 décembre. La règle est qu'au bout de treize mois de fonctionnement, on les arrête pour maintenance. Leur redémarrage est soumis à l'autorisation du président de région, le gouverneur. Or aucun d'eux n'a accepté de signer ce redémarrage !

Tous réclament des garanties solides, sachant que les avis de la Nisa (Nuclear and Industrial Safety Agency), autorité japonaise de sûreté nucléaire, sont discrédités après la catastrophe qu'elle n'a pas su prévenir. A ce jeu là, le Japon aura arrêté la production d'électricité nucléaire au printemps mais sera encore empêtré dans les problèmes du nucléaire pendant des décennies, voire des siècles.

Les réacteurs peuvent être relancés

- La sortie du nucléaire me semble acquise. Dans la région d'Osaka, à 600 kilomètres de Fukushima, le gouverneur connu pour ses positions anti-nucléaires vient d'être élu maire de la ville d'Osaka, qui possède 9% des parts de la compagnie d'électricité locale. L'ancien premier ministre avait clairement annoncé que le Japon sortait du nucléaire.

Le nouveau, Yoshihiko Noda, au poste depuis le 27 septembre, est beaucoup moins clair. Mais son gouvernement a mis en place une commission pour réfléchir à l'avenir énergétique du pays, dans lequel figurent des antinucléaires notoires. Elle doit elle aussi sortir son rapport prochainement.

Comment sera compensée la baisse de production énergétique ?

- Le nucléaire représente 30% de l'électricité du pays. Pour les périodes de forte demande, été et hiver, il existe des installations thermiques, qui tournent au charbon, au gaz et au pétrole. Le pays compte dessus, y compris en remettant en marche les anciennes centrales.

Et puis tout le monde fait des économies. Cet été, moins chaud que d'habitude il est vrai, Tokyo a consommé 15% d'énergie en moins. Les restaurants ont baissé la climatisation, les enseignes lumineuses ont été éteintes la nuit, les industries et les trains ont changé leurs horaires pour limiter leur consommation aux heures de pointe C'est un début.

Si le Japon sortait du nucléaire rapidement, que deviendrait le parc de centrales ?

- On n'en n'est pas encore à la question du démantèlement. D'autant que le pays n'a pas de centre de stockage des déchets. Les déchets radioactifs vont devenir le problème n°1 du pays : le gouvernement a dit qu'il décontaminerait une surface estimée à 13 000 km2 de terres. Pour la seule province de Fukushima, avec 70% de forêts et montagnes, environ 29 millions de m3 de déchets sont attendus. Que personne ne sait où mettre.

 


Ma Ville.Com, 7/12/2011:

Fukushima: l'équivalent d'une région française devenue radioactive

Par Agnès Rousseaux

À Hitachinaka, à une centaine de km de la centrale, le taux de radiation est de 40 000 becquerels/m2, près d'un million de fois supérieur à la radioactivité naturelle locale, avant la catastrophe [2]. Après l'accident de Tchernobyl, les zones où les niveaux de radioactivité dépassaient 37 000 becquerels/m2 étaient considérées comme « contaminées », rappelle le journal Asahi, principal quotidien du Japon

Les conséquences de l'accident nucléaire de Fukushima sur la population commencent à montrer leur étendue. Pneumonies, leucémies ou problèmes hormonaux semblent se multiplier chez les deux millions d'habitants de la région. Les enfants sont en première ligne, alors que les terres, les eaux et certains aliments sont fortement contaminés. De son côté, Tepco, l'exploitant de la centrale, sombre dans le cynisme : les éléments radioactifs qui se sont échappés des réacteurs ne lui appartiennent plus

« La santé de nos enfants est maintenant en danger. Nous constatons des symptômes tels que thyroïdes enflées, saignements de nez, diarrhées, toux, asthme » C'est l'appel lancé par un groupe de femmes de la région de Fukushima. Depuis mars, ils sont de plus en plus nombreux à se mobiliser pour alerter sur les dangers sanitaires de la radioactivité, dans la zone concernée par la catastrophe nucléaire, comme ailleurs dans le pays. Des graphiques mis en ligne par Centre de surveillance des maladies infectieuses font apparaître d'inquiétants pics pour certaines maladies au Japon, comme les pneumonies, ou les conjonctivites aiguës hémorragiques.

Des écoliers plus irradiés que les travailleurs du nucléaire

Des prélèvements d'urine effectués par un laboratoire indépendant français (l'Acro, agréé par l'Autorité de sûreté du nucléaire), auprès d'une vingtaine d'enfants de la région de Fukushima ont montré que 100 % d'entre eux sont contaminés par du césium radioactif. Dans cette région, un enfant examiné sur 13 aurait des problèmes hormonaux et un dysfonctionnement de la thyroïde, selon une étude japonaise. Face à l'angoisse des parents, la préfecture de Fukushima a lancé en octobre une grande étude médicale auprès de 360 000 enfants.

Les habitants de la région de Fukushima restent soumis à un important taux de radiation. En avril, le gouvernement japonais a relevé la norme de radioprotection de la préfecture de Fukushima de 1 millisievert/an à 20 millisieverts/an. Ce taux est le seuil maximal d'irradiation en France pour les travailleurs du nucléaire. Alors que la sensibilité des enfants aux radiations est plus importante que celle des adultes, le ministère de l'Éducation considère pourtant comme « sans danger » les écoles où le taux de radiation approche les 20 millisieverts/an. 20 % des écoles de la préfecture de Fukushima dépasseraient ce taux. Dans ces établissements, les activités de plein air sont limitées : les enfants ne sont pas autorisés à rester plus d'une heure dans les cours de récréation et les parcs, ni à jouer dans les bacs à sable. Parallèlement, du césium a même été détecté dans du lait en poudre destiné aux enfants.

Les autorités confirment la vente de riz contaminé

Cette situation est « extrêmement dangereuse », s'indigne le réseau Sortir du nucléaire, qui rappelle qu'« aucune dose de radioactivité n'est inoffensive » : « Les normes d'exposition ne correspondent en aucun cas à des seuils d'innocuité scientifiquement fondés ; elles définissent seulement des niveaux de "risque admissible". » Dans la ville de Fukushima, située à 60 km de la centrale, la Criirad (Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité) a mesuré une contamination de 370 000 Bq/kg de la terre prélevée sous les balançoires d'une école primaire. Une radioactivité énorme. « Ce sol est devenu un déchet radioactif qui devrait être stocké dans les meilleurs délais sur un site approprié », déclarait alors l'organisation.

La nourriture est aussi un vecteur de contamination radioactive. Les autorités japonaises ont étendu le 29 novembre l'interdiction de vente de riz, notamment dans la région de Date, où des milliers d'agriculteurs ont dû suspendre leurs livraisons. Les dernières mesures effectuées montraient une teneur supérieure à la limite légale provisoire, fixée par le gouvernement à 500 becquerels/kg. Neuf kg de riz « excédant les standards de sécurité internationaux » ont par ailleurs été vendus à des consommateurs, ont déclaré les autorités de la préfecture de Fukushima, qui se sont excusées pour « les désagréments causés aux personnes qui ont acheté ce riz » (sic). C'est la première fois depuis la catastrophe que les autorités confirment la vente de riz contaminé. Le présentateur de télévision Norikazu Otsuka, qui consommait en direct des produits de la région de Fukushima pour en montrer l'innocuité, a récemment été hospitalisé pour une leucémie aigüe. Ce qui n'a pas rassuré les deux millions d'habitants de la zone.

L'équivalent de la Bretagne contaminé au Césium

Autre sujet d'inquiétude : le taux de contamination en césium des rivières de la région de Fukushima. Une étude universitaire évalue le niveau de contamination à l'embouchure de l'Abukumagawa à environ 50 milliards de becquerels répandus dans la mer chaque jour. L'équivalent, au quotidien, du césium déversé dans la mer pour tout le mois d'avril, par les eaux « faiblement contaminées » relâchées par Tepco depuis les réacteurs.

Un rapport publié fin novembre par les autorités japonaises souligne que 8 % du territoire du Japon est fortement contaminé par du césium radioactif. Soit 30 000 km2. L'équivalent de la superficie de la Bretagne ou de la région Paca. Le césium s'est diffusé à plus de 250 km vers l'ouest, et jusqu'à la préfecture d'Okinawa, à 1 700 km de la centrale, selon le ministère des Sciences [1]. Une zone de 20 km autour de la centrale a été évacuée en mars, et à 30 km les habitants avaient pour consigne de se calfeutrer chez eux, prêts pour une évacuation. Les dernières cartes publiées par le ministère montrent que la zone à risque est beaucoup plus étendue. 300 000 personnes vivent dans la ville de Fukushima, où la radioactivité cumulée atteignait en mai plus de 20 fois la limite légale.

À qui appartient la radioactivité ?

À Hitachinaka, à une centaine de km de la centrale, le taux de radiation est de 40 000 becquerels/m2, près d'un million de fois supérieur à la radioactivité naturelle locale, avant la catastrophe [2]. Après l'accident de Tchernobyl, les zones où les niveaux de radioactivité dépassaient 37 000 becquerels/m2 étaient considérées comme « contaminées », rappelle le journal Asahi, principal quotidien du Japon. Dans le quartier Shinjuku de Tokyo, le taux est toujours de 17 000 becquerels/m2 [3]. Dans certaines régions montagneuses, à 180 km de Fukushima, la radioactivité se situe entre 100 000 et 300 000 becquerels/m2. Une contamination qui aura des conséquences durables, car la demie-vie du césium 137 est de 30 ans.

Le gouvernement se veut pourtant rassurant. Beaucoup d'habitants n'ont de toute façon pas les moyens de quitter les zones contaminées. La plupart des 160 000 Japonais évacués après la catastrophe attendent toujours des indemnités de la part de Tepco. Le propriétaire de la centrale est de plus en plus critiqué pour sa gestion de l'après-catastrophe. Lors d'un procès concernant la décontamination d'un terrain de golf au Japon, Tepco a sidéré les avocats en se dédouanant de ses responsabilités, affirmant que « les matériaux radioactifs (comme le césium) qui ont été disséminés par le réacteur n° 1 de la centrale de Fukushima et sont retombés appartiennent aux propriétaires des terres et non plus à Tepco » !

Cynisme et manque de transparence

Un argument rejeté par le tribunal, qui a cependant décidé de confier les opérations de décontamination aux autorités locales et nationales. Tepco va jusqu'à contester la fiabilité des mesures effectuées et affirme qu'un taux de 10 millisieverts/heure n'était après tout pas un problème et ne justifiait pas de maintenir des terrains de golf fermés. Les mesures effectuées sur ces terrains mi-novembre ont pourtant détecté un taux de césium de 235 000 becquerels par kg d'herbe : à ce niveau, la zone devrait être classée comme interdite selon les standards mis en place après l'accident de Tchernobyl, souligne Tomohiro Iwata, journaliste du Asahi Shimbun.

Au cynisme de Tepco s'ajoute le manque de transparence. Le 28 novembre, l'entreprise a annoncé que Masao Yoshida, 56 ans, directeur de la centrale de Fukushima au moment de la catastrophe, a dû quitter son poste pour des raisons de santé.. Il a été hospitalisé en urgence. Tepco refuse de donner davantage de précisions. Par ailleurs, un projet du gouvernement d'organiser un monitoring en temps réel des radiations dans 600 lieux publics de la préfecture de Fukushima, notamment les écoles, devait démarrer en octobre. Il a été reporté à février 2012. Argument évoqué : l'entreprise qui devait fournir les équipements n'a pas pu tenir les délais.

Le béton des réacteurs rongé par le combustible

Les experts estiment que les efforts de décontamination devraient coûter au Japon 130 milliards de dollars. À cela risquent de s'ajouter des coûts sanitaires et environnementaux encore difficiles à comptabiliser, tant le risque sanitaire semble être aujourd'hui minimisé. D'après Tepco, la situation de la centrale est aujourd'hui stabilisée [4]. La température des réacteurs 1, 2 et 3 ­ qui ont subi une perte totale du système de refroidissement en mars ­ serait maintenue en dessous de 100 degrés. Le risque sismique n'est pourtant pas écarté, qui pourrait de nouveau aggraver la situation. Dans un rapport rendu public le 30 novembre, Tepco explique que le combustible du réacteur 1 aurait entièrement fondu, percé la cuve et rongé une partie du béton de l'enceinte de confinement, sur 65 cm de profondeur. Le combustible fondu serait à 37 cm de la coque en acier. Mais ces analyses reposent sur des estimations et simulations informatiques. Impossible d'avoir des informations plus précises.

Pendant ce temps, la vie continue dans les régions contaminées. Le 13 novembre, dans la ville de Fukushima, était organisé le marathon annuel, Ekiden. Des jeunes femmes ont couru 40 km, sans aucune protection, dans une des zones les plus contaminées du Japon. Un journaliste japonais y a relevé des taux de 1,4 microsieverts/h (soit plus de 12 fois la limite d'exposition aux rayonnements autorisée pour la population civile en temps normal). L'organisateur de la course a fait signer aux participants un formulaire stipulant qu'ils ne pourraient le poursuivre en justice s'ils avaient des problèmes de santé. À Fukushima, la vie ressemble à un jeu de roulette russe où les victimes ne sont pas ceux qui appuient sur la gâchette. Eux jouissent, pour le moment, d'une impunité totale.

Source : The Asahi Shimbun


Notes

[1] La présence de césium 134, à la durée de mi-vie de 2 ans, est la preuve que la source de cette radioactivité est bien l'explosion de la centrale de Fukushima.
[2] 970 000 fois le niveau de 2009, qui était de 0,042 becquerels/m2 de « densité cumulée de césium 134 et 137 », d'après The Asahi Shimbun
[3] De grandes quantités de poussières radioactives sont tombées sur Tokyo, mais une autre étude montre une faible accumulation de césium dans le sol. L'explication ? « Tokyo a de plus petites surfaces de sol que les autres préfectures, mais les routes et les surfaces en béton ont moins tendance à fixer le dépôt de césium, qui a probablement été lessivé par le vent et la pluie », affirme un membre du ministère.
[4] 45 tonnes d'eau radioactive se sont pourtant de nouveau échappées du réacteur n°1 début décembre.

 

 


TF1, 7/12/2011:

Fukushima: l'accident est-il dû au tsunami ?

Résumé : Et si l'accident nucléaire de Fukushima n'était pas dû au tsunami ? La commission gouvernementale a de plus en plus de doute sur la version livrée par l'exploitant Tepco. Les réacteurs auraient été fortement endommagés avant l'arrivée de la vague. Le responsable serait le séisme, ce qui pourrait changer la donne pour l'industrie nucléaire dans le pays.

 


Le Monde, 29/11/11:

Le Japon étend l'interdiction de la vente de riz contaminé au césium 137

Les autorités japonaises ont interdit, mardi 29 novembre, aux exploitants agricoles de deux localités supplémentaires de vendre leur riz, après la découverte de niveaux excessifs de césium radioactif. Elles demandent à plusieurs autres de suspendre les livraisons avant de nouveaux contrôles. "Nous avons ordonné ce jour au préfet de Fukushima d'interdire la commercialisation du riz produit cette année dans deux localités de Date", a indiqué un porte-parole du gouvernement. Sont concernées par la nouvelle interdiction quelque 300 exploitations situées dans deux zones de la municipalité de Date qui s'ajoutent aux 154 fermes rizicoles de la localité d'Onami (dépendante de la ville de Fukushima) sur laquelle un embargo a été décrété le 17 novembre.

LA PROVINCE DE FUKUSHIMA, QUATRIÈME PRODUCTEUR DE RIZ
Les dernières mesures effectuées sur du riz récolté dans ces aires des communes de Fukushima et Date ont révélé une teneur en césium radioactif supérieure à la limite légale provisoire de 500 becquerels par kilogramme fixée par le gouvernement central. Par ailleurs, la préfecture de Fukushima a demandé à 2381 exploitants de deux autres zones, Nihonmatsu et Motomiya, de suspendre les livraisons de leur riz dans l'attente de nouveaux contrôles. Elle avait déjà auparavant enjoint à 1941 cultivateurs de quatre lieux-dits, dont ceux de Date, de stopper leurs expéditions en attendant de conduire de nouveaux tests. La province rurale de Fukushima, quatrième terroir de production de riz du Japon, est largement contaminée par les rejets radioactifs issus de la centrale nucléaire de Fukushima saccagée par le séisme et le tsunami du 11 mars dans le Nord-Est. Les premiers contrôles, effectués sur des échantillons, avaient incité le préfet à se féliciter hâtivement de la qualité et de la sûreté de la production locale, mais des mesures plus fines effectuées ultérieurement ont révélé des différences notables de contamination en fonction des aires de culture. Certains prélèvements ont affiché une teneur en césium 137 près de quatre fois supérieure au plafond, soit près de 2.000 becquerels par kilogramme.

 

 

Rfi , 28/11/2011:

Le directeur de la centrale de Fukushima hospitalisé

Masao Yoshida lors d'une réunion, le 30 mai 2011. Le directeur de la centrale de Fukushima était sur le site de la catastrophe jour et nuit, depuis le 11 mars.

Avec notre correspondant à Tokyo, Frédéric Charles

« J'ai cru que nous allions tous mourir », a déclaré Masao Yoshida, le directeur de la centrale de Fukushima, il y a deux semaines à quelques journalistes. Lorsque ces derniers lui ont demandé la dose de radiation à laquelle il est exposé - Masao Yoshida est sur le site jour et nuit depuis le 11 mars - il a balayé la question d'un revers de la main.

De quels maux souffre-t-il aujourd'hui ? Tepco, l'opérateur, refuse de répondre. Au moins trois ouvriers de la centrale, après avoir été hospitalisés, sont morts depuis l'accident. Pour d'autres raisons qu'une exposition aux radiations, selon Tepco, mais personne ne croit l'opérateur d'après les dires des ouvriers qui travaillent toujours sur le site.

Masao Yoshida aura évité que l'accident de Fukushima ne tourne à la catastrophe en désobéissant [il a peut-être empéché l'explosion des réacteurs...] à l'ancien Premier ministre Naoto Kan et à la haute direction de Tepco [mais 3 réacteurs qui fondes + les piscines de refroidissement, ça fait 4 accidents majeurs sur le site, ça fait une grosse catastrophe du même ordre de grandeur que Tchernobyl]. Il avait cherché, dans les heures qui suivirent l'accident, à sauver ses installations. Le Premier ministre Naoto Kan aggrava ensuite la situation dans la centrale - trois réacteurs ayant fondu en un peu plus de 48 heures - en décidant de micro-gérer l'accident sans rien connaître au nucléaire.

Après plusieurs explosions d'hydrogène, alors que les réacteurs étaient surchauffés, Masao Yoshida décida d'utiliser de l'eau de mer pour les refroidir et d'ignorer le Premier ministre Naoto Kan.

 


Cri On Line, 13/11/2011:

Japon: rassemblement contre le nucléaire à Fukuoka

Plus de 15 000 manifestants se sont rassemblés à Fukuoka, dans le sud-ouest du Japon, pour exiger le démantèlement de toutes les centrales nucléaires du Japon, selon l'agence de presse Kyodo News. Yukinobu Aoyagi, l'un des meneurs du rassemblement, s'est adressé ainsi aux manifestants, réunis dans un parc de Fukuoka : "Nous devons lutter ensemble pour sauver notre sol de la contamination radioactive". Une femme, évacuée de la préfecture de Fukushima après l'accident nucléaire de la centrale de Daiichi, suite au tremblement de terre et au tsunami du 11 mars, a déclaré qu'elle souhaitait "un monde sans centrales nucléaires". Les manifestants ont ensuite défilé dans les rues du centre-ville, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire des slogans tels que "Nous ne voulons pas du nucléaire", ou "Non aux centrales nucléaires". Après l'accident nucléaire de Fukushima, le pire que le Japon ait connu, les opposants au nucléaire se rassemblent régulièrement à travers le pays pour appeler le gouvernement à cesser d'être dépendant de l'énergie nucléaire.

 


Tribune de Genève,10/11/2011:

Japon: la presse «promenée» sur le site de la centrale de Fukushima

Catastrophe nucléaire | La presse a été autorisée à pénétrer dans une partie du périmètre de la centrale nucléaire de Fukushima. Les journalistes ont dus restés à bord d'un bus pendant l'essentiel de la visite, et n'ont pas pu approcher des bâtiments des réacteurs.

Une trentaine de journalistes, essentiellement des Japonais, a été autorisée samedi à pénétrer dans une partie du périmètre de la centrale nucléaire de Fukushima, pour la première fois depuis la catastrophe du 11 mars dernier. Les journalistes ont pu constater les traces des dégâts et les travaux en cours.

Les systèmes de refroidissement de la centrale, située à 240 km au nord-est de Tokyo, ont été mis hors d'usage le 11 mars par un puissant raz de marée, consécutif à un séisme.

Les journalistes autorisés à entrer ont été promenés à bord d'un bus pendant l'essentiel de la visite, et n'ont pas pu approcher des bâtiments des réacteurs. Ils ont dû revêtir des combinaisons de protection et des gants et se protéger les cheveux avec des sortes de foulards en plastique. De plus, ils ont dû porter des masques pour respirer et des appareils de détection de la radioactivité.

Lente amélioration

Les autorités leur ont déclaré que la situation s'améliorait lentement, au point qu'un «arrêt à froid» serait possible comme prévu vers la fin de l'année.

«Il ne fait aucun doute, au vu des données auxquelles vous avez eu accès sur la centrale, que les réacteurs ont été stabilisés», a déclaré Masao Yoshida, directeur de la centrale de Fukushima-Daiichi.

Les bâtiments ont beau être toujours jonchés de débris, la compagnie Tokyo Electric Power (Tepco), qui exploite la centrale, a réussi à abaisser la température des trois réacteurs endommagés, de sorte qu'elle n'atteint plus des niveaux considérés comme dangereux.

«Arrêt à froid»

Les autorités ont bon espoir de déclarer l'état d'»arrêt à froid» - soit le moment où les températures sont stabilisés en dessous du point de bouillonnement - comme prévu vers la fin de l'année.

La catastrophe du 11 mars a conduit le gouvernement à décréter une zone d'évacuation dans un rayon de 20 km autour des installations, ce qui a entraîné le départ de 80.000 habitants. Un «arrêt à froid» est l'une des conditions devant être remplies pour envisager un retour de ces habitants.

Une trentaine d'années nécessaire

«Chaque fois que je reviens ici, je constate que les conditions se sont améliorées. Cela est le fruit de notre travail acharné», a déclaré le ministre japonais de l'Environnement et de la Crise nucléaire, Goshi Hosono, aux employés de la centrale.

Il n'en a pas moins estimé qu'il faudrait une trentaine d'années pour démanteler les réacteurs lorsque l'arrêt à froid aura été atteint.

Les ouvriers engagés dans les travaux d'assainissement de la centrale sont logés au village-J, un centre national d'entraînement de football près de Daiichi, qui a été renconverti en base opérationnnelle.

Quelque 3300 personnes au total se rendent chaque jour du «village-J», situé en lisière de la zone d'évacuation, à la centrale.

Les bâtiments des réacteurs, eux, sont toujours environnés de débris - réservoirs éventrés, pièces de métal tordues. Des grues se dressent ici et là, témoin des efforts de remise en état.

 


31/10/2011:
Fukushima, témoignage de terrain d'un cinéaste franco-belge Alain de Halleux

 


Aujourd'hui le Japon, 3/10/2011:

Comment le lobby nucléaire japonais manipule l'opinion

Plusieurs débats publics sur le nucléaire auraient été truqués par les entreprises du secteur, avec la complicité d'agences gouvernementales, selon deux rapports publiés récemment.

Lors d'une manifestation anti-nucléaire à Tokyo.

Déjà affaibli par la catastrophe du 11 mars dernier à Fukushima, le lobby nucléaire japonais a pris un nouveau coup dur vendredi dernier, avec la publication conjointe de deux rapports édifiants.

Des pratiques plutôt douteuses ont d'abord été révélées par
un comité tripartite mis en place par le ministère de l'Economie, du Commerce et de l'Industrie, qui affirme que des organes du gouvernement ont organisé avec les entreprises du nucléaire le trucage de débats destinés à informer le public sur la question du nucléaire, et ce, à au moins sept reprises.

Dans un rapport publié vendredi, les auteurs mettent en cause l'indépendance de l'Agence de Sécurité de l'Industrie et du Nucléaire (NISA) et de l'Agence pour les Ressources Naturelles et l'Energie, qui "n'ont pas conscience de l'importance des relations publiques et du besoin de justice et de transparence".

Le directeur des relations publiques pour le nucléaire de la NISA aurait par exemple rencontré les dirigeants de la Tohoku Electric Power Co avant une série de réunions explicatives destinées aux résidents proches de la centrale en octobre 2006. "Les personnes connectées à Tohoku Electric Power Co devraient participer aux réunions et exprimer leurs opinions", aurait alors recommandé la NISA.

Bidonnages au sud du pays

Egalement publié vendredi, un autre rapport épingle des pratiques similaires sur l'île de Kyushu, au sud du pays.

"Le réacteur numéro un est en activité depuis 30 ans, et je n'ai jamais eu de problèmes pour vendre mon riz ou mes légumes à cause des radiations", déclarait ainsi un paysan lors d'un meeting destiné à discuter d'une proposition visant à utiliser du combustible MOX, beaucoup plus radioactif que le combustible à base d'uranium enrichi, à la centrale nucléaire de Genkai. Sauf que ce soi-disant paysan était en fait un employé de Kyushu Electric Power, l'opérateur de la centrale.

Autre exemple lors d'une autre réunion, diffusée après la catastrophe du 11 mars à la télévision, durant laquelle l'entreprise demandait aux téléspectateurs d'envoyer leurs questions par e-mail. Là encore, il s'agissait d'un bidonnage en bonne et due forme: les questions ont toutes été rédigées par des employés de l'entreprise qui se sont fait passer pour des citoyens ordinaires. Pas étonnant, donc, que beaucoup d'entre eux aient demandé la remise en route des réacteurs dont l'activité avait été interrompue après l'accident...

Politiques et industriels vraiment désolés

Les politiciens locaux en prennent d'ailleurs également pour leur grade, et le rapport pointe en particulier la responsabilité du gouverneur de la préfecture, Yasushi Furukawa.

Les auteurs recommandent l'arrêt des donations et autres cadeaux faits par Kyushu Electric aux politiques, et a demandé au gouverneur de couper ses liens avec l'entreprise. "Il y a un manque de transparence entre Kyushu Electric et les officiels", a déclaré Nobuo Gohara, qui a dirigé le rapport, à la télévision australienne ABC. "Le rapport m'a conseillé de reconsidérer ma relation avec Kyushu Electric Power Company, a reconnu, pour sa part, M.Furukawa. Je vais donc réfléchir à ce que pourrait être une relation appropriée". Promettant de ne plus jamais s'adonner à ce genre de pratiques, l'entreprise a également procédé à un mea culpa public.

"C'est un moment de vérité pour l'entreprise, a affirmé son vice-président, Yoshinori Fukahori. Nous ferons tout ce que nous pouvons pour empêcher que cela se reproduise".De son côté, le directeur général de la NISA, Hiroyuki Fukano, a assuré qu'il s'excusait "du fond du coeur".

Benjamin Gauducheau

 


Les déchets du tremblement de terre et du tsunami au Japon

1. La contagion radioactive

Le 11 mars 2011, c'est le vide juridique au Japon pour les déchets radioactifs diffus d'une catastrophe nucléaire. La Loi en vigueur sur la gestion des déchets place sous la responsabilité technique et financière des collectivités territoriales les déchets des catastrophes naturelles à l'exclusion cependant des déchets radioactifs ; la Loi sur la réhabilitation des sols pollués exclut de son périmètre les sols et déchets radioactifs ; la Loi sur la gestion des matières et des déchets radioactifs concerne seulement l'emprise des établissements nucléaires. Aucun enseignement n'a été tiré des accidents antérieurs sur le sol japonais et en Ukraine. Le cas des fuites accidentelles d'un réacteur transformant bien au-delà de son périmètre les végétaux, le bâti, la voirie, les milieux urbains, naturels, aquatiques en déchets radioactifs n'est pas envisagé.
Au Japon, la principale voie d'élimination des déchets est l'incinération. Il y a plusieurs centaines d'incinérateurs établis en milieu urbain. Dès la fin du mois de mars sont repérées des cendres contenant 100.000 à 140.000 Bq/kg « d'une substance radioactive inconnue ». Avant l'alerte, une partie de ces cendres avait été incorporée selon l'usage dans la production commerciale de ciment. La contamination des cendres provient de la concentration de la radioactivité intégrée à la biomasse. Les végétaux, les feuilles des arbres, les écorces, les mousses, les haies, les herbes, les cultures servent de premier réceptacle aux dépôts atmosphériques radioactifs. Il semble que dans un réflexe de sauvegarde de la propriété privée les citoyens se soient rués sur les tondeuses, les tronçonneuses, les faucheuses, pour se débarrasser massivement des végétaux suspects juste avant ou après les premières explosions des réacteurs de Fukushima Daiichi. Dans un deuxième temps, ces déchets verts ont été brûlés dans les incinérateurs de déchets ménagers. Les cendres concentrent dans un ordre de grandeur de 10 fois la radioactivité des déchets incinérés.
Depuis la mi-mars la contamination radioactive s'est répandue dans la moitié nord de l'archipel sans déclencher de mise en garde officielle, de consignes techniques et comportementales, ni même de solidarité interrégionale. Ainsi, conformément à un accord signé 10 jours avant la catastrophe, les incinérateurs de Matsudo dans la préfecture de Chiba ont exporté dans la préfecture d'Akita, distante au nord d'environ 500 km, 40 tonnes de cendres contenant près de 50.000 Bq/kg de césium 137. Elles ont été partiellement enfouies dans la décharge de déchets ménagers de Kosamachi. Six conteneurs non ouverts ont été renvoyés aux expéditeurs et la ville de Matsudo a ouvert sur un parking un entreposage provisoire de ces cendres tout en annonçant qu'à la fin du mois d'août il sera saturé.
Les boues de potabilisation des eaux destinées à la distribution et des stations d'épuration des eaux usées sont aussi devenues des déchets radioactifs. Elles ont concentré la radioactivité des eaux pluviales et superficielles provenant du lessivage des toitures, du bâti, de la voirie, des voitures, des milieux naturels et des eaux usées. Un rebond de radioactivité est prévisible après les inondations catastrophiques de cet été.
A la mi-juin, le ministère de l'Environnement japonais émet enfin des recommandations :
- Entre 100 et 8.000 Bq/kg de césium 137, les cendres et les boues peuvent être déposées dans des décharges d'ordures ménagères. La circonscription de Tokyo en a enfoui 6.000 t dans un parc de décharges au bord de la baie.
- Entre 8.000 et 100.000 Bq/kg, les déchets pourront être enfouis dans des sites sécurisés à désigner ou dans les sites existants dédiés aux déchets industriels. Des précautions constructives telles que des toitures, la pose de géomembranes d'étanchéité ou de conditionnement comme l'encapsulage des fûts de déchets dans du béton devront être prises pour réduire la pollution des eaux souterraines.
- Au dessus de 100.000 Bq/kg, les déchets devront être confinés dans des emballages étanches et le périmètre d'entreposage sera entouré de palplanches en béton pour absorber les radiations. Les sites restent à désigner et les refus des populations riveraines commencent à affluer.
A titre de comparaison, en France, des déchets contaminés par 100 Bq/kg de césium 137 sont normalement considérés comme TFA (Très Faiblement Actifs) et à partir de 8.000 Bq/Kg comme des déchets Moyennement Actifs. Tous ces déchets sont destinés à être stockés dans les sites spécialisés de l'ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs).

Au 30 juillet, selon les informations diffusées par le ministère japonais de la Santé,
37.000 tonnes de boues doivent être considérées comme des déchets radioactifs.
Fin août, le ministère de l'Environnement déclare que les cendres de 42 incinérateurs dépassent le seuil de 8.000 Bq/kg et le service public de radio et télévision Nihon Hoso Kyokai (NHK) considère qu'
il y a désormais 50.000 tonnes de boues radioactives. Certaines stations de traitement des eaux ont dû suspendre leur activité, les travailleurs étant exposés à des doses inacceptables de radioactivité.
C'est seulement à partir du 28 juillet que le gouvernement japonais a envisagé d'élaborer une loi plaçant sous la responsabilité technique et financière de l'Etat les déchets radioactifs disséminés dans la préfecture de Fukushima et dans les autres préfectures impactées. Cette loi n'est pas encore promulguée et elle exigerait de TEPCO et de tous les exploitants de réacteurs nucléaires de financer la gestion des déchets.
Faute d'avoir anticipé ce type de contagion radioactive,
le Japon est en train de contaminer ses moyens logistiques en même temps que son réseau de traitement des déchets ménagers et d'assainissement.



2. Par millions de tonnes

Au mois de mai 2011, le gouvernement a publié un plan de gestion de déchets du double désastre tremblement de terre et tsunami : le tri est encouragé. Les rôles des trois échelons, gouvernemental, préfectoral, territorial, sont rappelés et définis. La coopération pour l'élimination des déchets entre les préfectures et les régions est encouragée. Les risques amiante, bois traités, dioxines, déchets toxiques dans les épaves de voitures et de navires sont soulignés. Pas un mot sur la radioactivité.
Le bilan global des déchets post-tremblement de terre et tsunami reste imprécis : 25 millions de tonnes selon le gouvernement, 80 millions selon des experts du Japan Research Institute, 100 millions de tonnes selon la radiotélévision nationale japonaise, environ la moitié de la production annuelle de déchets ménagers sur l'ensemble de l'archipel japonais selon l'université de Kyoto ou 15 fois la production annuelle des trois préfectures les plus sinistrées, Fukushima, Iwate et Miyagi. Dans la commune portuaire d'Ishinomachi, les déchets du tsunami équivalent à 100 ans de collecte. Le regroupement des déchets bruts ou triés sur des sites provisoires prendra encore deux à quatre ans selon les estimations, sans parler de la phase complexe du recyclage, de l'élimination et de la surveillance qui s'étendra sur deux à trois décennies.
La phase préliminaire des regroupements se heurte à une crise des espaces disponibles. Les stockages provisoires s'installent dans les parcs, les stades, les friches, les tarmacs. Cet apport considérable et soudain s'inscrit dans une pénurie de décharges légales. Le recyclage de tous les matériaux est compliqué par la présence ou la suspicion de contamination radioactive et par les dépôts de sel pour les déchets végétaux ou de démolition submergés par le tsunami. L'incinération et la co-incinération dans les cimenteries sont encouragées par le gouvernement, par les préfectures et les collectivités pressées de réduire les volumes de déchets tandis que la contamination radioactive et les dépôts de sel ralentissent ou empêchent ces opérations. Le sel en excès est un polluant pour le ciment et les végétaux qui en sont imprégnés dégagent des dioxines au moment du brûlage. Le cumul des déchets de bois atteindrait 20 millions de tonnes. Il est aussi redouté et constaté autour des gravats de démolition une « ambiance » amiante élevée. La Loi sur l'interdiction totale de l'usage de l'amiante date seulement de 2006.
Dans les trois préfectures cibles du tsunami, un million de tonnes de déchets de métaux serait à terme disponible s'ils sont extraits du magma de démolition et triés mais là encore le recyclage en deuxième fusion va poser à cause de la radioactivité des problèmes d'acceptabilité technique et des risques ultérieurs pour les populations générales au Japon et ailleurs si ces ferrailles sont exportées.
Cet été un nouveau facteur aggravant est apparu. Les déchets ont été envahis par des millions de mouches ou autres insectes attirés par les produits alimentaires en décomposition et l'humidité. 200.000 tonnes de poissons et autres produits de la mer stockés dans les congélateurs industriels portuaires détruits ont été avariés. Des pulvérisations massives d'insecticide ont été réalisées par l'armée ou des travailleurs intérimaires dans les ports de pêche courant juin. Par dérogation du ministère de l'Environnement au moins 55.000 tonnes de produits de la mer en voie de décomposition ont été immergées à 50 milles du littoral.
Les boues et sédiments générés par le tsunami pourront être immergés sous certaines conditions susceptibles d'interprétations multiples, ce qui ouvre la voie à de nouvelles inquiétudes pour la mer et ses ressources. 130 usines mettant en oeuvre et stockant des produits toxiques ont été dévastées ou endommagées par le tsunami. Des centaines de marées noires ont été visibles à l'oeil nu. 25.000 hectares de terre, de serres et de coopératives agricoles ont été lessivés. Les boues et les sédiments sont polypollués.
Le corps médical remarque chez les populations les plus exposées des problèmes respiratoires, asthmatiques, cutanés, oculaires, un ensemble de pathologies déjà remarquées après d'autres catastrophes où les rescapés ont été soumis à l'inhalation et aux envols de composés et poussières toxiques.

Ce rapport d'étape a été réalisé par Jonathan Senin, Miriam Potter, Charlotte Nithart, Christine Bossard et Jacky Bonnemains.
 
Robin des Bois
Association de protection de l'Homme et de l'environnement
Depuis 1985 / Since 1985
www.robindesbois.org

 

Août 2011:

Lancement d'une enquête épidémiologique sur l'effet de faibles doses d'irradiation portant sur les 2 millions d'habitants de la préfecture de Fukushima

Près de cinq mois après la catastrophe nucléaire de Fukushima, le Japon lance «la plus ambitieuse étude épidémiologique jamais réalisée» sur les effets de faibles doses de radioactivité sur le corps humain, ont annoncé des chercheurs la semaine dernière. Fin juin, un questionnaire a ainsi été distribué aux habitants de la région afin d'établir le profil d'exposition aux radiations de chacun, rapporte Libération ce matin. Mais l'étude ne se limitera pas à la collecte de données, selon le quotidien. Ainsi les quelque 360.000 jeunes de moins de 18 ans de la région devront faire surveiller régulièrement leur thyroïde. Les bébés et les femmes enceintes ­ elles sont 20.000 ­ seront également suivis médicalement. Enfin, les 200.000 personnes évacuées de la région de Fukushima au lendemain de la catastrophe nucléaire subiront un check-up annuel.

Impact de la radioactivité sur la santé
La première phase de cette étude devrait durer au moins trente ans. «Cette étude ambitionne de confirmer, ou pas, si les faibles doses de radioactivité ont un impact significatif sur la santé», précise un épidémiologiste dans les colonnes de Libération. Le quotidien rappelle que pendant longtemps, on pensait que seules les fortes doses avaient un impact sur la santé. Un postulat que l'on sait désormais faux: d'après la Commission internationale de recherche en protection radiologique, il n'existe pas de seuil en dessous duquel la radioactivité n'a pas d'impact. Cette enquête portera sur toute la préfecture de Fukushima soit plus de 2 millions d'habitants. Le professeur Yasumura en assurera la direction. Son but est de suivre la population de la préfecture de Fukushima et d'apporter des éléments sur les effets des faibles doses. Cette étude durera 30 ans et se continuera probablement. Pour le moment il s'agit de la mettre en oeuvre: questionnaire, crédits et personnels.

 

 

NHK, 21 août 2011

TEPCO: La température du réacteur n°1 baisse

L'opérateur de la centrale de Fukushima Daiichi a annoncé que toutes les mesures de température effectuées sur le réacteur n°1 était autour de 100°C, ce vendredi 19 août. Samedi 20, TEPCO a expliqué que les 19 thermomètres du n°1 sont en dessous de 100°C depuis 11h du soir vendredi. Il a ajouté que cette situation était donc stable depuis 12 h. Dans cet effort pour reprendre le contrôle de la centrale TEPCO essaie de ramener les 3 réacteurs en arrêt froid. La température reste maintenant en dessous de 100°C, mais ce uniquement dans le n°1. TEPCO a déclaré que ces efforts pour refroidir les réacteurs commençaient à porter leurs fruits.
Mais pour arriver à l'état  froid, la firme doit réussir à maintenir les réacteurs en état pour ne pas repartir en catastrophe si un incident se produit. TEPCO a aussi expliqué que les 2 autres réacteurs sont encore au-dessus de 100°C  (Samedi 20 à 11h du matin). Ces 3 réacteurs sont ceux qui étaient en puissance quant le tremblement de terre et le Tsunami ont détruit la centrale.

 

 

20 août 2011:

Les doses annuelles estimées pourraient  atteindre 508 milliSv dans une ville proche de la centrale

Un niveau annuel de radiation de 508,1 millisieverts a été estimé dans des zones des 20 km autour de la centrale de Fukushima n°1, selon des données rendues publiques le 19 août par le gouvernement. Ces données, rendues publiques par le ministre de l'Education, de la Culture, des Sports, des Sciences et des Technologies, ont pour la première fois révélé une estimation annuelle de doses cumulées sur 50 zones dans 8 municipalités localisées dans les 20 km autour de la centrale. Le chiffre le plus élevé était celui de Koirino, district d'Okuma, préfecture de Fukushima. L'estimation de dose annuelle était de 508,1 millisievert soit 500 fois le niveau annuel réglementaire de 1mSv pour la partie artificielle. Le district est à 3 km de la centrale dans la direction ouest sud-ouest. Les chiffres ont été obtenus à partir de mesures effectuées dans 50 points et en supposant que la personne reste à l'intérieur 16 heures et à l'extérieur 9 h chaque jour. Les estimations entre le 12 mars et le 11 août repose sur des mesures actuelles. Et à partir du 12 août et ce jusque mars 2011, on s'appuie sur les résultats les plus récents, en supposant que les rejets continuent. Sur 35 points, le niveau dépasse les 20 millisievets par an. La dose annuelle en 7 points dans la ville de Okuma est estimée autour de 100 millisieverts. Koirino district de Okuma est l'endroit où l'estimation de  débit de dose horaire est la plus élevée: 75 microsievert par heure. Ces chiffres sont inférieurs aux 200 microsievert par heure utilisés par le gouvernement pour décider si les habitants peuvent ou non effectuer de courts séjours dans leurs maisons. Dans d'autres zones, il est possible de recevoir des doses estimées annuelles élevées incluant Kawabusa district de la ville de Namie ­ 20 km au nord de la centrale - avec 223,7 millisieverts par an, et Nagatsuka- 5 km au nord, nord/Ouest de la centrale - avec 172,4 millisieverts par an. Cependant, dans Kitakiyohashi district de Namie, 8 km au nord de la centrale, le niveau est de 4,1 millisievert montrant que les niveaux peuvent varier beaucoup et ce même dans une ville. Yoshihisa Matsomoto, un professeur associé en radiobiologie de l'institut de technologie à Tokyo, a expliqué les difficultés pour décontaminer et dit: «Avec des surfaces avec un tel niveau de débit, les expositions aux radiations vont être plus élevées que celles d'astronautes exposés pendant leur séjour dans la Station Internationale (environ 1 millisievert par jour), d'où une décontamination qui va s'imposer pour les habitants qui vivent là, mais en plus avec toutes les retombées et les débris radioactifs, le travail sera très difficile. Si on se penche sur les personnes qui font de courtes visites, je ne pense pas qu'ils soient vraiment exposés s'ils séjournent seulement quelques heures

 

 

Yomiuri Shimbun, 12, Août 2011:

Problèmes liés à l'incinération des déchets ménagers de l'agglomération de Tokyo
Les Gouvernements locaux sont préoccupés par les cendres nucléaires

CHIBA- On apprend que, avec les habitants vivant près des sites de stockage, exprimant leurs inquiétudes et quelque gouvernements locaux refusant de les accepter, la région Tohoku est en train de revenir sur les accords de stockage de cendres ­certaines radioactives- en provenance de la mégapole Tokyo et ce sur leurs terres. À Matsudo, préfecture de Chiba, il a été trouvé, en juillet, plus de 47.000 becquerel/kg en césium dans les cendres venant de deux usines d'incinération d'ordures ménagères. Ces chiffres sont 6 fois plus élevés que la limite provisoire instaurée par le gouvernement pour les accepter dans les stockages. Mais le gouvernement Matsudo n'a pas communiqué cette information à la ville de Kosakamachi, préfecture d'Akita qui a accepté et brûlé, puis stocké les cendres. Et c'est donc 39,5 tonnes de cendres douteuses qui ont été incinérées dans l'installation de Kosakamachi. Le gouvernement de la ville de Kosakamachi a en conséquence envoyé une lettre de protestation au maire de Matsudo. Par cette lettre, Kosakamachi refuse maintenant d'accepter les cendres en provenance de Matsudo, annulant un accord du 1er mars 2011.  La lettre critique durement le gouvernement de la ville de Matsudo: «Les cendres ont été envoyées (à nous) avant que les résultats des mesures de radioactivité soient connus. (Matsudo) a oublié ses responsabilités en tant que producteur des cendres. Nous estimons que cette situation est extrêmement regrettable.» Les habitants de Kasakamachi expriment, aussi, leurs craintes sur cette affaire. «Je crains que la pluie puisse atteindre les cendres et les entraîne à la rivière, polluant notre eau de boissons», a dit Yuko Asari employé depuis 55 ans dans l'installation et vivant à côté. Six conteneurs transportant environ 60 tonnes de cendres et autres ordures ont été arrêtés près de la station ferroviaire JR dans la préfecture d'Akita et renvoyés à Matsudo ce lundi. Des cendres, contaminées par du césium au-dessus des normes ont aussi été détectées dans d'autres villes au nord-ouest de la préfecture de Chiba, où les niveaux de radioactivité sont plus élevés comparés à ceux des zones voisines.  Il a été détecté plus de 9 fois la limite  à Kashiva et plus de 3,5 fois à Nagareyama. À Matsudo, environ 30 tonnes de cendres radioactives ont été stockées temporairement sur un parking et sur d'autres endroits. Mais le gouvernement de la ville a indiqué que le stockage serait plein à la fin de ce mois. De même, 140 tonnes de cendres sont stockées à Nagaremaya. Le gouvernement de la ville a annoncé que le stockage serait rempli mi-septembre.

 

 

The Yomiuri Shimbun 12 août 2011:

Le Gouvernement  revoit son plan pour traiter les cendres radioactives

Le ministre de l'Environnement a préparé un projet pour enterrer les cendres des débris radioactifs incinérés et des boues contaminées au-dessus de 8.000 becquerels par kg en césium. Ce projet réalisé avec soin devrait éviter les fuites des sites de stockage. Le ministre a soumis ce projet au Comité chargé de la sûreté des déchets venant du désastre, son conseil consultatif, ce mercredi. Le ministre a officiellement décidé d'appliquer cette méthode pour enterrer les cendres radioactives à partir de la fin août au plus tard. En juin, le ministre a annoncé qu'il voulait permettre l'enfouissement des cendres contaminées par du césium en dessous de 8.000 becquerels par kg. Maintenant le ministre recommande que les cendres dépassant ce niveau soient stockées temporairement. Si on enterre les cendres dépassant 8.000 becquerels, le projet de mercredi explique qu'il est nécessaire de s'assurer que les cendres contaminées ne vont pas être entraînées par la pluie ou les eaux de surface. Le projet suggère  plusieurs possibilités, tel qu'un site de stockage recouvert par un toit pour protéger les cendres de la pluie, un système de drainage pour ne pas contaminer les eaux profondes, mettre les cendres dans des conteneurs résistants ou couler les cendres dans du béton.  Pour les cendres contaminées à plus que 100.000 becquerels par kg, le projet recommande de construire des stockages du même type que ceux utilisés pour les métaux lourds. Le ministre ne pensait pas que des cendres contaminées à plus de 8.000 becquerels par kg pourraient être détectées en dehors de la Préfecture de Fukushima Cependant, depuis la fin juin, des cendres à plus de 8.000 becquerels par kg en césium ont été découvertes dans les usines d'incinération de Tokyo, Chiba et autres préfectures.


Koide HIROAKI (traduction Gazette du Nucléaire), 5 août 2011:

Un ingénieur Japonais démonte les dessous de l'industrie nucléaire japonaise

Préambule
     Koide Hiroaki a commencé une carrière d'ingénieur nucléaire, il y a 40 ans. Il avait été attiré par les promesses de l'énergie nucléaire. Cependant, rapidement il a perçu les points faibles du programme nucléaire japonais et a été reconnu comme le critique le mieux informé sur ce programme. Sa critique publique et non contestable lui a valu un purgatoire honorable comme «assistant professor» à l'Université de Kyoto soit sa carrière s'est arrêtée.  Il a pu, cependant, continuer une recherche « gagne pain» sur les mesures des radioéléments à l'Institut de Recherche sur les réacteurs de l'Université de Kyoto. Et ce jusque mars de cette année.
     Depuis le séisme suivi d'un tsunami entraînant des fusions de coeurs à Fukushima n°1, il est apparu comme une voix puissante et une figure centrale, pour suite au désastre, relancer le Japon vers d'autres énergies.
     Les médias et les citoyens apprécient ses interventions: conférences, consultations et interviews. Il a publié 3 livres qui ont aidé à reconstruire une conscience publique et un débat officiel.
     En 1968, étudiant au département de techniques nucléaires de l'université TOHAMA (Sendai), il croyait en ce qui lui était enseigné: le nucléaire était une source d'énergie qui pouvait résoudre tous les problèmes énergétiques d'une nation pauvre en ressources locales. Mais apprenant qu'un site nucléaire allait être construit à Enagawa, région peu peuplée et située à environ 50 km de l'endroit où serait consommée l'électricité produite, il critiqua le fait d'imposer un tel fardeau à des communautés vulnérables.
     En effet, sa propre installation de recherche dépendant de l'université de Kyoto n'était pas dans cette ville, mais dans le sud de la préfecture d'Osaka, près de la préfecture rurale de Wakayama, en raison de dangers potentiels. Cette reconnaissance socio-géographique du danger de l'énergie nucléaire et le prix que devraient payer des communautés non concernées est au coeur de sa critique, car tout ce poids vient de décisions imposées par le gouvernement japonais et les puissants monopoles nucléaires. 
     Avant le 11 mars, Koide était une voix prêchant dans le désert dans une nation engagée dans le nucléaire. Par conséquent les milliers de personnes qui viennent l'écouter, donnent un sens à cette célébrité.
     Dans un premier temps Koide est devenu une référence dans les média, incluant journaux et télévision.
     Son nouveau livre «Genpatsu no uso (le mensonge du nucléaire)» est un best seller.
     Son blog
«Unofficial Koide Hiroaki Matome» est l'un des plus importants ­et populaire- sites web sur Fukushima.
     Le 23 mai 2011 le gouvernement a invité 4 personnes: Koide, Ishibashi Katsuhiko (un sismologue qui a alerté en vain sur la vulnérabilité au séisme des réacteurs), Goto Masahi (un ingénieur de Toshiba qui maintenant tient tête à l'industrie) et Son Masayoshi (président du géant des télécommunications Softbank et ardent défenseur des énergies renouvelables).
L'effort gouvernemental sans précédent de vouloir recueillir l'avis de Critiques avérés de l'énergie nucléaire est révélateur de graves problèmes. En effet, quand le gouvernement essaie de promouvoir un effort pour recourir aux énergies renouvelables en freinant le recours au nucléaire, les géants du nucléaire et leurs répondants bureaucrates bataillent fermement contre.
     Koide a un impact certain via son blog, via Twiter tant au Japon que dans les média internationaux.
    
Rappelons que, en même temps une chaîne humaine a entouré le siège du ministère de l'Education, des Sports, de la Science et de la Technologie (Mext), chaîne formée par les parents de Fukushima et leurs soutiens pour protester contre la décision ministérielle d'augmenter les normes d'exposition pour les enfants (20mSv/an au lieu du 1mSv/an précédemment appliqué).
     Il est bon de rapprocher l'action de Koide et celle des parents très en colère devant ce relèvement des normes.

Koide a présenté son avis sur le nucléaire japonais le 23 mai, en voici un résumé.
     Je suis ici pour donner mon avis au gouvernement japonais et aux gestionnaires de la politique nucléaire. Je vais considérer l'énergie nucléaire avec ses espoirs et ses rêves parce que je crois que le nucléaire est l'énergie du futur. Pétrole et charbon vont s'épuiser, mais le nucléaire est inépuisable..., donc c'est l'énergie du futur.
     Cependant j'ai des doutes, car je réalise que le nucléaire n'est pas une source d'énergie importante. L'uranium est rare, (80 ans au plus), le charbon est beaucoup plus abondant (800 ans environ) et il existe le gaz naturel et encore du pétrole.
     Et si on me rétorque que j'ai tort de dire que l'uranium est rare parce qu'on peut utiliser sa partie non fissile en le transformant en plutonium, je vais montrer que la filière à neutrons rapides est loin d'être au point.

Explication sur le cycle du combustible:
     Pour produire de l'électricité, il faut partir du minerai d'uranium. Après enrichissement, façonnage des combustibles et pour finir mise en réacteur, on peut les traiter (extraire uranium et plutonium) et de cette façon déclarer le nucléaire recyclable. En utilisant des réacteurs spécifique appelés «Fast Breeder Reactor» (réacteur «couveuse» et en France ils sont maintenant appelés les Réacteurs à Neutrons Rapides), il est possible d'avoir un cycle du combustible utilisant le plutonium.
     Mais au final, le cycle nous laisse de très ennuyeux déchets de haute activité et il nous faudra trouver le moyen de les stocker pendant un temps certain dans le futur.
     Ceci est leur scénario, voici le mien;
     Le plutonium n'existe pas dans la nature, donc ils planifient l'utilisation du plutonium, produit dans les réacteurs existants (REP ou BWR), dans ces fameux FBR qui sont la clé de ce nouveau cycle.

Et où en est-on? Je vais vous montrer que ce plan envisagé de FBR japonais est défaillant.
     Entre les années 1960 et 2010, il a été mis en place un plan long terme du développement et de l'utilisation de l'énergie atomique. Mais comme des difficultés sont vite apparues, ce plan a été revu en 1990 (année où les FBR auraient dû prendre le relais). Et en 1995, il a encore fallu le revisiter. Et les FBR ont été reprogrammés pour démarrer en 2000.
     Mais cela n'a toujours pas marché: la date a été repoussée en 2010. Toujours pas de FBR. Et maintenant les termes ont changé. L'objectif est non plus de «réaliser» mais «d'analyser méthodiquement les concepts» pour 2020. Mais ceci est toujours irréaliste: on a donc repoussé à 2030 «la simple analyse de faisabilité d'un FBR».
     Qu'y a-t-il dans cette nouvelle révision? Quand il a été décidé de revisiter le plan long terme en l'an 2000, il a été impossible de mettre en place un calendrier. Et finalement 5 ans plus tard le plan long terme a pris le nom de «Principes fondamentaux pour un programme d'énergie nucléaire». Dans cette révision, personne ne pense à construire un FBR avant 2050.
     Si on analyse tous les reports de 10 ans en 10 ans, on arrive à la conclusion qu'il n'y aura jamais de FBR.
     Mais, ni la Commission de l'Energie Atomique du Japon qui établit ces plans long terme, ni le gouvernement qui soutient cette commission, n'ont été tenus pour responsables; du moins à cette date. Le Japon a gaspillé plus un trillon de yen (soit en français 1milliard de milliard de yen) ou encore 12,6 milliards de dollars US pour le prototype FBR, Monju. Si on se réfère à notre système judiciaire où on est condamné à une année d'emprisonnement pour une fraude de 100 million de yen. Quelle serait la sentence pour une fraude de un trillion de yen ? 10 milliers d'années.
     Je ne connais pas le nombre de personnes responsable de Monju dans ce gouvernement: la Commission d'Energie atomique, la commission de sûreté nucléaire, le ministère de l'Economie, du commerce et de l'Industrie, et enfin le ministère du Commerce et de l'industrie à l'international et ainsi de suite...
     Mais supposons que 100 personnes soient responsables, chacune devra subir 100 ans de prison. La fraude est énorme, mais personne n'est responsable. C'est cela la réalité. Il me semble que le monde des affaires nucléaires est extrêmement anormal.

Revenons à Fukushima
     Je suppose que la plupart d'entre vous connaissent le sujet, l'énergie nucléaire est une technologie qui crée d'énormes quantité de radioactivité. Ceci est dû à la quantité d'uranium qui fissionne. Et
rappelez-vous qu'à Hiroshima, seulement 800g d'uranium ont fissionné et ceci a suffi pour brûler, écraser et annihiler cette cité.
     Que contient
un réacteur et que consomme-t-il en 1 an ? Environ 1 tonne d'uranium et de plutonium sont nécessaires. Ceci vous donne donc une idée de la quantité de produits de fission (1.000 fois au moins, du kilogramme à la tonne).
     Un réacteur est une machine. Il faut s'attendre à ce qu'une machine se dérègle et cause un accident. Il ne faut pas oublier les humains qui conçoivent et utilisent la machine. Les humains ne sont pas Dieu. Il est également normal que les humains fassent des erreurs. De toute façon nous souhaitons que l'accident n'arrive pas, ceci n'empêche pas qu'il existe toujours la possibilité d'une catastrophe. Quelles sont donc les parades de nos promoteurs pour limiter la possibilité d'accidents ? Ils assurent simplement qu'une catastrophe se produit très rarement. 
     D'où ils décident d'ignorer cette possibilité en la déclarant
«hypothèse inappropriée».
     Sur le site de la compagnie «Chubu Electric Power», j'ai trouvé leurs parades: les barrières multiples qui empêchent la radioactivité de sortir. La plus importante barrière de toutes pour eux est la 4ème soit la cuve. Ils assurent que cette cuve en acier contiendra toujours la radioactivité, quoi qu'il arrive.
     En accord avec les règles, ils assurent que s'il y a un accident tout est prévu. À cause de leur prétention, si un tel accident arrive, il n'y a aucune parade de prévue et la barrière qui devait contenir la radioactivité sera rompue. Mais ils restent persuadés que cet accident est impossible donc l'hypothèse est inappropriée.
     Mais une catastrophe vient de se produire produite et n'est pas terminée. Comme vous le savez, ces tragiques évènements se déroulent à Fukushima. Et les réponses gouvernementales, à cet accident en cours, sont de mon point de vue, totalement inappropriées. 
     Le gouvernement dissimule l'information et repousse l'évacuation.
     Le principe pour prévenir un désastre est de prendre des mesures préventives sur la base d'une surestimation raisonnable du risque dans le but de protéger la population. S'il arrive que la surestimation conduit à prendre des mesures non nécessaires, ce sera OK tout de même, parce la population ne sera pas touchée .
     Cependant, ce que le gouvernement a fait jusque maintenant produit l'effet inverse, il a sous-estimé les risques et travaillé avec des hypothèses optismistes.
     Premièrement il a dit qu'il s'agissait d'un incident de niveau 4 sur l'échelle INES et l'a prétendu pendant un long moment. Alors ils sont admis le niveau 5, et attendu le dernier moment pour annoncer qu'il s'agissait, en fait, d'un accident de niveau 7. Cette réaction est venue trop tard.
Le gouvernement a aussi retardé l'envoi des directives d'évacuations. D'abord l'évacuation s'est faite dans un rayon de 3 km, en disant qu'il s'agissait d'une précaution au cas où le scénario serait pire. Puis très vite, je crois qu'ils ont évacué dans un rayon de 10 km, toujours en affirmant qu'il «s'agissait d'une mesure juste au cas où...». Et enfin, ils ont étendu l'évacuation à la zone des 20 km de rayon, toujours en disant qu'ils se préparaient au pire. En fait, ils étaient toujours en retard, prenant des mesures réactives, à la place de précautionneuses.
     Je crois que diffuser une information précise est la seule façon d'éviter la panique. Cette voie est la seule possible pour que le peuple reprenne confiance en l'administration et le gouvernement. Cependant le gouvernement japonais va exactement dans le sens inverse. Ils cachent toujours l'information, répétant que la situation n'est pas critique.
     Le gouvernement a dépensé plus de 10 billion de yen (en français mille milliards de yen), depuis 25 ans pour développer  une simulation de contamination par des radioéléments SPEEDI (System for Prediction of Environnemental Emergengy Dose Information), mais ils ont caché les résultats de la simulation au public et n'ont pas permis aux riverain de connaître les risques.
    
Le gouvernement a aussi contraint les travailleurs des sites et les riverains à se sacrifier sans clairement expliquer qui était responsable. Ils ont aussi augmenté les limites de doses pour les travailleurs de Fukushima Daiichi. Ils ont augmenté également les limites de doses pour les riverains de façon à limiter les évacuations. Ont-ils réellement permis de telles choses? J'ai du mal à y croire car il s'agit d'estimer correctement les dommages causés par l'accident de Fukushima.
     Si j'applique la loi japonaise, nous devrions abandonner une surface plus grande que toute la préfecture de Fukushima. C'est la seule issue pour ne pas changer la limite de doses des riverains et il semble qu'on fasse le contraire.
     Je pense que les industries locales vont souffrir terriblement. L'agriculture et la pêche vont connaître des difficultés pour vendre leurs produits et leurs prises.
     Les riverains vont devoir quitter leurs maisons et leurs vies vont être brisées.
     Par ailleurs TEPCO doit aussi dédommager les riverains. Mais il est peu probable qu'ils puissent payer, car ils vont vers la banqueroute. TEPCO ne pourra pas prendre en charge un tel accident. Les dégâts occasionnés sont tellement énormes que même le Japon tout entier risque une banqueroute. Et ceci s'il est déterminé à payer les dommages.

Pour terminer
     Je voudrais citer les «Seven Social Sins ou Sept Sentences Sociales» qui sont inscrites sur la tombe du Mahatma Gandhi.
     Le premier est «Politic without Principle» et pour ceux qui rassemblés ici ce jour, j'aimerai que vous preniez vraiment à coeur ces mots. Les sentences suivantes sont: «Richesse sans travail», «Plaisir sans Conscience», «Connaissance sans compréhension», «Commerce sans moralité» s'appliquent tous aux compagnies d'électricité, incluant TEPCO.
     Et avec «Science sans Humanité», je veux provoquer l'académie et dénoncer son entière implication dans la politique d'énergie nucléaire de la nation, et ce en m'y incluant moi-même.
     Le dernier pêché est «Travail sans Sacrifice». Pour ceux qui me font confiance prenez ces mots à coeur.
Merci.

 

 

AFP, 1er août 2011:

Niveau record de radiations mesuré entre deux réacteurs à Fukushima

TOKYO - Un niveau record de radiations a été mesuré entre les bâtiments des deux réacteurs accidentés de la centrale nucléaire de Fukushima, a indiqué lundi la compagnie Tokyo Electric Power (Tepco), exploitante du site mis à mal par le séisme du 11 mars. Selon Tepco, le niveau de rayonnement atteint au moins 10 sieverts par heure à proximité de débris accumulés entre les réacteurs 1 et 2 de cette centrale endommagée par le violent tremblement de terre et le tsunami géant qui ont dévasté le nord-est du Japon, il y a près de cinq mois. Le précédent niveau le plus élevé de radiations dans l'enceinte de la centrale Fukushima Daiichi avait été relevé le 3 juin. Il était de trois à quatre sieverts par heure, à l'intérieur du réacteur numéro un. "Nous sommes toujours en train de vérifier la cause de tels niveaux élevés de radioactivité", a expliqué une porte-parole de Tepco. Le gouvernement et Tepco prévoient toujours de stabiliser la situation à Fukushima en conduisant les réacteurs vers un état dit d'"arrêt à froid" d'ici au mois de janvier. Diverses actions se poursuivent depuis l'accident pour faire progressivement baisser la température du combustible, notamment grâce à la mise en place d'un système de circulation d'eau de refroidissement.

Le site de Fukushima a été victime après le 11 mars d'une série d'avaries, dont des explosions d'hydrogène qui ont détruit une partie des bâtiments et engendré d'importants rejets radioactifs dans l'environnement. Le gouvernement a cependant affirmé récemment que les niveaux de radiations aux alentours de la centrale avaient chuté à un niveau identique à deux millionièmes du pic enregistré le 15 Mars. Environ 80.000 personnes, résidant précédemment à moins de 20 kilomètres de la centrale ou dans des localités ayant été particulièrement contaminées, ont été forcées de quitter leur domicile en raison de risques pour la santé.


Le Monde 14/7/11:

Fukushima a accentué la crise de confiance

Le Japon apparaît résigné à une lutte de longue haleine - plusieurs semaines - pour essayer d'enrayer ce qui risque de devenir la plus grave catastrophe nucléaire en un demi-siècle. Des voix se font néanmoins entendre pour appeler à se tourner vers l'avenir. "Paradoxalement, écrit Naoaki Okabe, éditorialiste du Nihon Keizai (quotidien des milieux d'affaires), cette catastrophe pourrait être le point final aux décennies perdues", celles du Japon en récession enlisé dans une langueur dont il avait du mal à se dégager depuis l'éclatement de la bulle spéculative au début des années 1990, puis du choc financier. "Le Japon ne peut assister ainsi à son propre déclin, ajoute M. Okabe. La catastrophe doit être le seuil d'un nouveau départ." Mais il ne s'agit pas seulement de reconstruire les régions dévastées. Il faut aussi repenser les grandes orientations de l'expansion.

La tâche de reconstruction est énorme (de 16.000 à 25.000 milliards de yens, soit entre 140 et 217 milliards d'Euros). Il ne fait guère de doute qu'en dépit du choc ressenti, du coût humain le plus dramatique depuis la guerre, la troisième puissance économique du monde dispose des moyens financiers et technologiques pour se redresser. Elle a surtout la force d'une population qui sait faire preuve de retenue et d'austérité quand il le faut: une retenue dans la consommation individuelle d'électricité, par exemple, ou une consommation ralentie qui se veulent une expression de solidarité envers les sinistrés. Cette puissance économique conjuguée à la force morale de la société permettra au pays de sortir de l'ornière plus vite qu'on ne le pense. Mais sur quelle base, cette renaissance va-t-elle s'opérer ?

La responsabilité de l'Etat et celle des opérateurs nucléaires, les carences d'un monde politique incapable d'exiger un peu de transparence dans la gestion d'une énergie aussi dangereuse devront être posées. Plus profondément, le Japon est appelé à repenser ce qui est à la base d'une économie moderne: sa politique énergétique, mais en ne laissant pas aux seuls experts le soin de la décider.

Ce qui suppose ne pas traiter avec une arrogance hautaine les opposants, parfois des poignées de paysans et de pêcheurs se battant avec leurs moyens et leurs arguments - qui ne font guère le poids face à la morgue des certitudes technocratiques - contre la construction de centrales nucléaires dans leur région. "L'usage du nucléaire doit être l'objet d'une réflexion qui dépasse les experts", fait valoir l'économiste Matsuto Uchihashi.

A partir des années 1960, le Japon de l'expansion s'est lancé tête baissée dans une croissance exponentielle en prenant des risques énormes pour sa population, dont l'une des conséquences fut les maladies de la pollution comme celle de Minamata (intoxication par le mercure déversé en mer): des milliers de morts et des "enfants-larves". Après des décennies de lutte, les mouvements de citoyens ont réussi à faire condamner les pollueurs bien que des malades n'aient pas encore été indemnisés. Le contexte historique et économique comme le risque sont différents. Assurément.

Mais l'état d'esprit des pollueurs d'hier et des opérateurs nucléaires d'aujourd'hui est-il si éloigné par leur non-respect du principe de précaution et de primauté de la santé des populations ? Délibéré et cynique dans le cas des pollueurs. Insuffisamment pris en compte dans celui des opérateurs nucléaires. Peut-être. Mais, dans les deux cas, la rentabilité à court terme est passée avant les principes de sécurité à long terme. Tepco, opérateur de la centrale de Fukushima, n'est pas seul en cause : tous ses homologues à travers l'Archipel agissent de la même manière.


On aurait tort, pour autant, de faire de la catastrophe de Fukushima un problème spécifique au Japon: les carences politiques, la collusion entre l'administration et les intérêts privés, ont accentué le trait. Quelle que soit l'option - nucléaire ou non -, la question est valable partout: doit-on laisser la gestion du nucléaire à des entreprises privées dont la logique est par définition la rentabilité ? Si c'est le cas, de quels moyens l'Etat, supposé défendre les intérêts de la communauté, se dote-t-il pour les contraindre à respecter ladite "responsabilité sociale de l'entreprise".

À cet impératif renforcement du contrôle par l'Etat s'ajoutent des choix: "Les Japonais sont placés devant un dilemme: continuer à suivre aveuglément l'élite au pouvoir, avec les risques qui sont devenus une réalité, ou bien opter pour un développement durable. Ils ne peuvent avoir les deux en même temps", fait valoir Andrew DeWitt, professeur d'économie politique à l'université Rikkyo à Tokyo ("The Earthquake in Japanese Energy Policy", The Asia-Pacific Journal, 28 mars).

Cette catastrophe, qui est loin d'être terminée, a fait entrer le Japon dans une nouvelle ère. Et c'est de la prise de conscience par ses citoyens qu'il s'agit bien d'un tournant dans l'histoire nationale, et qu'il est temps pour eux de se faire entendre et de ne pas s'en remettre à leur élite actuelle, que dépendra leur avenir.

Philippe Pons
(Correspondant à Tokyo)

 

 

Sébastien Lapeyre, 11 juillet 2011:

Japon: petits arrangements entre nucléaire et incinération

Le séisme et le tsunami qui ont frappé le Japon ont entraîné la production d'environ 25 millions de tonnes de déchets post-catastrophe. L'accident nucléaire de Fukushima ajoute un problème de taille: une partie des déchets produits est désormais radioactive, ce qui change totalement la donne quant à leur élimination. Malheureusement, la réponse apportée par le gouvernement japonais ne semble pas la meilleure: une partie de ces déchets vont en effet être brûlés dans des incinérateurs qui vont ainsi relarguer directement dans l'air des poussières radioactives [1] en plus des résidus de combustion. Ces déchets solides seront stockés dans des centres spécifiques... sauf ceux dont la radioactivité sera inférieure 8.000 Bq/kg qui seront stockés dans des décharges classiques. Avec quels effets à long terme? Nul ne peut le dire. La boucle n'étant pas tout à fait bouclée, les autorités s'apprêtent en outre à faire fonctionner les incinérateurs à plein régime pour pallier le manque d'alimentation du réseau en électricité d'origine nucléaire.

Voilà comment une catastrophe nucléaire se transforme en opportunité pour les incinérateurs en mal de déchets. Ces derniers jours, l'un des incinérateurs de déchets municipaux de Tokyo (Edogawa-ku ­ 200.000 t/an) a d'ores et déjà produit des cendres dépassant les seuils de 8.000 Bq/kg alors même que les déchets brûlés n'étaient pas censés venir d'une zone contaminée.

[1] information rapportée dans l'édition du 20 juin 2011 du Mainichi daily news

 

 



Accident Majeur toujours en cours au Japon: Fukushima proche du "syndrome chinois" !

Japon: La Corruption médiatique qui protège TEPCO et la censure gouvernementale des médias

Fukushima: Peut-être 417 000 cancers supplémentaires d'ici 50 ans dans la seule zone contaminée des 200 km.

12 avril: L'accident de Fukushima classé 7 (au même niveau que Tchernobyl) sur l'échelle médiatique Ines graduée de 0 à 7
Rappel: "Cette échelle, utilisée au plan international depuis 1991, s'appuie à la fois sur des critères objectifs et des critères subjectifs. Appliquée par une soixantaine de pays, elle est destinée à faciliter la perception par les médias et le public de l'importance des incidents et des accidents nucléaires. Elle ne constitue pas un outil d'évaluation et ne peut, en aucun cas, servir de base à des comparaisons internationales : en particulier, il n'y a pas de relation univoque entre le nombre d'incidents sans gravité déclarés et la probabilité que survienne un accident grave sur une installation." Extrait de L'échelle INES de classement des incidents et accidents nucléaires ASN 2007.

Pour la CRIIRAD, ce classement arrive trop tard: Hypothèses et calculs auraient dû servir à protéger les habitants !
"L'urgence, c'est d'évaluer les niveaux de risque et de dimensionner en conséquence les mesures de protection. OU, PLUS EXACTEMENT, C'ETAIT L'URGENCE D'IL Y A 4 OU 5 SEMAINES ! Il aurait fallu anticiper, évaluer les doses que les habitants étaient susceptibles de recevoir et décider en conséquence des contre-mesures à prendre pour limiter, autant qu'il est possible dans de telles conditions, l'irradiation et la contamination des habitants des zones les plus affectées". [Extrait de Japon: les experts calculent, les populations subissent]

- Des débits de dose de plusieurs microSieverts par heure (µSv/h), voire de plusieurs dizaines de µSv/h, ont été, sont encore, couramment mesurés que ce soit dans la zone de mise à l'abri (20-30 km) ou à l'extérieur, avec des valeurs dépassant même les 100 µSv/h.

- Une augmentation brutale de la radioactivité de l'air a été enregistrée à TOKYO, à 230 km au sud de la centrale de FUKUSHIMA DAIICHI, le 15 mars au matin (jusqu'à 240 Bq/m3 à 11h pour l'iode particulaire et on ignore encore la quantité d'iode gazeux !). Les conditions météorologiques ont heureusement limité à 3 heures la phase de forte contamination. Avec quelques heures supplémentaires, il aurait fallu administrer de l'iode stable aux groupes critiques et les autorités n'en auraient jamais eu le temps. Si Tokyo a été relativement épargné, ce n'est pas le cas des villes et villages situés plus au nord.

- Le niveau de contamination des légumes à feuille a atteint des centaines de milliers, voire des millions de becquerels d'iode 131 par kilogramme (Bq/kg) : 690 000 Bq/kg à IWAKI, ville de 345 000 habitants à 45 km au sud de la centrale ; 2 540 000 Bq/kg à IITATE, gros village de 7 000 habitants, à 40 km au nord-ouest. A ce niveau de contamination, ce ne sont plus des aliments, ce sont des déchets radioactifs : il suffit qu'un jeune enfant avale 2 ou 3 grammes de ce légume pour recevoir la limite maximale admissible sur 1 an.

A lire: Les mendiants, esclaves du nucléaire au Japon (El Mundo, 2003)

Dossier spéciale Japon de la CRIIRAD:
Les comprimés d'iode stable seraient nécessaires au Japon, car des niveaux de contamination très élevés - et non pas des traces de radioactivité - ont été mesurés dans des épinards : de 6 100 Bq/kg à 15 020 Bq/kg pour l'iode 131, avec une moyenne de 10 450 Bq/kg. Les lieux de prélèvements ne sont pas situés dans des villes proches de la centrale de FUKUSHIMA DAIICHI : il s'agit de 7 villes de la Préfecture d'IBARAKI situées à 100 km environ au sud de la centrale. Les aliments ont probablement commencé à être contaminés dès samedi 12 mars, dans les zones voisines de la centrale de Fukushima Daiichi.

L'augmentation des niveaux de rayonnements se poursuit à 100, 200 km, voire 300 km de la centrale nucléaire de Fukushima.  La CRIIRAD mentionne une multiplication par 1 000 du débit de dose le 13 mars à 120 km au nord-nord-ouest ; valeurs encore 100 fois supérieures à la normale hier 15 mars. La CRIIRAD mentionne la multiplication par 100 du débit de dose à 75 km au sud (villes de la préfecture d'Ibaraki) et la multiplication par 16 du débit de dose à Tokyo, à 270 km au sud. Ces augmentations s'expliquent par la présence de produits radioactifs (gaz, halogènes, aérosols) que les personnes présentes incorporent en respirant. Aucune information n'a été publiée sur l'activité volumique (en Bq/m3) des radionucléides (césium 137, iode 131). L'absence de toute donnée chiffrée sur le niveau de contamination de l'air, paramètre clef de la gestion de crise, empêche d'évaluer le niveau de risque réellement encouru par la population.
La CRIRAD rappelle que les limites de dose (doses dites efficaces ou au corps entier) sont de 1 mSv/an (1 milliSiervert par an) pour les personnes du public et de 20 mSv/an pour les travailleurs les plus exposés. Ces doses ne correspondent pas à des niveaux de non risque mais de risques maximum admissibles. Par exemple pour 100 000 personnes exposées à 1 mSv, on s'attend à 5  décès par cancers radio-induits.
Le 15 mars, après l'explosion du bâtiment qui abrite le réacteur n°2 les autorités japonaises ont publié des niveaux d'exposition externe excessivement élevés : Réacteur n°3 : 400 mSv/h (milliSieverts par heure); Réacteur n°4 : 100 mSv/h ; Réacteur n°2 et 3 : 30 mSv/h  " Avec des valeurs aussi élevées, explique l'association, (1 million de fois et plus le bruit de fond naturel) on n'est plus dans le domaine des faibles ou très faibles doses de rayonnements, avec des pathologies ne se manifestant qu'après un temps de latence (plusieurs années à plusieurs décennies pour les cancers par exemple) mais dans le domaine des fortes doses d'irradiation. Les fortes doses de rayonnements provoquent une destruction massive des cellules, destruction qui peut altérer le fonctionnement de certains organes, voire engager le pronostic vital." (Enviscope)

23 mars: 140 000 personnes abandonnées en zone contaminée au Japon (voir: l'analyse des débits de dose dans la zone de confinement, et au-delà de 30 km)

21 mars: Le nuage arrive en France mardi ou mercredi, le risque associé à l'inhalation des aérosols radioactifs présents dans l'air devrait être très faible, les calculs de dose indiquent que la prise de comprimés d'iode stable, n'est pas justifiée.

18 mars: De l'iode et du césium radioactifs ont été détectés à 1600 km de la centrale en Russie (Kamchatka) et à 7500 km aux Etats-Unis (Californie).

Les piscines de refroidissement des réacteurs 2, 3 et 4 sont en ébullition.
La quantité de combustible extrèmement radioactif dans les piscines des réacteurs de Fukushima Daiichi est quatre fois supérieure à la quantité de combustible dans les cuves des réacteurs de la centrale, a révélé Tepco.

17 mars: "La plus haute des priorités maintenant est de verser de l'eau en quantité adéquate sur les réacteurs n°3 et 4, tout particulièrement sur les piscines de combustible usé" a déclaré un porte parole de l'agence de sûreté nucléaire japonaise...

16 mars: Une nouvelle explosion dans le réacteur 4 a eu lieu ce mercredi, après celle de mardi, et le niveau de radioactivité a obligé à renoncer à une nouvelle tentative de refroidissement du combustible (l'armée aurait dû déverser de l'eau par hélicoptère ce mercredi, mais l'opération a été annulée. Une fumée blanche s'échappait ce mercredi du réacteur 3, et les canons à eau de la police pourraient être utilisés dans les prochaines heures pour refroidir le combustible. La température augmente dans les réacteurs 5 et 6. La population a été évacuée dans un rayon de 20 km autour de la centrale, et les habitants de la zone comprise dans un rayon de 20 à 30 km sont invités à rester calfeutrés chez eux. 70 % du coeur du réacteur n°1 aurait fondu et 33 % du coeur du réacteur n°2 selon l'exploitant de la centrale

15 mars: Le gouvernement japonais a confirmé que de la radioactivité fuyait des réacteurs accidentés. La radioactivité à Tokyo est 20 fois supérieure à la normale selon les officiels de la ville, située à 270 km de la centrale nucléaire. A la centrale accidentée, la dose de radioactivité atteint 400 mSv/h selon l'AIEA, soit une dose mortelle pour l'homme en 12 heures d'exposition.

3ème explosion dans le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Fukushima n°1, mardi matin. L'Agence de sûreté nucléaire japonaise a rapporté deux brèches de huit mètres de large dans l'enceinte extérieure du réacteur n°4 de la centrale suite à une explosion survenue aujourd'hui
Un incendie se serait également déclaré sur la piscine (qui contient les barres de combustible usagé) du réacteur 4 et il serait maîtrisé selon l'AIEA (si les barres de combustible commencent à brûler des quantités énormes de radioactivité pourraient être relâchées).

Le secrétaire général du gouvernement japonais Yukio Edano a annoncé mardi "Une  explosion d'hydrogène s'est produite dans le réacteur N°4 de la centrale. Samedi et lundi derniers, des explosions aux causes similaires ont eu lieu dans les réacteurs N°2 et N°3. Le niveau de radiation entre le réacteur N°2 et le réacteur N°3 était égal à 30 microsieverts. Près du réacteur N°3, elle atteint 400 microsieverts, et 100 microsieverts pour le réacteur N°4".

14 mars: L'ASN redoute un accident de niveau 5 voire 6 à Fukushima (sur l'échelle médiatique de communication INESS)

L'affaire semble mal engagée pour les réacteurs japonais endommagés à Fukushima (plusieurs autres réacteurs connaîtraient également des problèmes de refroidissement), et empêcher leur fonte (au moins partielle), le déroulement des accidents est plus lent qu'à Tchernobyl et plus rapide qu'à Three Mile Island, compliqué par les destructions du tremblement de terre et les innondations (rappelons qu'en France si les tremblements de terre sont bien moins fréquents qu'au Japon et moins forts, les centrales sont aussi bien moins protégées...).